COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
17e Chambre B
ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION
ARRÊT AU FOND
DU 03 MARS 2016
N°2016/ 190
GP
Rôle N° 15/08252
[D] [H]
C/
[I] [U]
Grosse délivrée le :
à :
Me Pierre LOPEZ, avocat au barreau de TOULON
Me Stéphane MAMOU, avocat au barreau de TOULON
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Arrêt en date du 3 mars 2016 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 15 avril 2015, qui a cassé l'arrêt rendu le 22 octobre 2013 par la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE (18ème chambre)
APPELANT
Monsieur [D] [H], demeurant [Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Me Pierre LOPEZ, avocat au barreau de TOULON
INTIME
Monsieur [I] [U], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Stéphane MAMOU, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786, 910, 945-1 et R312-9 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 5 janvier à 14h00, sans que le premier président ait d'office ou à la demande des parties renvoyé l'affaire à une audience solennelle, en audience publique, les avocats ayant été invités à l'appel des causes à demander à ce que l'affaire soit renvoyée à une audience collégiale s'ils n'acceptaient pas de plaider devant les magistrats rapporteurs et ayant renoncé à cette collégialité, l'affaire a été débattue devant Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller, et Madame Sophie PISTRE, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte à la Cour composée de :
Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller
Madame Sophie PISTRE, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 3 mars 2016
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 3 mars 2016
Signé par Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre et Madame Caroline LOGIEST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Monsieur [I] [U] a été embauché en qualité de dessinateur CAO/DAO, niveau employé technicien de bureau, le 1er juillet 1995 par la société SIMEG spécialisée dans l'étude de la construction de biens immobiliers.
Son contrat de travail a été transféré à compter du 1er novembre 2007 à Monsieur [D] [H], architecte, avec reprise de son ancienneté.
Il a été licencié pour motif économique le 15 février 2010 en ces termes, exactement reproduits :
« nous avons le regret de vous informer que nous sommes contraints de vous licencier pour le motif économique suivant :
-la suppression de votre emploi de dessinateur projeteur, sans possibilité de vous reclasser dans un autre emploi, car notre entreprise est une toute petite entreprise dans laquelle vous le savez, vous êtes le seul salarié, qui se trouve confrontée à une baisse régulière de son activité notamment du fait de la crise que connaît l'immobilier dans notre département depuis 2008.
Comme nous vous l'indiquions dans notre précédente lettre, la société SIMEG qui vous employait précédemment n'est plus opérationnelle et ne dispose plus d'aucun salarié actuellement. Les autres sociétés (OTIM, CASTET-DAVELUY IMMOBILIER) dont je suis dirigeant ne sont pas en mesure de vous proposer un emploi correspondant à votre profil' ».
Contestant le bien-fondé de la mesure ainsi prise à son encontre et réclamant le paiement de rappel de salaire, de prime d'ancienneté et de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, Monsieur [I] [U] a saisi la juridiction prud'homale.
Par jugement de départage du 30 avril 2012, le Conseil de prud'hommes de Toulon a dit que le licenciement du salarié était dénué de cause réelle et sérieuse, a condamné Monsieur [D] [H] à payer à Monsieur [I] [U] 25 000 € de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 3844,44 € de rappel d'heures supplémentaires et 384,44 € de congés payés sur rappel d'heures supplémentaires et a condamné Monsieur [D] [H] à payer à Monsieur [I] [U] 1000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.
Monsieur [D] [H] a interjeté appel du jugement de départage par pli recommandé du 23 mai 2012.
La 18ème Chambre de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a, par arrêt du 22 octobre 2013, confirmé le jugement déféré, a débouté Monsieur [D] [H] de sa demande reconventionnelle en dommages intérêts pour procédure abusive et l'a condamné à payer 1000 € à Monsieur [I] [U] en cause d'appel, par application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens d'appel.
Sur pourvoi interjeté par Monsieur [D] [H], la Cour de cassation a, par arrêt du 15 avril 2015, cassé et annulé, sauf en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de l'employeur au titre d'une procédure abusive, l'arrêt rendu le 22 octobre 2013 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence et a renvoyé les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.
Monsieur [D] [H] conclut à la confirmation du jugement du Conseil de prud'hommes de Toulon du 30 avril 2012 en ce qu'il a retenu que la lettre de licenciement était suffisamment motivée et en ce qu'il a retenu le licenciement fondé sur un motif économique et sérieux, à la réformation pour le surplus et au vu de l'arrêt de la Cour de cassation du 15 avril 2015, statuant à nouveau, à ce qu'il soit jugé que l'employeur a satisfait à son obligation de reclassement, à ce qu'il soit jugé que le licenciement économique est fondé sur une cause réelle et sérieuse, au débouté du salarié de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, au débouté du salarié de sa demande de rappel de salaires comme abusive et non justifiée, au débouté du salarié de sa demande de rappel de prime d'ancienneté comme juridiquement et conventionnellement non fondée, reconventionnellement, à la condamnation de Monsieur [I] [U] au paiement de la somme de 2000 € à titre de dommages intérêts pour procédure abusive, injustifiée et de mauvaise foi et à la condamnation de Monsieur [I] [U] au paiement de la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Monsieur [D] [H] fait valoir que, âgé de 75 ans et confronté à une activité déficitaire, il n'avait d'autre choix que d'envisager le licenciement économique de son seul salarié, que la lettre de licenciement est suffisamment motivée, qu'il suffit de se référer au bilan de l'entreprise pour constater que s'il a pu dégager un résultat comptable de 58 268 € au 31 décembre 2007, ce résultat s'est effondré à 2836 € au 31 décembre 2008, qu'enfin en 2009 les difficultés économiques se sont encore aggravées, le cabinet enregistrant une perte de 56 085 €, que depuis lors le concluant a fermé son cabinet d'architecture, que la cause économique du licenciement est ainsi parfaitement justifiée, que le concluant a envisagé les possibilités de reclassement du salarié dans son cabinet d'architecture et dans le groupe de sociétés dans lequel il conservait des intérêts, à savoir dans les sociétés SIMEG, OTIM et DAVELUY, que le concluant a produit l'ensemble des bilans et des registres des personnels des trois sociétés, que par l'extrême petite taille de l'entreprise, l'employeur disposait de marges de man'uvre quasiment nulles dans la recherche d'un reclassement, qu'il n'existait au sein du groupe aucune possibilité de reclassement, que le licenciement du salarié est parfaitement fondé, que l'horaire de Monsieur [I] [U] était de 35 heures hebdomadaires, que l'amplitude d'ouverture du cabinet ne peut être confondue avec l'horaire pratiqué par le salarié, lequel n'arrivait jamais avant 8h15-8h30 voire au-delà, que Monsieur [I] [U] doit être débouté de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, qu'à la date du transfert de son contrat de travail le 31 octobre 2007, Monsieur [I] [U] était fondé à bénéficier des avantages de la Convention collective de l'architecture, que si initialement, la Convention collective de l'architecture prévoyait en effet le bénéfice d'une prime de 8 % après 10 ans d'ancienneté, cette convention collective de 1962 a été dénoncée et une nouvelle convention de l'architecture est entrée en vigueur à compter de janvier 2004, qu'elle ne prévoyait plus de prime d'ancienneté, précisant seulement que dans un délai de 4 mois suivant son entrée en vigueur, la prime d'ancienneté acquise sous l'empire de l'ancienne convention collective était convertie en points qui s'ajoutaient au coefficient, qu'en 2004 Monsieur [I] [U] n'a pas bénéficié de ces dispositions puisqu'à cette date, il ne relevait pas de la Convention collective de l'architecture, qu'il ne saurait revendiquer aucun avantage acquis sur le fondement de la Convention collective d'architecture, qu'il a néanmoins bénéficié du versement constant d'une prime d'ancienneté de 3 % puis de 6 % qui était donc un avantage accordé volontairement par l'employeur, qu'en conséquence la demande de Monsieur [I] [U] est juridiquement infondée, que Monsieur [I] [U] doit être débouté de l'ensemble de ses réclamations et que le concluant est fondé à solliciter la condamnation de Monsieur [I] [U] à lui verser la somme de 2000 € à titre de dommages intérêts pour procédure abusive, frustratoire et injustifiée.
Monsieur [I] [U] conclut à ce que l'appel interjeté par Monsieur [D] [H] soit déclaré irrecevable, à défaut à ce qu'il soit déclaré infondé, à la confirmation du jugement de départage du 30 avril 2012 en ce qu'il a déclaré son licenciement sans cause réelle ni sérieuse et en ce qu'il a prononcé des condamnations à l'encontre de Monsieur [D] [H], y ajoutant et statuant à nouveau : à ce que son licenciement soit déclaré sans cause réelle ni sérieuse, à la condamnation de Monsieur [D] [H] à lui payer :
-29 000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-3844,44 € bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires,
-384,44 € à titre de congés payés sur heures supplémentaires,
-2272 € à titre de rappel de prime,
et à la condamnation de Monsieur [D] [H] à lui payer la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel, outre l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile accordée en première instance, ainsi qu'aux entiers dépens du procès.
Monsieur [I] [U] fait valoir que son employeur n'allègue pas des difficultés économiques dans la lettre de licenciement, que Monsieur [D] [H] n'a produit aucun bilan, se contentant des premières pages des déclarations 2035, sans les annexes et comptes annuels, que concernant la société GERIM, Monsieur [D] [H] ne produit aucun élément ni comptable ni relatif au registre du personnel, que le transfert du contrat de travail vers Monsieur [D] [H] en 2007 constitue une opération plus que suspecte compte tenu du licenciement intervenu deux ans après, que la Cour ne pourra que relever l'existence d'une légèreté blâmable et en toute hypothèse d'une faute de Monsieur [D] [H] dès lors que la société SIMEG dégageait un bon bénéfice pour l'exercice 2007, que dès 2008 Monsieur [D] [H] à titre personnel ne déclarait plus de bénéfice, qu'il ne fera pas croire à la Cour qu'il ne savait pas au moment du transfert que ses chiffres allaient diminuer, que Monsieur [D] [H] est le dirigeant de plusieurs autres entreprises y compris de la société SIMEG, que toutes ses activités et sociétés ont la même adresse d'exploitation, que dès lors, tous les chiffres communiqués par Monsieur [D] [H] dans la présente procédure sont suspects et en toute hypothèse ne peuvent justifier son licenciement économique, que d'ailleurs l'année suivant son licenciement, soit en août 2011, Monsieur [D] [H] a créé la société PACARE pour commercialiser des lots provenant de l'ensemble immobilier pour lequel le salarié avait travaillé par l'établissement des préparatifs au permis, qu'aucune difficulté économique n'est démontrée, que Monsieur [D] [H] ne justifie pas avoir tenté de reclasser le salarié, qu'il ne justifie d'aucune proposition écrite et précise, que l'employeur fait bien partie d'un groupe puisqu'il détient de nombreuses sociétés dont SIMEG, OTIM, CASTET-DAVELUY, GERIM, SCI LES ORANGERS', que l'attestation de l'expert comptable ne peut être objective puisqu'il s'agit d'un partenaire de Monsieur [D] [H] et qui s'occupe de l'ensemble de ses sociétés, qu'aucune démarche n'a été entreprise pour le reclassement du salarié malgré le nombre de structures, qu'il convient donc de sanctionner la légèreté blâmable de l'employeur sur ce point également, que son licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse, que le concluant est demeuré au chômage et à la recherche d'un emploi avant de pouvoir partir en retraite à 65 ans en avril 2015, sans bénéficier d'une retraite décente, que le concluant produit un décompte précis des heures supplémentaires accomplies et non rémunérées par son employeur de 2005 à 2010, qu'il était dû au salarié une prime d'ancienneté de 8 % après 10 ans de présence dans l'entreprise en vertu de la convention collective applicable au contrat de travail, que l'employeur s'est contenté du versement d'une prime d'ancienneté à hauteur de 6 % et qu'il doit être reçu en l'ensemble de ses réclamations.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il y a lieu de se référer au jugement du conseil de prud'hommes et aux écritures déposées, oralement reprises.
SUR CE :
Sur la recevabilité de l'appel :
Si Monsieur [I] [U] sollicite, dans le dispositif de ses conclusions, à ce que soit déclaré irrecevable l'appel interjeté par Monsieur [D] [H], il ne développe cependant pas ce moyen dans le corps de ses conclusions.
Monsieur [D] [H] a interjeté appel, par pli recommandé du 23 mai 2012, du jugement du conseil de prud'hommes de Toulon en date du 14 février 2012, notifié à l'intéressé par pli recommandé du 14 mai 2012 avec avis de réception du 24 mai 2012. L'appel a donc été interjeté dans le délai d'un mois suivant la notification du jugement et il n'est pas prétendu par ailleurs que cet appel ne répond pas aux exigences légales de fond et de forme.
Par conséquent, l'appel formé par Monsieur [D] [H] est déclaré recevable en la forme.
Sur la prime d'ancienneté :
Dans le cadre de la relation salariale liant Monsieur [I] [U] à la société SIMEG, il n'est pas contesté qu'était applicable la Convention collective nationale de la Promotion-construction, laquelle ne prévoit pas l'instauration d'une prime d'ancienneté.
Monsieur [I] [U] bénéficiait, à titre d'avantage accordé par la société SIMEG, du versement d'une prime d'ancienneté de 6 % avant son transfert, à partir du 1er novembre 2007, de son contrat de travail à Monsieur [D] [H].
Monsieur [I] [U] a continué à bénéficier d'une prime d'ancienneté de 6 % versée par Monsieur [D] [H] à partir du 1er novembre 2007.
Il soutient qu'il aurait dû bénéficier d'une prime d'ancienneté de 8 % après 10 ans de présence dans l'entreprise, soit à compter du mois de juillet 2005, et produit un extrait de la Convention collective numéro 3062 des Entreprise d'architecture (article 26).
Cependant, ces dispositions conventionnelles produites par le salarié sont issues de l'ancienne Convention collective qui a été dénoncée et substituée par la Convention collective nationale des entreprises d'architecture du 27 février 2003, étendue par arrêté du 6 janvier 2004, qui prévoyait, aux termes de l'article V.1.9 du chapitre V sur les nouvelles classifications, que « dans le même délai de 4 mois suivant l'entrée en application de la convention collective, la prime d'ancienneté acquise à l'échéance de ce délai sera convertie en points, qui s'ajouteront au coefficient hiérarchique, en divisant le montant brut de la prime d'ancienneté par la valeur de point applicable en 2003 ».
Ces dispositions n'étaient pas applicables à l'époque, en 2004, à Monsieur [I] [U], qui était employé par la société SIMEG et se voyait appliquer la Convention collective nationale de la Promotion-construction.
En conséquence, lors du transfert de son contrat de travail à Monsieur [D] [H] à partir du 1er novembre 2007, Monsieur [I] [U] a vu sa prime d'ancienneté de 6 % maintenue à titre d'avantage acquis, sans qu'aucune obligation conventionnelle ne pèse sur le nouvel employeur quant au versement d'une prime d'ancienneté qui n'existait plus dans la nouvelle convention collective des entreprises d'architecture du 27 février 2003.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [I] [U] de sa demande en paiement d'un rappel de prime d'ancienneté.
Sur les heures supplémentaires :
Monsieur [I] [U] soutient qu'il effectuait toutes les semaines 36 heures de travail, et non 35 heures, selon les horaires suivants : du lundi au jeudi de 8 heures à 12 heures et de 14 heures à 18 heures et le vendredi de 8 heures à 12 heures.
Il indique que ses horaires de travail n'ont pas été contestés par l'employeur lors de l'entretien préalable ainsi qu'en témoigne le conseiller du salarié, Monsieur [A]. Il produit un compte rendu d'entretien préalable du 30 juillet 2010 signé par Monsieur [K] [A], qui a noté: « À ma question : quelle est l'amplitude de travail au cabinet, Monsieur [D] [H] répond : du lundi au jeudi de 8h00 à 12h00 et 14h00 à 18h00 et le vendredi où nous terminons à 12h00 ».
Monsieur [I] [U] produit un décompte des heures supplémentaires dont il réclame le paiement, à raison d'une heure par semaine, sur la période de février 2005 à février 2010, pour un montant total de 3844,44 € au titre de 253 heures supplémentaires.
Monsieur [D] [H] réplique que Monsieur [I] [U] n'arrivait jamais au cabinet avant 8h15 et le plus souvent à 8h30, voire au-delà, et qu'il bénéficiait de la liberté de participer, sans contrepartie, à toutes les fêtes musulmanes, et bénéficiait très régulièrement de jours non travaillés compte tenu notamment de la baisse d'activité chronique au cabinet.
Il produit l'attestation du 20 septembre 2010 de sa fille, [G] [N], associée dans l'agence GERIM, qui indique « avoir eu l'occasion de constater, à plusieurs reprises, lors de rendez-vous matinaux à l'Agence Gerim, que Monsieur [U], dessinateur de la société Simeg, qui partageait une partie des locaux de la GERIM, n'était pas présent à 8 heures. Il n'arrivait pas avant 8h15 voire au-delà, c'était de notoriété à l'agence », ainsi que l'attestation du 19 septembre 2010 de Monsieur [R] [X], associé à Monsieur [D] [H] dans un projet de promotion immobilière, qui atteste qu' « en qualité d'agent commercial (il a) collaboré durant 14 ans avec l'agence GERIM et la société SIMEG. À ce titre, il (lui) est arrivé de constater que Monsieur [U] arrivait certaines fois après 8h15 pour prendre son service».
Monsieur [D] [H] indique que par ailleurs Monsieur [I] [U] a été mis en demeure, par lettre recommandée du 4 septembre 2008, de justifier de son absence alors qu'il devait réintégrer son poste le 1er septembre 2008 à la fin de ses congés. Il ressort cependant du bulletin de paie de septembre 2008 que le salarié était en congé du 1er au 4 septembre 2008.
S'il résulte du compte-rendu d'entretien établi par le conseiller du salarié, Monsieur [K] [A], que seule l'amplitude des horaires de travail au sein du cabinet a été précisée par l'employeur, il n'en reste pas moins que Monsieur [D] [H] ne justifie pas des horaires effectivement réalisés par le salarié.
Les témoignages produits par l'employeur, outre qu'ils émanent de ses proches, n'apportent pas de précision sur les horaires de travail effectifs de Monsieur [I] [U] et relèvent tout au plus qu'il était « de notoriété » que celui-ci n'arrivait pas avant 8h15, voire plus tard, ce qui a contrario signifie qu'il aurait dû arriver avant 8h15 et que son horaire de prise du travail était bien à 8 heures.
En conséquence, l'existence d'heures supplémentaires accomplies par le salarié est établie.
Au vu du décompte présenté par le salarié, sauf à déduire les heures supplémentaires réclamées durant les périodes de congés payés (5 semaines par an et 1 semaine en 2010) et durant la période d'arrêt de travail pour maladie du 1er au 6 novembre 2009, la Cour réforme le jugement et alloue à Monsieur [I] [U] la somme brute de 3427,36 € au titre d'heures supplémentaires, ainsi que la somme brute de 342,74 € au titre des congés payés y afférents.
Sur le licenciement :
La lettre de licenciement, qui vise la baisse régulière de l'activité de l'entreprise, qui est une toute petite entreprise, notamment du fait de la crise que connaît l'immobilier dans le département 83 depuis 2008 et la répercussion sur l'emploi du salarié qui est supprimé, est fondée sur des faits précis et matériellement vérifiables et est donc suffisamment motivée.
Monsieur [D] [H] produit, pour justifier de ses difficultés économiques, les éléments suivants :
-ses comptes annuels au 31 décembre 2008, établis par la société SECEE
-les copies de ses déclarations fiscales 2035 des années 2007, 2008 et 2009,
-les copies des déclarations fiscales 2065 de la société SIMEG de 2007, 2008 et 2009,
-les déclarations fiscales de la société AGENCE DAVELUY des années 2007 et 2008 et la déclaration fiscale de la société CASTET-DAVELUY de 2009,
-les déclarations fiscales de la société OTIM sur les années 2007, 2008 et 2009,
-l'attestation du 9 septembre 2013 de Monsieur [Q] LOPEZ, gérant de la société d'expertise comptable SECEE, qui « certifie que le chiffre d'affaires de la SARL SIMEG s'établit comme suit :
-2006 : 300 126 € HT
-2007 : 198 022 € HT
-2008 : 11 386 € HT
-2009 : 13 098 € HT ».
Il résulte des éléments versés par Monsieur [D] [H] que celui-ci a dégagé un résultat comptable de 58 268 € au 31 décembre 2007 (pour un total de recettes de 151 005 €), un résultat comptable de 2836 € au 31 décembre 2008 (pour un total de recettes de 58 233 €) et a connu une perte de 56 085 € en 2009.
Quant à la SARL SIMEG, elle a déclaré un déficit de 89 570 € sur 2008 et un déficit de 141 764 € en 2009. Au vu de ces chiffres révélateurs des difficultés économiques de la société SIMEG, il ne peut être retenu, comme avancé par Monsieur [I] [U], que le transfert de son contrat de travail à compter du 1er novembre 2007 à Monsieur [D] [H] serait une opération suspecte, destinée à préparer son licenciement.
De même, si Monsieur [I] [U] invoque que Monsieur [D] [H] est susceptible d'attribuer les chantiers à l'une des sociétés qu'il gère et que dès lors, les chiffres qu'il communique sont suspects et ne peuvent justifier son licenciement, les différentes pièces qu'il verse, dont les extraits Kbis et statuts des différentes sociétés, sont insuffisantes à démontrer l'existence d'une fraude.
Au vu des éléments versés par Monsieur [D] [H], la réalité et le sérieux de ses difficultés économiques sont donc établis.
Monsieur [D] [H] soutient par ailleurs, compte tenu de la petite taille de son établissement et des sociétés du groupe, qu'il n'avait pas de poste disponible à proposer en reclassement à Monsieur [I] [U].
Il indique qu'il n'existait qu'un seul poste au sein de son cabinet, celui de Monsieur [I] [U] qui a été supprimé, qu'il n'existait aucun salarié au sein de la société SIMEG, qu'il existait un comptable (aujourd'hui en longue maladie et non remplacée) et une assistante administrative aujourd'hui à mi-temps au sein de la société OTIM, et qu'il existait au sein de la société DAVELUY une directrice salariée responsable d'agence et aucun autre salarié. Il produit son registre du personnel et les registres du personnel des sociétés DAVELUY, OTIM et SIMEG, ainsi que l'attestation du 28 juin 2012 de Monsieur [Q] [T], gérant de la société d'expertise comptable SECEE, qui indique avoir participé avec Monsieur [D] [H] à la recherche d'un reclassement et que « concernant l'activité d'architecte, Monsieur [U] étant l'unique salarié, il nous est vite apparu qu'aucune possibilité de reclassement n'était envisageable au sein de l'entreprise, Monsieur [H] ayant par ailleurs à ce moment-là l'âge de 75 ans. Concernant la société SIMEG, celle-ci n'avait plus aucune activité opérationnelle (chiffre d'affaires 2009 : 13 098€ hors taxes) et ne comptait aucun salarié. La société OTIM comptait déjà deux salariés pour une activité somme toute assez réduite (chiffre d'affaires 2009: 145 081 € hors taxes). Quant à la société CASTET-DEVALUY, elle ne comptait qu'une seule salariée, une activité réduite (chiffre d'affaires 2009 : 84 284 € hors taxes et résultat déficitaire) et de plus son objet d'agence immobilière ne lui permettait pas de proposer un poste quelconque à Monsieur [U]' ».
Au vu des registres du personnel produits par l'appelant, il est démontré qu'il n'existait aucun poste de reclassement au sein du cabinet [H] et au sein de la société SIMEG, qu'il existait uniquement deux postes au sein de la société OTIM déjà occupés et un seul poste de directrice responsable d'agence au sein de la société DAVELUY, poste déjà occupé. Compte tenu de la petite taille de chacune des structures et de l'absence de poste disponible, l'employeur justifie de son impossibilité de reclasser le salarié.
En conséquence, il convient de réformer le jugement en ce qu'il a dit le licenciement de Monsieur [I] [U] dépourvu de cause réelle et sérieuse et de débouter le salarié de sa demande d'indemnisation de ce chef.
Sur la demande reconventionnelle de Monsieur [H] :
La Cour de cassation a, par arrêt du 15 avril 2015, cassé et annulé, sauf en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de l'employeur au titre d'une procédure abusive, l'arrêt rendu le 22 octobre 2013 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence. En conséquence, la disposition de l'arrêt en date du 22 octobre 2013 ayant débouté Monsieur [D] [H] de sa demande d'indemnisation pour procédure abusive est définitive et la demande présentée par l'appelant de ce chef est irrecevable.
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, tel que précisé au dispositif.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
STATUANT PUBLIQUEMENT, EN MATIERE PRUD'HOMALE, PAR ARRET CONTRADICTOIRE,
Déclare l'appel recevable en la forme,
Confirme le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [I] [U] de sa demande de rappel de prime d'ancienneté, en ce qu'il reconnu l'existence d'heures supplémentaires dues à Monsieur [I] [U] et en ce qu'il a condamné Monsieur [D] [H] à payer à Monsieur [I] [U] la somme de 1000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,
Le réforme pour le surplus,
Dit que le licenciement de Monsieur [I] [U] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
Condamne Monsieur [D] [H] à payer à Monsieur [I] [U] 3427,36 € d'heures supplémentaires et 342,74 € de congés payés sur heures supplémentaires,
Condamne Monsieur [D] [H] aux dépens et à payer à Monsieur [I] [U] 2000€ supplémentaires au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre prétention.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT