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03/11/2015 | FRANCE | N°13/21071

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 03 novembre 2015, 13/21071


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 03 NOVEMBRE 2015



N°2015/

SB/FP-D













Rôle N° 13/21071







SAS CARREFOUR HYPERMARCHES SAS





C/



[M] [O]



























Grosse délivrée le :

à :

Me Nicolas DRUJON D'ASTROS, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE



Me Houria BOULFIZA-CHABOUB,

avocat au barreau D'AIX-EN-

PROVENCE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section - en date du 03 Octobre 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/01019.





APPE...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 03 NOVEMBRE 2015

N°2015/

SB/FP-D

Rôle N° 13/21071

SAS CARREFOUR HYPERMARCHES SAS

C/

[M] [O]

Grosse délivrée le :

à :

Me Nicolas DRUJON D'ASTROS, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE

Me Houria BOULFIZA-CHABOUB, avocat au barreau D'AIX-EN-

PROVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section - en date du 03 Octobre 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/01019.

APPELANTE

SAS CARREFOUR HYPERMARCHES SAS, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Nicolas DRUJON D'ASTROS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Isabelle GUITTARD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Madame [M] [O], demeurant [Adresse 2]

comparante en personne, assistée de Me Houria BOULFIZA-CHABOUB, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 21 Septembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie BLUME, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président

Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller

Madame Sylvie BLUME, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Novembre 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Novembre 2015

Signé par Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Madame [O] a été employée par la SAS Carrefour et a saisi le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence le 18 août 2011 afin d'obtenir la requalification des contrats à durée déterminée conclus entre le 1er décembre 1999 et le 1er juin 2001 ainsi que le paiement d'une indemnité de requalification , d'un rappel de salaire pour les périodes correspondant aux périodes non travaillées entre les contrats à durée déterminée et des dommages et intérêts pour exécution lourdement fautive du contrat de travail.

Par jugement du 3 octobre 2013 le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence a:

- requalifié en contrat de travail à durée indéterminée les contrats de travail à durée déterminée successivement conclus à compter du 1er décembre 1999 jusqu'au 1er juin 2001 ;

- dit que la société Carrefour à exécuté déloyalement le contrat de travail de Madame [O];

- condamné la société Carrefour à régler à Madame [O] les sommes suivantes :

. 1500 € au titre d'une indemnité spéciale de requalification ;

. 2 297,59 € à titre de salaire et de rappel de salaire pour les périodes du 1er au 26 octobre 2000 et du 1er février au 19 mars 2001 ;

. 229,75 € à titre de congés payés afférents ;

. 22'500 € au titre de dommages et intérêts pour exécution lourdement fautive du contrat de travail ;

.1 080 € au titre de l'article 700 de procédure civile ;

- fixé la moyenne des salaires à 589,75 € ;

- ordonné l'exécution provisoire en application de l'article 515 du code de procédure civile ;

- ordonné la remise sous astreinte par la société Carrefour des bulletins de salaire des mois d'octobre 2000, février et mars 2001 et d'une attestation de Pôle Emploi mentionnant une ancienneté au 1er décembre 1999 ;

- dit que les intérêts de droit courront à compter de la saisine sauf en matière de dommages et intérêts et indemnités ;

- débouté la société Carrefour de ses demandes ;

- condamner la société Carrefour aux entiers dépens.

La société Carrefour a interjeté appel de ce jugement le 28 octobre 2013. Elle en sollicite l'infirmation et demande à la cour de:

- rejeter les demandes de Madame [O] ;

- la condamner au paiement de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-la condamner au paiement des entiers dépens.

Madame [O] sollicite la confirmation du jugement déféré sauf en ses dispositions ayant fixé le quantum des dommages et intérêts alloués pour exécution lourdement fautive de travail qu'elle demande à la cour de fixer à la somme de 35'000 €.

Elle sollicite la condamnation de la société Carrefour au paiement de la somme de 3 600 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en sus des entiers dépens.

La cour renvoie pour plus ample exposé aux écritures reprises et soutenues oralement par les conseils des parties à l'audience d'appel tenue le 21 septembre 2015.

MOTIFS DE LA DECISION

Il sera indiqué à titre liminaire que les observations respectives des parties sur les conditions de reconduction des contrats de travail à durée déterminée dont la salariée a bénéficié entre le 22 décembre 1991 et le 1er novembre 1999 sont sans intérêt pour le présent litige qui est limité, aux termes de la demande de la salariée, à l'examen des contrats conclus sur la période du 1er novembre 1999 au 31 décembre 2001.

Sur la demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée

En application de l'article L1242-1 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.

En application de l'article L1242-2 du code du travail, sous réserve des dispositions de l'article L1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans les cinq cas qu'il énumère, parmi lesquels figurent le remplacement d'un salarié (1°), l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise (2°) et les emplois saisonniers ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif étendu, il est d'usage de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois (3°).

Selon l'article L1245-1 du code du travail, est réputé à durée indéterminée tout contrat conclu en méconnaissance des dispositions des articles L1242-1 à L1242-4, L1242-6 à L1242-8, L1242-12 alinéa 1, L1243-11 alinéa 1, L1243-13, L1244-3 et L1244-4 du même code.

Sur la période du 1er décembre 1999 au 31 janvier 2000 Madame [O] a été employée selon les contrats à durée déterminée suivants.

1) contrat du 1er décembre 1999 au 31 janvier 2000: ce contrat afférent à des fonctions d'assistante de caisse de niveau 2 A est motivé par un surcroît d'activité dû aux fêtes de fin d'année et aux soldes.

2) contrat renouvelé dans les même fonctions du 1er février 2000 au 30 septembre 2000 et motivé par un surcroît d'activité temporaire dû à la mise en place des horaires îlots.

3) contrat du 27 octobre 2000 au 31 décembre 2000 visant des fonctions d'équipière de vente de niveau 1 A et motivé part un surcroît d'activité dû aux fêtes de fin d'année, aux jouets.

4) contrat du 13 mars 2001 au 31 décembre 2001 motivé par le remplacement de Madame [S] [Q] en congé maladie, aux fonctions d'assistante de caisse au niveau 2 A.

Les relations contractuelles se sont poursuivies dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er juin 2001.

La réalité du motif tiré du surcroît temporaire d'activité fondant le premier contrat à durée déterminée conclu entre le 1er décembre 1991 et le 31 janvier 2000 ne saurait être remise en cause au regard du secteur d'activité de la société Carrefour, les ventes étant indiscutablement en augmentation durant les fêtes de Noël ainsi que pendant la période des soldes courant janvier.

En revanche il doit être relevé que ce contrat venu à échéance le 31 janvier 2000 a été renouvelé pour les mêmes fonctions le 1er février 2000 pour un surcroît d'activité temporaire dû à la mise en place des horaires îlots, et ce jusqu'au 30 septembre 2000, soit pour une durée totale de 20 mois, au mépris des dispositions de l'article L 1243-13 du code du travail selon lesquelles la durée du renouvellement, ajoutée à la durée du contrat initial, ne peut excéder 18 mois.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a ordonné la requalification des contrats à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée sauf à dire qu'elle prendra effet à compter du 1er février 2000 et non du 1er décembre 2009.

Sur les conséquences financières de la requalification

Attendu qu'aux termes de l'article L 1245-2 alinéa 2 du code du travail, si le juge fait droit à la demande du salarié tendant à la requalification de son contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, il doit lui accorder une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.

La salariée percevait un salaire mensuel de 589,75 €. Compte tenu de son ancienneté et des circonstances de l'espèce, l'indemnité de 1500 € allouée à la salariée par les premiers juges a été justement appréciée et sera confirmée.

Madame [O] est également fondée à solliciter le paiement d'un rappel de salaire correspondant aux périodes non travaillées entre les contrats à durée déterminée, du 1er au 26 octobre 2000 et du 1er février au 18 mars 2001.

Le jugement sera donc confirmé en ses dispositions ayant condamné la société Carrefour à payer à ce titre à la salariée une somme de 2 297,59 € outre l'indemnité de congés payés correspondante de 229,75 €.

Sur la demande au titre d'une exécution fautive du contrat

Madame [O] reproche à son employeur un exécution fautive du contrat de travail ayant généré pour elle de multiples difficultés financières . Elle soutient :

- que la société Carrefour a modifié son contrat de travail en novembre 2005, sans son accord, en réduisant de moitié son horaire de travail hebdomadaire (15h50 au lieu de 31h) ;

- que bien qu'ayant fait l'objet d'une déclaration d'inaptitude définitive par le médecin du travail le 21 avril 2009 , l'employeur a attendu le mois de juillet 2009 pour lui régler les salaires dus postérieurement au 21 mai 2009 ;

- que la société Carrefour qui devait lui verser la rémunération qui lui était due au titre de son congé individuel de formation à compter de septembre 2009, moyennant un remboursement ultérieur par le Fongecif , s'est abstenue de le faire jusqu'à la fin du mois de février 2010.

La société Carrefour affirme que cette modification d'horaires que déplore la salariée avait été sollicitée par cette dernière . Elle ne produit toutefois aucun élément justifiant d'une telle demande de la salariée ni aucun document contractuel signé par les parties attestant d'un accord sur la réduction du temps de travail. La modification imposée dans ces conditions à la salariée caractérise une exécution déloyale du contrat de travail qui a impliqué une baisse de salaire de près de moitié de la rémunération portant nécessairement préjudice à la salariée.

La société ne conteste pas par ailleurs n'avoir réglé qu'en juillet 2009 à Madame [O] le salaire qui lui était dû à compter du 21 mai 2009 jusqu'au licenciement prononcé le 12 juillet 2010, après expiration du délai d'un mois suivant la visite médicale de reprise du 21 avril 2009. Ce retard de deux mois procède également d'une exécution déloyale du contrat, pénalisant la salariée qui n'a pu bénéficier en temps et en heure de la rémunération qui lui était due pour faire face à ses dépenses essentielles. La société Carrefour ne conteste aucunement les difficultés financières auxquelles la salariée a été confrontée puisqu'elle évoque dans ses écritures l'octroi à la salariée d'une somme de 2 400 € au titre du fonds de solidarité Carrefour en février 2010.

Cet ensemble de faits imputables à l'employeur caractérise une exécution déloyale du contrat de travail par la société Carrefour ayant causé un préjudice financier à la salariée. Toutefois l'indemnité allouée à la salariée par le conseil de prud'hommes présente un caractère excessif et sera fixée à la somme de 5 000 €.

Sur les autres demandes

Il sera ordonné la remise par la société Carrefour d'un bulletin de salaire établi conformément aux dispositions du présent arrêt ainsi qu'une attestation Pôle Emploi mentionnant une ancienneté au 1er février 2000, sans qu'il y a ait lieu d'assortir cette condamnation d'une astreinte.

Les dispositions du jugement déféré relatives à la remise des documents sous astreinte seront infirmées.

La société Carrefour succombe principalement en son appel, elle en supportera donc les entiers dépens, en sus des dépens de première instance.

La société Carrefour sera condamnée à verser à Madame [O] une somme globale de 1 800 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Carrefour.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile ;

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes du 2 octobre 2013 sauf en celles ayant condamné la SAS Carrefour Hypermarchés à payer à Madame [M] [O] 1 500 € à titre d'indemnité de requalification ;

Statuant à nouveau ;

Ordonne la requalification des contrats de travail à durée déterminée de Madame [O] en contrat de travail à durée indéterminée à effet au 1er février 2000 ;

Condamne la SAS Carrefour Hypermarchés à payer à Madame [M] [O] les sommes suivantes :

. 2 297,59 € à titre de rappel de salaire et l'indemnité de congés payés correspondante de 229,75 € ;

. 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

. 1 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel;

Ordonne la remise par la société Carrefour à Madame [M] [O] d'un bulletin de salaire établi conformément aux dispositions du présent arrêt ainsi qu'une attestation Pôle Emploi mentionnant une ancienneté au 1er février 2000, sans qu'il y a ait lieu d'assortir cette condamnation d'une astreinte ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire des parties ;

Condamne la SAS Carrefour Hypermarchés au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT

G. BOURGEOIS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 13/21071
Date de la décision : 03/11/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°13/21071 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-03;13.21071 ?
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