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01/09/2015 | FRANCE | N°14/20837

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 01 septembre 2015, 14/20837


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 01 SEPTEMBRE 2015



N°2015/

GB/FP-D













Rôle N° 14/20837







SCP [C] [G] [U] [Z]





C/



[F] [K] épouse [D]





































Grosse délivrée le :

à :

Me Christine GAILHBAUD, avocat au barreau de GRASSE



Me Gui

llaume CARRE, avocat au barreau de NICE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de NICE - section AD - en date du 06 Août 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 12/205.





APPELANTE



SCP [C] [G] [U] [Z], dem...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 01 SEPTEMBRE 2015

N°2015/

GB/FP-D

Rôle N° 14/20837

SCP [C] [G] [U] [Z]

C/

[F] [K] épouse [D]

Grosse délivrée le :

à :

Me Christine GAILHBAUD, avocat au barreau de GRASSE

Me Guillaume CARRE, avocat au barreau de NICE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de NICE - section AD - en date du 06 Août 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 12/205.

APPELANTE

SCP [C] [G] [U] [Z], demeurant NOTAIRES - [Adresse 1]

représentée par Me Christine GAILHBAUD, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEE

Madame [F] [K] épouse [D], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Guillaume CARRE, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786, 910 et 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 10 juin 2015, en audience publique, les avocats ayant été invités à l'appel des causes à demander à ce que l'affaire soit renvoyée à une audience collégiale s'ils n'acceptaient pas de plaider devant les magistrats rapporteurs et ayant renoncé à cette collégialité, l'affaire a été débattue devant Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président et Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller

Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Septembre 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Septembre 2015

Signé par Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE

Par lettre recommandée postée le 21 octobre 2014, la SCP [C], [G], [U], [Z] a relevé appel du jugement de départage rendu le 6 août 2014 par le conseil de prud'hommes de Nice, à elle notifié le 16 octobre 2014, la condamnant à verser à Mme [D] les sommes suivantes :

6 200 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

20 000 euros pour licenciement illégitime,

10 000 euros pour harcèlement moral.

L'employeur conclut au rejet de toutes les demandes qui lui sont faites ; son conseil réclame 3 000 euros pour frais irrépétibles.

Au bénéfice de son appel incident, la salariée conclut à l'annulation d'une sanction disciplinaire, puis à la confirmation du jugement déféré à la censure de la cour.

La cour renvoie pour plus ample exposé aux écritures reprises et soutenues par les conseils des parties à l'audience d'appel tenue le 10 juin 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Mme [D] a été au service de ces SCP de notaires, en dernier lieu en qualité d'employée aux écritures, du 1er septembre 1991 au 6 février 2012, date à laquelle elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail en dénonçant des faits de harcèlement moral imputés au notaire [U] 'dont les méthodes de travail, de gestion de personnel et de management sont totalement condamnables et indignes'.

La salariée fait état des faits suivants :

- une misogynie affichée se traduisant par l'expression de son mépris pour les salariés de sexe opposé,

- une violente agression verbale survenue le 18 novembre 2011.

Nonobstant les dénégations de l'employeur, ces faits, pris dans leur ensemble, sont de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral.

La salariée verse aux débats plusieurs attestations, régulières en la forme :

- le témoin [B], ancienne collègue de travail, dont la relation est insuffisamment précise pour éclairer la cour : 'Avoir constaté que depuis plus d'un an, les relations de travail entre Mme [D] et Me [E] [U] n'étaient plus normales.';

- le témoin [Q], client de l'étude, dont la relation est à nouveau insuffisamment précise pour éclairer la cour : 'Le 13 octobre 2010...s'ensuivit une discussion houleuse professionnelle se soldant par la réplique 'si vous n'êtes pas satisfaite, vous pouvez partir' ce que fit Mme [D]', étant observé que ce témoin n'identifie pas M° [U] comme étant l'auteur de ce propos, se bornant à l'imputer à 'l'un des associés de Maître [G]';

- le témoin [X], ancien notaire assistant, laquelle déclare à la cour : 'Que par ailleurs, la position de mon bureau m'a également permis tout au long de ma présence dans l'étude d'être le témoin du comportement et de l'attitude de Me [U]. Celui-ci a toujours fait preuve de la plus grande grossièreté et du plus grand manque de respect, tant à l'égard de son personnel que des clients eux-mêmes. Que Me [U] peut se montrer capable d'une grande violence et de tentative d'intimidation vis-à-vis de son personnel, voire de ses associés. Il a même osé traîner une cliente hors de l'étude alors qu'elle était assise dans un fauteuil de son bureau, attitude non seulement irrespectueuse et humiliante pour la cliente, mais également indigne d'un notaire, et d'un patron, censé montrer l'exemple. Que Me [U] s'est toujours montré extrêmement mysogine et a toujours affiché le plus grand mépris vis-à-vis des femmes en général, et de Mme [D] en particulier. Il s'amusait à tirer des élastiques dans la direction de celle-ci, malgré ses prières de cesser ce petit jeu dangereux et humiliant ; par ailleurs, dès mon entrée dans l'étude j'ai pu noter à mes dépens que Me [U] affectionnait particulièrement de reluquer de façon insistante pouvant mettre extrêmement mal à l'aise, les seins et les fesses de ses employées poussant l'humiliation jusqu'à faire des remarques plus que déplacées à celles-ci.'.

Ce témoignage, qui a retenu toute l'attention de la cour, n'emporte pas sa conviction car, hormis le stupide jeu de l'élastique qu'il décrit, dont l'existence est farouchement contestée, cette relation manque de précision sur la manière selon laquelle maître [U] aurait fait sentir à Mme [D] le poids de sa misogynie.

L'employeur rappelle utilement que Mme [X], qui a quitté l'étude en septembre 2010, un an et demi avant la prise d'acte de Mme [D], est partiale car un litige l'a opposé à la SCP à la suite de son licenciement pour motif économique, étant observé que durant l'instance prud'homale Mme [X] n'a pas reproché à maître [U] un harcèlement moral ou sexuel, nonobstant la description qu'elle fait de son comportement.

Par ailleurs, le conseil de l'employeur verse aux débats plusieurs attestations de salariés, dont l'attestation de la salariée protégée [I], lesquels, contrairement à ce que le témoin soutient, attestent du fait que les relations de travail avec maître [U] sont harmonieuses.

En conséquence de quoi, le témoignage partial de Mme [X] est sans portée.

- le témoin [N], amie de Mme [D], dont le témoignage fait état des doléances de la salariée, sans avoir directement constaté les faits rapportés, de sorte que cette relation est sans portée ;

- pour le même motif pris d'un témoignage indirect, les déclarations de Mme [F] [D], belle-soeur de la salariée, et de M. [A] [D], son époux, sont sans portée.

Reste la journée du 18 novembre 2011 que Mme [D] de la manière suivante :

'...Quelques minutes après, Maître [E] [U] a fait irruption dans mon bureau en hurlant.

Il a fermé la porte coulissante de mon bureau en y laissant sa main afin de maintenir cette porte bien fermée ; j'étais assise derrière mon bureau, tentant de parler, et Maître [U] [R] hurlait violemment qu'il n'en avait 'rien à foutre de ce que je pouvais dire'.

J'ai eu peur et lui ai demandé, en le repoussant de la poignée de la porte de mon bureau, de ma laisser sortir, et je me suis réfugiée dans le bureau de Me [G].

Maître [U] m'y a suivi et toujours en hurlant m'a adressé des propos selon lesquels 'j'avais mauvais caractère' alors qu'en vingt ans au sein de l'étude, mon travail et mon comportement n'ont fait l'objet d'aucun reproche, que je me plaignais tout le temps, que j'allais prendre un deuxième avertissement et ensuite un troisième etc...

Maître [U] est sorti du bureau de Maître [G], puis je suis sortie du bureau laissant Maître [G] a son travail et Maître [U] qui était dans l'entrée de l'étude m'a menacée en ces termes : 'tu vas voir, quand les deux vont être partis, tu vas dégager à grands coups de pieds dans le cul'.

A la suite de quoi, je me suis effondrée enn pleurs, au point que Me [C] m'a demandée de me calmer et de quitter mon poste à midi précise.'.

Pour conforter son témoignage, formellement contesté par la partie adverse, Mme [D] ne verse aux débats aucune pièce de nature à accréditer sa narration.

De son côté, l'employeur produit l'attestation , régulière en la forme, de Mme [O], standardiste, laquelle déclare à la cour : 'Le vendredi 18 Novembre 2011 aux alentours de 10H45, date des faits entre Me [U] et Mme [D]; je n'ai vu ni entendu aucune violence de la part de Me [U] à l'encontre de Mme [D], alors que j'était à mon poste à l'accueil de l'étude'.

Si maître [U], comme le prétend la salariée, avait hurlé et proféré une menace étant dans l'entrée de l'étude, cette standardiste n'aurait pas manqué de voir et d'entendre la dispute.

Son témoignage, le seul présenté pour apprécier la véracité du fait, ne peut que plaider en faveur de maître [U], lequel s'est toujours défendu du harcèlement moral reproché.

Ajoutons, au plan du droit, que le fait du 18 novembre 2011 serait unique, donc non susceptible de caractériser un harcèlement qui suppose une répétition de faits.

D'où il suit que la cour, infirmant, dira que les faits de harcèlement moral imputés à l'employeur ne sont pas établis, en conséquence de quoi la prise d'acte, exclusivement motivée par l'affirmation de ces faits de harcèlement, produira les effets d'une démission sans le bénéfice de l'indemnité de licenciement ni la prise en compte du préjudice né de la rupture du contrat de travail.

.../...

La salariée poursuit l'annulation de l'avertissement qui lui a été infligé le 25 janvier 2012 pour le motif suivant :

'Nous notons que les faits qui vous sont reprochés sont identiques à ceux ayant fait l'objet du premier avertissement, au titre des grossièretés et d'un abandon de poste. Nous comptons donc sur vous mour qu'à votre retour d'arrêt de travail, l'exécution du travail puisse se poursuivre sans que nous ayons à nouveau à sanctionner votre attitude que ce soit en présente des clients de l'Etude ou à l'égard des membres de l'Etude.'.

Pour établir la véracité des faits reprochés, le conseil de l'employeur verse les pièces décisives suivantes :

- l'attestation, régulière en la forme, du client Steiner, lequel déclare : '... J'ai a plusieurs fois des sujets de griefs concernant les manières [un mot illisible] et assez vulgaires d'une de leurs collaboratrices : Mme [D] qui selon son humeur changeante, pouvait vous traiter de manière désastreuse.';

- l'attestation, régulière en la forme, du client [L], lequel déclare : '...Client depuis de nombreuses années... J'ai pu constater en revanche tout particulièrement au mois de novembre 2011 le comportement inadmissible d'une employée de l'étude. En effet, Madame [D] a fait preuve devant moi et envers d'autres clients d'un comportement agressif et vulgaire.'.

Ce comportement de Mme [D] justifiait le reproche de la part de son employeur.

D'où il suit que cet avertissement ne sera pas annulé.

.../...

L'intimée supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile :

Infirme le jugement ;

Rejette toutes les demandes présentées par Mme [D] ;

La condamne aux entiers dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme [D] à verser 1 000 euros à la SCP [C], [G], [U] et [Z].

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

Gilles BOURGEOIS faisant fonction.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 14/20837
Date de la décision : 01/09/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°14/20837 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-01;14.20837 ?
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