COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 17 FEVRIER 2015
A.D
N° 2015/
Rôle N° 14/05163
S.A.R.L. LAAR
C/
[I] [C]
Grosse délivrée
le :
à :Me Simoni
Me Revah
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS en date du 12 Mars 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/01008.
APPELANTE
S.A.R.L. LAAR prise en la personne de son représentant légal actuellement en exercice, demeurant en sa qualité audit siège, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Corine SIMONI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me André DAUMAS, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE
INTIME
Monsieur [I] [C], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Patrice REVAH, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 Janvier 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme DAMPFHOFFER, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Georges TORREGROSA, Président
Monsieur Olivier BRUE, Conseiller
Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Février 2015
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Février 2015,
Signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE :
En 2008, M [C], garagiste dépanneur, a acheté un camion et une grue d'occasion.
Il a, ensuite, confié ce véhicule à la société Laar pour divers travaux d'aménagement et notamment la confection et la pose d'un faux chassis afin de recevoir la grue. Ces travaux ont été facturés le 25 juillet 2008 pour le prix de 80132€, mais le 7 mai 2009, les soudures du faux chassis ont cédé et entrainé une déformation du chassis porteur.
Le véhicule était alors pris en charge pour réparation par la société Laar qui le confiait à a société Omars, sise à Cuneo en Italie.
Suite aux anomalies constatées après cette intervention, M [C] a obtenu la désignation d'un expert en référé, lequel a conclu, le 20 Novembre 2011, en préconisant des réparations pour 17175 € HT outre divers frais pour 19542,50€ HT .
C'est dans ces conditions que M [C] a fait assigner la société LAAR, lui réclamant l'indemnisation de son préjudice.
Par jugement contradictoire du 12 mars 2014, le Tribunal de Grande Instance de Digne a statué ainsi qu'il suit :
- condamne la société Laar à payer à M. [C] la somme de 36'717,50 euros hors taxes, assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2012,
- condamne la société Laar à payer à M. [C] la somme de 1500 € par application de l'article 700du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.
Par déclaration du 13 mars 2014, la société Laar a relevé appel de cette décision.
Par conclusions du 29 septembre 2014, l'appelante demande à la cour de :
- la recevoir en son appel,
- dire que l'intervention critiquée par M. [C] a été réalisée et facturée directement par la société Omars Italie le 18 juin 2009 pour 6960 € et payée directement par M. [C],
- dire qu'il n'existe aucun contrat passé et exécuté entre M. [C] et la société Laar au sens de l'article 1134 du Code civil, et encore moins de contrat de sous-traitance,
- en conséquence, réformer le jugement entrepris et débouter M. [C] de ses demandes,
- à titre subsidiaire, si sa responsabilité était retenue, dire que les désordres ayant affecté le camion réparé par la société Omars sont la conséquence d'une utilisation inadéquate de la grue montée sur le camion,
- ne pas homologuer le rapport d'expertise judiciaire qui a été réalisé uniquement à charge, qui fait référence à un contrat de sous-traitance inexistant et qui comporte une évaluation du préjudice totalement fantaisiste,
- débouter M. [C] de sa demande en condamnation de la société Laar à lui payer la somme de 10'000€ au titre de dommages et intérêts,
- condamner M. [C] au paiement de la somme de 2500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions du 1er août 2014 M, [C] demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société appelante à lui payer la somme de 36'717,50 euros hors taxes, outre les intérêts à compter du jour de l'assignation en référé en date du 14 novembre 2009,
y ajoutant :
- la condamner à une somme de 10'000 € de dommages et intérêts en l'état de sa mauvaise foi avérée,
- la condamner aux entiers dépens, y compris ceux du référé et d'expertise, ainsi qu'à une somme de 5000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dire que dans l'hypothèse où à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées l'exécution forcée est nécessaire par l'intermédiaire d'un huissier en application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001, ces frais seront solidairement supportés par les requis en plus de l'article 700.
L'ordonnance de clôture a été prise le 30 décembre 2014.
Motifs
Sur la recevabilité de l'appel :
Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas contestée ; que rien au dossier ne conduit la cour à le faire d'office.
Attendu que l'appel sera donc déclaré recevable.
Sur le fond :
Attendu que la société Laar prétend essentiellement que les interventions mises en cause par M [C] sont celles faites en Italie, celui-ci ne critiquant pas son intervention d'origine ayant donné lieu à la facture du 25 juillet 2008 ; qu'elle affirme n'avoir eu aucun autre lien contractuel avec M [C] que celui relatif à l'installation de l'équipement de dépannage et de la grue, et fait valoir que les travaux de réparation postérieurement faits en 2009 ont été réalisés à Cuneo, sans qu'elle n'intervienne, s'étant contentée de présenter la société Italienne lors du salon du dépannage à [Localité 1] ; que ces travaux ont d'ailleurs été facturées par l'entreprise italienne directement à M [C].
Attendu que M [C] se plaint , pour sa part et contrairement aux allégations de l'appelante, des dommages subis par son camion qu'il impute à la fois aux travaux d'origine et aux travaux de réparation réalisés en Italie.
Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats que lorsque le véhicule a été ramené par M.[C] à la société Laar, le 13 mai 2009, le gérant de celle-ci s'est engagé, dans un document intitulé 'ordre de réparation', à :
« effectuer sous 15 jours (sinon frais de pénalités de retard à raison de 50 € par jour)
et prendre la totalité des travaux en garantie sur le véhicule Renault Kerax, immatriculée [Immatriculation 1] appartenant au garage [Adresse 2].
Les travaux sont les suivants :
- Redressage ou remplacement selon notre avis engageant votre responsabilité du châssis plié du à de mauvaises soudures du faux châssis et du manque de renforts.
- Réparation des rampes hydrauliques de chargement. »
Attendu que ce document formalise , sans aucune équivoque, l'accord de la société Laar pour une prise en charge, par elle même, des travaux de réparation des dommages du camion ; que les termes suscités, ainsi que la référence à la notion de garantie impliquent le caractère contractuel de la responsabilité ainsi reconnue par la société Laar, la notion de contrat de sous traitance n'ayant, dans ces conditions, pas lieu d'être recherchée.
Attendu que la cour relève par ailleurs :
- que la société Laar qui prétend n'être pas concernée par la phase des réparations et qu'elle impute à la seule société Omars, s'est bien gardée de l'appeler au débat ;
- que la seule production d'une facture, établie par la société italienne au nom du garage Le Lann, que celui-ci conteste, est sans emport dans le cadre ainsi défini des relations de la société Laar et de M [C] et de la responsabilité qui en découle pour la première alors que cette facture n'a, en outre, été précédée d'aucun devis ou d'un ordre d'intervention de la part du second et que rien n'établit qu'elle a été acquittée.
Attendu qu'il en est de même pour les attestations fournies par la société Laar et émanant du gérant et des employés de la société Omars Italie alors que de son côté, M.[C] produit des attestations les contredisant.
Attendu que la circonstance que les réparations dont la société Laar a donc ainsi accepté la prise en charge aient été effectuées par la société Omars en Italie ne la dégage enfin pas de la responsabilité qu'elle encourt tant à raison des malfaçons relatives à l'installation d'origine ayant causé des dommages que de l'exécution défectueuse des réparations.
Attendu à cet égard qu'il résulte du rapport d'expertise judiciaire que les dommages survenus au mois de mai 2009 viennent bien de la conception à l'origine défectueuse du faux châssis par manque de renforts et par mauvaises soudures, conception qui a donc été prise en charge par la société Laar au titre de la facture du 25 juillet 2008.
Attendu que l'expert relève à ce sujet qu'à partir des photos prises après le dommage du 7 mai 2009, le faux châssis présentait des déformations qui avaient engendré des ruptures des soudures du bâti ; que le faux châssis, solidaire du châssis d'origine du véhicule, avait entraîné la déformation de ce dernier et provoqué la torsion et la compression des deux longerons porteurs du châssis cabine; qu'après les remises en état consécutives à l'incident du mois de mai 2009, le faux châssis mis en place, qui n'a pas été correctement conçu, sa résistance ne permettant pas de supporter les contraintes imposées par la grue embarquée, a été renforcé afin de supporter les contraintes engendrées par le matériel de dépannage ; que toutefois, des déformations résiduelles sont toujours visibles sur le faux châssis et sur les longerons ; que les déformations du faux châssis ont pour origine une inéquation entre les contraintes engendrées par le matériel de dépannage embarqué et les possibilités techniques du faux châssis à résister à ces contraintes ; que la société Laar, qui a réalisé ces travaux, connaissait les caractéristiques du matériel qui devait y prendre place ayant fourni une partie des accessoires et l'autre partie ayant été mise à sa disposition par le client ; que les contraintes engendrées par le matériel de dépannage ont donc été sous-évaluées par le concepteur du produit ; que lors des opérations de remise en état, le redressage du châssis cabine n'a pas été entrepris et que les longerons conservent leurs déformations, ce qui altère la résistance et les possibilités techniques du matériel.
Attendu qu'il s'ensuit qu'il ne peut être fait droit aux écritures de la société Laar, garagiste professionnel, tenu en cette qualité d'une obligation de résultat, en ce qu'elles tendent à la mise hors de cause de ses prestations d'origine, étant observé qu'elle n'a au demeurant formé aucun dire durant l'expertise pour contester les conclusions techniques de l'étude ainsi menée de façon complète et parfaitement renseignée, et que ses conclusions critiques ne sont présentement étayées par aucune observation technique, précise .
Attendu que l'ensemble de ces observations caractérisent parfaitement l'entière responsabilité de la société appelante pour l'ensemble des préjudices consécutifs aux fautes ci dessus caractérisées
Attendu, sur l'évaluation des dommages, que l'expert a chiffré les travaux de remise en état à la somme de 17'175 € hors taxes en détaillant les divers postes de cette dépense, ainsi que dans les mêmes conditions, le préjudice subi par M.[C] suite au sinistre du 7 mai 2009 , consistant dans l'immobilisation du camion en Italie, à la somme de 18'442,50 euros hors taxes, ce qui conduit à un préjudice total de 36'717,50 euros hors taxes alloué par le tribunal.
Attendu que ces observations expertales n'ont pas plus été critiquées que les précédentes par d'éventuels dires et qu'elles n'ont pas été utilement contestées par la société appelante, qu'elles seront retenues étant encore considéré que l'expert n'a retenu au titre du préjudice de jouissance qu'une indisponibilité du matériel sur un mois alors que celui-ci est parti en Italie sur la période 13 mai 2009/ 5 juin 2009 et qu'à cette date, il n'avait pas été correctement réparé.
Attendu que le jugement sera donc confirmé en ses dispositions relatives à l'évaluation du préjudice, les intérêts sur la somme allouée de ce chef courant à compter du 23 juillet 2012, date de l'assignation introductive de la présente instance au fond aux termes de laquelle la réclamation a été formulée, à l'exclusion de l'assignation en référé qui ne tendait qu'à l'expertise.
Attendu, par suite, que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions, l'appelante étant déboutée des fins de son recours.
Attendu qu'en raison de sa succombance , la société Laar supportera les entiers dépens de la procédure de première instance , y compris les dépens du référé et les frais d'expertise, ainsi que ceux d'appel, et versera, en équité, à l'intimé la somme supplémentaire de 1500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Attendu qu'aucun autre préjudice n'étant démontré que ceux ci-dessus indemnisés, la demande supplémentaire de dommages et intérêts de M [C] pour 10'000 € sera rejetée.
Par ces motifs
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
reçoit l'appel,
confirme le jugement sauf à préciser que les dépens de première instance comprennent les frais de la procédure de référé et de l'expertise,
y ajoutant :
Condamne la société Laar à verser à M. [C] la somme de 1500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples des parties,
Condamne la société Laar à supporter les dépens de la procédure d'appel, et en ordonne la distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile;
Dit que dans l'hypothèse où à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées, l'exécution forcée sera nécessaire par l'intermédiaire d'un huissier en application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996, ces frais devront être supportés par la société appelante.
LE GREFFIER LE PRESIDENT