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27/11/2015 | FRANCE | N°13/08757

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 27 novembre 2015, 13/08757


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 27 NOVEMBRE 2015



N° 2015/670













Rôle N° 13/08757





SA CSSI



C/



[M] [O]

































Grosse délivrée

le :

à :



Me Jean-Michel CHEULA, avocat au barreau de PARIS



Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON


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Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section E - en date du 25 Mars 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/602.







APPELANTE



SA CSSI, prise en la personne de son représentant légal d...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 27 NOVEMBRE 2015

N° 2015/670

Rôle N° 13/08757

SA CSSI

C/

[M] [O]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Jean-Michel CHEULA, avocat au barreau de PARIS

Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section E - en date du 25 Mars 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/602.

APPELANTE

SA CSSI, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 2]

représentée par Me Jean-Michel CHEULA, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Olga OBERSON, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Monsieur [M] [O],

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Juin 2015 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Fabienne ADAM, Conseiller qui en a rapporté

Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Fabienne MICHEL.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2015, puis prorogé au 23 Octobre 2015 et 27 Novembre 2015.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Novembre 2015.

Signé par Monsieur Jean Bruno MASSARD, Conseiller pour le Président empêché et Madame Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur [M] [O] a été embauché en 1986 en qualité d'ingénieur statut cadre par la société INFORMATIQUE INTERNATIONALE désormais SA CS SYSTEMES D'INFORMATIONS, selon contrat à durée indéterminée, pour une rémunération comprenant alors une partie fixe de 10.027 francs. La convention collective applicable est celle des bureaux d'études techniques, SYNTEC.

Monsieur [O] a occupé divers postes, chef de projet, responsable d'agence, chef d'établissement, et en dernier lieu, chef de projet au sein de l'activité DES (Défense Espace Sécurité) à [Localité 2], poste qu'il occupe depuis quatre ans, avec une rémunération moyenne brute de 6.026,65€.

Rencontrant des difficultés économiques, la société CSSI a informé et consulté les représentants du personnel en 2011 à propos d'un projet de réorganisation avec suppression de postes pour motif économique et mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

Suite à la suppression de trois postes sur le site de [Localité 2], une proposition de reclassement a été faite à Monsieur [O] en juillet 2011, sur un poste de chef de projet, suite à un départ volontaire, au sein de l'activité ITS (Systemes de Transports Intelligents) rattachée administrativement et géographiquement au [Localité 1] en région parisienne à compter du 1er septembre 2011 qu'il a accepté . Le rattachement administratif a été mentionné sur les bulletins de salaire dès le mois d'octobre 2011. Néanmoins, d'après l'employeur en raison d'une poursuite de l'activité au sein de la division Défense à [Localité 2], Monsieur [O] est demeuré chef de projet au sein de l'activité DES à [Localité 2] en accord avec l'activité ITS, poursuivant ses missions antérieures.

Le 25 janvier 2012, Monsieur [O] a demandé à quitter la société en bénéficiant des mesures d'accompagnement du plan de sauvegarde de l'emploi, demande refusée par l'employeur qui lui a précisé que s'il avait bénéficié d'un reclassement sur un poste de chef de projet au [Localité 1] cette affectation n'était en fait pas intervenue du fait d'une poursuite d'activité au sein de la division défense à [Localité 2] ce qui lui avait permis d'éviter une mobilité géographique.

Le 5 mars 2012, Monsieur [O] a pris acte de la rupture de son contrat de travail considérant que la tentative de reclassement avait échoué et qu'en application des mesures du plan de sauvegarde de l'emploi, son licenciement pour motif économique aurait dû dès lors lui être notifié et qu'il aurait dû bénéficier des mesures découlant du plan de sauvegarde de l'emploi suite à la rupture de son contrat de travail.

Le 8 mars 2012, la société CSSI a accusé réception de cette lettre, a contesté le bien fondé de cette rupture qu'elle a considérée comme une démission.

Le salarié a saisi, le 13 juin 2012, le conseil de prud'hommes de Toulon des demandes suivantes:

' Requalifier la prise d'acte de la rupture du contrat en licenciement sans cause réelle et sérieuse

' indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse (24 mois) : 144.640 € nets

' Indemnité compensatrice de préavis 3 mois: 18.079,95 € bruts

' Indemnité compensatrice de congés payés sur préavis: 1.808 € bruts

' Indemnité conventionnelle de licenciement: 52.230,96€ nets

' Indemnité complémentaire de base et optionnelle: 22.012,76€ nets

' Article 700 du code de procédure civile: 5000 €

' Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir

Par un jugement rendu le 25 mars 2013, le conseil de prud'hommes a:

- dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de Monsieur [O] emportait les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société CSSI à payer à Monsieur [O] les sommes suivantes au titre:

* de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 52.230,96€,

* de l'indemnité compensatrice de préavis, 18.079,95€,

* de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents, 1.808€,

* de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, 36.500€,

* de l'article 700 du code de procédure civile, 1.500€,

- a ordonné la remise des bulletins de salaire conformes,

- a débouté Monsieur [O] de toutes ses autres demandes,

- a débouté la société CSSI de ses demande reconventionnelles ( indemnité de préavis et article 700 du code de procédure civile),

- a laissé les dépens à la charge de la société CSSI.

Le 22 avril 2013, la société CSSI a relevé appel de ce jugement.

' Dans ses écritures développées à la barre et par des moyens qui seront analysés dans le corps du présent arrêt, l'appelante demande à la cour de:

Vu les articles L 1233 et suivants du Code de travail,

Vu les articles 15 et 17 de la convention collective SYNTEC,

Il est demandé à la Cour de :

INFIRMER le jugement dont appel en ses dispositions condamnant la société CSSI,

DIRE que Monsieur [O] devra rembourser à la société CSSI la somme nette de 54.239,85 € versée en exécution du jugement déféré,

DIRE que la prise d'acte de rupture du contrat de travail de Monsieur [O] s'analyse en une démission,

DEBOUTER Monsieur [O] de toutes ses demandes,

LE CONDAMNER à payer à CSSI la somme de 11. 270 € nets au titre de l'indemnité de préavis,

LE CONDAMNER à payer à CSSI la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

LE CONDAMNER aux entiers dépens. .

' Dans ses écritures également soutenues sur l'audience et par des moyens qui seront analysés dans le corps du présent arrêt, l'intimé demande à la cour de:

CONFIRMER le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Toulon le 25 mars 2013 en ce qu'il a jugé que la prise d'acte du contrat emportait les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

CONSTATER DIRE ET JUGER les manquements de l'employeur suffisamment graves pour justifier la rupture du contrat de travail à ses torts.

DIRE QUE la prise d'acte emporte les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse

EN CONSEQUENCE

CONDAMNER la SA CSSI au paiement des sommes suivantes:

' indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse (24 mois) : 144640 € nets

' Indemnité compensatrice de préavis 3 mois: 18079,95 € bruts

' Indemnité compensatrice de congés payés sur préavis: 1808 € bruts

' Indemnité conventionnelle de licenciement: 52230,96€ nets

' Indemnité complémentaire de base et optionnelle: 220l2,76€ nets

ORDONNER la remise de bulletins de salaire conformes au jugement à intervenir, et ce sous astreinte de 100€ par jour de retard à compter de la notification.

SE RESERVER le droit de liquider l'astreinte

DIRE que les intérêts porteront intérêts de droit à compter de la saisine du conseil de prud'hommes par Monsieur [O]

CONDAMNER la SA CSSI au paiement de la somme de 5000€ au titre des frais irrépétibles outre les entiers dépens.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures oralement soutenues à l'audience.

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Sur la recevabilité de l'appel :

La recevabilité de l'appel n'est pas discutée. Les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d'office.

Sur le fond :

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixant pas les limites du litige, le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

Pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les faits invoqués par le salarié doivent non seulement être établis, mais constituer des manquements d'une gravité suffisante.

Si un doute subsiste, il profite à l'employeur.

Monsieur [O] fait valoir que sa nouvelle affectation n'est jamais devenue effective. Il expose que celle-ci consistait en un poste de chef de projet dans la division Défense, rattachée administrativement à l'activité ITS au [Localité 1] et se situant géographiquement sur cette commune également, pour prendre la responsabilité de la part incombant à la société CSSI dans la réalisation d'un projet d'envergure, le projet FABEC, ce qui représentait pour lui une réelle opportunité d'évolution de carrière et justifiait son déménagement en région parisienne.

La société CSSI répond en affirmant avoir rempli ses obligations légales consistant à éviter les licenciements et que si elle a, au final, maintenu Monsieur [O] sur ses projets à [Localité 2] c'est en raison de l'évolution favorable de l'activité sur le site de [Localité 2] ( nouveau projet, projet SACHEM, perspectives favorables à la poursuite du projet 'plan d'eau de [Localité 2]') intervenue depuis l'annonce de la réorganisation et la consultation des instances représentatives, qu'elle l'a fait en accord avec les deux divisions, ITS d'une part, entité de rattachement du salarié depuis septembre 2011 et DES d'autre part, entité qui présentait des besoins. L'appelante soutient également ne pas avoir manqué à son engagement unilatéral de reclassement en n'affectant pas Monsieur [O] à la mission FABEC, en exposant que l'affectation sur tel ou tel projet n'était pas contractuel et de même, concernant le lieu d'exécution du travail, elle relève qu'aucun engagement n'avait été pris sur ce point. Enfin, elle fait valoir que cette situation n'a apporté aucun changement au contrat de travail de Monsieur [O] si ce n'est son rattachement administratif au [Localité 1] puisque son travail de chef de projet a perduré de même que sa rémunération et enfin qu'il est demeuré à [Localité 2].

Dès lors, les griefs formulés par Monsieur [O], alors qu'il est établi par les diverses pièces versées aux débats, que son travail, en terme d'activité, de rémunération, de niveau hiérarchique, de responsabilité, de lieu d'exécution, est demeuré inchangé, qu'il n'est pas démontré que le travail sur le projet FABEC était un engagement réciproque et qu'il fondait à lui seul l'acceptation du salarié, et enfin que le grief concernant un frein à son évolution de carrière, de même que le projet de filialisation de la direction d'activité ITS étaient alors des éléments hypothétiques, ne sont pas suffisants pour justifier une prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur.

Dans ce cas, et d'autant que la société CSSI relève que Monsieur [O] qui, de fait n'a pas exécuté de préavis, a, dès mars 2012, intégré la société 4S FRANCE à [Localité 2] en qualité de directeur général, affirmation non contredite par Monsieur [O], cette rupture doit être analysée comme une démission.

Le jugement sera donc infirmé et Monsieur [O] débouté des demandes pécuniaires liées aux effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le présent arrêt infirmatif constituant le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, ces sommes portant intérêt au taux légal à compter de la présente décision, il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu à statuer sur la demande de restitution faite par la société CSSI.

Sur la demande de paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, s'agissant d'une démission, rien ne justifiait que le salarié ne se maintienne pas dans l'entreprise le temps d'exécuter la période de préavis, situation qui sera réparée par la condamnation de Monsieur [O] au paiement de la somme de 11.270€ à ce titre.

Les dépens de première instance et d'appel seront supportés par Monsieur [O] qui sera en outre condamné, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, à verser à la société CSSI la somme de 1.000€.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, en matière prud'homale, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

Reçoit l'appel,

Infirme le jugement entrepris,

Et statuant à nouveau,

Dit que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par Monsieur [M] [O] constitue une démission,

Condamne Monsieur [M] [O] à payer à la société CSSI la somme de 11.270€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

Condamne Monsieur [M] [O] aux dépens de première instance et d'appel,

Condamne Monsieur [M] [O] à payer à la société CSSI la somme de 1.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER.LE CONSEILLER

POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 13/08757
Date de la décision : 27/11/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°13/08757 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-27;13.08757 ?
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