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22/12/2015 | FRANCE | N°14/12687

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 22 décembre 2015, 14/12687


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 22 DECEMBRE 2015



N° 2015/













Rôle N° 14/12687

(N° 14/13549 joint)



Société AMESYS

[M] [X]





C/



SAS EKIUM

































Grosse délivrée

le :

à :

Me Pierre BALLANDIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



Me Chris

tine CASABIANCA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



Me Jean-Baptiste TRAN-MINH, avocat au barreau de Lyon



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décisions déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section E - en date du 27 Mai 2014, enre...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 22 DECEMBRE 2015

N° 2015/

Rôle N° 14/12687

(N° 14/13549 joint)

Société AMESYS

[M] [X]

C/

SAS EKIUM

Grosse délivrée

le :

à :

Me Pierre BALLANDIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Me Christine CASABIANCA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Me Jean-Baptiste TRAN-MINH, avocat au barreau de Lyon

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décisions déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section E - en date du 27 Mai 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 13/388.

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section E - en date du 27 Mai 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 13/449.

APPELANTS

SAS AMESYS venant aux droits de la SAS AMESYS INTERNATIONAL, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Pierre BALLANDIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, vestiaire : 160

Monsieur [M] [X], demeurant [Adresse 3]

comparant en personne, assisté de Me Christine CASABIANCA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, vestiaire : 198

INTIMEE

SAS EKIUM, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Jean-Baptiste TRAN-MINH, avocat au barreau de Lyon ([Adresse 1])

Monsieur [E] [Z] (D.R.H)

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 16 Novembre 2015 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président

Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller

Madame Sylvie BLUME, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Décembre 2015.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Décembre 2015.

Signé par Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE

Par lettre recommandée postée le 20 juin 2014, la société Amesys international, désormais dénommée Amesys, a relevé appel du jugement rendu le 27 mai 2014 par le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence la condamnant à verser au salarié [X] une indemnité de 40 000 euros en réparation de sa procédure abusive et vexatoire, et condamnant ce salarié à lui rembourser la somme de 5 400 euros représentant une fraction de son indemnité contractuelle de non-concurrence.

Par déclaration d'appel reçue le 10 juillet 2014, M. [X] a relevé appel du jugement rendu le 27 mai 2014 par le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence, à lui notifié le 16 juin 2014, condamnant la société Ekium à lui verser un préavis de 10 200 euros, sans préjudice des congés payés afférents.

Il est de l'intérêt d'une bonne justice d'ordonner la jonction de ces deux instances.

Le salarié [X] fait grief à la société Amesys d'être à l'origine de son licenciement par la société Ekium pour avoir menacé cette dernière de poursuites se prévalant avec malignité d'une clause de non-concurrence ; arguant de la nullité de cette clause de non-concurrence, le salarié conteste son licenciement.

M. [X] poursuit devant la cour la condamnation de la société Amesys à lui verser les sommes suivantes :

16 945 euros au titre de la contrepartie pécuniaire de la clause de non-concurrence restant due,

40 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

25 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice matériel, le tout avec intérêts au taux légal à compter de sa demande, sous le bénéfice de l'anatocisme.

M. [X] sollicite sa réintégration dans les effectifs de la société Ekium assortie du paiement des sommes suivantes:

10 200 euros, ainsi que 1 020 euros au titre des congés payés afférents, pour préavis,

20 400 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

12 500 euros pour rupture abusive de son contrat de travail, le tout avec intérêts au taux légal à compter de sa demande, sous le bénéfice de l'anatocisme.

A défaut de réintégration, ce salarié poursuit la condamnation de la société Ektium à lui verser les sommes suivantes :

15 000 euros en réparation de son absence de réintégration,

7000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

8 500 euros pour préjudice matériel, le tout avec intérêts au taux légal à compter de sa demande, sous le bénéfice de l'anatocisme.

La société Amesys conclut à l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement déféré à la censure de la cour et poursuit la condamnation de M. [X] à lui verser une clause pénale de 21 000 euros, ainsi qu'à lui rembourser la somme de 9 000 euros versée au titre de la contrepartie de la clause de non-concurrence ; son conseil réclame 1 000 euros pour frais irrépétibles.

La société Ekium, qui refuse de réintégrer le salarié dans ses effectifs, conclut au rejet de toutes ses prétentions ; son conseil réclame 3 200 euros pour frais non répétibles.

La cour renvoie pour plus ample exposé aux écritures reprises et soutenues par les conseils des parties à l'audience d'appel tenue le 16 novembre 2015 au cours de laquelle furent évoquées ces deux affaires.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le contrat de travail s'exécute de bonne foi entre les parties.

Ne fut pas de bonne foi à l'égard de la société Ekium le salarié [X] lequel, bien qu'ayant obtenu le maintien de la clause de non-concurrence le liant à la société Amesys et bien que percevant la contrepartie pécuniaire de cette clause, a, au moment de son embauchage, faussement approuvé la mention selon laquelle il était libre de tout engagement.

Cette omission volontaire de sa situation de dépendance vis-à-vis de son premier employeur caractérisait une faute dûment reprochée dans la lettre du 5 mars 2013 ainsi rédigée :

'Suite à une candidature spontanée, vous avez été engagé par la société EKIUM en qualité de Responsable Projets en automatisme et système à compter du 24 septembre 2012 selon un contrat de travail à durée indéterminée.

Le 29 janvier 2013, Maître [N], huissier de justice, est intervenu dans nos locaux afin de nous délivrer une sommation interpellative et nous signifier une copie du contrat de travail à durée indéterminée en date du 11 juin 2011 que vous aviez précédemment signé avec la société AMESYS et qui comportait une clause de non-concurrence.

Or, vous ne nous aviez nullement informé, ni lors de votre embauche, ni au cours de notre collaboration de l'existence de cette clause de non concurrence pour laquelle vous perceviez tous les mois l'indemnité contractuelle prévue.

Le contrat de travail que vous avez signé avec la société EKIUM précisait d'ailleurs expressément que vous étiez libre de tout engagement.

Qui plus est, vous n'êtes pas sans savoir que la dissimulation de l'existence de cette clause de non concurrence pourrait avoir des conséquences extrêmement graves pour la société EKIUM dans la mesure où elle est susceptible d'engager sa responsabilité civile.

Ainsi, un tel comportement constitue un manquement manifeste à l'obligation de loyauté à laquelle vous êtes pourtant tenue à l'égard de votre employeur.

Lors de notre entretien préalable, vous nous avez indiqué avoir considéré sur les conseils de votre avocat que cette clause était illicite. Or, là n'est pas la difficulté. Vous avez dissimulé sciemment cette information, la licéité de la clause étant sans incidence sur la gravité de votre comportement.

Votre comportement fort préjudiciable rend impossible la poursuite de votre contrat de travail ainsi que votre maintien dans l'entreprise, même pendant le temps du préavis. C'est la raison pour laquelle nous vous notifions votre licenciement pour faute grave.'.

Peu important la licéité de la clause de non-concurrence passée avec un tiers, la déloyauté du salarié envers son nouvel employeur primant toute autre considération.

Par ailleurs, relève d'une vaine tentative de masquer la réalité l'affirmation de ce salarié selon laquelle les sociétés Amesys et Ekium ne seraient pas en situation de réelle concurrence sachant que ces deux sociétés ont une activité commune dans l'ingénierie et les études techniques et étant observé que M. [X] occupait au sein de la société Amesys un poste de 'responsable projets contrôle accès' semblable au poste de 'responsable projets en automatisme et système' qu'il occupait au sein de la société Ekium.

Destinataire d'une sommation d'huissier l'instruisant de l'existence de la clause de non-concurrence le liant à la société Amesys, l'employeur, sauf à engager son entreprise dans un contentieux à l'issue incertaine, n'avait d'autre choix que de se séparer immédiatement de son collaborateur.

D'où il suit que le licenciement pour faute grave de M. [X], comme tel privatif de ses indemnités de rupture, était légitime.

Pour faire reste de droit, la procédure de licenciement fut respectée par la société Ekium, laquelle a toujours fait montre d'une parfaite urbanité à l'endroit de l'intéressé, ces considérations étant exclusives de l'existence d'une rupture abusive et/ou vexatoire.

Dans ses rapports avec la société Amesys, M. [X] invoque utilement la nullité de la clause de non-concurrence ainsi rédigée dans son contrat de travail :

'Compte tenu de ses fonctions d'ingénieur d'études et de développement et de sa parfaite connaissance des méthodes de travail, des réalisations ainsi que des clients de la société, en cas de rupture du contrat de travail pour quelque cause que ce soit, le SALARIE s'interdit, à compter de cette rupture, d'entrer au service d'une entreprise concurrente ou d'exercer sur quelques formes que ce soit (y compris à titre d'indépendant), une activité concurrente à celle de la société et à celle des autres sociétés du Groupe auquel il appartient.

Cette interdiction de concurrence est applicable pendant une durée d'un an. Pendant toute l'interdiction, il sera versé au SALARIE chaque mois une somme égale à 50% de sa rémunération brute mensuelle moyenne des 12 derniers mois de présence dans l'entreprise.

En cas de violation de la clause, le SALARIE sera automatiquement redevable d'une somme fixée forfaitairement et dès à présent à 21.600 €. La société sera pour sa part libérée de son engagement de versement de la contrepartie financière.'.

Cette nullité résulte à l'évidence du fait que cette interdiction de concurrence n'est pas limitée dans l'espace.

Une clause nulle est de nul effet, de sorte que le paiement de la contrepartie pécuniaire prévue par cette clause doit être tenu pour inexistant, et ouvre droit à la répétition des sommes indûment versées par l'employeur, tandis que ce dernier, pour un motif identique, n'est pas fondé à se prévaloir de la clause pénale sanctionnant son non-respect.

En conséquence, M. [X] sera condamné à rembourser la société Amesys à hauteur de la somme de 9 000 euros versée au titre de la contrepartie pécuniaire de cette clause de non-concurrence que l'intéressé a volontairement méconnu.

M. [X] supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile :

Joint les instances n° 14/12687 et n° 14/13549 ;

Infirme les deux jugements en toutes leurs dispositions ;

Condamne M. [X] à restituer la somme de 9 000 euros à la société Amesys ;

Rejette les prétentions plus amples ou contraires ;

Condamne M [X] aux entiers dépens des instances jointes ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [X] à verser 600 euros à la société Ekium.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

Gilles BOURGEOIS faisant fonction.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 14/12687
Date de la décision : 22/12/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°14/12687 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-12-22;14.12687 ?
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