La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/03/2016 | FRANCE | N°14/02989

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 24 mars 2016, 14/02989


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 24 MARS 2016



N°2016/

SB/FP-D













Rôle N° 14/02989







[B] [O]





C/



AGENCE NATIONALE POUR LA GARANTIE DES DROITS DES MINEURS (ANGDM)























Grosse délivrée le :

à :

Me Philippe RAFFAELLI, avocat au barreau D'AIX-EN-

PROVENCE



Me Cathy NOLL, avoc

at au barreau de MULHOUSE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section I - en date du 04 Février 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 12/833.





APPEL...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 24 MARS 2016

N°2016/

SB/FP-D

Rôle N° 14/02989

[B] [O]

C/

AGENCE NATIONALE POUR LA GARANTIE DES DROITS DES MINEURS (ANGDM)

Grosse délivrée le :

à :

Me Philippe RAFFAELLI, avocat au barreau D'AIX-EN-

PROVENCE

Me Cathy NOLL, avocat au barreau de MULHOUSE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section I - en date du 04 Février 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 12/833.

APPELANT

Monsieur [B] [O], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Philippe RAFFAELLI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

AGENCE NATIONALE POUR LA GARANTIE DES DROITS DES MINEURS (ANGDM), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Cathy NOLL, avocat au barreau de MULHOUSE ([Adresse 1])

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786, 910 et 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 25 janvier 2016, en audience publique, les avocats ayant été invités à l'appel des causes à demander à ce que l'affaire soit renvoyée à une audience collégiale s'ils n'acceptaient pas de plaider devant les magistrats rapporteurs et ayant renoncé à cette collégialité, l'affaire a été débattue devant Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller, et Madame Sylvie BLUME, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président

Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller

Madame Sylvie BLUME, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 mars 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 mars 2016

Signé par Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M.[O] a été employé en qualité de mineur de fond par les Houillères du Bassin du Centre Midi (HBCM) dans les mines de [Localité 1] à compter de mars 2001 et a bénéficié de ses droits à la retraite le 1er février 2008.

Revendiquant la possibilité de racheter, par capitalisation, les avantages perçus en qualité de mineur en application de l' accord du Congé Charbonnier de Fin de Carrière ( CCFC) au titre d'indemnités logement et indemnités chauffage calculées sur la base du tarif Employés, Techniciens et Agents de maîtrise (ci-après désigné ETAM) et non ouvrier, M.[O], dont la demande a été refusée par décision de la commission de recours et de conciliation de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ci-après dénommée ANGDM) en date du 3 avril 2008 a saisi le tribunal administratif qui, considérant que le litige relevait de la compétence judiciaire, s'est déclaré incompétent par jugement du 13 juillet 2011.

Le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence, saisi par M.[O] le 7 août 2012, l'a débouté de ses demandes par jugement du 4 février 2014.

Le 14 février 2014 M.[O] a interjeté appel de ce jugement dont il sollicite l'infirmation et demande à la cour de condamner l'ANGDM à lui payer la somme de 22 473 € au titre du rachat des indemnités chauffage et logement au taux ETAM outre 3 000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et exécution déloyale du contrat de travail et 3 000 € au titre des frais irrépétibles en sus des entiers dépens.

Il fait valoir qu'il a bénéficié du Congé de Fin de Carrière (CCFC) à compter du 17 janvier 2003 et que par une décision des Houillères du Bassin du Centre et du Midi (HCBM) du 2 décembre 2002 lui a accordé le droit de percevoir des indemnités de chauffage et de logement au taux ETAM, supérieur au taux ouvrier auquel il pouvait prétendre en application du Pacte Charbonnier du 22 octobre 1994, et ce sans condition particulière et sans limite de temps.

Considérant qu'il s'agit d'un droit acquis qui s'imposait au repreneur en application de l'article 1224-1 du code du travail, que l'employeur ne pouvait le remettre en cause sans information ni préavis, que d'autres mineurs-ouvriers, dans la même situation que lui, ont obtenu le rachat des avantages susvisés au taux ETAM , il estime être en droit de prétendre à un rachat des dites indemnités au taux ETAM.

l'ANGDM conclut à la confirmation du jugement déféré et au rejet des demandes de M.[O].

Elle expose que les indemnités le logement et de chauffage correspondent à des avantages en nature dus en application des articles 22 et 23 du décret du 14 juin 1946 dit 'statut des mineurs' et valant convention collective dans les entreprises minières ; que ces indemnités , dont le taux diffère selon le statut de l'agent, ouvrier ou ETAM, peut être capitalisé lors de la retraite. Elle explique que l'avantage dont se prévaut M.[O] lui a été consenti le 2 décembre 2002 dans un contexte de fin de grève pour une durée limitée à la durée du Congé de Fin de Carrière (CCFC), que les salariés ouvriers qui ont obtenu le versement de ces indemnités au taux ETAM ne sont pas concernés par la décision du 2 décembre 2002 et ne sont pas dans la même situation que M.[O] dans la mesure où ils ont produit une attestation datée de 2007 signée de M.[Z], délégué régional RH Centre Midi dans laquelle celui-ci attestait que les salariés devaient percevoir des avantages en nature d'un montant supérieur lors du passage à la retraite; de sorte que le principe d'égalité n'a pas été méconnu.

La cour renvoie pour plus ample exposé aux écritures reprises et soutenues oralement par les conseils des parties à l'audience d'appel tenue le 25 janvier 2016.

MOTIFS DE LA DECISION

En application du protocole d'accord du 7 avril 1995 relatif aux mesures d'âge visées par le Pacte Charbonnier du 20 octobre 1994 visant à organiser les aspects sociaux de la fin d'exploitation charbonnière, M.[O] a bénéficié du Congé Charbonnier de Fin de Carrière ( CCFC) à compter du 17 janvier 2003, période au cours de laquelle il a perçu 80% de sa rémunération nette outre les avantages en nature, jusqu'à son départ à la retraite le 1er février 2008.

Alors que les dispositions de l'article 5 de ce protocole prévoyaient que 'les avantages en nature servis en sus de la rémunération garantie sont ceux de l'agent en activité', M.[O] qui avait le statut d'ouvrier tout au long de sa carrière a reçu des indemnités logement et chauffage au taux ETAM et non ouvrier, en exécution d'une décision du responsable de l'unité d'exploitation Provence des Houillères du Bassin du Centre et du Midi, sous la forme d'une note datée du 6 décembre 2002 adressée par M.[L] à M.[I] en ces termes: 'veuillez prendre en compte les avantages en nature supérieurs lors du départ en CCFC des préparateurs confirmés suivants: M.[O].(...).'

L'examen des bulletins de salaire versés aux débats atteste de l'augmentation des indemnités chauffage et logement perçues par le salarié à compter du 1er janvier 2003 jusqu'au 1er février 2008, ce qui démontre que la décision du 6 décembre 2002 a reçu une application effective le mois suivant son prononcé , la fixation du montant des indemnités sur la base du taux ETAM à compter de cette date n'étant du reste aucunement remise en cause par l'ANGDM.

Cet avantage attribué au salarié pendant plus de cinq ans est plus favorable que celui résultant de la simple application de l'article 5 du protocole précité du 5 avril 1995. Il a été accordé au salarié par une décision unilatérale de l'employeur, sans condition particulière ni limitation de durée à la période du congé charbonnier de fin de carrière (CCFC),contrairement à l'argument avancé par l'ANGDM.

La remise en cause de cet avantage n'ayant donné lieu à aucune information ni préavis de l'employeur, le salarié est fondé à solliciter sa prise en compte dans la capitalisation de ses droits à indemnités à compter de la prise de la retraite.

Surabondamment, le salarié qui se prévaut du principe d'égalité de rémunération entre tous les salariés dès lors qu'ils sont placés dans une situation identique, démontre que deux autres salariés, anciens mineurs du Bassin du Centre du Midi-Provence, Messieurs [R] et [C], qui à compter du 1er janvier 2001 ont bénéficié comme lui d'indemnités logement et chauffage au taux ETAM alors qu'ils avaient le statut d'ouvrier, ont pu obtenir de l'ANGDM (pièce 13) par décisions de la commission de recours et de conciliation du 20 février 2008 le rachat de leurs indemnités chauffage et logement au taux ETAM lors de leur retraite.

L'ANGDM oppose à l'argumentation du salarié la spécificité de la situation des Messieurs [C] et [R] qui auraient fourni une attestation établie en 2007 par M.[Z], délégué régional RH Centre Midi, selon laquelle les intéressés devaient percevoir des avantages en nature supérieurs lors de leur passage à la retraite, à la fin de leur CCFC.

Outre le fait que l'attestation à laquelle l'ANGDM fait référence n'est pas produite aux débats, la cour s'interroge sur la valeur d'une telle attestation établie en 2007 par le délégué régional des ressources humaines d'une entreprise dissoute par arrêté du 24 février 2004.

En l'état des éléments versés aux débats, les conditions d'obtention de l'avantage susvisé sont les mêmes pour Messieurs [O], [C] et [R] en ce qu'elles résultent d'une décision unilatérale de l'employeur qui n'est assortie d'aucune condition ni limite de temps.

L'ANGDM ne justifie d'aucune raison objective, pertinente et matériellement vérifiable de nature à justifier la différence de rémunération entre ces salariés qui travaillaient pour le même employeur et se trouvaient dans la même situation.

Il s'en déduit que M.[O] est fondé à se prévaloir du maintien de l'avantage en nature en vertu du principe d'égalité de rémunération entre salariés placés dans une situation identique, principe qui trouve application pour les avantages en nature.

En l'état de ces diverses constatations, il sera fait droit à la demande du salarié en paiement de la somme globale brute de 22 473 € ( 17 224 € au titre de l'indemnité logement, 5 249 € au titre de l'indemnité chauffage), correspondant à la différence entre la somme de 37 649 € brute d'ores et déjà versée par l'ANGDM au titre de la capitalisation des indemnités chauffage et logement sur la base du taux ouvrier et la somme de 60 122 € brute due sur la base du taux ETAM.

Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a rejeté la demande du salarié.

Le salarié ne démontre pas que l'attitude de l'ANGDM dans la procédure procède d'un abus de droit.

De plus l'ANGDM est un établissement public de l'Etat à caractère administratif créé par la loi n°2004-105 du 3 février 2004, qui a pour mission de garantir, au nom de l'Etat, en cas de cessation définitive d'activité d'une entreprise minière, l'application des droits sociaux des anciens agents de celle-ci et de leurs ayants droit tels qu'ils résultent des lois, règlements, convention et accords en vigueur au jour où l'entreprise a définitivement cessé ses activités et de l'évolution ultérieure de ces droits. L'ANGDM n'a jamais employé M.[O] et ne peut être considérée comme venant aux droits des Houillères du Bassin du Centre et du Midi sur le fondement de l'article 1224-1 du code du travail.

La demande en dommages et intérêts formée par le salarié au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail est dès lors infondée et sera rejetée.

L'ANGDM succombe en appel et sera condamnée au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel, avec réformation du jugement déféré sur ce point.

L'équité justifie la condamnation de l'ANGDM à payer à M.[O] la somme de 1 800 € au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile ;

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Condamne l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) à payer à M.[B] [O] les sommes suivantes :

. 22 473 € à titre de complément de capitalisation des indemnités logement et chauffage sur la base du taux ETAM ;

. 1 800 € au titre des frais irrépétibles ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire ;

Condamne l'Agence Nationale pour la Garantie des Droits des Mineurs (ANGDM) au paiement des entiers dépens.

LE GREFFIERLE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT

G. BOURGEOIS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 14/02989
Date de la décision : 24/03/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°14/02989 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-24;14.02989 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award