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01/10/2015 | FRANCE | N°14/00393

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2e chambre, 01 octobre 2015, 14/00393


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

2e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 01 OCTOBRE 2015



N° 2015/ 276













Rôle N° 14/00393







SNC COGEDIM MEDITERRANEE





C/



[Q] [Q]





















Grosse délivrée

le :

à :



Me BADIE



Me SIMONI













Décision déférée à la Cour :



Jug

ement du Tribunal de Commerce de NICE en date du 09 Janvier 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 2012F00971.





APPELANTE





SNC COGEDIM MEDITERRANEE,

demeurant [Adresse 3]



représentée par Me Sébastien BADIE, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté par Me Jean-marc SZEPETOWSKI, avocat au barreau de NICE,




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COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

2e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 01 OCTOBRE 2015

N° 2015/ 276

Rôle N° 14/00393

SNC COGEDIM MEDITERRANEE

C/

[Q] [Q]

Grosse délivrée

le :

à :

Me BADIE

Me SIMONI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de NICE en date du 09 Janvier 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 2012F00971.

APPELANTE

SNC COGEDIM MEDITERRANEE,

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Sébastien BADIE, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté par Me Jean-marc SZEPETOWSKI, avocat au barreau de NICE,

INTIME

Monsieur [Q] [Q],

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Corine SIMONI, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté par Me Jacques SALVATERRA, avocat plaidant au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Juin 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, monsieur FOHLEN, conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Octobre 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Octobre 2015,

Signé par Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

F A I T S - P R O C E D U R E - D E M A N D E S :

Le 23 avril 2008 une promesse de vente notariée sur des immeubles situés [Adresse 4] a été conclue au bénéfice de la S.N.C. COGEDIM MEDITERRANEE par Monsieur [L] [L] et les époux [B] [B]/[L] [L]; elle concerne :

- pour le premier vendeur une propriété bâtie et une parcelle de terre d'une surface totale de 34 a 02 ca cadastrées AO n°[Cadastre 1] et n° [Cadastre 2];

- pour les seconds une propriété cadastrée AO n° 240 d'une surface de 10 a 00 ca.

Cette promesse stipule :

- en page 4 une durée de 20 mois expirant le 23 décembre 2009 à 16 h 00;

- en page 6 un prix global de 4 400 000 €;

- en page 7 l'obligation pour la bénéficiaire de verser aux promettants une indemnité d'immobilisation de 220 000 € 00 dans le délai de 3 mois, et à défaut la précision que la promesse sera considéré comme nulle et non avenue;

- parmi les conditions suspensives l'obtention par la bénéficiaire d'un permis de construire, étant précisé qu'elle devra justifier auprès des promettants du dépôt de la demande de ce permis dans le délai de 5 mois; à défaut une indemnité de 20 000 € 00 sera due.

Aucune de ces 2 indemnités n'a jamais été versée par la société COGEDIM.

Cette dernière a écrit le 26 mai 2008 à Monsieur [Q] [Q] :

'(...) nous vous confirmons votre accord pour porter votre rémunération à hauteur de 90 000 euros HT forfaitairement concernant votre intervention dans la négociation auprès de Monsieur [L] pour la vente de son terrain.

'Le présent courrier est valable jusqu'à la signature de l'acte authentique'.

Le 1er juin 2009 la S.A.R.L. KAUFMAN & BROAD COTE D'AZUR a confié à la société MAGIC VIEW un . Par courrier du 25 août suivant la première société a confirmé à la seconde, qualifiée de son mandataire pour l'opération sur la propriété [L] et [B], qu'elle lui versera une rémunération de 150 000 € 00 H.T. le jour de la signature de l'acte authentique (de vente).

Les 3 immeubles précités ont fait l'objet le 1er octobre 2009 d'une promesse de vente devant un second Notaire au bénéfice de la société KAUFMAN & BROAD et au prix de 3 900 000 € 00.

La société MAGIC VIEW a établi le 15 mars 2011 contre la société KAUFMAN & BROAD sa facture de commission pour la somme précitée de 150 000 € 00 H.T. c'est-à-dire 179 400 € 00 T.T.C.

Le 24 octobre 2011 ont été signés les statuts de la S.C.I. [Adresse 5], dont les 2 associées à parts égales sont la société KAUFMAN & BROAD et la société COGEDIM.

L'acte d'acquisition, limité aux 2 parcelles de Monsieur [L], a été conclu devant le même second Notaire le 9 novembre 2011 au prix de 2 807 000 € 00 en faveur de la S.C.I. [Adresse 5].

Le 15 suivant le compte bancaire de la société KAUFMAN & BROAD a été débité de la somme de 179 400 € 00 correspondant à la commission de la société MAGIC VIEW.

Sur le terrain acquis de Monsieur [L] un programme immobilier de 8 appartements, dénommé [Adresse 6], a été construit avec :

- pour maître d'oeuvre-architecte la société ADC mandatée selon convention du 31 mai 2010 par la société KAUFMAN & BROAD;

- un permis de construire accordé à cette dernière le 22 février 2011, rapporté et remplacé le 25.

Le 4 décembre 2012 Monsieur [Q] a fait assigner la société COGEDIM en paiement devant le Tribunal de Commerce de NICE, qui par jugement du 9 janvier 2014 a :

* condamné la seconde à payer au premier la somme de 90 000 € 00 H.T. avec les intérêts légaux à compter du 26 mai 2008;

* dit n'y avoir lieu à exécution provisoire;

* dit n'y avoir lieu au paiement au titre de dommages et intérêts;

* condamné la société COGEDIM à payer à Monsieur [Q] la somme de 750 € 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

La S.N.C. COGEDIM MEDITERRANEE a régulièrement interjeté appel le 10-13 janvier 2014. Par conclusions du 29 janvier 2015 elle soutient notamment que :

- pour la première promesse de vente elle avait été mise en relation avec les consorts [L] et [B] par Monsieur [Q] auquel elle avait accepté de régler une commission de 90 000 € 00; cette promesse n'a pas été suivie de la conclusion d'un acte authentique parce qu'elle-même n'a pas poursuivi le projet, et faute de versement de l'indemnité d'immobilisation dans les 3 mois est devenue caduque; les consorts [L] et [B] ne pouvaient après ce délai réclamer une indemnité d'immobilisation, mais leur abstention ne peut être invoquée par Monsieur [Q];

- la seconde promesse de vente résulte d'un rapprochement des consorts [L] et [B] et de la société KAUFMAN & BROAD par l'agence MAGIC VIEW bénéficiaire d'un mandat de recherche et qui a bénéficié d'une commission de 150 000 € 00;

- elle a acquis le terrain dans le cadre non de la promesse de vente conclue grâce à Monsieur [Q], mais de celle conclue par l'intermédiaire de l'agence MAGIC VIEW qu'elle avait mandatée et qu'elle a commissionnée suite à sa facture du 15 mars 2011; la commission de 179 400 € 00 a été débitée de son compte le 15 novembre suivant;

- la première promesse de vente est devenue caduque le 23 juillet 2008, et ce n'est que quinze mois après que la seconde est intervenue;

- le fait que la société KAUFMAN & BROAD se soit associée avec elle pour constituer la S.C.I. [Adresse 5] ne saurait permettre à Monsieur [Q] de réclamer une quelconque rémunération dans le cadre d'une vente dans laquelle il n'a joué aucun rôle; seule la première société a signé le contrat d'architecte et obtenu le permis de construire;

- Monsieur [Q] n'a droit à rien vu les changements de prix et de parties entre la promesse le concernant, et celle ultérieure à laquelle il est étranger; la défaillance d'une condition suspensive dans un acte entraîne la caducité de ce dernier, et l'absence d'une quelconque rémunération pour l'intermédiaire;

- le point de départ des intérêts au taux légal a été fixé par le jugement au 26 mai 2008 date de la lettre d'elle-même reconnaissant un droit à rémunération à Monsieur [Q], alors que ce droit n'est exigible qu'à la date de la conclusion de la vente.

L'appelante demande à la Cour de :

- réformer le jugement;

- débouter Monsieur [Q] de l'intégralité de ses demandes;

- ordonner le bâtonnement de l'attendu suivant qui commence par 'La Cour fera par conséquent litière de toute l'argumentation ...' jusqu'à '... Plazza Verde des 4 Chemins' en page 9 des conclusions d'appel de Monsieur [Q];

- le condamner à lui payer la somme de 5 000 € 00 sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions du 12 novembre 2014 Monsieur [Q] [Q] répond notamment que :

- la promesse de 2008 stipulait (page 9) une pénalité de 20 000 € 00 contre l'acheteur qui ne déposait pas une demande de permis de construire dans un délai de 5 mois; la société COGEDIM n'a pas effectué ce dépôt, et n'a pas été inquiétée par les consorts [L] et [B] parce qu'elle a continué l'affaire avec la société KAUFMAN & BROAD à un prix meilleur pour eux;

- le terrain [L] a été apporté à la société COGEDIM par lui-même, et non par l'agence immobilière MAGIC VIEW que celle-là n'avait pas mandatée;

- l'intervention de l'agence MAGIC VIEW est surréaliste : aucun mandat de vente par les consorts [L] et [B] n'est produit en faveur de celle-ci; l'acte notarié du 1er octobre 2009 ne fait aucune mention de la commission pour cette agence;

- selon le journal NICE MATIN du 31 mai 2013 la société COGEDIM aurait fait bénéficier un fonctionnaire municipal d'ANTIBES attaché au service de l'urbanisme d'un tarif préférentiel dans une résidence antiboise qui n'est autre que la résidence [Adresse 6];

- le courrier de la société COGEDIM du 26 mai 2008 ne fait pas de la réalisation par acte authentique une condition sine qua non à l'obligation de le payer; cette société veut confondre l'obligation à la dette et le paiement de celle-ci.

L'intimé demande à la Cour, vu les articles 1134 et 1147 du Code Civil, de :

- confirmer le jugement;

- y ajoutant condamner la société COGEDIM à lui payer la somme de 10 000 € 00 à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et vexatoire;

- condamner la même à lui payer la somme de 5 000 € 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 mai 2015.

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M O T I F S D E L ' A R R E T :

Sur le bâtonnement :

Le paragraphe des conclusions de Monsieur [Q] critiqué par la société COGEDIM comporte notamment la phrase suivante : celle-ci 'aurait fait bénéficier un fonctionnaire attaché au service de l'urbanisme de la mairie d'[Localité 1] d'un tarif préférentiel dans une résidence antiboise qui n'est autre que la[Adresse 1]'. Cette phrase d'une part n'est pas publique, et d'autre part emploie le conditionnel. Pour ce double motif elle n'a donc pas à être bâtonnée.

Sur le fond :

Il est acquis que la promesse de vente conclue le 23 avril 2008 sur 3 parcelles pour le prix de 4 400 000 € 00 par Monsieur [L] et les époux [B]/[L] au bénéfice de la société COGEDIM, grâce à l'intervention de Monsieur [Q] qui devait pour cela percevoir une rémunération de 90 000 € 00 H.T. payable par définition lors de l'acte de vente, n'a pas été suivie de ce dernier; il en résulte que cette rémunération n'est pas due, peu important que cette société n'ait pas versé les 2 indemnités de 220 000 € 00 et de 20 000 € 00 mises à sa charge par cette promesse.

Ces parcelles ont ensuite fait l'objet :

- pour toutes les 3 le 1er octobre 2009 d'une promesse de vente au bénéfice de la société KAUFMAN & BROAD au prix de 3 900 000 € 00;

- pour les 2 de Monsieur [L] [soit 77,28 % de la superficie totale] d'une vente le 9 novembre 2011 au prix de 2 807 000 € 00 en faveur de la S.C.I. [Adresse 5];

actes auquel Monsieur [Q] n'a pas directement participé.

Cependant ces 3 sociétés sont étroitement liées puisque d'une part la S.C.I. [Adresse 5] a été constituée avec pour associées à parts égales la société KAUFMAN & BROAD et la société COGEDIM, et d'autre part les parcelles acquises par la seule première ont fait l'objet d'une mission de maître d'oeuvre-architecte et d'un permis de construire bénéficiant à la deuxième ce qui est curieux puisqu'elle n'est pourtant pas propriétaire. Il en résulte que l'intervention de Monsieur [Q] au profit de la société COGEDIM a été, implicitement mais nécessairement, transmise par celle-ci au bénéfice tant de la société KAUFMAN & BROAD que de la S.C.I. [Adresse 5], ce qui permet de lui attribuer une valeur juridique. La société COGEDIM, qui n'a pas conservé pour elle seule les parcelles obtenues uniquement par l'intervention de Monsieur [Q], a ainsi manqué à son obligation de bonne foi de l'article 1134 alinéa 3 du Code Civil.

Pour autant, dans la mesure où la promesse de vente à la société COGEDIM du 23 avril 2008 n'a pas abouti à un acte de vente effective, Monsieur [Q] a droit non à sa rémunération convenue pour la somme de 90 000 € 00 H.T. comme l'a retenu le Tribunal de Commerce, mais à la perte d'une chance d'avoir pu percevoir cette somme puisqu'a disparu de façon actuelle et certaine l'éventualité favorable de cette perception. Le préjudice ainsi subi est indemnisé par la somme de 80 000 € 00.

Le point de départ des intérêts au taux légal sur la somme due par la société COGEDIM, conformément à l'article 1153 alinéa 3 du Code Civil, ne peut être le jour de l'engagement de celle-ci soit le 26 mai 2008, mais uniquement le jour de la sommation de payer constituée par la réception de la réclamation de l'avocat de Monsieur [Q] le 26 octobre 2012.

Si la résistance de la société COGEDIM était injustifiée, son caractère abusif et vexatoire n'est pas démontré, non plus que le préjudice spécifique qu'en aurait subi Monsieur [Q]; par suite la Cour déboutera ce dernier de sa demande de dommages et intérêts.

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D E C I S I O N

La Cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire.

Confirme le jugement du 9 janvier 2014, mais en réduisant le montant de la condamnation à la somme de 80 000 € 00, et en retardant au 26 octobre 2012 le point de départ des intérêts au taux légal.

Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile condamne la S.N.C. COGEDIM MEDITERRANEE à payer à Monsieur [Q] [Q] une indemnité de 5 000 € 00 au titre des frais irrépétibles d'appel.

Rejette toutes autres demandes.

Condamne la S.N.C. COGEDIM MEDITERRANEE aux dépens d'appel, avec application de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Le GREFFIER. Le PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 14/00393
Date de la décision : 01/10/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 02, arrêt n°14/00393 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-10-01;14.00393 ?
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