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13/01/2016 | FRANCE | N°15/10292

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 6e chambre d, 13 janvier 2016, 15/10292


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre D



ARRÊT AU FOND

DU 13 JANVIER 2016

F.T

N° 2016/013













Rôle N° 15/10292







MINISTERE PUBLIC AIX EN PROVENCE





C/



[K] [B] [C]

[A] [C]





















Grosse délivrée

le :

à :



Mme POUEY

substitut général (2)







Me Rachel SARAGA-BROSSAT

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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 11 Mars 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13-9033.





APPELANT



LE PROCUREUR GÉNÉRAL

PRÈS LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

[Adresse 2]



représenté par Madame Isabelle POUEY, Substitut génér...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre D

ARRÊT AU FOND

DU 13 JANVIER 2016

F.T

N° 2016/013

Rôle N° 15/10292

MINISTERE PUBLIC AIX EN PROVENCE

C/

[K] [B] [C]

[A] [C]

Grosse délivrée

le :

à :

Mme POUEY

substitut général (2)

Me Rachel SARAGA-BROSSAT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 11 Mars 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13-9033.

APPELANT

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

PRÈS LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

[Adresse 2]

représenté par Madame Isabelle POUEY, Substitut général.

INTIMES

Monsieur [K] [B] [C]

né le [Date naissance 7] 1970 à [Localité 2] (Algérie),

demeurant [Adresse 1]

pris tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'administrateur légal de ses deux enfants mineurs,[U] [B] [C] né le [Date naissance 5] à [Localité 3] (Algérie) et [X] [C] né le [Date naissance 3].2005 à [Localité 3] (Algérie).

Madame [A] [C]

née le [Date naissance 2] 1995 à [Localité 4] (Algérie),

demeurant [Adresse 1]

représentés par Me Rachel SARAGA-BROSSAT de la SELARL GOBAILLE & SARAGA-BROSSAT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistés par Me Janine BERMOND-AUDINET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Claire LANGEVIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 09 Décembre 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme Florence TESSIER, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Anne VIDAL, Présidente

Madame Chantal MUSSO, Présidente de chambre

Mme Florence TESSIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Janvier 2016.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Janvier 2016,

Signé par Madame Anne VIDAL, Présidente et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur [K]-[B] [C] est né le [Date naissance 7] 1970 à [Localité 2] ( Algérie ) de Monsieur

[U] [C] né le [Date naissance 1] 1937 à [Localité 1] ( Algérie ) et de Madame [G] [I] née le [Date naissance 6] 1944 à [Localité 5] ( Algérie ).

Marié depuis le [Date mariage 1] 1994 à Madame [J] [E], il est père de :

*[A] née le [Date naissance 2] 1995 à [Localité 4] ( Algérie ),

*[U] [B] né le [Date naissance 4] 2001 à [Localité 3] ( Algérie ),

*[X] né le [Date naissance 3] 2005 à [Localité 3] ( Algérie ).

Par acte d'huissier en date du 8 juillet 2013, Monsieur [K]-[B] [C], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de ses enfants mineurs, a fait assigner le procureur de la République devant le tribunal de grande instance de Marseille afin de faire reconnaitre leur nationalité française, sur le fondement de l'article 29-3 du code civil.

Par conclusions du 28 novembre 2013, Madame [A] [C], devenue majeure en cours de procédure, est intervenue volontairement à l'instance.

Par jugement en date du 11 mars 2015, le tribunal de grande instance de Marseille a :

-déclaré recevables les demandes de Monsieur [K]-[B] [C], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de ses enfants mineurs,

-rejeté la demande en révocation de l'ordonnance de clôture formée par Monsieur [K]-[B] [C] et Madame [A] [C],

-déclaré irrecevables les pièces communiquées par ces derniers, numérotées 76 et 77 et les a écartées des débats,

-constaté la nationalité française de Monsieur [K]-[B] [C], de Madame [A] [C], de [U] [B] [C] et de [X] [C] en application de l'article 18 du code civil,

-ordonné la mention prévue à l'article 28 du code civil,

-dit que les dépens resteront à la charge du Trésor Public.

Le Ministère Public a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe du 8 juin 2015, sauf à l'encontre de Madame [A] [C].

Le Ministère Public, aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 23 novembre 2015, demande à la cour d'infirmer le jugement et de :

-constater que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré,

-constater l'extranéité de Messieurs [K]-[B] [C], [U] [C] et [X] [C],

-ordonner la mention de l'article 28 du code civil.

Il fait valoir pour l'essentiel que :

-l'article 32-1 du code civil implique que soit rapportée la double preuve d'une part de la qualité de Français avant l'indépendance de l'Algérie et, d'autre part, du statut civil de droit commun,

-les intimés ne produisent pas l'acte de naissance de Monsieur [W] [Y] dit [V] [N], qu'ils prétendent être leur ascendant, aucune pièce ne justifiant également du changement d'identité le concernant,

-les intimés ne rapportent pas la preuve de l'existence d'une chaîne de filiation légitime continue entre eux et [V] [N], aucune identité de personne n'existant entre l'admis [W] [M] et [V] [N],

-il n'y a aucun lien de filiation entre [D] [N] et [W] [M], entre [Z] [N] et [H] [N] ainsi qu'entre [O] [S] et [Z] [N].

Monsieur [K]-[B] [C] et Madame [A] [C], dans leurs dernières conclusions signifiées le 30 octobre 2015, sollicitent de la cour de :

-constater que les intimés étaient en droit de saisir le tribunal par une seule assignation,

-constater que l'assignation introductive d'instance du 8 juillet 2013 était recevable,

-constater la recevabilité de l'action introduite par Monsieur [K]-[B] [C] en sa qualité de représentant légal de ses enfants mineurs à la date de l'assignation,

-constater que les formalités de l'article 1043 du code de procédure civile ont été accomplies,

-constater que les actes d'état civil produits comportent toutes les mentions obligatoires,

-constater que les intimés rapportent la preuve de leur filiation légitime, à chaque génération, avec l'ascendant [V] [N],

-constater qu'ils rapportent la preuve de l'identité de personne entre [Z] [N], [P] [N] et [P] [N],

-constater qu'ils rapportent la preuve de l'identité de personne entre [D] [N] et [D] [N] ainsi qu'entre [V] [N] et [M] [W],

-confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions,

-dire que Messieurs [K]-[B] [C], [U] [B] [C], [X] [C] et Madame [A] [C] sont de nationalité française,

-ordonner la mention prévue à l'article 28 du code civil,

-condamner le Trésor Public aux dépens.

Ils soutiennent principalement que :

-par deux arrêts définitifs de la première chambre de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date des 14 mai 2009 et 29 octobre 2009 il a été jugé que [Z] [N] est la fille de [H] [N], ce dernier étant le fils de [V] [N],

-par quatre jugements définitifs du tribunal de grande instance de Marseille des 13 mars 2013, 4 décembre 2014, 14 janvier 2015 et 13 mai 2015, il a été jugé que [V] [N] était également connu sous le nom de [W] [M] et était Français,

-par arrêt définitif rendu le 9 avril 2015 la première chambre de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a jugé que [V] [N], connu sous le nom de [M] [W], indigène musulman né en 1829 à [Localité 1] et décédé en 1898, bénéficiaire du décret impérial du 28 novembre 1866 en vertu du senatus consulte du 14 juillet 1865 qui lui a conféré les droits de citoyen français, a bien conservé sa nationalité française,

-aucun descendant de l'admis n'est un enfant né hors mariage, Monsieur [K]-[B] [C] ayant produit toutes les pièces nécessaires à la preuve de sa filiation légitime paternelle,

-la preuve de la chaîne de filiation maternelle légitime entre [U] [C] et [O] [S] ainsi qu'entre [O] [S] et [Z] [N] est rapportée à la lecture des indications portées sur une multitude d'actes d'état civil et notamment par le biais de l'indication du nom de la mère sur les actes de naissance,

-les intimés prouvent la filiation paternelle légitime de [Z] [N] avec [H] [N] ainsi que de [H] [N] avec [V] [N].

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 9 décembre 2015.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que de manière liminaire il convient d'observer que le Ministère Public n'a pas interjeté appel du jugement déféré à l'encontre de Madame [A] [C], la décision étant définitive à l'encontre de cette dernière ;

Attendu qu'en application de l'ordonnance 62-825 du 11 juillet 1962 ainsi que des articles 32-1 et 32-2 du code civil, les personnes de nationalité française, bénéficiaires du statut civil de droit commun, domiciliées en Algérie à la date de l'annonce officielle des résultats du scrutin d'auto-détermination de ce pays, le 3 juillet 1962, ont conservé de plein droit la nationalité française, quelle que soit leur situation au regard de la loi algérienne, sans qu'aucune formalité n'ait à être accomplie ;

Que la circulaire ministérielle n°62-25 du 7 décembre 1962 a précisé que sont bénéficiaires du statut civil de droit commun les musulmans qui ont accédé à la qualité de citoyen français en vertu des dispositions spéciales en vigueur en Algérie avant la constitution de 1946 ;

Que la loi n°94-488 du 11 juin 1994 rappelle que bénéficient de ce statut ceux dont les ascendants, anciennement de statut civil de droit local, se sont vus appliquer le Senatus Consulte du 14 juillet 1865 ;

Que tel est le cas de feu [V] [N] ;

Qu'en effet celui-ci, né en 1829 à [Localité 1], a été admis à la qualité de citoyen français par décret impérial du 28 novembre 1866, pris en application de l'article 4 dudit Senatus Consulte ;

Qu'il résulte des pièces produites aux débats, et notamment de l'extrait du registre-matrice, de l'acte de décès ainsi que de l'acte authentique transcrit les 7 et 12 juin 1924, que [V] [N] était connu sous le nom de [M] [W] ;

Attendu qu'il appartient à ses descendants, qui réclament le bénéfice du même statut civil de droit commun, de rapporter la preuve de l'existence, pour chaque génération, d'une chaîne de filiation directe entre eux-mêmes et [V] [N], étant rappelé qu'en vertu des articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales l'indication du nom de la mère dans un acte de naissance suffit à établir la filiation maternelle d'un enfant ;

Attendu que la filiation entre Monsieur [K]-[B] [C] et [U] [C] résulte des pièces d'état civil produites et n'est pas contestée par le Ministère Public ;

Qu'il en est de même de la filiation de [U] [C] avec [O] [S] épouse [C], la copie de l'acte de mariage dressé le 3 janvier 1930 établissant le mariage de [O] [S] avec [B] [C] et, par voie de conséquence, la légitimité de l'enfant [U] [C] ;

Que la filiation de [O] [S] avec sa mère, [Z] [N], est établie par l'acte de naissance n° 1054 dressé le 11 novembre 1914 ;

Que la circonstance que cet acte ait été rectifié par jugement du tribunal d'[Localité 1] en date du 6 mars 2004, compte tenu de l'existence d'une erreur matérielle affectant l'acte, est indifférente sur l'établissement de la filiation dont s'agit, aucun élément n'étant communiqué pour démontrer le caractère apocryphe de cette décision, produite en original certifié ;

Que cette filiation résulte également de l'acte de mariage n°01 d'[B] [C] et de [O] [S], de leur livret de famille ainsi que de l'acte de décès n°244 de [O] [S], et du livret de famille, documents qui, tous, mentionnent que [O] [S] est fille de [Z] [R] ( fille de ) [H] [N] ;

Attendu que la filiation entre [Z] [N] épouse [S] et [H] [N] est établie à la lecture de l'extrait des registres d'état civil de [Z] [N], délivré le 4 juin 1957, de son acte de décès, délivré le 26 mars 2013, de l'acte de décès de M'[Q] [S], qui mentionnent qu'elle est la fille de [H] [N], ainsi que d'un acte de notoriété n°680/2005 qui précise que, de l'union de [H] et [L] [F], est née [Z] [N] ;

Que si l'acte de mariage des parents de [Z] [N] n'est pas produit, les extraits d'actes de décès de ceux-ci font bien référence à leur mariage célébré en 1869, étant observé que l'état civil n'a été institué en Algérie qu'en 1882 ;

Attendu que la filiation de [H] [N] avec [V] [N] résulte des actes de décès de ceux-ci, ainsi que de l'acte notarié du 12 juillet 1884, aux termes duquel [H] [N] est indiqué comme étant bénéficiaire d'une donation en qualité de fils de [V] [N] ;

Attendu en conséquence que Monsieur [K]-[B] [C], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de ses deux enfants mineurs, [U] [B] [C] et [X] [C], démontre l'existence d'un lien de filiation ininterrompu l'unissant à [V] [N] et se trouve dès lors fondé à faire constater sa nationalité française ainsi que celle de ses descendants ;

Que le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions ;

Vu l'article 696 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Constate que le récépissé prévu à l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré par le Ministère de la Justice ;

Constate que le jugement déféré est définitif à l'encontre de Madame [A] [C] ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Ordonne la mention du présent arrêt telle que prévue à l'article 28 du code civil ;

Dit que les dépens d'appel sont à la charge du Trésor Public et qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 6e chambre d
Numéro d'arrêt : 15/10292
Date de la décision : 13/01/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6D, arrêt n°15/10292 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-13;15.10292 ?
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