COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
17e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 16 DECEMBRE 2014
N°2014/
MV/FP-D
Rôle N° 13/24350
SAS CHALAVAN ET DUC
C/
[G] [U]
Grosse délivrée le :
à :
Me Rozenna GORLIER, avocat au barreau de NICE
Me Florence ROLLIN-GARCIA, avocat au barreau de GRASSE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE - section - en date du 22 Novembre 2013, enregistré au répertoire général sous le n° F13/00364.
APPELANTE
SAS CHALAVAN ET DUC, demeurant [Adresse 2]. [Adresse 2]
représentée par Me Rozenna GORLIER, avocat au barreau de NICE
INTIME
Monsieur [G] [U], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Florence ROLLIN-GARCIA, avocat au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 27 Octobre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller
Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Décembre 2014
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Décembre 2014
Signé par Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Monsieur [G] [U] a été engagé par la SAS CHALAVAN ET DUC à compter du 7 mars 2012 tout d'abord dans le cadre de plusieurs contrats de travail à durée déterminée puis à compter du 15 avril 2012 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de conducteur VL.
Le 23 juillet 2012 Monsieur [U] faisait l'objet d'un avertissement pour des retards à la prise de service le 12 juillet, le 17 juillet et le 20 juillet 2012.
Le 13 septembre 2012 Monsieur [U] faisait l'objet d'un avertissement pour un retard régulier lorsqu'il effectuait la ligne " tpc 209 060-0209 ".
Le 30 janvier 2013 il était mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable fixé au 11 février 2013 et le 14 février 2013 il était licencié pour faute grave aux motifs suivants :
«' Lors de l'entretien qui s'est tenu en nos locaux le Il février courant, nous vous avons fait part des griefs que nous étions amenés à formuler à votre encontre.
Monsieur [N] [J], conducteur en charge du contrôle des départs sur le dépôt de [Localité 4], nous a informés que vous avez pris votre service en retard sur la liaison « TPC 209» le 31 décembre 2012 (15 minutes), ainsi que les 2janvier 2013 (20 minutes) et 7 janvier 2013 (15 minutes).
Selon l'intéressé, vous auriez également laissé, le 16 janvier 2013, les phares du véhicule immatriculé BS 309 QV allumés lors de votre coupure à Saint Etienne de Tinée (06), en conséquence de quoi la batterie du véhicule s'est vidée progressivement, retardant alors votre retour sur [Localité 4].
D'autre part, le 18 janvier 2013, Monsieur [N] [J] a contacté la permanence nocturne de [Localité 3] à 04h20 pour signaler que la veille, à votre retour au dépôt de [Localité 4], vous n'aviez pas stationné votre véhicule au bon endroit et aviez omis de laisser le hayon ouvert, de sorte que le conducteur chargé d'assurer les livraisons pour notre client MERCEDES a dû laisser les panières à l'extérieur. Bien entendu, plusieurs cartons ont alors été mouillés par la pluie.
Durant l'entretien, vous avez semblé surpris par les retards évoqués et avez expliqué par ailleurs que la panne du véhicule survenue le 16 janvier 2013 par l'utilisation du vébasto, et non par l'absence d'extinction des phares.
Concernant l'incident du 18 janvier 2013, vous avez justifié sa survenance par l'irrégularité du transfert des caisses, soulignant que le fait que cette consigne ne soit pas tous les jours appliquée ait effectivement pu vous amener à oublier de laisser de temps à autre le hayon ouvert.
Vous n'ignorez cependant pas que tous ces dysfonctionnements sont susceptibles de nuire à la qualité de la prestation que nous nous devons de réaliser pour nos clients.
Ce dernier incident n'est malheureusement pas un acte isolé. En effet, le 29 janvier 2013, alors que vous circuliez ,sur la Route Départementale 2205, à hauteur du Lieu-Dit « Le Cialancier », vous avez été interpellé par les forces de l'ordre, lesquelles ont relevé à votre égard un dépassement de la vitesse autorisée de 45 km/h.
Compte tenu de la gravité de l'infraction constituée, votre permis de conduire vous a été retiré sur le champ et pour une durée d'un mois.
Cet évènement n'a pas manqué de perturber le fonctionnement normal du service puisque nous avons dû procéder à votre remplacement au pied levé.
En dépit des efforts du Service Exploitation pour pallier cette situation, nous n'avons pu assurer la fin de la liaison qu'avec 02h30 de retard sur l 'horaire prévu, ce qui a amené notre client à solliciter à l'encontre de la société l'application d'une pénalité financière.
Au cours de l'entretien, vous avez expliqué avoir perdu du temps au bureau de poste de Saint Etienne de Tinée en raison de la présence d'une nouvelle salariée de notre client. Conjuguée à des soucis d'ordre personnel, cette situation vous a conduit à tenter de rattraper le retard sur la route sans faire vraiment attention à votre vitesse.
Vous comprendrez cependant que nous ne pouvons nous satisfaire de telles explications de la part d'un conducteur professionnel!!!
N'oubliez pas qu'en signant votre contrat de travail, vous vous êtes d'ailleurs engagé à faire le nécessaire pour être toujours en possession d'un permis de conduire valide. Plus généralement, vous vous êtes engagé à respecter les dispositions légales, règlementaires et conventionnelles en vigueur, dont les règles du code de la route.
Nous vous laissons le soin d'imaginer les conséquences, tant personnelles que professionnelles, en cas d'implication dans un accident de la circulation dans de telles conditions!
Nous avons malheureusement déjà eu l'occasion de vous interpeller au sujet de la qualité de votre travail, notamment au regard du respect des horaires, comme en atteste votre dossier disciplinaire (Avertissements des 23 juillet 2012 et 13 septembre 2012).
Ces rappels à l'ordre n'ont visiblement pas porté leurs fruits!!!
Au contraire, vous admettrez que ces derniers incidents, incompatibles avec l'exercice de votre profession, sont de nature à préjudicier aux intérêts de l'entreprise, ce que nous ne pouvons admettre ni tolérer.
Aussi, compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, nous vous notifions par la présente la rupture immédiate et sans préavis de votre contrat de travail.
Vous cesserez définitivement de faire partie du personnel de notre entreprise dès première présentation de cette lettre par la Poste. Votre certificat de travail, solde de tout compte et attestation destinée au Pôle Emploi seront préparés dès réception de vos derniers disques ou données numériques et vous seront ensuite notifiés dans un prochain courrier... »
Contestant son licenciement et sollicitant un rappel de salaire Monsieur [U] a le 14 mars 2013 saisi le conseil des prud'hommes de [Localité 4].
PROCEDURE
Par lettre recommandée postée le 20 décembre 2013 la SAS CHALAVAN ET DUC a régulièrement relevé appel du jugement rendu le 22 novembre 2013 par le Conseil de Prud'hommes de Nice qui a constaté que Monsieur [U] restait à la disposition de son employeur pendant le temps d'attente, a dit que le temps d'attente constituait un temps de travail au sens de l'article L3121.1 du code du travail , a condamné la société CHALAVAN ET DUC à lui verser les sommes de :
15 720,15 euros à titre de rappel de salaire,
1572,01 euro au titre des congés payés y afférents,
a dit que le salaire moyen mensuel de Monsieur [U] était de 2780 €,
a dit que le temps d'attente non rémunéré ne constituait pas du travail volontairement dissimulé au sens de l'article L8223. 5 du code du travail,
a dit que le licenciement n'était pas fondé sur une faute grave,
a constaté que Monsieur [U] avait manqué à ses obligations contractuelles,
a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,
a débouté Monsieur [U] de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
a condamné la société CHALAVAN ET DUC à lui verser la somme de :
2780 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
ainsi qu'à lui remettre les bulletins de salaire et les documents de fin de contrat rectifiés,
a dit n'y avoir lieu à fixation d'une astreinte pour la remise des bulletins de salaire et des documents de fin de contrat,
a dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire, sauf ce que de droit,
a débouté les parties du surplus de leurs demandes,
a condamné la société CHALAVAN ET DUC aux dépens ainsi qu'à payer à Monsieur [U] la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La SAS CHALAVAN ET DUC conclut à l'infirmation du jugement déféré et statuant à nouveau demande à la cour de débouter Monsieur [U] de toutes ses demandes et de le condamner à lui rembourser la somme de 15 173,43 euros assortie d'intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2014 outre la somme de 3500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur [U], au visa des articles L8223.1, L 1234 et suivants et L3100.1 du code du travail et de la jurisprudence applicable conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a considéré que le temps d'attente constituait un temps de travail soumis à rémunération et a condamné de ce chef la société CHALAVAN ET DUC à lui verser la somme de 15 720,15 euros à titre de rappel de salaire outre 1572,01 euros au titre des congés payés y afférents ainsi qu'en ce qu'il a recalculé le salaire moyen mensuel qu'il aurait du percevoir en exécution du contrat de travail aux fins de le voir porter à la somme brute de 2780 € et à son infirmation pour le surplus et statuant à nouveau, il demande à la cour de constater que le licenciement dont il a été victime ne repose nullement sur une cause réelle et sérieuse, par conséquent de condamner la société CHALAVAN ET DUC à lui verser les sommes de :
16 680 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,
2780 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
16 680 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
ainsi qu'à lui délivrer sous astreinte de 150 € par jour de retard ses bulletins de salaire, son certificat de travail, son solde de tout compte et son attestation pôle emploi.
Il sollicite en outre la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La cour renvoie pour plus ample exposé aux écritures reprises et soutenues par les conseils des parties à l'audience d'appel tenue le 27 octobre 2014.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande en rappel de salaire,
Attendu que le contrat de travail de Monsieur [U] ne prévoit aucun horaire de travail concernant la prise de poste et la fin de service, la société CHALAVAN ET DUC se contentant de produire des feuilles de décompte des temps de travail dans lesquelles il apparaît que Monsieur [U] était considéré comme travaillant environ 5h50 par jour sans qu'à aucun moment il ne soit précisé dans les documents en question à quel horaire précis correspond le temps ainsi retenu ;
Attendu que dans le cadre de ses conclusions écrites oralement reprises la société CHALAVAN ET DUC indique que Monsieur [U] ne peut se prévaloir de l'accord conventionnel du 23 novembre 1994 prévoyant le règlement intégral des heures d'attente dans la mesure où cet accord ne concerne que le personnel de conduite dit « grands routiers », ce qui est exact puisque Monsieur [U] n'appartient pas à cette catégorie mais conteste les revendications de ce dernier au motif qu'il n'établit pas avoir reçu d'instructions impératives de son employeur notamment en termes d'attente et de surveillance du véhicule entre deux tournées et qu'en conséquence en l'absence de directives durant l'intervalle séparant les tournées cela suffit à démontrer l'existence d'un temps de repos non indemnisable ;
Attendu que pour asseoir sa position la société CHALAVAN ET DUC indique que Monsieur [U] ne reçoit « aucune directive de l'employeur entre la fin du déchargement à [Localité 5] et le début du rechargement l'après-midi » sans pour autant indiquer à quelle heure Monsieur [U] doit prendre le camion au dépôt, à quelle heure il doit arriver à [Localité 5] pour décharger, ni le temps de déchargement, ni l'heure du rechargement de l'après-midi, ni l' heure du retour au dépôt, ajoutant qu'elle produit des factures démontrant que des chambres d'hôtel ont bien été prises pour Monsieur [U] au mois de mars 2012 et qu'aucune obligation de surveillance n'était imposée «puisque par définition le salarié ne pouvait surveiller le véhicule durant le temps de sommeil à l'hôtel» et ce d'autant que le véhicule ne contenant plus aucune marchandise durant a période litigieuse il ne nécessitait aucune surveillance ;
Attendu toutefois que la société CHALAVAN ET DUC n'a assuré le paiement des chambres d'hôtel à Monsieur [U] qu'au mois de mars 2012, soit avant la signature du contrat à durée indéterminée du 15 avril 2012, et n'a plus pris en charge de facture hôtelière au-delà de cette date, contraignant ainsi Monsieur [U] - qui n'avait pas à prendre en charge personnellement cette dépense - à rester dans son camion, ne contestant pas par ailleurs avoir fait installer un chauffage dans le véhicule, ce qui induisait pour Monsieur [U] l'obligation de rester à l'intérieur de celui-ci entre les temps de déchargement et de rechargement afin d'en assurer la surveillance ;
Attendu que la société CHALAVAN ET DUC ne peut donc soutenir que « les heures au cours desquelles Monsieur [U] restait à [Localité 5] cconstituaient des heures de repos n'ouvrant droit à aucune rémunération ou indemnisation » faute d'une part de définir les heures en question, faute d'autre part de permettre à Monsieur [U] de pouvoir s'éloigner de son véhicule pour vaquer à ses occupations personnelles ;
Attendu que l'imprécision même des horaires exacts de Monsieur [U] et le flou entretenu par la société CHALAVAN ET DUC sur ce point de même que la non prise en charge à compter du 15 avril 2012 de la moindre chambre d'hôtel établit l'existence de directives émanant de l'employeur, qui bien que non écrites n'en étaient pas moins réelles, à savoir (Monsieur [U] n'étant nullement contesté dans la description de son emploi du temps), que l'intéressé prenait possession du camion au dépôt de [Localité 4] Ouest à 6h50, qu'il quittait le dépôt entre 7h05 et 7h15, qu'il livrait deux bureaux de poste le premier à [Localité 7] et le second à [Localité 5] entre 8h05 et 8h55 puis qu'il attendait dans son camion jusqu'à 14h50 heure à laquelle il procédait au rechargement pour quitter [Localité 5] à15h05, effectuait un autre chargement à [Localité 2] entre 15h10 et 15h20, puis un autre à [Localité 7] entre 15h25 et 15h40, un autre à [Localité 1] entre 16h35 et 16h55, puis passait à [Localité 6] pour charger des colis et retournait au dépôt de [Localité 4] pour vider le camion entre 17h30 et 18 heures, emploi du temps empêchant de fait Monsieur [U] de regagner son domicile en raison de la distance (90 km) entre le déchargement du matin et le chargement de l'après-midi, l'obligeant à rester, de surcroît dans une zone de montagne, dans son camion pendant son temps d'attente afin de le surveiller puisque aucune prise en charge de chambre d'hôtel n'était assurée , l'ensemble de ces éléments, à savoir les conditions de lieu, de temps et les directives implicites de l'employeur, démontrant qu'il était à la disposition de celui-ci pendant les temps d'attente et devait se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer à ses occupations personnelles et effectuait en conséquence un temps de travail effectif au sens de l'article L3121.1 du code du travail,
justifiant sa demande en rappel de salaire ;
Attendu que sur une durée d'amplitude journalière de 11,50 heures il y a lieu de confirmer le jugement déféré qui sur la base d'un calcul non subsidiairement contesté a condamné la société CHALAVAN ET DUC à verser à Monsieur [U] la somme de 15 720,15 euros à titre de rappel de salaire outre 1572,01 euros au titre des congés payés y afférents et a reconstitué le salaire mensuel moyen brut de Monsieur [U] à la somme de 2780 € ;
Attendu en revanche que Monsieur [U] ne démontrant pas que ce soit de façon intentionnelle que la société CHALAVAN ET DUC ait dissimulé une partie de son temps de travail et ce d'autant qu'elle a contesté que le temps d'attente puisse être assimilé en ce qui la concerne à du temps de travail effectif, c'est à juste titre que Monsieur [U] a été débouté de sa demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé ;
Sur le licenciement,
Attendu que la société CHALAVAN ET DUC ne donnant aucune précision sur les heures exactes de prise de poste devant être respectées par Monsieur [U] le grief tenant aux retards de celui-ci ne saurait être retenu, peu important le fait qu'il y ait eu des avertissements précédents concernant l'existence d'autres retards ;
Attendu de même que les griefs tenant au mauvais stationnement du véhicule, à l'omission de laisser le hayon ouvert et à la panne de batterie du véhicule ne sont établis par aucune pièce probante de la part de la société CHALAVAN ET DUC à laquelle appartient la charge de la preuve de la faute grave, de sorte qu'ils ne peuvent être davantage retenus ;
Attendu en revanche qu'il apparaît que le 29 janvier 2013 à 15h10 Monsieur [U] a commis un excès de vitesse très important (vitesse limitée à 50 km à l'heure, enregistrée à 100 km à l'heure, retenue à 95 km à l'heure) qui a donné lieu à un avis de rétention de son permis de conduire d'une durée d'un mois et qui constitue notamment pour un chauffeur professionnel qui risque d'engager la responsabilité de son employeur et qui l'empêche momentanément de pouvoir continuer à exercer ses fonctions une faute grave de nature à justifier la rupture immédiate du contrat de travail y compris pendant la durée limitée du préavis ;
Attendu qu'à ce titre si Monsieur [U] invoque l'accord de branche du 13 novembre 1992 réglementant les « conséquences de la suspension ou de l'invalidation du permis de conduire sur le contrat de travail » et prévoyant notamment :
«1. La suspension ou l'invalidation du permis de conduire n'entraînent pas en tant que telles la rupture automatique du contrat de travail du salarié occupant un emploi de conducteur au sens de la convention collective susvisée'
2. Une concertation doit s'engager entre l'employeur et le conducteur afin qu'ils examinent ensemble la situation, sans qu'il soit pour autant porté atteinte au principe de la confidentialité.
À cette occasion, le conducteur, s'il le souhaite, se fait assister par une personne de son choix appartenant à l'entreprise'
a) à l'issue de la concertation avec l'employeur, si un emploi de reclassement se trouve immédiatement disponible, celui-ci est proposé au conducteur.
'
c) en l'absence de reclassement immédiat ou aux termes de la période définie au paragraphe ci-dessus, le contrat de travail est soit suspendu par accord entre les parties, soit rompu conformément aux dispositions du paragraphe 3 ci-dessous'
3. À défaut d'accord entre les parties sur la suspension du contrat de travail, ou à défaut de reclassement, il appartient à l'employeur de mettre en 'uvre la procédure de licenciement ' »
il apparaît que l'article 6 du même accord prévoit que :
« les dispositions du présent article ne sont pas exclusives de l'exercice de son pouvoir disciplinaire par l'employeur et de l'application des dispositions relatives au droit du licenciement »
de sorte qu'en l'espèce après l'entretien préalable il apparaît que l'employeur n'a pas opté pour un reclassement ou pour une suspension du contrat de travail mais a opté comme c'était son droit pour un licenciement, lequel, au regard de la gravité de la faute commise par Monsieur [U] s'agissant d'un comportement dangereux et irresponsable qu'aucune excuse liée à la volonté de ne pas être en retard ne saurait justifier,a à juste titre été prononcé pour faute grave ;
Attendu qu'il y a donc lieu d'infirmer sur ce point le jugement déféré en ce qu'il a retenu une cause réelle et sérieuse et non une faute grave et en ce qu'il a condamné la société CHALAVAN ET DUC au paiement de la somme de 2780 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;
Attendu que Monsieur [U] devra restituer si besoin est ladite somme avec intérêts au taux légal à compter de son versement soit du 28 mars 2014 ;
Attendu qu'il y a lieu de confirmer le jugement qui a condamné la société CHALAVAN ET DUC à la remise des bulletins de salaire et des documents sociaux rectifiés, la nécessité du prononcé d'une astreinte n'étant pas justifiée ;
Attendu qu'il n'y a pas d'atteinte suffisante au principe d'équité justifiant qu'il soit fait application en cause d'appel de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La cour,statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et non une faute grave et condamné la société CHALAVAN ET DUC à payer à Monsieur [U] la somme de 2780 € au titre de l'indemnité de préavis,
Et statuant à nouveau du chef réformé,
Dit le licenciement fondé sur une faute grave,
Déboute Monsieur [U] de sa demande en paiement de l'indemnité compensatrice de préavis et de dommages et intérêts pour rupture abusive,
Dit que Monsieur [U] devra restituer si besoin est la somme perçue au titre du préavis avec intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2014,
Rejette toute demande plus ample ou contraire,
Dit n'y avoir lieu en cause d'appel à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.
LE GREFFIERLE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT
G. BOURGEOIS