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10/09/2015 | FRANCE | N°13/23667

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre b, 10 septembre 2015, 13/23667


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B



ARRÊT SUR RENVOI

DE CASSATION



ARRÊT AU FOND

DU 10 SEPTEMBRE 2015



N° 2015/560



BP









Rôle N° 13/23667





[B] [K]





C/



CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU MIDI

































Grosse délivrée

le :

à :

Me Nicole LOUBATIERES, avocat au barreau de

MONTPELLIER



Me Olivier BONIJOLY, avocat au barreau de MONTPELLIER







Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Arrêt en date du 10 septembre 2015 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 14 Novembre 2013, qui a cassé...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B

ARRÊT SUR RENVOI

DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 10 SEPTEMBRE 2015

N° 2015/560

BP

Rôle N° 13/23667

[B] [K]

C/

CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU MIDI

Grosse délivrée

le :

à :

Me Nicole LOUBATIERES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Me Olivier BONIJOLY, avocat au barreau de MONTPELLIER

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Arrêt en date du 10 septembre 2015 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 14 Novembre 2013, qui a cassé l'arrêt rendu le 02 novembre 2011 par la Cour d'appel de MONTPELLIER

APPELANTE

Madame [B] [K], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Nicole LOUBATIERES, avocat au barreau de MONTPELLIER

([Adresse 2])

INTIMEE

CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU MIDI, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Olivier BONIJOLY, avocat au barreau de MONTPELLIER

([Adresse 4])

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 25 Juin 2015 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Madame Brigitte PELTIER, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Caroline LOGIEST.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Septembre 2015.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Septembre 2015.

Signé par Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre et Madame Caroline LOGIEST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme [B] [K] a été embauchée par la Caisse Régionale du Crédit agricole du Languedoc (Crédit agricole) le 1er octobre 1998 suivant contrat de travail à durée déterminée qui s'est poursuivi à durée indéterminée en qualité d'assistante commerciale ; elle a été convoquée à un entretien préalable fixé au 27 avril 2009 et concomitamment lui a été notifiée une mise à pied à titre conservatoire ; par un autre courrier en date du 23 avril 2009 elle a été convoquée à un conseil de discipline devant se tenir le 4 mai 2009 afin que soit recueilli l'avis de celui-ci sur la mesure de licenciement envisagée ; elle a été licenciée pour faute grave par lettre du 07 mai 2009, au motif notamment d'agissements contraires aux procédures en vigueur au Crédit agricole et non respect réitéré des dispositions du règlement intérieur et de la charte de déontologie.

Contestant cette mesure Mme [K] a saisi le 05 août 2009 le conseil de prud'hommes de Montpellier lequel par jugement rendu le 03 juin 2010 l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes.

Par arrêt en date du 2 novembre 2011, la cour d'appel de Montpellier a confirmé la décision déférée.

Au visa de l'article 13 de la convention collective nationale du Crédit agricole et motif que « pour dire que le licenciement de la salariée reposait sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel retient que si le délai de communication du dossier n'avait pas été respecté en ce qui concernait la salariée elle-même, le délégué du personnel qui l'assistait devant le conseil de discipline avait reçu le dossier neuf jours avant la tenue de l'instance disciplinaire dont l'avis avait ainsi régulièrement été recueilli après audition de la salariée et de la personne appelée à l'assister ; Qu'en se déterminant ainsi alors que le procès-verbal du conseil de discipline établissait que le délégué du personnel n'assistait pas la salariée mais était l'un des membres du conseil de discipline, de sorte qu'il ne résultait pas du respect, à son égard, du délai de communication du dossier que la salariée avait disposé du temps nécessaire à la préparation de sa défense, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé » la cour de cassation a cassé et annulé cette décision par arrêt en date du 14 novembre 2013 et a remis, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyé devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

Aux termes des écritures, reprises oralement à l'audience, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions, les parties formulent les demandes suivantes :

Mme [K] conclut à la réformation du jugement déféré ; au non respect de la procédure visée par la convention collective applicable s'agissant d'une irrégularité affectant une garantie de fond ; à la nullité du licenciement ; à l'absence de cause réelle et sérieuse ; à la condamnation de la société Crédit agricole à lui payer la somme de 39.613,50 euros au titre de l'article L. 1235-3 du code du travail, 17.721 euros à titre d'indemnité de licenciement, 4.672 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre congés payés y afférents, 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient qu'ayant reçu les pièces relatives à son dossier le 28 avril 2009, soit moins de huit jours avant le 4 mai 2009, date de la tenue du conseil de discipline, il y a eu "violation évidente du délai imposé conventionnellement à l'occasion d'une procédure de consultation du conseil de discipline", constitutive d'une "grave irrégularité qui, affectant une garantie de fond" prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ; que pire, « le délégué du personnel choisi a siégé dans le conseil de discipline en qualité de juge après avoir prétendu être [son] conseil », situation ahurissante pointée par la cour de cassation ; que dans ces conditions le licenciement ne peut qu'être déclaré sans cause réelle et sérieuse ; que ses demandes en paiement sont justifiées.

Le Crédit agricole conclut au débouté adverse, à la régularité de la procédure de licenciement, à un licenciement fondé sur une faute grave outre paiement d'une somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir, s'agissant du respect de la procédure de licenciement, que si l'absence de consultation du conseil de discipline constitue bien une irrégularité de fond, l'inobservation du délai de 8 jours prescrit par l'article 13 de la convention collective est une simple irrégularité de forme qui ne peut avoir pour effet de rendre le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, comme cela résulte au demeurant de la jurisprudence de la cour de cassation ; que ce n'est que lorsque le délai de présentation a eu pour effet d'empêcher le salarié d'assurer utilement sa défense que les juges peuvent considérer le licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la salariée ayant assuré sa défense, elle ne pourrait prétendre qu'à une indemnité réparant une irrégularité de forme, non supérieure à un mois de salaire ; que le délégué du personnel l'ayant assistée lors de l'entretien préalable du 27 avril, ayant reçu son entier dossier dès le 24 avril 2009, atteste avoir préparé l'entretien préalable « sur la base des éléments du conseil de discipline que j'avais en ma possession » ; qu'elle ne s'est plainte d'aucune irrégularité lors du conseil de discipline, et a donné des explications sur chaque grief ; que les demandes en paiement, de surcroît calculées sur une moyenne de salaire erronée, ne sont ni fondées, ni justifiées.

SUR CE

L'article 12 de la convention collective nationale du Crédit Agricole dispose qu'en cas de faute dans l'exercice de la profession diverses mesures disciplinaires peuvent être prises et que dans l'hypothèse d'un licenciement pour faute grave l'avis du conseil de discipline doit être préalablement recueilli dans les conditions définies par l'article 13 de la convention précitée ; cet article énonce : « Il est institué un organe disciplinaire chargé (...) de formuler un avis sur les sanctions à donner aux fautes professionnelles susceptibles d'entraîner la rétrogradation ou le licenciement du personnel titulaire. / Le conseil de discipline est composé de quatre membres : deux membres désignés par le conseil d'administration ; un délégué du personnel du collège auquel appartient l'agent et choisi par lui ; un agent du même collège, élu dans les mêmes conditions et en même temps que les délégués du personnel. / L'intéressé recevra communication de son dossier au moins huit jours à l'avance et pourra se faire assister d'un salarié de la Caisse régionale choisi par lui. Les membres du conseil de discipline auront, dans les mêmes délais, communication du dossier (...) ».

Au cas d'espèce, Mme [K], avisée par courrier remis en main le 17 avril 2009, de ce que son licenciement pour faute grave était envisagé et de ce qu'elle serait convoquée devant le conseil de discipline conformément aux dispositions de l'art 13 de la convention collective, a été mise à pied à titre conservatoire et convoquée à un entretien préalable fixé au 27 avril.

Par courrier recommandé du 23 avril 2009, auquel était joint le dossier présenté au conseil de discipline, elle a été avisée de sa réunion fixée au 4 mai 2009 et convoquée à cette date ; ce courrier précise « Vous pouvez vous faire assister au cours de ce conseil par une personne de votre choix, salariée de la Caisse Régionale. / Par ailleurs, je vous précise qu'en application de cette même convention collective nationale , vous devez désigner un délégué du personnel du collège auquel vous appartenez (liste annexée) qui siégera au conseil de discipline » ; si l'employeur fait valoir qu'il avait pris la peine de tenir compte du délai de 48 heures d'acheminement de la Poste en déposant le dossier 10 jours calendaires avant la date prévue pour le conseil de discipline, il ne conteste pas que la salariée n'en a reçu communication que le 28 avril 2009, soit dans un délai inférieur à celui de 8 jours prévu par l'article 13 sus visé de la convention collective applicable.

Toutefois, le non-respect du délai prescrit par cet article 13, pour communication du dossier au salarié avant la réunion du conseil de discipline, ne constitue pas une garantie de fond, sauf si cette irrégularité a eu pour effet de priver le salarié de la faculté d'assurer utilement sa défense ; le Crédit agricole est en conséquence fondé à soutenir que ce n'est que lorsque le délai de présentation a eu pour effet d'empêcher le salarié d'assurer utilement sa défense que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

M. [J], délégué du personnel choisi par la salarié, a été convoqué par lettre remise en main le 24 avril 2009, accompagnée du dossier devant être présenté au conseil de discipline ; il atteste avoir préparé l'entretien préalable de licenciement du 27 avril 2009, au moyen du dossier qui lui avait été remis dans le cadre de sa convocation pour la réunion du conseil de discipline ; il en résulte que Mme [K] a choisi M. [J] en qualité de délégué du personnel antérieurement à la date du 24 avril 2009 et donc également antérieurement à la date du 27 avril, à laquelle s'est tenu l'entretien préalable au cours duquel elle a choisi d'être assistée par ce même salarié ; elle n'est donc pas fondée à soutenir que la présence de M. [J], choisi par elle en qualité de membre du conseil de discipline puis conseiller du salarié à l'occasion de l'entretien préalable, a constitué une irrégularité aggravante, et ce, d'autant qu'il ressort du compte rendu du conseil de discipline que ce salarié, intervenu en sa faveur lors du conseil de discipline au titre des différents griefs, a rendu un avis défavorable à la sanction envisagée.

Or, il ressort de ce même compte rendu du conseil de discipline que Mme [K] a pu répondre précisément au titre de chacun des griefs évoqués et elle ne soutient pas qu'un plus long délai lui aurait permis d'apporter des réponses différentes de celles qu'elle a faites ou d'assurer plus utilement sa défense, de sorte qu'il ne résulte pas des circonstances de la cause que l'inobservation du délai de convocation en litige, a privé l'intéressée de la possibilité d'assurer utilement sa défense devant le conseil de discipline ; cette irrégularité justifie en revanche qu'il lui soit alloué une indemnité de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure irrégulière.

Mme [K] sera en conséquence déboutée de ses demandes et le jugement déféré confirmé en toutes ses dispositions.

Les dépens ainsi qu'une somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile seront mis à la charge du Crédit agricole qui succombe partiellement.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, en matière prud'homale, et par mise à disposition au greffe,

Réforme le jugement déféré, et statuant à nouveau

Condamne la société Crédit agricole à payer à Mme [K] la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure irrégulière et 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société Crédit agricole aux entiers dépens.

Déboute les parties de toutes demandes, fins et conclusions autres, plus amples ou contraires.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre b
Numéro d'arrêt : 13/23667
Date de la décision : 10/09/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°13/23667 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-10;13.23667 ?
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