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23/02/2016 | FRANCE | N°15/00340

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre a, 23 février 2016, 15/00340


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1re Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 23 FEVRIER 2016

A.V

N° 2016/













Rôle N° 15/00340







Société SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE [C] & ASSOCIES





C/



[N] [V]

[H] [I]





















Grosse délivrée

le :

à :Me DE MICHELIS

ME CHERFILS

CAMPESTRE













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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 04 Décembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/00113.





APPELANTE



SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE [C] & ASSOCIES agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité a...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1re Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 23 FEVRIER 2016

A.V

N° 2016/

Rôle N° 15/00340

Société SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE [C] & ASSOCIES

C/

[N] [V]

[H] [I]

Grosse délivrée

le :

à :Me DE MICHELIS

ME CHERFILS

CAMPESTRE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 04 Décembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/00113.

APPELANTE

SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE [C] & ASSOCIES agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit [Adresse 4]

représentée par Me Véronique DEMICHELIS de la SCP DRUJON D'ASTROS BALDO & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée par Maître DI VISIA, de la SCP COULOMB DI VISIA CHIARINI,avocat au barreau de NIMES, plaidant

INTIMES

Madame [N] [V], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Bernard CANCIANI, avocat au barreau de PARIS, plaidant

Monsieur [H] [I], demeurant [Adresse 2] [Adresse 3]

représenté par Me Olivier CAMPESTRE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 19 Janvier 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Anne VIDAL, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Anne VIDAL, Présidente

Monsieur Olivier BRUE, Conseiller

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Février 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Février 2016,

Signé par Madame Anne VIDAL, Présidente et Madame Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Mme [N] [V], qui avait acquis un automate de biochimie pour son laboratoire d'analyses médicales en 1998, a obtenu, à la suite de plusieurs décisions rendues par le tribunal de grande instance de Nanterre et la cour d'appel de Versailles, que soient prononcées :

Par arrêt du 16 octobre 2008 rendu sur renvoi de cassation, la résolution du contrat de vente conclu avec la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES et la condamnation de cette société à lui payer la somme de 76.953,75 euros à titre de dommages et intérêts, outre intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2003 avec capitalisation,

Par arrêt du 11 février 2010 rendu sur renvoi de cassation, la résiliation à effet du 29 janvier 2001 du contrat de crédit-bail consenti par la société BNP PARIBAS LEASE pour le financement de ce matériel, Mme [N] [V] étant déboutée de sa demande en remboursement des loyers perçus par la société BNP PARIBAS LEASE.

Suivant acte d'huissier du 12 octobre 2011, Mme [N] [V] a fait assigner M. [H] [I] devant le tribunal de grande instance de Nice en paiement de la somme de 157.603,51 euros de dommages et intérêts, lui reprochant d'avoir clôturé de manière prématurée les opérations de liquidation amiable de la société LABBO IMMUNO SYSTEMES, anciennement BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES, alors que la procédure était encore en cours, de sorte qu'elle n'a pu être payée. M. [H] [I] a appelé en garantie la société d'expertise comptable [C] et associés suivant acte d'huissier du 16 mai 2012 pour être garanti par elle de toute condamnation pouvant être prononcée à son égard. Les procédures ont été jointes.

Par jugement en date du 4 décembre 2014, le tribunal de grande instance de Nice a :

Sur la demande principale,

Déclaré la demande de Mme [N] [V] régulière et recevable,

Condamné M. [H] [I] à payer à Mme [N] [V] à titre de dommages et intérêts les sommes de 76.953,75 euros avec intérêts légaux à compter du 5 mai 2003 capitalisés par application de l'article 1154 du code civil et de 63.000 euros avec intérêts légaux à compter de la signification de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 16 octobre 2008,

Condamné M. [H] [I] au paiement d'une somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

Sur l'appel en garantie :

Condamné la société d'expertise comptable [C] et associés à garantir M. [H] [I] de l'entière condamnation prononcée contre lui au bénéfice de Mme [N] [V],

Condamné la société d'expertise comptable [C] et associés aux dépens,

Débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Il a retenu que Mme [N] [V] avait engagé sa procédure dans le délai de la prescription triennale de l'article L 273-12 du code de commerce applicable à l'action en responsabilité contre le liquidateur ; que M. [H] [I] ne pouvait clôturer les opérations de liquidation sans s'assurer du paiement de l'intégralité du passif de la société et qu'il ne pouvait ignorer le litige opposant la société LABBO IMMUNO SYSTEMES, anciennement BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES, à Mme [N] [V] ; que la société d'expertise comptable [C] et associés, en tant que professionnelle, aurait dû questionner le liquidateur amiable sur l'existence des procédures en cours et attirer son attention sur leur sort ; que le préjudice de Mme [N] [V] est égal au montant des dommages et intérêts alloués et au montant de l'astreinte dont le chiffrage à 60.000 euros n'est pas contesté par les défendeurs.

La société d'expertise comptable [C] et associés a interjeté appel de cette décision suivant déclaration en date du 13 janvier 2015.

---------------------

La société d'expertise comptable [C] et associés, suivant conclusions signifiées le 3 avril 2015, demande à la cour de réformer le jugement et de :

A titre principal, au visa des articles 122 et suivants du code de procédure civile et L 237-12 et L 225-254 du code de commerce, 

Dire que l'appel en garantie de la concluante est sans objet, l'action principale de Mme [N] [V] étant irrecevable pour prescription, ainsi que pour avoir assigné une personne sans lien de droit avec elle, et infondée en raison de l'absence de préjudice réel et certain en lien de causalité avec le reproche formulé contre le liquidateur,

A titre subsidiaire, au visa de l'article 1147 du code civil,

Dire que la concluante n'a commis aucun manquement à ses obligations contractuelles et qu'il n'est justifié d'aucun préjudice indemnisable à sa charge,

Débouter en conséquence M. [H] [I] de son appel en garantie,

Condamner tout succombant à lui verser une somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ses moyens sont les suivants :

Contre l'action principale de Mme [N] [V] :

L'action en responsabilité contre le liquidateur se prescrit par trois ans à compter du fait dommageable qui est ici la clôture des opérations de liquidation (soit le 30 juin 2006 pour la dissolution anticipée et le 8 décembre 2006 pour la radiation du registre du commerce et des sociétés), et non la décision de condamnation par la cour d'appel de Versailles ;

De surcroît, l'interlocuteur de Mme [N] [V] dans la procédure était la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES, cessionnaire du fonds de commerce de la société LABBO IMMUNO SYSTEMES ;

Il n'est pas justifié qu'en l'absence de clôture des opérations de liquidation, Mme [N] [V] aurait recouvré sa créance contre la société ;

Contre l'appel en garantie de M. [H] [I] :

L'expert-comptable n'est tenu que d'une obligation de moyens, sa faute doit être prouvée et les premiers juges ont inversé la charge de la preuve ; or, M. [H] [I] n'établit pas l'existence d'une faute dans l'accomplissement de la mission confiée et d'un lien de causalité avec le préjudice invoqué.

M. [H] [I], aux termes de ses conclusions signifiées le 8 avril 2015 formant appel incident du jugement déféré, demande à la cour de réformer le jugement déféré et de :

Déclarer l'action de Mme [N] [V] contre lui prescrite par application de l'article L 122-254 du code de commerce,

Dire que l'interlocuteur de Mme [N] [V] était la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES, cessionnaire du fonds de commerce de la société LABBO IMMUNO SYSTEMES,

En conséquence, réformer la décision en ce qu'elle a déclaré M. [H] [I] responsable en sa qualité de liquidateur amiable,

Dire au surplus que Mme [N] [V] ne justifie pas d'un préjudice réel et certain indemnisable et la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour confirmerait la décision,

Confirmer la décision en ce qu'elle a dit que la société d'expertise comptable [C] et associés était condamnée à garantir M. [H] [I] de l'entière condamnation prononcée contre lui au bénéfice de Mme [N] [V],

Condamner solidairement Mme [N] [V] et la société d'expertise comptable [C] et associés à lui payer la somme de 20.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. 

Il soutient, à l'appui de son appel incident, les moyens suivants, identiques à ceux présentés par la société d'expertise comptable [C] et associés :

Le fait dommageable faisant courir le délai de prescription de trois ans de l'article L 225-254 du code de commerce est la clôture des opérations de liquidation de la société LABBO IMMUNO SYSTEMES et non les décisions de condamnation, ou, si tel était le cas, serait à tout le moins la décision de la Cour de cassation du 16 janvier 2007,

L'unique interlocuteur de Mme [N] [V] dans la procédure est la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES, cessionnaire du fonds de commerce de la société LABBO IMMUNO SYSTEMES,

Il n'est pas justifié qu'en l'absence de clôture des opérations de liquidation, Mme [N] [V] aurait pu être payée de sa créance.

Il fait valoir, sur la confirmation du jugement à l'égard de la société d'expertise comptable [C] et associés, que c'est cette société qui a procédé à toutes les formalités de liquidation amiable de la société LABBO IMMUNO SYSTEMES et qu'elle ne pouvait pas ne pas être au courant du procès contre Mme [N] [V], sachant que M. [X], représentant de la société d'expertise comptable [C] et associés, était l'expert-comptable de la société LABBO IMMUNO SYSTEMES et assurait la direction générale de la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES.

Mme [N] [V], en l'état de ses écritures signifiées le 3 juin 2015, conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a :

condamné M. [H] [I] à lui payer, à titre de dommages et intérêts, la somme de 76.953,75 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2003 et capitalisation par application de l'article 1154 du code civil, et celle de 63.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 16 octobre 2008,

condamné M. [H] [I] à lui payer la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la société d'expertise comptable [C] et associés à relever et garantir M. [H] [I] de toutes les condamnations prononcées contre lui ainsi qu'aux dépens,

et sollicite en outre la condamnation de M. [H] [I] et de la société d'expertise comptable [C] et associés à lui payer la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens d'appel.

Elle fait valoir :

sur la prescription : le délai n'a commencé à courir qu'à compter de la date à laquelle le montant de sa créance contre la société LABBO IMMUNO SYSTEMES, anciennement dénommée société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES, a été définitivement fixé par l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 16 octobre 2008 passé en force de chose jugée ;

sur le fond : M. [H] [I] a commis une faute en clôturant les opérations de liquidation amiable de la société LABBO IMMUNO SYSTEMES, auparavant dénommée BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES, le 13 novembre 2006, alors que la procédure l'opposant à Mme [N] [V] était encore en cours puisque le pourvoi contre le premier arrêt de la cour d'appel de Versailles de 2005 était pendant, en violation de l'obligation qui lui est faite d'apurer intégralement le passif  ; cette faute est d'autant plus grave qu'il a été successivement directeur général et président du conseil d'administration de la société LABBO IMMUNO SYSTEMES ;

en raison de cette clôture prématurée, Mme [N] [V] n'a pu être payée par la société LABBO IMMUNO SYSTEMES des sommes auxquelles cette dernière a été définitivement condamnée par l'arrêt du 16 octobre 2008.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 5 janvier 2016.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur l'action principale de Mme [N] [V] contre M. [H] [I] :

Attendu que le jugement a précisément repris la chronologie des décisions de justice ayant émaillé la procédure engagée par Mme [N] [V] contre la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES, vendeur d'un appareil de biochimie défectueux et qu'il convient de s'y référer ;

Que, par arrêt en date du 16 octobre 2008, devenu irrévocable sur ce point, la cour d'appel de Versailles a confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 5 mai 2003 ayant prononcé la résolution du contrat de vente et a condamné la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES à reprendre l'appareil vendu à ses frais et risques, en y ajoutant une astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt, et à verser à Mme [N] [V] la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et, le réformant pour le surplus, a condamné cette société à payer à Mme [N] [V] la somme de 76.953,75 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2003 capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;  

Que Mme [N] [V], considérant que les opérations de liquidation amiable de la société LABBO IMMUNOSYSTEMES ont été clôturées le 8 décembre 2006, au mépris de la procédure en cours, a fait assigner M. [H] [I], liquidateur amiable, en responsabilité en réparation du préjudice résultant pour elle de l'impossibilité d'obtenir le paiement de sa créance par la société ;

Attendu que c'est à juste titre que le tribunal a déclaré l'action de Mme [N] [V] recevable en ce qu'elle est dirigée contre le liquidateur de la société LABBO IMMUNOSYSTEMES ; qu'en effet, l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 16 octobre 2008 a été rendu contre la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES, anciennement dénommée LABBO IMMUNOSYSTEMES, représentée à l'instance par M. [H] [W] [I], désigné en qualité de mandataire ad'hoc de la société LABBO IMMUNOSYSTEMES par ordonnance du président du tribunal de commerce de Salon-de-Provence du 18 mars 2008 ;

Attendu que c'est également à juste titre et à bon droit que le tribunal a déclaré l'action recevable en rejetant le moyen de prescription soulevé par les défendeurs ;

Qu'en effet, si les dispositions combinées des articles L 237-12 et L 225-252 du code de commerce prévoient que l'action en responsabilité engagée contre le liquidateur amiable d'une société anonyme se prescrit par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation, et si la prescription de cette action engagée en raison d'un préjudice résultant de la radiation de la société court à compter de cette dernière, dès lors que, publiée au registre du commerce et des sociétés, elle n'est pas un fait dissimulé, il est cependant admis que le délai de prescription ne peut courir à l'encontre d'un créancier tant que celui-ci a été dans l'impossibilité d'agir en dommages-intérêts contre le liquidateur ; que dès lors, la prescription ne peut courir que du jour où les droits du créancier ont été définitivement reconnus par une décision de justice ;

Qu'ainsi, Mme [N] [V] n'ayant bénéficié d'une condamnation définitive et irrévocable contre la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES que par l'effet de l'arrêt du 16 octobre 2008, son action, engagée par acte d'huissier du 12 octobre 2011, n'était pas prescrite ;

Attendu qu'est fautif le fait pour le liquidateur d'une société de clôturer les opérations de liquidation et de procéder à la radiation de celle-ci sans s'assurer du paiement de l'intégralité du passif ;

Qu'il est avéré, en lecture de l'extrait Kbis de la SA LABBO IMMUNOSYSTEMES au registre du commerce et des sociétés de Salon-de-Provence, que la dissolution anticipée de la société LABBO IMMUNOSYSTEMES a été décidée à compter du 30 juin 2006 et que M. [H] [I], président du conseil d'administration, a été nommé liquidateur et a clôturé les opérations le 8 décembre 2006 ;

Que, cependant, la procédure opposant Mme [N] [V] à la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES, anciennement dénommée LABBO IMMUNOSYSTEMES, était en cours en raison du pourvoi interjeté contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 15 avril 2005, ce que savait parfaitement M. [H] [I], président du conseil d'administration de cette société, représentant alors celle-ci en justice devant la cour d'appel de Versailles ;

Que la faute reprochée à M. [H] [I] est en conséquence avérée ;

Attendu que Mme [N] [V] chiffre son préjudice à la somme de 76.953,75 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2003 capitalisés par la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES et à celles de 60.000 euros correspondant au montant de l'astreinte de 1.000 euros par jour pendant deux mois et de 3.000 euros correspondant à l'indemnité allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, toutes deux augmentées des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles ;

Que le tribunal a fait droit à cette réclamation pour sa totalité en constatant que ni M. [H] [I] ni la société d'expertise comptable [C] n'ont discuté le montant sollicité au titre de l'astreinte ;

Que M. [H] [I] oppose qu'il n'est pas justifié qu'en l'absence de clôture des opérations de liquidation, Mme [N] [V] aurait pu recouvrer sa créance, de sorte que son préjudice est incertain et sans lien de causalité avec la faute qui lui est reprochée ;

Mais qu'il convient de rappeler que, dans le cadre de la liquidation amiable d'une société, le liquidateur, face à des créances litigieuses, doit, jusqu'au terme des procédures en cours, les garantir par une provision, et qu'en l'absence d'actif social suffisant pour répondre du montant des condamnations éventuellement prononcées contre la société, il lui appartient de différer la clôture ou de solliciter l'ouverture d'une procédure collective ; qu'en l'absence de déclaration de cessation des paiements et de documents justifiant du produit de la réalisation de l'actif et de son affectation, la preuve de l'impossibilité alléguée de recouvrement par le créancier du montant des condamnations prononcées à son profit n'est pas rapportée ;

Que dès lors, il y a lieu, à défaut de démonstration que l'actif social était insuffisant pour répondre du montant des condamnations prononcées contre la société BIOCHEM IMMUNO SYSTEMES, anciennement société LABBO IMMUNOSYSTEMES, de condamner le liquidateur, M. [H] [I], au paiement de l'intégralité des sommes dues par la société liquidée ;

Que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a condamné M. [H] [I] à payer à Mme [N] [V] une somme correspondant à l'intégralité des condamnations prononcées à son bénéfice ;

Sur le recours en garantie de M. [H] [I] contre la société d'expertise comptable [C] :

Attendu qu'il ressort de l'attestation établie le 7 mars 2006 par M. [X], expert-comptable, gérant de la société d'expertise comptable [C], que celle-ci a été chargée par M. [H] [I] d'effectuer les formalités de la liquidation de la société LABBO IMMUNOSYSTEMES ;

Que M. [H] [I] prétend qu'il appartenait à cette société d'expertise comptable, dans le cadre de sa mission, d'intégrer dans les opérations de liquidation le litige opposant la société à Mme [N] [V] ; qu'il a été retenu par le tribunal qu'elle avait commis une faute pour ne pas avoir averti le liquidateur des conséquences d'une clôture des opérations de liquidation avant la fin de procédure dont elle ne justifiait pas ne pas avoir eu connaissance ;

Mais qu'il appartient à M. [H] [I] qui entend mettre en jeu la responsabilité de la société d'expertise comptable [C], de démontrer la faute commise par celle-ci et donc d'établir qu'elle aurait eu connaissance de la procédure opposant la société LABBO IMMUNOSYSTEMES à Mme [N] [V] et de la créance réclamée par cette dernière et qu'elle aurait, malgré ce, omis d'en tenir compte dans l'accomplissement des formalités de liquidation et à tout le moins négligé de mettre en garde M. [H] [I] des conséquences d'une clôture prématurée des opérations de liquidation ;

Que force est de constater que M. [H] [I] ne produit aucune pièce permettant de considérer que la société d'expertise comptable [C] avait été informée de l'existence du contentieux ; qu'il affirme dans ses écritures que M. [X] était l'expert-comptable de la société LABBO IMMUNOSYSTEMES depuis 2001 et qu'il assurait la direction générale de la société BIOTECH INTERNATIONAL, société à laquelle la société LABBO IMMUNOSYSTEMES avait donné son fonds en location-gérance en 2003, mais qu'aucune pièce n'en atteste ; qu'il indique également que la société d'expertise comptable [C] avait son siège à la même adresse que la société LABBO IMMUNOSYSTEMES, mais que cette identité d'adresse n'implique pas qu'elle ait pu avoir connaissance des courriers adressés à cette société et concernant le litige [V] ; qu'enfin, il ne peut être tiré aucune déduction du silence de la société d'expertise comptable [C] à réception du courrier de M. [H] [I] l'informant des poursuites de Mme [N] [V] contre lui ;

Qu'il convient en conséquence, infirmant le jugement sur ce point, de débouter M. [H] [I] de son appel en garantie contre la société d'expertise comptable [C] ;

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS,

la cour statuant publiquement, contradictoirement,

et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société d'expertise comptable [C] à relever et garantir M. [H] [I] des condamnations prononcées contre lui au bénéfice de Mme [N] [V] ;

L'infirme également en ce qu'il a condamné la société d'expertise comptable [C] aux dépens de première instance ;

Statuant à nouveau des chefs réformés,

Déboute M. [H] [I] de son appel en garantie contre la société d'expertise comptable [C] ;

Condamne M. [H] [I] aux entiers dépens de première instance ;

Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [H] [I] à payer à Mme [N] [V] une somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne M. [H] [I] à payer à la société d'expertise comptable [C] une somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le condamne aux dépens d'appel lesquels seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre a
Numéro d'arrêt : 15/00340
Date de la décision : 23/02/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°15/00340 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-23;15.00340 ?
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