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25/02/2016 | FRANCE | N°13/13505

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2e chambre, 25 février 2016, 13/13505


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

2e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 25 FEVRIER 2016



N° 2016/ 105













Rôle N° 13/13505







SAS COMPOSITEWORKS





C/



SOCIETE ANTEXIS LIMITED



SASU AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE





















Grosse délivrée

le :

à :



Me COSTE



scp BADIE



Scp ERMENEUX













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 21 Juin 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2011F01553.





APPELANTE





SAS COMPOSITEWORKS

demeurant [Adresse 1]



représentée et plaidant par Me Bertrand COSTE, avocat au barreau de MARSEILLE









INTIMEES...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

2e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 25 FEVRIER 2016

N° 2016/ 105

Rôle N° 13/13505

SAS COMPOSITEWORKS

C/

SOCIETE ANTEXIS LIMITED

SASU AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE

Grosse délivrée

le :

à :

Me COSTE

scp BADIE

Scp ERMENEUX

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 21 Juin 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2011F01553.

APPELANTE

SAS COMPOSITEWORKS

demeurant [Adresse 1]

représentée et plaidant par Me Bertrand COSTE, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

SOCIETE ANTEXIS LIMITED,

demeurant [Adresse 2])

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée et plaidant par Me HOLMAN de la SCP HOLMAN FENWICK & WILLAN, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Laure CAPRINI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE (Cabinet BADIE),

SASU AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE anciennement dénommée S.A.S. DU PONT PERFORMANCE COATINGS,

immatriculée au R.C.S. de VERSAILLES sous le numéro 778 150 706,

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée et plaidant par Me Caroline CARLBERG, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Janvier 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, monsieur FOHLEN, conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Février 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Février 2016,

Signé par Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

F A I T S - P R O C E D U R E - D E M A N D E S :

Pour des travaux de peinture du navire Dark Shadow, construit en 2000 et propriété de la société ANTEXIS Limited dont le siège est à [Localité 1], un devis précisant une peinture DU PONT [émanant de la S.A.S. DU PONT PERFORMANCE COATINGS FRANCE] a été établi le 14 novembre 2006 pour la somme de 163 651 € 00 H.T. par la S.A.S. COMPOSITEWORKS. Cette dernière a sous-traité les travaux à la société HYDRA SUD SERVICES qui a établi le 22 novembre un devis pour 90 000 € 00 H.T., et a facturé les 1er et 22 décembre 2006 la somme totale de 63 000 € 00 H.T.

Le 15 mars 2007 la société HIGH SPEC YACHTING a établi un devis vis-à-vis de la société COMPOSITEWORKS pour la somme de 81 125 € 00 H.T.

Le 11 mai 2007 la société COMPOSITEWORKS a émis contre la société ANTEXIS une facture pour 90 231 € 67 H.T., dont 60 260 € 40 H.T. pour la peinture, qui a été payée.

Désignés en qualité d'experts par ordonnances sur requêtes des 13 février et 11 mai 2007, et par ordonnance de référé du 29 mai suivant, Messieurs [Q] [Y] et [R] [O] ont établi leur rapport le 25 février 2008.

Le 8 mai 2008 un devis de la société MONACO MARINE a été établi vis-à-vis de la société ANTEXIS pour carénage et peinture du navire à hauteur de 63 370 € 47. Un contrat pour la peinture (de marque ALEXSEAL) du navire a été conclu le 10 octobre suivant entre la société DIAMOND COATING et la société ANTEXIS pour le prix total de 95 000 € 00. Ces 2 prix additionnés correspondent à 158 370 € 47.

Le 5 mars 2008 la société COMPOSITEWORKS avait fait assigner la société DU PONT PERFORMANCE COATINGS FRANCE en paiement de 167 970 € 00. Un arrêt de cette Cour du 25 mai 2011, sur appel d'un jugement rendu le 3 septembre 2009 par le Tribunal de Commerce de MARSEILLE, a notamment condamné la seconde société à payer à la première la somme demandée, à titre de dommages et intérêts en raison des vices propres de la peinture et au regard de l'article 1382 du Code Civil. Le pourvoi de la société DU PONT PERFORMANCE COATINGS FRANCE a été rejeté par la Cour de Cassation dans un arrêt du 23 octobre 2012.

Le 17 mars 2011 la société ANTEXIS a fait assigner en paiement de la somme de

158 370 € 47, en visant la responsabilité contractuelle des articles 1134 et 1147 du Code Civil, la société COMPOSITEWORKS, laquelle a assigné en garantie le 4 avril la société DU PONT PERFORMANCE COATINGS FRANCE au visa des mêmes textes. Le Tribunal de Commerce de MARSEILLE par jugement du 21 juin 2013 a :

* dit recevable comme non prescrite l'action de la société ANTEXIS;

* condamné la société COMPOSITEWORKS à lui payer les sommes de :

- 60 260 € 40 en principal avec intérêts au taux légal et capitalisés à compter du 17 mars 2011;

- 5 000 € 00 au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile;

* dit recevable comme non prescrit l'appel en garantie de la société COMPOSITEWORKS à l'encontre de la société DU PONT PERFORMANCE COATINGS FRANCE;

* débouté la société COMPOSITEWORKS de cet appel en garantie;

* condamné la société COMPOSITEWORKS à payer à la société DU PONT PERFORMANCE COATINGS FRANCE la somme de 3 000 € 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile;

* condamné la société COMPOSITEWORKS aux dépens;

* ordonné pour le tout l'exécution provisoire;

* rejeté pour le surplus toutes autres demandes.

La S.A.S. DU PONT PERFORMANCE COATINGS FRANCE est aujourd'hui dénommée la S.A.S.U. AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE.

La S.A.S. COMPOSITEWORKS a régulièrement interjeté appel du jugement les 28 juin-1er juillet 2013. Concluant le 8 septembre 2015 elle soutient notamment que :

- les demandes de la société ANTEXIS sont prescrites par 1 an à compter de la découverte du vice (mai 2007), le rapport d'expertise étant du 25 février 2008 et l'assignation du 17 mars 2011; cette prescription existe que le vice soit d'emblée apparent (selon le jugement) ou initialement caché; cette société ne peut opter pour la responsabilité de droit commun des articles 1134 et 1147 du Code Civil afin de contourner les règles spéciales du Code des Transports; le sinistre n'est pas imputable à une inexécution contractuelle mais à un vice de la peinture, qui est celle commandée;

- la créance revendiquée par la société ANTEXIS est née après la fixation définitive du préjudice de la société COMPOSITEWORKS à 167 970 € 00 par l'arrêt du 25 mai 2011 (devis du 10 octobre 2008 non pris en compte par l'expertise judiciaire du 25 février précédent); la seconde société n'a pu recouvrer contre elle-même un préjudice subi par la première, cet arrêt répare le préjudice de la société COMPOSITEWORKS et non celui de la société ANTEXIS; faire droit à la thèse de la société AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE reviendrait à censurer cet arrêt, cette thèse ayant déjà été soumise par celle-là à la Cour; les 167 970 € 00 ont été déterminés à titre d'expert comme étant le préjudice et la société COMPOSITEWORKS et non un profit.

L'appelante la société COMPOSITEWORKS demande à la Cour, par application des articles 7 à 9 de la loi du 3 janvier 1967 et 480 du Code de Procédure Civile, de réformer le jugement et statuant à nouveau de :

- juger que les demandes de la société ANTEXIS sont prescrites et l'en débouter;

- subsidiairement condamner la société AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE à la relever et garantir de toute condamnation prononcée contre elle;

- condamner tout succombant au paiement de la somme de 10 000 € 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Concluant le 12 septembre 2013 la société ANTEXIS Limited répond notamment que:

- son action est recevable, car fondée non sur l'article L. 5113-5 du Code des Transports (prescription d'1 an), mais sur les articles 1134 et 1147 du Code Civil (prescription quinquennale); elle-même reproche à la société COMPOSITEWORKS non la défectuosité de la peinture appliquée, mais les choix opérés par celle-ci (sélection de ses 2 sous-traitants dont HIGH SPEC YACHTING, et préconisation d'une peinture DU PONT);

- son action est fondée : la société COMPOSITEWORKS ne conteste ni l'inadaptation de cette peinture, ni son application réalisée non conformément aux règles de l'art;

- pour la troisième application elle a dû payer les sommes de :

. 95 000 € 00 à la société DIAMOND COATING;

. 63 370 € 47 à la société MONACO MARINE,

soit un total de 158 370 € 47 qui constitue son préjudice; les contrats avec ces 2 sociétés ont été dénoncés à la société COMPOSITEWORKS.

L'intimée la société ANTEXIS demande à la Cour, vu les articles 1134 et 1147 du Code Civil, de :

* à titre principal :

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré son action non prescrite, et retenu le principe de la condamnation de la société COMPOSITEWORKS pour faute contractuelle engageant sa responsabilité;

- le réformer au surplus et statuant à nouveau;

- infirmer le jugement en ce qu'il condamne la société COMPOSITEWORKS à lui payer la somme de 63 370 € 47 [en réalité 60 260 € 40];

- condamner la même à lui payer la somme de 158 370 € 47 assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation avec et capitalisation en vertu de l'article 1154 du Code Civil;

* en tout état de cause condamner la société COMPOSITEWORKS à lui payer la somme de 15 000 € 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions du 17 novembre 2015 la S.A.S.U. AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE répond notamment que :

- par l'arrêt du 25 mai 2011 la société COMPOSITEWORKS a déjà reçu d'elle-même le remboursement des sommes pour travaux de peinture confiés à son sous-traitant la société HYDRA SUD SERVICES à hauteur de 63 000 € 00 H.T. (inclus dans les 167 970 € 00), et ne saurait aujourd'hui demander la garantie d'elle-même pour restituer à la société ANTEXIS les sommes qu'elle lui a indûment facturées;

- l'action de la société ANTEXIS repose sur une inexécution contractuelle au sens de l'article 1147 du Code Civil; cette société n'a subi aucun préjudice lié à un surcoût de la 3ème application de peinture; la même doit régler cette dernière, mais doit être remboursée des sommes versées à la société COMPOSITEWORKS au titre de la seule 1ère application défectueuse soit 60 260 € 40 H.T.;

- cette somme correspond aux 40 %, facturés par la société COMPOSITEWORKS à la société ANTEXIS, de ce qu'a réglé celle-là à la société HYDRA SUD SERVICES.

L'intimée la société AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE demande à la Cour, vu l'article 1351 du Code Civil, de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société COMPOSITEWORKS de son appel en garantie contre elle-même;

- condamner la même à lui verser une somme de 5 000 € 00 sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

La S.A.S. COMPOSITEWORKS a reconclu le 17 décembre 2015, la veille de l'ordonnance de clôture rendue le 18. Le 28 la S.A.S.U. AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE a conclu au rejet de ces conclusions faute d'avoir eu le temps d'y répliquer. Le 4 janvier 2016 la S.A.S. COMPOSITEWORKS a conclu à la recevabilité de ses conclusions faute de prétention nouvelle et d'argument nouveau.

----------------------

M O T I F S D E L ' A R R E T :

Sur la procédure :

L'article 15 du Code de Procédure Civile impose aux parties de se faire connaître 'en temps utile le moyens de fait sur lesquelles elles fondent leurs prétentions'. La société COMPOSITEWORKS, en concluant la veille de l'ordonnance de clôture pour répondre aux conclusions de la société AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE notifiées 1 mois auparavant, n'a pas respecté ce texte. Ses conclusions litigieuses sont donc rejetées.

Sur le fond :

Il appartient au Juge, en vertu de l'article 12 du Code de Procédure Civile, de 'donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée'. Par suite la Cour, bien que tant la société ANTEXIS que la société COMPOSITEWORKS aient visé dans leurs assignations les articles 1134 et 1147 du Code Civil, n'est pas tenue de faire application de ces derniers au litige puisqu'en appel ces parties ont également discuté sur la prescription en matière de navire en invoquant les textes applicables.

Selon l'article L. 5113-6 du Code des Transports 'L'entreprise qui a procédé à la réparation d'un navire est garante des vices cachés résultant de son travail', l'action se prescrivant par un an à compter de la date de découverte du vice (article L. 5113-5). Ces textes, parce qu'ils sont spécifiques à la matière des navires, dérogent au régime de droit la responsabilité de droit commun de l'article 1134 du Code Civil, et à la prescription de cinq ans fixée par l'article 2224.

Dans leur rapport du 25 février 2008, non contesté par les parties dont la société ANTEXIS, les 2 experts judiciaires relèvent la présence anormale d'agglomérats de pigmentation dans la base de la peinture de la société DU PONT PERFORMANCE COATINGS FRANCE appliquée à l'initiative de la société COMPOSITEWORKS, ainsi que des problèmes techniques inhérents à cette peinture dont les lots sont défectueux. Ces conclusions expertales signifient que les travaux réalisés sur le navire de la société ANTEXIS avec la peinture fournie par la société DU PONT PERFORMANCE COATINGS FRANCE, aujourd'hui la société AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE, ont entraîné des vices cachés résultant du travail de leur auteur la société COMPOSITEWORKS.

Ces vices ont été connus de la société ANTEXIS au plus tard au jour de ce rapport le 25 février 2008, ce qui lui imposait d'assigner la société COMPOSITEWORKS dans l'année soit avant le 25 février 2009; or cette assignation est intervenue le 17 mars 2011, soit bien après le délai de prescription d'un an applicable.

C'est donc à bon droit que la société COMPOSITEWORKS demande à la Cour de dire et juger que les demandes de la société ANTEXIS sont prescrites; le jugement est par suite infirmé.

La demande de relevé et garantie formée par la société COMPOSITEWORKS contre la société AXALTA COATING SYSTEMS FRANCE est en conséquence sans objet; mais l'équité fait obstacle à la demande de la seconde société contre la première sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

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D E C I S I O N

La Cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire.

Rejette les conclusions prises par la S.A.S. COMPOSITEWORKS le 17 décembre 2015.

Infirme le jugement du 21 juin 2013, et juge prescrites les demandes de la société ANTEXIS Limited contre la S.A.S. COMPOSITEWORKS.

Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile condamne la société ANTEXIS Limited à payer à la S.A.S. COMPOSITEWORKS une indemnité de 5 000 € 00 au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens.

Rejette toutes autres demandes.

Condamne la société ANTEXIS Limited aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec application de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Le GREFFIER. Le PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 13/13505
Date de la décision : 25/02/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 02, arrêt n°13/13505 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-25;13.13505 ?
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