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21/01/2016 | FRANCE | N°13/17662

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 21 janvier 2016, 13/17662


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre C



ARRÊT AU FOND

DU 21 JANVIER 2016



N° 2016/ 62













Rôle N° 13/17662







[L] [T]

[X] [Y] épouse [T]

SCI LE MOULIN DE NICE NORD





C/



[B] [T]

[L] [P]

[Z] [P]

[R] [Q]

SA BANQUE PATRIMOINE IMMOBILIER





















Grosse délivrée

le :

à :COURT MENIGOZ

GUEDJr>
DUCRAY

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 12 Juillet 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 10/03124.





APPELANTS



Monsieur [L] [T], agissant tant à titre personnel qu'en qualité de gérant de la SCI Le Moulin de Nice no...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 21 JANVIER 2016

N° 2016/ 62

Rôle N° 13/17662

[L] [T]

[X] [Y] épouse [T]

SCI LE MOULIN DE NICE NORD

C/

[B] [T]

[L] [P]

[Z] [P]

[R] [Q]

SA BANQUE PATRIMOINE IMMOBILIER

Grosse délivrée

le :

à :COURT MENIGOZ

GUEDJ

DUCRAY

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 12 Juillet 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 10/03124.

APPELANTS

Monsieur [L] [T], agissant tant à titre personnel qu'en qualité de gérant de la SCI Le Moulin de Nice nord

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 1] (33)

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Rachel COURT-MENIGOZ de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assisté de Me Rachel COURT-MENIGOZ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituant Me Emmanuel ROUART, avocat au barreau de PARIS

Madame [X] [Y] épouse [T]

née le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 2] (83)

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Rachel COURT-MENIGOZ de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Rachel COURT-MENIGOZ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituant Me Emmanuel ROUART, avocat au barreau de PARIS

La SCI Le Moulin de Nice Nord agissant pas son représentant légal, dont le siège est sis [Adresse 2]

représentée par Me Rachel COURT-MENIGOZ de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Rachel COURT-MENIGOZ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituant Me Emmanuel ROUART, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [B] [T], demeurant [Adresse 3]

défaillant

Monsieur [L] [P], demeurant [Adresse 4]

défaillant

Monsieur [Z] [P], demeurant [Adresse 5]

défaillant

M. [R] [Q], notaire associé de la SCP [Q], demeurant [Adresse 6]

représenté par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assisté de Me Philippe DUTERTRE, avocat au barreau de NICE

La Banque patrimoine immobilier, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, dont le siège est sis [Adresse 7]

représentée et assistée de Me Marc DUCRAY de la SELARL HAUTECOEUR - DUCRAY, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 15 Décembre 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madam Hélène COMBES, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Hélène COMBES, Président

Madame Françoise DEMORY-PETEL, Conseiller

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Janvier 2016

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Janvier 2016,

Signé par Madame Hélène COMBES, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

En 2006, [L] [T], [Z] [P] et [B] [T] ont constitué la SCI Le Moulin de Nice Nord, dont les gérants étaient [Z] [P] et [B] [T].

Par acte authentique dressé le 17 octobre 2006 par Maître [R] [Q], [L] [P] et son épouse [Q] [W] ont vendu à la SCI le Moulin de Nice Nord, un bien immobilier situé à Nice au prix de 600.000 euros financé par un prêt de la Banque Patrimoine et Immobilier (BPI).

Ce prêt comprenait deux périodes :

- un différé sur 8 ans (in fine) avec remboursement partiel en fin de période de la somme de 178.000 euros placée sur un contrat d'assurance vie,

- une période d'amortissement de 12 ans à raison de 144 échéances mensuelles de 5.408,60 euros

Son remboursement a été garanti par les cautionnements solidaires de [B] [T], d'[Z] [P] et de son épouse, [P] [I], de [L] [T] et de son épouse [X] [Y] épouse [T].

A compter de 2007, la SCI le Moulin de Nice Nord a cessé de payer les échéances et la BPI a prononcé la déchéance du terme le 5 février 2009.

Le 28 juin 2009, [B] [T] a été révoqué de ses fonctions de gérant et [L] [T] nommé pour le remplacer.

Par acte du 26 avril 2010, les époux [L] [T] et [X] [Y] épouse [T] et la SCI le Moulin de Nice Nord ont assigné [B] [T], [L] [P], [Z] [P], la BPI et Maître [R] [Q] devant le tribunal de grande instance de Nice pour obtenir leur condamnation à leur payer à titre de dommages intérêts les sommes de 380.000 euros et 50.000 euros.

Ils faisaient valoir que la vente était intervenue à un prix manifestement exagéré et invoquaient les man'uvres de [L] [P], [Z] [P] et [B] [T] destinées à surprendre leur consentement.

Les époux [L] [T] et [X] [Y] épouse [T] invoquaient également des engagements de caution disproportionnés par rapport à leurs facultés contributives.

Par jugement du 12 juillet 2013, le tribunal a débouté [L] [T], [X] [Y] épouse [T] et [Z] [P] de leurs demandes et a condamné :

- [L] [T], [X] [Y] épouse [T] et la SCI le Moulin de Nice Nord à payer à Maître [R] [Q] la somme de 2.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- [L] [T], [X] [Y] épouse [T], [Z] [P] et la SCI le Moulin de Nice Nord à payer à Maître [R] [Q] la somme de 2.000 euros chacun au titre des frais irrépétibles.

[L] [T], [X] [Y] épouse [T] et la SCI le Moulin de Nice Nord ont relevé appel le 29 août 2013.

Dans leurs dernières conclusions du 13 novembre 2015, ils demandent à la cour d'infirmer le jugement et :

- de condamner in solidum [Z] [P], [B] [T], [L] [P], la BPI et Maître [R] [Q] à payer à la SCI le Moulin de Nice Nord la somme de 380.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- de condamner in solidum [Z] [P], [B] [T], [L] [P], la BPI et Maître [R] [Q] à payer à [L] [T] et [X] [Y] épouse [T] la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- de leur allouer 6.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Ils rappellent les circonstances dans lesquelles [B] [T] a demandé à son frère [L] [T] de s'associer avec lui dans le cadre d'une opération immobilière consistant dans l'acquisition à nice d'une villa propriété de [L] [P] et de son épouse.

Ils indiquent que c'est en vue de cette acquisition qu'a été constituée la SCI le Moulin de Nice Nord entre [Z] [P], père de [L] [P], [B] [T] et [L] [T].

Ils font essentiellement valoir que le prix de vente de la villa (600.000 euros) était manifestement exagéré puisque les estimations ont révélé qu'elle avait une valeur de 220.000 euros en 2006, ce qui signifie qu'elle a été vendue à un prix trois fois supérieur.

Ils soutiennent que les fautes suivantes ont été commises :

- les fautes de gestion des cogérants de la SCI, [Z] [P] et [B] [T] qui ont fait acquérir à la SCI un bien immobilier dont le prix était nettement surévalué, puis qui se sont abstenus de payer les échéances du prêt

- les manoeuvres frauduleuses employées par le vendeur [L] [P],

- le non respect de son obligation de conseil et de mise en garde par la BPI qui ne s'est pas assurée du caractère plausible de la valeur vénale du bien financé et qui n'a pas vérifié les capacités financières de l'emprunteur et des cautions,

- le manque de vigilance du notaire et son manquement à son devoir de conseil, d'information et de mise en garde.

Maître [R] [Q] conclut à la confirmation du jugement et réclame en plus des dommages-intérêts alloués en première instance 8.000 euros supplémentaires et 4.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Il conteste toute solidarité entre le notaire, les parties à l'acte, la banque ou les associés de la SCI et fait valoir qu'il ne pourrait répondre que des conséquences de ses propres manquements s''ils existaient, ce qui n'est pas le cas.

Il observe que l'action des époux [T] repose sur l'affirmation que le prix de vente était sans commune mesure avec la valeur du bien, ce qui n'est pas établi.

Il soutient qu'il n'avait de surcroît aucun devoir de conseil sur le montant du prix sauf lésion manifeste et que son devoir de conseil portait uniquement sur les conséquences juridiques de l'acte dès lors qu'il a été tenu à l'écart de la négociation.

Il indique qu'il n'a été requis que pour recevoir l'acte authentique et que c'est bien avant sa saisine que [L] [T] et [B] [T] en tant qu'associés de la SCI ont formulé une demande de financement auprès de la BPI.

Il ajoute que [L] [T] et son épouse ont eu toute latitude pour faire les vérifications sur la valeur de la villa, bien avant de s'associer, d'acheter l'immeuble et de se porter cautions.

Il rappelle que l'opération avait un caractère familial, ce qui excluait a priori tout risque de tromperie.

Il conteste tout lien de causalité entre un prétendu défaut de conseil sur le prix et le préjudice invoqué.

Il précise que l'augmentation de sa demande de dommages-intérêts est justifiée par les allégations injurieuses des appelants.

La BPI conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et réclame 4.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Elle réplique qu'elle a parfaitement respecté son obligation de mise en garde envers la SCI le Moulin de Nice Nord, que sa responsabilité n'est nullement engagée envers les cautions et soutient pour ce faire :

- que l'obligation de mise en garde n'impose pas au prêteur de vérifier la valeur vénale du bien, ce qui incombe à l'emprunteur,

- que les emprunteurs ont pu prendre connaissance de la différence existant entre le prix d'acquisition du bien en 2002 et de revente en 2006,

- que la banque pouvait parfaitement se fier aux documents transmis et faire confiance au professionnel qui avait réalisé l'estimation du bien et de sa rentabilité locative,

- que le crédit accordé à la SCI était adapté aux facultés contributives de chacune des cautions qui étaient cinq,

- que le bien immobilier devait avoir un usage locatif et un contrat de location avait été conclu pour un loyer de 3.500 euros par mois,

- que si l'emprunteur a pu rembourser les échéances pendant deux ans, c'est que le crédit était réaliste.

Par acte du 12 décembre 2013, [Z] [P] a été assigné à sa personne devant la cour d'appel à la requête des époux [T] et de la SCI le Moulin de Nice Nord, puis par deux actes des 31 janvier 2014 et 15 juillet 2014, il a été assigné dans les formes de l'article 656 du code de procédure civile par la BPI et Maître [R] [Q], mais n'a pas constitué avocat.

[L] [P] assigné le 11 décembre 2013 dans les formes de l'article 659 du code de procédure civile et [B] [T] assigné le 9 décembre 2013 à une personne présente à domicile, n'ont pas constitué avocat.

Il sera statué par défaut.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 décembre 2015.

DISCUSSION

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées.

Selon acte notarié du 17 octobre 2006, [L] [P] et son épouse, non présente à la procédure, ont vendu à la SCI le Moulin de Nice Nord dont les trois associés égalitaires étaient [L] [T], [Z] [P] et [B] [T] - les deux derniers étant également gérants -, une maison de ville avec terrain attenant située à [Adresse 8] au prix de 600.000 euros.

Le prix de vente a été intégralement financé par la BPI. [B] [T], les époux [Z] [P], [L] [T] et son épouse [X] [Y] se sont constitués cautions solidaires de la SCI le Moulin de Nice Nord envers la banque, prêteur.

Il est mentionné en page 20 de l'acte notarié que le bien a été acquis en 2002 au prix de 114.337 euros.

Les demandes que la SCI le Moulin de Nice Nord et les époux [L] et [X] [T] formulent à l'encontre du vendeur, de ses premiers gérants, du notaire et de la banque relèvent de régimes différents, mais elles procèdent toutes de l'affirmation selon laquelle le prix de vente de 600.000 euros est trois fois supérieur à la valeur du bien.

C'est sur ce point qu'il convient de statuer dans un premier temps.

Certes, ainsi que le souligne Maître [R] [Q], [B] [T] a été destinataire avant l'opération d'une estimation du cabinet Lambert-Laurent selon laquelle le bien avait une valeur de 660.000 euros, mais cet avis exposé en 4 lignes n'est nullement étayé.

Le rapport d'expertise établi sur 22 pages par Madame [X] au mois de septembre 2009, soit trois ans après la vente, comporte la description des méthodes d'évaluation employées, la définition de la valeur vénale, un descriptif précis de la situation et de l'environnement du bien, la description du bâti, le rappel des surfaces (soit une surface habitable de 84,10 m²), les conditions d'occupation et mentionne des termes de comparaison avec des maisons individuelles dans le secteur.

L'expert en conclut que la valeur vénale du bien au 17 octobre 2006 était de 220.000 euros et qu'elle est de 260.000 euros au jour de l'établissement de son rapport.

Bien que ce rapport n'ait pas été établi contradictoirement, il est s'agissant de la valeur du bien, la seule pièce argumentée produite aux débats et l'estimation lapidaire du cabinet Lambert-Laurent, n'est manifestement pas sérieuse, ne serait-ce que parce qu'elle assimile la surface du terrain (02a 08 ca), à celle de la villa dont la surface habitable mesurée par l'expert sur trois niveaux est en réalité de 84,10 m² soit 26,71 m² pour le rez de jardin, 18,38 m² pour le rez de chaussée et 39,01 m² pour le premier étage.

Il convient de retenir qu'au mois d'octobre 2006, la valeur vénale du bien était de 220.000 euros.

Contrairement à ce que soutient Maître [R] [Q], ce ne sont pas les travaux réalisés après la vente qui ont entraîné une perte importante de valeur vénale.

En effet, même si Madame [X] note dans son rapport qu'il y a à chaque niveau un très mauvais développement des pièces, elle n'en conclut pas moins à une augmentation de la valeur du bien entre 2006 et 2009.

Les termes de comparaison mentionnés en page 19 du rapport confortent la valorisation de l'expert.

Au vu de ce rapport qui n'est contredit par aucune autre pièce, la preuve du caractère exagéré du prix est rapportée.

Il convient dans ces conditions d'analyser les demandes, non dans leur globalité comme le font les appelants, mais au regard de chaque demandeur et de chacune des parties envers lesquelles elles sont présentées.

1 - Sur la demande de la SCI Le Moulin de Nice Nord

à l'égard de [L] [P]

La SCI le Moulin de Nice Nord fonde sa demande à l'encontre du vendeur sur les manoeuvres dolosives dont elle prétend avoir été victime.

Mais le seul avis de valeur du cabinet Lambert Laurent et un contrat de location pouvant être rompu à tout moment postérieurement au 30 mars 2006, sont insuffisants à caractériser des manoeuvres dolosives, alors que l'acquéreur qui connaissait le prix d'acquisition du bien en 2002 (114.337 euros) avait toute possibilité de faire réaliser une évaluation sérieuse.

Aucune demande sur le fondement du dol ne peut prospérer à l'encontre de [L] [P].

à l'égard d'[Z] [P] et [B] [T]

En tant que gérants de La SCI le Moulin de Nice Nord, [Z] [P] et [B] [T] n'ont fait que matérialiser la décision de la SCI de se rendre acquéreur du bien litigieux et aucune faute spécifique ne peut leur être reprochée du seul fait de leur intervention à l'acte notarié, alors que c'est par l'action conjointe de ses trois associés que La SCI le Moulin de Nice Nord a manqué de vigilance en ne vérifiant pas l'adéquation du prix de vente à la valeur réelle du bien.

De même, le non paiement des échéances faute de fonds, ne constitue pas une faute de gestion pouvant être sanctionnée sur le fondement des articles 1843-5 et 1850 du code civil.

La demande de La SCI le Moulin de Nice Nord envers [Z] [P] et [B] [T] sera rejetée.

à l'égard de Maître [R] [Q]

Maître [R] [Q] n'a eu aucun rôle dans la négociation du prix, sur lequel les parties, qui ont conservé l'entière maîtrise des opérations, s'étaient mises d'accord bien avant sans son intervention.

Dès lors qu'il n'a été requis que pour recevoir l'acte authentique de vente, il n'avait pas à apprécier l'opportunité économique de l'opération et n'avait aucun devoir de conseil sur le montant du prix. Aucune faute ne peut lui être reprochée.

à l'égard de la BPI

Sous l'intitulé de manquement à l'obligation de conseil et de mise en garde, La SCI le Moulin de Nice Nord reproche à la banque de s'être satisfaite de l'estimation du bien par le cabinet Lambert-Laurent et de n'avoir pas émis de doutes sur la valeur du bien indiquée dans la demande de prêt.

Mais dès lors que la banque n'a joué aucun rôle actif dans le montage du projet, ce qui est le cas puisqu'elle n'est intervenue qu'en qualité de dispensateur du crédit, elle n'était tenue à aucune obligation de conseil et n'avait pas à vérifier l'opportunité économique de l'opération, vérification qui incombait à l'emprunteur.

Ainsi qu'il a été relevé précédemment, La SCI le Moulin de Nice Nord et ses associés connaissaient la différence entre le prix d'acquisition du bien en 2002 et le prix de sa revente en 2006, et ils ne peuvent rendre la banque responsable de leur légèreté.

Il est également reproché à la banque de n'avoir pas suffisamment vérifié les capacités financières de l'emprunteur.

Mais elle était en possession d'un document sur la valeur locative du bien, compatible avec l'endettement de La SCI le Moulin de Nice Nord et il n'est pas soutenu qu'elle disposait sur les risques de l'opération financée d'informations que la SCI et ses associés ignoraient.

N'ayant pas méconnu son obligation de mise en garde, sa responsabilité n'est pas engagée vis à vis de La SCI le Moulin de Nice Nord.

2 - Sur les demandes des époux [T]

à l'égard de [L] [P]

Pas plus que La SCI le Moulin de Nice Nord, les époux [T] ne démontrent les manoeuvres frauduleuses de [L] [P] et seront déboutés de leur demande à son encontre.

à l'égard d'[Z] [P] et [B] [T]

Pour les raisons déjà exposées, les fautes de gestion d'[Z] [P] et [B] [T] ne sont pas établies, étant rappelé que [L] [T] était comme eux associé dans la SCI et qu'il a pris la même part qu'eux dans la décision d'acquisition du bien litigieux.

à l'égard de Maître [R] [Q]

Ainsi qu'il a été dit, Maître [R] [Q] n'a eu aucun rôle dans la négociation du prix, sur lequel les parties, dont [L] [T] en qualité d'associé de la SCI et de co-auteur de la demande de financement, s'étaient mises d'accord bien avant sans son intervention.

Dès lors qu'il n'a été requis que pour recevoir l'acte authentique de vente, il n'avait pas à apprécier l'opportunité économique de l'opération et n'avait aucun devoir de conseil sur le montant du prix. Aucune faute ne peut lui être reprochée.

à l'égard de la BPI

Comme il a été dit précédemment, dès lors que la banque, dispensateur du crédit n'a pas joué de rôle actif dans le montage du projet, elle n'était tenue à aucune obligation de conseil et n'avait pas à vérifier l'opportunité économique de l'opération, vérification qui incombait à l'emprunteur qui comptait [L] [T] parmi ses associés.

Les époux [T] se sont engagés en qualité de cautions de La SCI le Moulin de Nice Nord à hauteur de 600.000 euros chacun.

Invoquant un manquement de la banque à son obligation de mise en garde, ils lui reprochent de n'avoir pas suffisamment vérifié leurs capacités financières.

L'obligation de mise en garde est subordonnée à deux conditions, la qualité de caution non avertie et l'existence d'un risque d'endettement.

Lors de la souscription du prêt, [L] [T] n'était pas gérant de La SCI le Moulin de Nice Nord, mais uniquement associé et [X] [Y] épouse [T] était tiers.

Ils doivent être considérés comme des cautions non averties.

Ils affirment sans verser aucune pièce aux débats que leurs revenus mensuels étaient insuffisants pour faire face au remboursement des échéances et que leur patrimoine immobilier et mobilier était insuffisant pour garantir la créance de la banque.

Des pièces produites par la BPI, il résulte qu'au moment de la demande de prêt, elle s'est renseignée sur la situation des cautions.

Les éléments transmis à la banque révèlent que les époux [T] sont mariés sous le régime de la communauté, que [L] [T] dispose de revenus mensuels de 4.600 euros, qu'[X] [Y] épouse [T] exerce le métier de formatrice et que les époux sont propriétaires de leur résidence principale valorisée à 300.000 euros et au travers d'une SCI d'une résidence locative dont le loyer couvre le crédit.

Ils disposent en outre de valeurs mobilières fin 2005 de 19.776 euros pour [X] [Y] épouse [T] et de 91.603 euros pour [L] [T].

En l'état de ces éléments, il n'existe pas de risque lié à un endettement excessif des époux [T], de sorte que la banque n'a pas manqué à son devoir de mise en garde.

Sa responsabilité n'est pas engagée.

Le jugement sera confirmé sur le rejet des demandes.

***

Les conclusions des appelants ne contiennent pas d'allégations injurieuses envers Maître [R] [Q].

Il n'y a pas lieu de porter à 8.000 euros les dommages intérêts alloués au notaire en première instance.

Il sera alloué à Maître [R] [Q] la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel et à la BPI la somme de 2.000 euros de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par défaut,

- Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré.

- Y ajoutant, condamne La SCI le Moulin de Nice Nord, [L] [T] et [X] [Y] épouse [T] à payer à Maître [R] [Q] la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel et celle de 2.000 euros à la BPI.

- Condamne La SCI le Moulin de Nice Nord, [L] [T] et [X] [Y] épouse [T] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 13/17662
Date de la décision : 21/01/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°13/17662 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-21;13.17662 ?
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