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19/01/2016 | FRANCE | N°13/16328

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre a, 19 janvier 2016, 13/16328


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1re Chambre A



ARRET SUR RENVOI DE CASSATION



ARRÊT AU FOND

DU 19 JANVIER 2016

G.T

N°2016/















Rôle N° 13/16328







CAISSE DE GARANTIE DES ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES

SA ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALITY FRANCE





C/



[T] [R]

[U] [X]

[M] [C]

[W] [N]

SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT

SOCIETE WOX LIMITED

Société INTERNATIONAL CREDIT

RECOVERY

SOCIETE BANK LEUMI LE ISRAEL

Société BANQUE PALATINE

Société HSBC FRANCE



































Grosse délivrée

le :

à :Me Juston

Me Cherfils

Me Ermeneux

Me Buvat

Me Pedinielli

Me Sider

Me Boissonnet

Me Rebufat...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1re Chambre A

ARRET SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 19 JANVIER 2016

G.T

N°2016/

Rôle N° 13/16328

CAISSE DE GARANTIE DES ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES

SA ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALITY FRANCE

C/

[T] [R]

[U] [X]

[M] [C]

[W] [N]

SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT

SOCIETE WOX LIMITED

Société INTERNATIONAL CREDIT RECOVERY

SOCIETE BANK LEUMI LE ISRAEL

Société BANQUE PALATINE

Société HSBC FRANCE

Grosse délivrée

le :

à :Me Juston

Me Cherfils

Me Ermeneux

Me Buvat

Me Pedinielli

Me Sider

Me Boissonnet

Me Rebufat

Me Guedj

Me Latil

Arrêt en date du 19 Janvier 2016 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 04/06/2013, qui a cassé et annulé l'arrêt n° 520 rendu le 22/09/2011 par la Cour d'Appel d' AIX EN PROVENCE ( 1ère Chambre B).

DEMANDEURS SUR RENVOI DE CASSATION

CAISSE DE GARANTIE DES ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES ET DES MANDATAIRES JUDICIAIRES A LA LIQUIDATION DES ENTREPRISES, prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié [Adresse 1]

représentée par Me Sandra JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée par Me Florence REBUT DELANOE, avocat au barreau de PARIS,

avocat plaidant

SA ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALITY FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice [Adresse 2]

représentée par Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me François-Genêt KIENER, avocat au barreau de PARIS

avocat plaidant

DEFENDEURS SUR RENVOI DE CASSATION

Maître [T] [R], mandataire judiciaire, pris en sa qualité d'ancien administrateur provisoire de l'Etude de Maître [M] [C] [Adresse 3]

représenté par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté par Me Timothée DE HEAULME, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Maître [U] [X] de la SCP BOUET-GILLIBERT, administrateurs judiciaires, intimé en qualité de Commissaire à l'execution du Plan de la société GEANT DU MEUBLE, demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Robert BUVAT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté par Me Laurent VILLEGAS, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE

Monsieur [M] [C]

né le [Date naissance 1] 1946 à TUNIS (TUNISIE), demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Jean-François PEDINIELLI, avocat au barreau de MARSEILLE

Maître [W] [N] agissant en sa qualité de représentant des créanciers de la Société Géant du Meuble

né le [Date naissance 2] 1959 , demeurant [Adresse 6]

défaillant

SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domiciliée [Adresse 7]

représentée par Me Paul GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée par Me Yves ARMENAK, avocat au barreau de MARSEILLE,

SOCIETE WOX LIMITED venant aux droits de la banque Worms, prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié, demeurant [Adresse 8])

représentée par Me Pascale PENARROYA-LATIL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Sébastien CAVALLO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Société INTERNATIONAL CREDIT RECOVERY, société de droit italien - venant aux droits de la Société BANCO DI SICILIA par suite d'une cession de créance intervenue le 28/12/2007, prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié, [Adresse 9]TALIE)

représentée par Me Philippe- Laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Charlotte TASSY-PALMIERI, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant

SOCIETE BANK LEUMI LE ISRAEL dont le siège social est sis [Adresse 10], prise en la personne de son représentant légal en exercice et encore pris en son établissement [Adresse 11]

représentée par Me Bruno BOISSONNET de la SCP ROUSSEAU & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Ruth RIQUELME, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant

Société BANQUE PALATINE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualités audit siège, [Adresse 12]

représentée par Me Philippe- Laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée par Me Charlotte TASSY-PALMIERI, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant

Société HSBC FRANCE, dont le siège social est [Adresse 13]

représentée par Me Denis REBUFAT, avocat au barreau de MARSEILLE

avocat plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 30 Novembre 2015 en audience publique .Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur TORREGROSA, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries devant la Cour composée de :

Monsieur Georges TORREGROSA, Président,

Monsieur Olivier BRUE, Conseiller

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Janvier 2016.

ARRÊT

Réputé Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Janvier 2016

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Conseiller, en l'absence du Président empêché, et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Les faits, la procédure et les prétentions :

Le groupe Géant du meuble est composé de huit sociétés , en difficultés économiques à partir de 1993 , ce qui a motivé la nomination par le tribunal de commerce d'Aix d'un administrateur ad hoc , Maître [Q] , avec mission d'assister le groupe dans le cadre des négociations avec les banques et avec les crédits bailleurs.

Le 10 février 1994 , une convention a été signée avec six établissements bancaires, Crédit Commercial de France, banque de Sicile, société marseillaise de crédit, banque Leumi , banque Worms et san Paolo, pour apporter un concours de substitution à leurs concours antérieurs , pour un total de 5'754'950 € (37'750'000 Frs ).

Une inscription d' hypothèque était prévue sur le bâtiment du dépôt central à plan de campagne, mais le bâtiment devait être préalablement racheté à Unibail .

Le 7 décembre 1994, le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de chacune des sociétés du groupe, et prononcé l'unicité de la procédure , avec Maître [N] comme représentant des créanciers et Maître [C] comme administrateur judiciaire avec mission d'assistance;

le 23 novembre 1995, ce dernier a levé l' option d'achat auprès d'Unibail pour acheter le dépôt, et le 20 décembre 1915 , le tribunal de commerce homologuait un plan cession au profit de la société but, hors actif immobilier.

La vente du dépôt était autorisée le 20 novembre 1997 au prix de 12 millions de francs, et passée le 17 décembre 1997 devant le notaire [M], par Maître [C] commissaire à l'exécution du plan et une société Immocabriés .

Maître [C], es qualité de commissaire à l'exécution du plan, percevait le prix .

Un protocole transactionnel était passé entre les banques et Maître [C], selon lequel la somme de 12 millions de francs serait répartie entre les banques à proportion de leur concours financiers.

Le 20 octobre 1998, Maître [R] était désigné comme administrateur provisoire de l'étude de Maître [C] , et Maître [X] était désigné comme commissaire à l'exécution du plan en remplacement de Maître [C] .

Sur autorisation du juge-commissaire en date du 22 mai 2001, Maître [X] répartissait une somme de 8 millions de francs entre les six établissements bancaires, mais il manquait 4 millions de francs sur le prix de vente du dépôt .

Par actes en date du deux et du 6 septembre 2002, le Crédit Commercial de France, la banque de Sicile , la société marseillaise de crédit , la banque Leumi , la banque Worms et la banque San Paolo ont fait assigner Maître [C], l'assureur AGF et la caisse de garantie des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires par devant le tribunal de grande instance de Marseille, au visa de l'article 1304 du Code civil , pour obtenir le paiement à titre de dommages-intérêts des sommes manquantes, détournées par Maître [C], avec condamnation des assureurs à le relever et garantir .

Par jugement en date du 7 mai 2009 , le tribunal de grande instance de Marseille a reçu l'intervention volontaire de la société Wox Ltd venant aux droits de la banque Worms et a rejeté la demande de sursis à statuer , tout en déclarant irrecevable l'exception de procédure soulevée par la caisse de garantie.

Cette dernière et Maître [C] ont été condamnés in solidum à payer diverses sommes à chacune des banques demanderesse, avec capitalisation des intérêts , et garantie par les AGF des condamnations de la caisse de garantie à hauteur de 80 %, au titre d'une police numéro 65 062 682 ;

Maître [C] a été condamné à rembourser à la caisse de garantie et à l'assureur AGF les sommes qu'ils seraient amenés à payer au titre des conséquences pécuniaires de la non-représentation des fonds.

Le jugement a été déclaré opposable Maître [X], Maître [R] et Maître [N] , chacun en sa qualité .

Les AGF ont relevé appel le 17 juin 2009 , la caisse de garantie pareillement le 17 juin 2009, et Maître [C] le 24 juin 2009 .

Par arrêt réputé contradictoire en date du 22 septembre 2011, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a confirmé partiellement le jugement , notamment en ce que l'assureur AGF devait garantir à la caisse de garantie dans la proportion de 80 % , sauf à préciser que c'est la compagnie allianz global Corporate and spéciality France qui est aux droits et obligations des AGF Iart ;

le jugement a été réformé pour le surplus , et la cour a dit que dans le cadre de la garantie non-représentation des fonds, la caisse de garantie devra verser les sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2001, avec anatocisme, avec garantie à hauteur de 80 % par la compagnie allianz :

' 32'390 ۈ HSBC CCF ;

' 60 248 € à la banque de Sicile ;

' 71'620 € à la banque San Paolo ;

' 68'187 € à la société marseillaise de crédit ;

' 45'486 € à la banque Leumi ;

' 151'117 €à la société Wox limited;

Sur pourvois d'allianz , et de la caisse de garantie qui ont été joints, la Cour de Cassation a statué le 4 juin 2013 au visa de l'article L814 ' trois du code de commerce, et de l'article 455 du code de procédure civile , en cassant et en annulant l'arrêt sauf en ce qu'il a reçu l'intervention volontaire de la société Wox , déclaré irrecevable l'exception de procédure soulevée par la caisse de garantie , dit le jugement opposable à Maître [X], [R] et [N] , chacun en sa qualité , et condamné Maître [C] à indemniser la caisse de garantie et la compagnie allianz des sommes restant leur charge;

la cour suprême a remis, sur les autres points la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt .

La Cour de Cassation a rappelé que la non représentation des fonds à un créancier se distingue du défaut de paiement et suppose que soit établi le droit de ce créancier à percevoir des fonds reçus par le mandataire de justice ; il convenait donc d'établir que le rang de leurs créances conférait aux banques le droit d'être colloquées sur le prix de vente reçu par le commissaire à l'exécution du plan à concurrence du montant prévu par les protocoles d'accord;

la Cour de Cassation a par ailleurs considéré qu'il convenait de répondre aux conclusions de la société allianz qui invoquait la prescription de l'action de la caisse de garantir à son encontre.

La caisse de garantie a saisi le 2 août 2013 la cour de renvoi d'Aix-en-Provence, autrement composée , et allianz a procédé de même, les deux instances étant jointes selon ordonnance en date du 23 octobre 2013 .

La société Allianz global Corporate & spéciality Se , venant aux droits d'allianz global Corporate & spéciality France , venant aux droits d'AGF Iart , a conclu le 13 novembre 2015 et demande à la cour de réformer le jugement de grande instance de Marseille en date du 7 mai 2009.

Statuant à nouveau, la cour jugera que les banques n'apportent pas la preuve d'une faute ou d'un détournement de fonds commis par Maître [C], et les déboutera .

La cour constatera que la police souscrite par la caisse de garantie a pris effet le 1er janvier 1999 pour arriver à terme le 31 décembre 2001, la clause base réclamation étant conforme à l'article 78 du décret du 27 décembre 1985, et la réclamation à l'origine de la mise en jeu de la responsabilité civile professionnelle de Maître [C] étant en date du 8 novembre 2002;

Par conséquent, la compagnie Allianz ne doit pas garantir Maître [C] des éventuelles condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre en raison des fautes qu'il aurait commises en sa qualité d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la société géant du meuble , par référence au contrat non-représentation des fonds numéro 65 062 682.

La caisse de garantie des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires a conclu le 16 octobre 2015 en demandant la cour d'infirmer au visa des dispositions de l'article L814 ' trois du code de commerce.

La cour constatera que Maître [C] a éventuellement commis une faute de nature à engager sa responsabilité civile professionnelle, et qu'il n'existe pas de non représentation des fonds au sens de l'article L814 ' trois du code de commerce.

Les banques seront déboutées et condamnées à payer une somme de 10'000 €au titre des frais inéquitablement exposés.

Subsidiairement, en cas de condamnation de la caisse de garantie, AGF allianz devra et garantir à hauteur de 80 %, et Maître [C] sera condamné à rembourser à la caisse de garantie et à l'assureur Allianz les sommes qu'ils auront été amenés à payer au titre des conséquences pécuniaires de la non-représentation des fonds.

Une somme de 10'000 €est réclamée in solidum à Maître [C] et à la compagnie allianz au titre des frais inéquitablement exposés .

La société marseillaise de crédit , intimée , a conclu le 3 juin 2015 à la confirmation du jugement de grande instance de Marseille par application de l'article L814 ' trois du code de commerce , la preuve étant rapportée de la non-représentation du solde des sommes dues par Maître [C] pour l'ensemble du pool bancaire et pour la SMC;

subsidiairement, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et de l'article 78 du décret du 27 décembre 85, Maître [C] ,qui n'a pas exécuté ses obligations au titre des protocoles du 30 avril 1998 et du 9 juillet 1998, a commis une faute en relation directe avec le préjudice subi par les banques, qui engage sa responsabilité civile professionnelle , et il sera condamné avec allianz et le cas échéant avec la caisse de garantie en cas de défaut d'assurance, à payer la même somme à la société marseillaise de crédit, avec capitalisation des intérêts.

Une condamnation solidaire de Maître [C], de la caisse de garantie et d'Allianz est réclamée au titre des frais inéquitablement exposés, à hauteur de 12'000 € .

La société Wox limited, intimée , a conclu le 28 novembre 2014 à la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné in solidum Maître [C] et la caisse de garantie alléguée une somme de 214'835 €en principal , outre intérêt légal et capitalisation, avec garantie d'allianz à hauteur de 80 % des sommes incombant à la caisse de garantie .

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné Maître [C] à rembourser à la caisse de garantie les sommes qu'elle sera amenée à payer au titre des conséquences pécuniaires de la non-représentation des fonds .

Subsidiairement, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu que Maître [C] n'a pas exécuté ses obligations issues du protocole d'accord et a commis une faute engageant sa responsabilité professionnelle et causant un préjudice direct et certain aux banques , qui sont fondés à rechercher la garantie de l'assureur de responsabilité civile professionnelle de Maître [C] , ce dernier devant être condamné in solidum avec son assureur Allianz à payer les sommes dues avec intérêts au taux légal à compter de l'acte de cession, et capitalisation.

Maître [C] et la caisse de garantie seront déboutés de leurs demandes et condamnés in solidum avec l'assureur à payer une somme de 10'000 euros au titre des frais inéquitablement exposés.

La société internationale crédit recovery, venant aux droits de banco di Sicilia, intimée , a conclu le 2 avril 2015, à la confirmation du jugement sur le fondement de la non-représentation des fonds , ce qui motive la condamnation in solidum de Maître [C] et de la caisse de garantie à lui verser une somme de 85'615 € en principal, outre intérêts au taux légal depuis l'acte de vente 17 décembre 97 et capitalisation.

Subsidiairement, sur le fondement des articles 1382 du Code civil et 78 du décret du 27 décembre 1985, Maître [C] sera débouté , et la réclamation des banques n'est pas prescrite car formulée avant la date d'expiration du contrat d'assurance de responsabilité civile.

En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il a prononcé condamnation in solidum de Maître [C], de l'assureur allianz à payer une somme en principal de 85' 615 € avec intérêts depuis l'acte de vente 17 décembre 97 et capitalisation .

Une somme de 12'000 € réclamés au titre des frais inéquitablement exposés .

HSBC , venant aux droits du Crédit Commercial de France, a conclu le 28 novembre 2014 à la confirmation de la décision dont appel, au visa de l'article 814 ' trois du code de commerce ; les banques disposaient d'un privilège leur donnant le droit d'être réglées intégralement du montant de la créance , soit 46 039,60 euros pour HSBC ;

au fond à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, de l'article 814 ' quatre du code de commerce et 78 du décret du 27 décembre 1985 , Maître [C] a engagé sa responsabilité professionnelle en ne représentant pas les fonds, ce qui constitue une faute ayant causé un préjudice certain et direct aux banques , dont la demande envers allianz n'est pas prescrite ;

la même condamnation est donc sollicitée à ce titre par HSBC ;

en tout état de cause, la cour fera courir le montant des intérêts légaux à compter de l'acte de cession 17 décembre 1997, date à laquelle les banques auraient dû percevoir les sommes , le tout avec capitalisation ;

en tout état de cause, une somme de 7700 € est réclamée au titre des frais inéquitablement exposés en cause d'appel.

Maître [X] , commissaire à l'exécution du plan de la société géant du meuble, a conclu le 28 novembre 2014 en s'en remettant à la sagesse de la cour .

Maître [R], ancien administrateur provisoire de l'étude de Maître [C] , a conclu le 28 novembre 2014 à sa mise hors de cause.

La banque Leumi, défenderesse à la saisine , a conclu le 28 novembre 2014 au visa de l'article L814 ' trois du code de commerce de l'article 1382 du Code civil , à la condamnation in solidum de [C], de la compagnie allianz et de la caisse de garantie à lui payer une somme de 64'638,38 euros en principal, outre intérêts au taux légal depuis le 17 décembre 1999 ;

subsidiairement, Maître [C] a commis une faute en ne respectant pas les obligations tirées du protocole , ce qui engage sa responsabilité professionnelle et motive sa condamnation solidaire avec l'assureur et la caisse de garantie à lui payer la même somme, le tout avec capitalisation.

Une condamnation solidaire de Maître [C], de la caisse de garantie et de l'assureur allianz est sollicité au titre de l'article 700 du code de procédure civile , pour un montant de 12'000 euros.

Maître [C] s'est constitué mais n'a pas conclu.

Maître [N], en sa qualité de représentant des créanciers de la société géant du meuble, quoique régulièrement assigné à sa personne 9 mai 2014 , n'a pas constitué avocat .

L'ordonnance de clôture est en date du 17 novembre 2015 .

SUR CE :

Attendu qu'il convient tout d'abord de rappeler le périmètre de la saisine de la cour de renvoi, par référence à l'arrêt de la Cour de Cassation du 4 juin 2013 ;

Attendu que l'arrêt du 22 septembre 2011 de la cour d'Aix n'a pas été cassé s'agissant de l'intervention volontaire de la société Wox Ltd, venant aux droits de la banque Worms , s'agissant de l'irrecevabilité de l'exception de procédure soulevée par la caisse de garantie, de l'opposabilité du jugement à Maître [X], [R] et [N] en leur qualité respective, de la condamnation de Maître [C] à indemniser la caisse de garantie et la compagnie Allianz des sommes restant leur charge ;

Attendu que le second moyen , pris dans ses deuxième, troisième et quatrième branches, consistait à soutenir qu'il convenait de vérifier si les fonds manquants avaient fait l'objet d'écritures de débit irrégulières ou injustifiées ou frauduleuse à l'origine du non-paiement des six banques , au-delà des 53'846,12 euros montant de la non-représentation de fonds identifiés par l'expert désigné par le président du tribunal de grande instance de Marseille le 8 octobre 2003, les fonds manquants ayant très bien pu être affecté au paiement d'autres créanciers de meilleur rang que les banques intimées , la cour s'étant abstenue de rechercher si le produit de la cession n'avait pas été appréhendé par d'autres créanciers de la procédure, et ayant ainsi violé l'article L814 ' trois du code de commerce ;

Attendu que la Cour de Cassation a rejeté ce moyen, au motif que la question de l'utilisation des fonds manquants était indifférente à la mise en jeu de la garantie de non-représentation des fonds instituée par l'article précité, la cour n'étant pas tenue de procéder aux recherches inopérantes sollicitées , ni de répondre aux conclusions sans incidence sur la solution du litige;

Attendu qu'il s'en déduit qu'en reprenant l'argumentation fondée sur le rapport de Monsieur [Y] , ordonné le 8 octobre 2003 , la caisse de garantie interroge à nouveau la cour sur l'utilisation frauduleuse des fonds qu'elle conteste , et sur une limitation à 53'846 du montant de la non-représentation des fonds , alors que la Cour de Cassation a déjà jugé que la question de l'utilisation des fonds était indifférente à la solution du litige s'agissant de la mise en jeu de la garantie de non-représentation des fonds ;

Attendu qu'en effet, cette garantie , telle que définie par l'article L8 14 ' trois du code de commerce , est mise en jeu sans que puisse être opposé au créancier le bénéfice de la discussion prévue à l'article 2021 du Code civil, sur la seule justification de l'exigibilité de la créance et de la non-représentation des fonds par l'administrateur judiciaire ;

Attendu qu'au surplus , n'est produit qu'un extrait de l'expertise [Y] , étant expressément conclu que les opérations définitives ne sont pas terminées , dont les conclusions n'ont pu être discutées par les banques sinon dans le cadre de la communication des pièces dans le présent débat , cet extrait ne permettant nullement de conclure à une non-représentation des fonds qui soit limités à 53'846 €, pour ce montant qui serait a fortiori opposable aux banques;

Attendu qu'enfin , la caisse de garantie elle-même évoque en page 18 un sinistre déclaré par Maître [R] à hauteur de 3 081'908 € pour non-représentation des fonds, ainsi qu'un rapport du 24 novembre 99 de l'expert [B] mandaté par les assureurs , dont il résulte que Maître [C] a prélevé un montant de 18'205 100 francs, ce qui constitue bien un détournement de fonds se traduisant par une non-représentation, les sommes prélevées n'étant absolument pas justifiées par des honoraires de taxes et semblant « en tout état de cause très importantes » ;

Attendu que la caisse de garantie proteste d'une absence de lien entre ces sommes et celle concernant le dossier géant du meuble , mais les éléments qu'elle communique et que la cour vient de rappeler , au-delà de la motivation dirimante à la Cour de Cassation sur ce volet , corroborent l'impossibilité au vu des pièces régulièrement communiquées de déterminer à ce jour l'assiette et le montant des fonds non représentés , la question essentielle en droit qui subsiste étant celle de la double condition de l'exigibilité des fonds et de leur non-représentation;

Attendu que sur ce volet, la Cour de Cassation a certes fait droit à la première branche du second moyen , la cour d'aix ayant omis de procéder à la vérification du rang des créances bancaires , leur donnant le droit d'être colloquées sur le prix de vente reçu par le commissaire à l' exécution du plan , à concurrence du montant prévu par les protocoles d'accord ;

Attendu que s'agissant de l'exigibilité , il est patent que la caisse de garantie , l'assureur Allianz et les banques se réfèrent aux mêmes actes qui sont d'ailleurs tous justifiés , à savoir :

' l'ordonnance du 18 novembre 1997 à la requête de Maître [C] , pour voir autoriser la vente du bien immobilier à 12 millions de francs, hors droits, hors frais, hors taxes , payables comptant le jour de la signature de l'acte;

' l'ordonnance précisant que les créanciers hypothécaires recevront, une fois leurs créances définitivement admises, une répartition sur le prix de vente, déduction faite des honoraires, en fonction de la participation au sein du pool bancaire...;

' Les protocoles d'accord intervenus le 9 juillet et le 3 novembre 1998, non contestés dans leur matérialité, teneur et régularité, avec toutes conséquences en termes de transaction, les banques renonçant à la créance hypothécaire à hauteur des sommes prêtées , pour recevoir au prorata les fonds issus de la cession , la garantie hypothécaire étant transférée sur le prix de cession , contre l'abandon pur et simple de la créance déclarée au passif du redressement judiciaire de géant du meuble;

' la requête de Maître [X], commissaire à l'exécution du plan, pour verser aux banques une provision de 8 millions de francs , avec autorisation du juge-commissaire en date du 22 mai 2001 d'exécuter la transaction ;

Attendu que reste en litige la question du rang des créances bancaires , étant précisé que le créancier hypothécaire n'est primé que par les dettes nées régulièrement au cours de la période d'observation et par le superprivilège des salaires , et que par requête du 12 avril 2001 il n'est pas contesté que Maître [X] mentionne en sa qualité de commissaire avoir encaissé environ 58 millions de francs de recettes , ce qui règle en tant que de besoin l'éventuelle question du règlement des honoraires de Maître [C] prévu aux protocoles ;

Attendu que la créance à caractére hypothèquaire des banques étant exigible dans son principe, il appartient à la caisse de garantie de démontrer que son assuré s'est acquitté de son obligation, fût ce partiellement , par le paiement des créanciers primant les banques , étant précisé que seuls les organes des procédures collectives détiennent les éléments de nature à démontrer ces paiements préférentiels qui pourraient être opposables aux banques ;

Attendu que sur ce volet , la caisse de garantie procède par inversion de la charge de la preuve en exigeant des banques la démonstration que des paiements prioritaires n'auraient pas dû être effectués , alors qu'il appartient à la caisse de garantie de démontrer que son assuré a régulièrement effectué des paiements prioritaires;

Attendu que l'assureur Allianz procéde pour sa part à une démonstration hypothétique, en évoquant des paiements prioritaires de nature fiscale intervenus en 1998, qui démontreraient que ces paiements parfaitement réguliers dépassent le montant du « prétendu détournement que la cour d'appel avait fixé dans un précédent arrêt à 2'814'847 Frs » , le tout sans aucune précision ni certitude qui puisse convaincre ;

Et attendu qu'en conséquence, la démonstration de l'exigibilité de leurs créances est suffisante de la part des banques ;

Attendu que reste à non-représentation des fonds, qui est patente puisque le notaire [M] a attesté le 25 novembre 1998 que la vente avait été signée le 17 décembre 1997, et que le règlement du prix avait été effectué entre les mains de Maître [C],commissaire à l'exécution du plan , chargé de la purge des hypothèques (pièce sept de la SMC notamment) ;

Attendu qu'il n'est pas sérieusement contesté que sur cette somme de 12 millions de francs , Maître [X] qui a déposé requête en ce sens , n'a pu disposer que d'une somme de 8 millions de francs , qui a été versée au prorata à titre de provision, sur autorisation du juge-commissaire ;

attendu que les deux conditions nécessaires à la mise en jeu de la garantie de non-représentation des fonds sont donc réunies , qui fondent les demandes des banques à l'égard de la caisse de garantie , par confirmation du juge de premier ressort , sachant que les intérêts sont dus depuis la mise à disposition des sommes entre les mains de Maître [C] ;

Attendu que l'assureur Allianz ne conteste pas le principe de sa couverture à hauteur de 80 % des condamnations pouvant être prononcées à l'encontre de la caisse de garantie , au titre de la police de non-représentation des fonds , numéro 65 062 682 ;

Attendu qu'elle se borne sur ce volet invoquer la prescription biennale de l'article L 114 ' un du code des assurances, question à laquelle la cour d'Aix n'avait pas répondu , ce qui a motivé là aussi la cassation intervenue ;

Attendu que l'assureur soutient que dans une assignation en référé devant le tribunal de grande instance de Marseille , la caisse de garantie a reconnu avoir été destinataire d'un courrier de Maître [R] , en date du 9 novembre 1998 , au terme duquel il était fait part d'un sinistre pour non-représentation de fonds, estimé provisoirement à 3'081'908 €;

Attendu que la garantie de l'assureur ne résultant que des conclusions signifiées devant le tribunal de grande instance en vue de l'audience du 7 mars 2005 , la prescription serait acquise;

Attendu que par courrier en date du 9 novembre 1998, l'administrateur provisoire du cabinet [C] , Maître [R] , a signalé en effet au président de la caisse de garantie un ensemble de chèques débités et non affectés, s'élevant à la somme de 18'528' 118 Fr., pour la période de janvier à octobre 1998 , outre l'existence d'un compte avance débiteur pour 1'687'418 Fr., ces observations « laissant supposer l'existence de non-représentation de fonds » le mandataire priant son destinataire de bien vouloir enregistrer cette déclaration de non-représentation des fonds et d'en donner la suite qui s'impose;

Attendu qu'à partir de cette date , l'assuré a eu certes connaissance d'un sinistre constitué par une non-représentation des fonds , mais qui avait un caractère général et ne permet pas d'opposer à l'assuré la connaissance du fait générateur du dommage constitué par la non-représentation des fonds dus aux banques concernées par la procédure collective de géant du meuble;

Attendu que dans un rapport de Monsieur [B], à la requête des compagnies d'assurances souhaitant vérifier l'insuffisance des fonds non représentés, ledit rapport réceptionné en décembre 1999 (pièce 12 de la caisse de garantie), il est fait mention en page huit du géant du meuble, sous la rubrique des comptes individuels concernant les affaires suivantes ;

Attendu que ce rapport est certes produit par la caisse de garantie en pièce 12, mais n'a pas été nécessairement porté à sa connaissance en janvier et en mars 2000, date à laquelle la caisse de garantie a simplement répercuté à Maître [R] des règlements provisionnels payés par axa , dont le dossier [C] pour non-représentation des fonds , ces versements incluant la part incombant à axa et le solde de franchise de 20 % incombant à la caisse de garantie ;

Attendu que la date précise à laquelle la caisse de garantie a eu connaissance , par le biais du rapport [B] , d'un sinistre de non-représentation des fonds concernant Maître [C], et englobant le géant du meuble , n'est donc pas établie au dossier ;

et attendu qu'en toute hypothèse , et s'agissant de la caisse de garantie , l'assureur ne peut soutenir à la fois que ce rapport [B] constituerait en toute hypothèse , au-delà du premier courrier de Maître [R] , le point de départ du délai de prescription , alors qu'en l'état des pièces régulièrement communiquées , c'est ce rapport qui a servi de base aux règlements provisionnels transmis à la caisse de garantie , pour un montant global non négligeable de 14 564'000 Fr., correspondant très exactement au montant établi par l'expert [B] , si l'on ajoute la franchise due par la caisse ;

Attendu que ces paiements provisionnels, sans aucune réserve y compris quant à leur montant puisque l'intégralité des opérations expertales a été avalisée , manifeste de façon certaine et non équivoque la volonté de prendre en charge le sinistre , ce qui est corroboré par les conclusions du 1er octobre 2007 devant le tribunal de grande instance de Marseille,où l'assureur se joignait à la demande d'expertise judiciaire de son assuré , pour établir notamment si Maître [C] s'est rendu coupable de détournement de fonds au détriment du redressement judiciaire géant du meuble , et n'invoquait aucunement une quelconque prescription, les réserves émises portant notamment sur la franchise due par la caisse de garantie , mais sans mention de la prescription, largement acquise si l'on retient les dates dont se prévaut cet assureur ;

Attendu la cour estime donc que l'exception de prescription soulevée par l'assureur à l'encontre de son assuré , au titre de la non-représentation des fonds ,n'est pas fondée ;

Attendu que la police numéro 65 0820822 doit s'appliquer qui prévoit une franchise de 20 %, sans que l'assureur puisse se prévaloir d'une co assurance , puisque les autres co assureurs ont donné expressément mandat et pouvoir à Allianz , apéritrice , de gérer le contrat en leur nom, notamment de procéder au règlement des sinistres, ce qui motivait qu'elle soit assignée seule en garantie, à charge pour elle de se retourner contre les co assureurs ;

Attendu que les motivations retenues supra rendent sans objet les demandes subsidiaires sur le fondement de la responsabilité civile professionnelle de Maître [C] ;

PAR CES MOTIFS , LA COUR statuant sur renvoi , par arrêt réputé contradictoire :

Tenant l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 22 septembre 2011;

Déclare l'appel principal de l'assureur Allianz ( global Corporate & spécialyy SE ) infondé;

Déclare l'appel incident de la caisse de garantie infondé ;

Confirme les dispositions du jugement de premier ressort du tribunal de Marseille en date du 7 mai 2009 ;

Met hors de cause Maître [R] ;

Condamne solidairement l'assureur Allianz ( global Corporate & spécialty SE ) et la Caisse de garantie aux dépens exposés en appel, qui seront recouvrés au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile outre le paiement, à la Société Marseillaise de Crédit , à HSBC, à la société Wox limited , à la société international crédit Recovery , à la banque Palatine, à la banque Leumi le Israël Bm, d'une somme de 4000 € pour chacun , au titre des frais inéquitablement exposés en cause d'appel.

LE GREFFIER P/LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre a
Numéro d'arrêt : 13/16328
Date de la décision : 19/01/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°13/16328 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-19;13.16328 ?
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