La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/03/2016 | FRANCE | N°14/10583

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 6e chambre d, 02 mars 2016, 14/10583


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre D



ARRÊT AU FOND

DU 02 MARS 2016

F.T

N° 2016/58













Rôle N° 14/10583







[S] [E]





C/



[I] [W]





















Grosse délivrée

le :

à :





Me Philippe- laurent SIDER



SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 16 Avril 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 11/04981.





APPELANT



Monsieur [S] [E]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 2]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 5]





représenté par Me Philippe- laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-E...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre D

ARRÊT AU FOND

DU 02 MARS 2016

F.T

N° 2016/58

Rôle N° 14/10583

[S] [E]

C/

[I] [W]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Philippe- laurent SIDER

SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 16 Avril 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 11/04981.

APPELANT

Monsieur [S] [E]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 2]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Philippe- laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté par Me Etienne BERARD de la SCP BERARD & NICOLAS, avocat au barreau de NICE substituée par Me Laurent NICOLAS, avocat au barreau de NICE, plaidant.

INTIMEE

Madame [I] [W]

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée par Me Jean marie POZZO DI BORGO de la SCP DELPLANCKE-POZZI DI BORGO-ROMETTI & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE, plaidant.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Février 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme Florence TESSIER, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente

Mme Michèle CUTAJAR, Conseiller

Mme Florence TESSIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Mars 2016.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Mars 2016,

Signé par Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur [S] [E] et Madame [I] [W] ont vécu en concubinage entre 1998 et le mois de juillet 2007 ; ils ont eu deux enfants.

Le patrimoine indivis des parties est composé d'un appartement situé à [Adresse 2], d'un studio sis à [Adresse 4], des parts de la société d'expertise comptable MVM INVEST, dont le siège est à [Adresse 3].

Par acte sous seing privé en date du 25 juin 2010, Monsieur [S] [E] et Madame [I] [W] ont décidé de la répartition entre eux de ces biens indivis :

*Monsieur [S] [E] conservant le studio, évalué à la somme de 110.000 euros, à charge pour lui de régler les crédits, frais et charges afférents, avec accord de Madame [I] [W] sur la vente éventuelle de ce bien et se voyant attribuer les parts, évaluées à leur valeur nominale, et les locaux commerciaux afférents de la SCI MVM INVEST, l'attributaire devant prendre en charge les dettes passées, présentes et à venir,

*Madame [I] [W] conservant l'appartement [Adresse 2], évalué à la somme de 350.000 euros, à charge pour elle d'assumer le paiement des crédits et frais afférents,

*le compte joint ouvert auprès de la société LCL étant clôturé par Monsieur [S] [E] au plus tard huit jours après la régularisation du partage ou, au plus tard, le 31 août 2010.

Par acte d'huissier en date du 5 septembre 2011, Madame [I] [W] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Nice Monsieur [S] [E] afin qu'il lui soit ordonné, sous astreinte, de signer en l'étude de Maître [H], notaire, ou tout autre notaire, l'acte de partage de leur indivision sur la base de la transaction du 25 juin 2010, et, subsidiairement, que cette transaction soit homologuée, le partage judiciaire de l'indivision étant ordonné conformément à ses stipulations, son ancien concubin étant condamné à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Monsieur [S] [E] s'est opposé aux demandes, exposant que la convention du 25 juin 2010 doit être annulée en application des articles 887 et 889 du code civil, pour absence de concessions réciproques et vice du consentement, ou demandant sa résolution judiciaire sur le fondement de l'article 1184 du code civil, pour défaut de respect, par son ancienne concubine, des obligations mises à sa charge et, subsidiairement, que le partage soit rescindé pour lésion de plus d'un quart, les évaluations des biens immobiliers étant erronées, les charges de l'indivision n'ayant pas été prises en compte et aucune indemnité d'occupation à la charge de Madame [I] [W] n'ayant été prévue.

Il a demandé qu'un partage, assorti d'un complément de partage, soit ordonné en application de l'article 890 du code civil, avec, pour y parvenir, la désignation préalable d'un expert, recevant pour mission d'évaluer les actifs indivis, de chiffrer l'indemnité d'occupation due depuis le 1er

janvier 2007, de chiffrer les sommes par lui réglées pour le compte de l'indivision et de faire les comptes entre les parties, Madame [I] [W] étant condamnée à lui payer les sommes de 10.000 euros à valoir sur l'indemnité d'occupation par elle due et de 2.000 euros en remboursement de ses frais irrépétibles.

Par jugement contradictoire rendu le 16 avril 2014, le tribunal de grande instance de Nice a :

-débouté Monsieur [S] [E] de ses demandes tendant à l'annulation et à la résolution du protocole d'accord du 25 juin 2010, ainsi que de son action en complément de part pour lésion de plus du quart et de sa demande d'expertise comptable,

-homologué le protocole d'accord du 25 juillet 2010, portant partage de l'indivision des parties,

-ordonné par suite l'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage de l'indivision existant entre elles, sur les bases dudit protocole,

-désigné le président de la chambre des notaires, avec faculté de délégation pour y procéder et désigné un juge chargé de les contrôler,

-ordonné l'exécution provisoire de la décision,

-condamné Monsieur [S] [E] à payer à Madame [I] [W] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Le tribunal a considéré pour l'essentiel que :

-les conditions de l'article 887 du code civil ne sont pas remplies, Monsieur [S] [E] ne pouvant invoquer qu'il n'aurait pas compris la portée de ses engagements, alors qu'il exerce la profession d'expert-comptable et que la convention a été conclue avec l'aide des avocats respectifs des parties,

-aucune violence ne peut être retenue à son encontre, Monsieur [S] [E] ne pouvant soutenir avoir signé le protocole sous la menace d'une procédure commerciale, alors que la convention prévoit au contraire que les parties s'engagent à tout mettre en 'uvre pour transiger dans le cadre d'une procédure pour concurrence déloyale introduite par Madame [I] [W] contre son ancien concubin,

-aucun document ne vient établir qu'il aurait signé le protocole en vue d'une résidence alternée des enfants communs,

-l'esprit du protocole querellé est de réajuster les valeurs des biens indivis en tenant compte des apports respectifs des parties et des dépenses par elles supportées, et non seulement des apports et charges de Madame [I] [W],

-le fait qu'aucune indemnité d'occupation n'ait été mise à la charge de cette dernière ne démontre pas l'absence de concessions réciproques, dans la mesure où Monsieur [S] [E] ne se trouve pas plus redevable de quelque somme que ce soit à ce titre,

-il ne peut être reproché à Madame [I] [W] de pas avoir respecté l'obligation de payer les charges de copropriété relatives à l'appartement [Adresse 2], carence à l'origine d'une saisie-attribution mise en 'uvre sur le compte bancaire de Monsieur [S] [E] courant novembre 2010, alors qu'elle a apuré sa dette à ce titre au mois de mai 2011,

-le fait que le protocole n'ait pas été réitéré dans le délai prévu ne peut justifier sa résolution, la date fixée n'étant pas stipulée à peine de résolution ou de caducité et la saisine du notaire mandaté ayant été effectuée par Madame [I] [W], l'acte définitif de partage n'ayant pu être signé du fait du refus de Monsieur [S] [E],

-la lésion de plus du quart invoquée n'est pas prouvée, le protocole prévoyant un réajustement des valeurs fixées et aucun élément d'estimation n'étant communiqué quant aux parts sociales attribuées à Monsieur [S] [E].

Monsieur [S] [E] a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe du 26 mai 2014.

Monsieur [S] [E], aux termes de ses dernières écritures notifiées le 5 janvier 2016, demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et de :

-constater l'absence de concessions réciproques des parties, et, au surplus, que le protocole d'accord aboutit à un partage lésionnaire à son détriment,

-en conséquence, débouter Madame [I] [W] de sa demande de régularisation forcée du partage,

-annuler le document du 25 juin 2010 intitulé « protocole d'accord » sur le fondement des articles 887 et 889 du code civil,

-constater que l'intimée n'a pas respecté les obligations mises à sa charge par le protocole,

-constater qu'aucun partage définitif n'est intervenu,

-en conséquence prononcer la résolution de la convention du 25 juillet 2010 sur le fondement de l'article 1184 du code civil,

-Subsidiairement,

-constater le caractère lésionnaire du partage proposé,

-dire recevable et bien fondée la demande en complément de partage sur le fondement de l'article 890 du code civil,

-ordonner le partage de l'indivision existant entre les parties et, pour ce faire, ordonner une mesure d'expertise, le technicien commis recevant pour mission de :

*évaluer l'actif mobilier, immobilier et le passif indivis, qui comprendra les créances des indivisaires envers l'indivision,

*chiffrer l'indemnité d'occupation due par l'intimée au titre de l'appartement sis à [Localité 1], le [Adresse 2],

-désigner pour procéder aux opérations de partage le président de la chambre des notaires des Alpes Maritimes, avec faculté de délégation, et un juge pour les surveiller,

-donner acte à l'appelant qu'il entend faire supporter à l'intimée une indemnité d'occupation concernant le bien immobilier sis à [Adresse 2],

-condamner Madame [I] [W] à lui payer la somme de 20.000 euros à valoir sur cette indemnité d'occupation due à compter du 1er janvier 2007,

-la condamner à lui verser la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et dire les dépens pris en frais privilégiés de partage.

Monsieur [S] [E] fait valoir les moyens suivants :

-le protocole détermine la ligne directrice d'un partage futur et ne saurait constituer les opérations de compte liquidation partage de l'indivision, les masses active et passive de celle-ci n'ayant pas été déterminées,

-il n'a jamais souscrit aux évaluations mentionnées dans le protocole, qui ont pu évoluer à la date du partage, élément non pris en compte,

-l'intimée n'a pas respecté les obligations mises à sa charge par le protocole puisqu'elle n'a pas payé les arriérés de charges de copropriété et de taxes foncières relatives à l'appartement situé dans l'immeuble [Adresse 2], cette carence l'ayant contraint à se substituer à elle et à supporter les charges de l'indivision,

-le protocole litigieux n'a pas donné lieu à l'établissement d'un acte de partage définitif à la date fixée du 31 août 2010, la répartition envisagée étant ainsi restée à l'état de projet,

-la cession des parts sociales ne fait pas partie de l'actif indivis,

-aucune concession réciproque ne résulte de l'application du protocole, qui est donc nul, aucune soulte n'étant prévue malgré le déséquilibre manifeste des lots constitués, lui-même ayant signé la convention car l'intimée avait promis d'accepter une résidence alternée des enfants communs, accord non tenu, et sous la menace de l'introduction par son ancienne concubine de procédures, dont il n'avait en réalité rien à craindre,

-Subsidiairement, le protocole d'accord doit être rescindé pour lésion, conformément aux dispositions de l'article 890 du code civil, l'appartement attribué à l'intimée devant être estimé à la somme de 490.000 euros en 2007 et 550.000 à 600.000 euros au moment du partage, alors que le passif afférent au studio s'élève à la somme de 107.000 euros et que le local commercial qui lui a été attribué a été surestimé, puisque ne valant aujourd'hui que 170.636 euros, son financement se montant à 200.000 euros,

-les charges par lui assumées n'ont pas été prises en compte aux termes du protocole et aucune indemnité d'occupation n'a été mise à la charge de l'intimée pour l'occupation, tant personnelle que professionnelle, de l'appartement sis [Adresse 2].

Madame [I] [W], dans ses dernières écritures notifiées le 24 octobre 2014, sollicite de la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de condamner Monsieur [S] [E] à lui payer les sommes de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l'ensemble de ses préjudices et de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.

Elle expose principalement que :

-seul l'appelant est responsable de l'enlisement de la situation,

-elle a assumé le paiement des charges lui incombant, sa dette envers la copropriété ayant été intégralement remboursée, grâce à des emprunts par elle contractés,

-le moyen tiré de l'absence d'évaluation des masses active et passive de l'indivision est inopérant,

-les parts sociales constituent bien un élément d'actif de l'indivision,

-la date prévue au protocole aux fins d'établissement de l'acte de partage n'était pas impérative, les parties ayant toute latitude pour la proroger dans le cas où les formalités à accomplir, notamment bancaires, ne permettaient pas de signer l'acte à la date arrêtée,

-concernant la lésion invoquée, les articles 887 et 889 du code civil ne concernent que les actions en nullité et en complément de part d'un acte de partage, et non d'une transaction, la seule action ouverte à l'appelant ne pouvant être fondée que sur la démonstration d'un vice du consentement portant sur l'existence ou la quotité des droits des copartageants, ou sur la propriété des biens compris dans la masse partageable, ce que Monsieur [S] [E] n'invoque pas,

-le partage envisagé n'est pas lésionnaire, l'intimée ayant renoncé à son unique source de revenus et à son outil de travail en abandonnant la moitié des parts par elle détenues dans la SCI MVM INVEST, conservant uniquement un appartement qu'elle avait déjà largement financé seule au jour de l'acquisition, grâce au produit de la vente d'un appartement lui appartenant en propre,

-la fixation de la résidence des enfants n'a jamais été envisagée dans le protocole, elle-même n'ayant pas accepté la mise en place d'une résidence alternée,

-l'article 4 de la transaction du 25 juin 2010 prévoit la mise en place de pourparlers entre les parties, afférents à la procédure commerciale les opposant, l'action par elle introduite étant fondée compte tenu des détournements de clientèle commis par l'appelant,

-les estimations de biens mentionnées dans le protocole ne sauraient être remises en cause, pour être exactes en l'état du marché immobilier actuel, celle concernant l'appartement situé [Adresse 2] ne tenant pas compte de l'apport initial par elle effectué à l'aide de fonds propres, d'un montant de 159.284,66 euros,

-la demande formulée au titre de l'indemnité d'occupation est irrecevable, le protocole se trouvant revêtu de l'autorité de la chose jugée, Monsieur [S] [E] n'ayant versé aucune somme à ce titre pour l'occupation exclusive du studio de juillet 2007 à septembre 2008, et aucun loyer n'ayant été perçu par l'indivision, pas plus que pour l'occupation des locaux de la société MVM INVEST.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 20 janvier 2016.

MOTIVATION DE LA DECISION

1/ Sur la transaction du 25 juin 2010 :

Attendu qu'aux termes du protocole d'accord sous-seing-privé du 25 juin 2010, Madame [I] [W] et Monsieur [S] [E] ont décidé de la répartition du patrimoine indivis par eux acquis pendant leurs années de vie commune ;

Que l'article 1 de ce protocole, intitulé « sur la composition du patrimoine commun », indique que les parties reconnaissent que leur patrimoine indivis est composé des biens suivants :

-un appartement situé à [Localité 1], dans l'immeuble [Adresse 2], évalué à 350.000 euros,

-un studio sis à [Adresse 4], évalué 110.000 euros,

-les parts de la SCI MVM INVEST, sise [Adresse 1], évaluées à leur valeur nominale,

-un compte joint ouvert auprès de la société LCL sous le numéro [Compte bancaire 1] ;

Que cet article dispose encore que « ces valeurs sont indicatives et seront ajustées dans l'acte notarié en fonctions des apports éventuels des parties lors des acquisitions des biens, des prêts bancaires, des travaux effectués, des dettes et charges etc » ;

Que l'article 2 intitulé « sur la répartition des actifs patrimoniaux » prévoit :

«-sur l'appartement [Adresse 2] : la cession par [S] [E] de sa moitié indivise à [I] [W], qui accepte de prendre en charge les dettes, arriérés de charges de copropriété et de taxe foncière, dus au jour de la signature du protocole, en ce compris les crédits en cours, précision étant faite qu'elle devrait toutefois obtenir un accord de prêt global permettant de racheter les trois crédits souscrits ('),

-sur le studio situé [Adresse 4] : l'abandon par [I] [W] de sa moitié indivise à [S] [E], qui devra immédiatement prendre en charge les dettes, arriérés de charges de copropriété et de taxe foncière dus au jour de la signature de l'acte, en ce compris les crédits en cours, [I] [W] donnant son accord à la vente éventuelle de ce bien immobilier indivis,

-sur les parts de la SCI MVM INVEST : leur attribution intégrale à [S] [E], [I] [W] s'engageant à lui céder l'intégralité de sa participation dans le capital social, et [S] [E] s'engageant à prendre en charge les dettes passées, présentes et à venir, non encore payées, dues par les associés, de sorte que [I] [W] ne soit pas recherchée à quelque titre que ce soit, [S] [E] s'engageant à obtenir le retrait de la caution personnelle souscrite par cette dernière au profit de la SCI,

-sur le compte joint ouvert au LCL : sa clôture par [S] [E] au plus tard huit jours après la régularisation du partage, et au plus tard le 31 août 2010, date où les crédits, prélèvements et encours bancaires devraient être transférés sur les comptes respectifs des parties » ;

Que, dans cet article 2, les parties ont déclaré accepter de partager par moitié l'impôt sur la plus-value immobilière, qui sera payée lors des transferts de propriété envisagés, et de rester solidairement responsables au regard de l'administration fiscale ;

Qu'elles se sont également engagées irrévocablement et réciproquement à saisir leurs notaires, afin de transmettre les termes de leur accord et à mettre tout en 'uvre pour réaliser la liquidation des actifs patrimoniaux avant le 31 août 2010 ;

Attendu que l'article 3 du protocole prévoit la remise sous huitaine à celui-ci par Madame [I] [W] des effets personnels de Monsieur [S] [E] restés dans l'appartement [Adresse 2] ;

Que l'article 4 intitulé « sur l'arrêt des procédures en cours », prévoit l'engagement des parties de se désister irrévocablement et définitivement de toutes instances et actions ayant pour objet leurs prétentions réciproques dans la liquidation de leurs actifs patrimoniaux, et à tout mettre en 'uvre pour transiger dans le cadre d'une procédure pendante devant le tribunal de commerce de Nice introduite par Madame [I] [W] et Maître [Y], désigné en tant que liquidateur de la société CABINET PCE ;

Attendu, enfin, que l'article 5 du protocole, intitulé « sur la force de la présente transaction et l'autorité de la chose jugée », rappelle les dispositions des articles 2044, 2048, 2049 et 2052 du code civil ;

Qu'il est constant que le projet d'acte de partage dressé par Maître [H], notaire, sur la base de ce protocole est resté à l'état de projet, compte-tenu du refus de Monsieur [S] [E] de le signer ;

Que l'appelant, qui conteste le protocole, invoque divers moyens d'annulation et de résolution de cet acte et, subsidiairement, son caractère lésionnaire, moyens qui devront être examinés successivement par la cour ;

2/ Sur la nullité du protocole :

*Pour vice du consentement :

Attendu que l'appelant, s'il vise dans le dispositif de ses dernières conclusions, l'article 887 du code civil, ne motive plus, en cause d'appel, l'existence d'un vice du consentement dont il aurait été victime, ni ne produit de pièces justificatives de ce chef ;

Qu'il n'y a donc pas lieu à annulation du protocole du 25 juin 2010 sur ce fondement, qui n'est plus soutenu devant la cour ;

*Pour absence de concessions réciproques :

Attendu que Monsieur [S] [E] fait valoir que, malgré le déséquilibre flagrant de l'attribution des lots, aucune soulte n'est envisagée par le protocole, ni dans le projet d'acte notarié, qui ne tient compte que des investissements réalisés par l'intimée, et non des apports par lui effectués, ni de l'indemnité d'occupation due par cette dernière pour l'occupation exclusive de l'appartement [Adresse 2] ;

Mais attendu, d'une part, que tant l'esprit que la lettre du protocole est de réajuster les valeurs des biens indivis, en tenant compte des apports respectifs des parties et des dépenses supportées par chacune d'elles pour lesdits biens, la convention du 25 juin 2010 rappelant expressément ce principe en sa page 1 in fine ;

Attendu, d'autre part, que si aucune indemnité d'occupation n'a été mise à la charge de Madame [I] [W], il convient d'observer que Monsieur [S] [E] a bénéficié de pareille dispense pour l'occupation exclusive du studio situé [Adresse 4] et des locaux commerciaux de la SCI MVM INVEST, dont les parts lui ont été intégralement attribuées, ce qui vaut pour l'un valant pour l'autre ;

Attendu que c'est donc à bon droit que le jugement a retenu que le protocole d'accord contesté contient des concessions réciproques des parties, étant observé que les comptes finaux devront être faits par le notaire chargé de dresser l'acte définitif de partage de l'indivision existant entre elles, prenant en compte, sur justificatifs, leurs apports personnels respectifs et les dettes de l'indivision par elles personnellement assumées ;

3/ Sur la résolution du protocole :

Attendu qu'au visa des dispositions de l'article 1184 du code civil, l'appelant soutient qu'il a dû payer les arriérés de charges de copropriété et de taxes foncières afférentes à l'immeuble le [Adresse 2], aux lieu et place de Madame [I] [W], et que le protocole n'a pas été réitéré à la date fixée ;

Qu'il sera tout d'abord observé que le protocole du 25 juin 2010 ne contient pas de clause expresse de résolution ;

Attendu, d'une part, que s'il est constant qu'une saisie-attribution a été pratiquée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2] sur le compte bancaire personnel de l'appelant le 18 juin 2010, d'un montant de 6.556,45 euros, Madame [I] [W] rapporte la preuve qui lui incombe qu'elle a apuré sa dette, pour un montant total de 25.295,50 euros, Monsieur [S] [E] ne soutenant pas avoir dû supporter des frais restés à sa charge du fait de la voie d'exécution pratiquée ;

Attendu, d'autre part, que la date visée au protocole n'a pas été stipulée à peine de résolution, ni de caducité ;

Attendu en conséquence que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit qu'il n'y avait pas lieu à résolution de la convention litigieuse ;

3/ Sur la lésion :

Attendu qu'en application des dispositions de l'article 889 du code civil, lorsque l'un des copartageants établit avoir subi une lésion de plus du quart, le comblement de sa part lui est fourni, au choix du défendeur, soit en numéraire, soit en nature ; que pour apprécier s'il y a eu lésion, on estime les objets suivant leur valeur à l'époque du partage ;

Attendu que, s'il est exact, tel que le soutient l'intimée, que, conformément à l'article 2052 alinéa 2 du code civil, les transactions ne peuvent être attaquées pour cause de lésion, l'action en rescision pour lésion est cependant recevable contre un acte qui a pour objet de faire cesser l'indivision, tel qu'en l'espèce ;

Attendu que la charge de la preuve de la lésion de plus du quart incombe à Monsieur [E], copartageant qui se prétend lésé, l'estimation des biens devant être faite en fonction de leur valeur à la date du partage ;

Attendu que, si les estimations d'agences immobilières versées aux débats par l'appelant démontrent que l'appartement [Adresse 2] et le studio de l'[Adresse 4] présentent une valeur évaluée en 2012, pour le premier à la somme de 542.000 euros et, pour le second, à celle de 124.673 euros, sommes supérieures à celles arrêtées au protocole, il n'en demeure pas moins que ledit protocole prévoit expressément un réajustement des valeurs indiquées et que Madame [I] [W] prouve, par les pièces qu'elle communique, qu'elle a personnellement contracté un crédit auprès de la société GE BANK, destiné à financer le bien immobilier [Adresse 2], d'un montant de 134.155,14 euros, qu'elle rembourse sur ses deniers personnels ;

Attendu qu'en outre Monsieur [S] [E] s'abstient de justifier de la valeur nominale des parts de la SCI MVM INVEST, qu'il a conservées en leur intégralité, l'intimée ayant, par cette cession de parts sociales, qui entrent dans l'actif indivis, renoncé à sa source de revenus et à son outil de travail ;

Attendu qu'au surplus les documents produits démontrent que le protocole du 25 juin 2010 a été signé au terme de pourparlers intervenus entre les ex-concubins suite, d'une part, à un dépôt de plainte de Madame [I] [W] à l'encontre de l'appelant pour des faits d'abandon de famille commis à compter du 9 septembre 2008, ayant donné lieu à l'arrêt de condamnation rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 16 octobre 2013, et, d'autre part, à l'introduction par l'intimée à l'encontre de Monsieur [S] [E] d'une procédure commerciale pour détournement de clientèle courant 2007 ;

Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces considérations que l'appelant ne démontre pas la lésion de plus du quart invoquée, la cour n'ayant pas à pallier la carence d'une partie dans l'administration de la preuve en ordonnant une mesure d'expertise ;

Attendu par suite qu'il y a lieu de confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Attendu que Madame [I] [W] n'établit pas que l'attitude de Monsieur [S] [E] est à l'origine d'un préjudice moral et financier, dommages qui ne se trouvent pas caractérisés à la lecture des pièces communiquées ;

Que par suite, l'intimée sera déboutée de sa demande reconventionnelle tendant à l'octroi de dommages et intérêts ;

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile ;

P A R C E S M O T I F S

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute Madame [I] [W] de sa demande tendant à l'octroi de dommages et intérêts ;

Condamne Monsieur [S] [E] à payer à Madame [I] [W] la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel ;

Dit n' y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Monsieur [S] [E], en cause d'appel ;

Condamne Monsieur [S] [E] aux dépens d'appel et dit qu'ils seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 6e chambre d
Numéro d'arrêt : 14/10583
Date de la décision : 02/03/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6D, arrêt n°14/10583 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-02;14.10583 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award