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30/10/2014 | FRANCE | N°13/10260

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre b, 30 octobre 2014, 13/10260


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 30 OCTOBRE 2014



N° 2014/655

BP











Rôle N° 13/10260





[R] [T]





C/



SA DIMOTRANS GROUP

































Grosse délivrée

le :

à :

Me Christophe MEYNIEL, avocat au barreau de PARIS



Me Loïc LE BERRE, avocat au barreau de LYON<

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Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE - section E - en date du 18 Avril 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/00853.







APPELANTE



Madame [R] [T], demeurant [Adresse 2]



...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 30 OCTOBRE 2014

N° 2014/655

BP

Rôle N° 13/10260

[R] [T]

C/

SA DIMOTRANS GROUP

Grosse délivrée

le :

à :

Me Christophe MEYNIEL, avocat au barreau de PARIS

Me Loïc LE BERRE, avocat au barreau de LYON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE - section E - en date du 18 Avril 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/00853.

APPELANTE

Madame [R] [T], demeurant [Adresse 2]

comparante en personne, assistée de Me Christophe MEYNIEL, avocat au barreau de PARIS (167 bd Malesherbes - 75017 PARIS)

substitué par Me Pauline OLEWNICZAK, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

SA DIMOTRANS GROUP, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Loïc LE BERRE, avocat au barreau de LYON

([Adresse 1])

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Septembre 2014 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Madame Brigitte PELTIER, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Caroline LOGIEST.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Octobre 2014.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Octobre 2014.

Signé par Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les conclusions des parties, déposées et développées oralement à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions ;

Le 19 décembre 2005, Mme [R] [T] a été engagée en qualité en qualité de responsable service aérien par la société Dimotrans Group Overseas Service devenue en 2008, en suite d'une fusion, Dimotrans Group Group, ayant pour activité le transport de marchandise ; par courrier recommandé en date du 1er juin 2012, Mme [T] a pris acte de la rupture de son contrat de travail puis a saisi le conseil de prud'hommes de Nice le 6 juillet 2012 ;

Par déclaration enregistrée le 25 avril 2013, Mme [T] a interjeté appel du jugement en date du 18 avril, au terme duquel le conseil de prud'hommes a dit que la prise d'acte produisait les effets d'une démission, et l'a déboutée de ses demandes.

Mme [T] conclut à l'infirmation de la décision entreprise, et condamnation de la société Dimotrans Group à lui payer les sommes de 33.283,05 euros à titre de rappel de salaire, 2.625 euros à titre de remboursement de sommes indûment prélevées, 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect du droit au repos et à la santé, 15.403,95 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre congés payés y afférents, 13.863,55 euros à titre d'indemnité de licenciement, 60.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; elle sollicite en outre remise sous astreinte des documents sociaux rectifiés.

Elle soutient que l'employeur a commis de nombreux et graves manquements ; que sa prise d'acte doit produire les effets d'un licenciement abusif ; que ses demandes  en paiement sont justifiées ;

La société Dimotrans Group, conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de Mme [T] au paiement d'une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'entiers dépens.

Elle conteste les demandes ;

SUR CE

Sur les demandes  en paiement concernant la période antérieure à la rupture :

S'agissant du rappel de primes d'objectifs :

Mme [T] soutient que l'employeur l'a privée de la rémunération variable contractuellement convenue en ne lui soumettant aucun avenant fixant ses objectifs annuels au cours de cinq des six exercices du contrat de travail, un seul avenant ayant été conclu pour la période du 1er avril 2011 au 31 mars 2012 ;

La société Dimotrans Group fait valoir que la salariée n'avait pas invoqué ce grief dans son courrier de prise d'acte ; elle ajoute d'une part qu'en l'absence d'accord sur la détermination des objectifs et sur les modalités de fixation de la prime sur objectif, aucune prime n'était due, d'autre part que Mme [T] n'avait jamais émis la moindre réclamation concernant la conclusion d'un avenant et ce, parce qu'elle savait son activité inférieure à ce qu'attendait son employeur ;

Toutefois, il est constant que tant les propositions d'embauche en date des 30 août et 7 octobre 2005, que le contrat de travail régularisé le 9 décembre, prévoient le paiement d'une prime variable sur objectifs dont les modalités de fixation aux termes de ce dernier contrat devaient être déterminées annuellement et définis d'un commun accord, par avenant séparé ;

Or, si Mme [T] démontre avoir refusé, le 4 avril 2011, l'avenant qui venait de lui être soumis en exposant que celui-ci contenait une contradiction et était irréalisable en ce qu'il fixait l'objectif à 40 % de plus que ses résultats actuels, il sera observé que l'employeur, qui a estimé ces remarques justifiées, avant qu'un avenant ne soit régularisé le 2 mai 2011, ne justifie d'aucune circonstance ayant empêché la régularisation d'autres avenants précédemment ou postérieurement, et ce alors qu'il lui appartenait d'engager les négociations pour la fixation des objectifs dont dépendait la rémunération ;

Mme [T] démontre avoir perçu une prime d'objectifs de 6.656,61 euros bruts pour l'exercice 2011 ; elle est dès lors fondée à réclamer paiement d'une somme équivalente au titre des exercices précédents non prescrits (soit à compter du mois de juillet 2007) ainsi qu'au titre de l'exercice suivant (jusqu'au mois 1er juin 2012) ; toutefois, c'est à juste titre que l'employeur observe que cette prime ne peut être due en 2010 au titre d'un exercice plein, alors qu'elle a été en maladie du 6 avril au 30 octobre ; il s'ensuit qu'il lui sera alloué paiement d'une somme de 22.188,70 euros correspondant aux 4 exercices en litige, sous déduction de la période d'arrêt de travail ;

S'agissant du rappel de salaire au titre de l'arrêt maladie du 6-04 au 30-10-10 :

Mme [T] soutient qu'il lui a été réclamé à tort puis retenu sur son bulletin de salaire du mois de juin 2012 une somme de 2.625 euros au titre d'un trop perçu au cours de son arrêt maladie ;

La société Dimotrans Group fait valoir que par application de la convention collective elle n'était tenue au maintien du salaire à 100 % que durant 60 jours, et à 75 % jusqu'au 120ème jour d'arrêt, et qu'elle a maintenu le versement de 75 % de la rémunération sur tout le mois de juillet et août alors qu'il n'était plus rien dû après le 28 juillet, motif pour lequel elle a opéré une retenue correspondant à 30 jours ; toutefois, il n'est pas contesté que l'arrêt de travail a commencé le 6 avril de sorte que le maintien de salaire était dû à 100 % jusqu'au 2 juin et 75 % jusqu'au 1er août 2010 ; Or, l'employeur se borne à soutenir, sans justifier du bien-fondé de la dite retenue, avoir limité le maintien de salaire à 100 % pendant 54 jours au motif que la salariée avait déjà bénéficié d'un maintien de salaire pendant 6 jours en 2010 ; il sera en outre observé que les bulletins de salaire font également mention du versement des indemnités journalières perçues par l'employeur subrogé de sorte qu'il ne résulte pas de leur examen démonstration d'un indu à concurrence de la somme retenue par l'employeur, deux ans plus tard à l'occasion de la rupture du contrat de travail, sur le bulletin de paie du mois de juin 2012 ; il sera donc fait droit à la demande formée de ce chef ;

S'agissant la demande en dommages et intérêts pour non respect du droit au repos et à la santé :

Mme [T] observe que son contrat de travail prévoyait une convention de forfait par référence à l'accord collectif du 18 avril 2002, alors que ce texte ne contient aucune disposition de nature à préserver les droits des salariés au repos et au respect de leur santé, ne précise même pas le nombre de jours octroyés au titre de la RTT et met à la charge des salariés l'obligation d'assurer eux-même le suivi de l'accord  ; elle ajoute n'avoir jamais bénéficié de l'entretien annuel prévu tant par ce texte que par l'article L. 3121-46 du code du travail, l'employeur ne lui ayant par ailleurs jamais octroyé le moindre jour de congé au titre de la RTT ; elle expose encore qu'à compter du mois d'avril 2009, ses bulletins de salaire n'ont plus fait référence au forfait mais à 151 h de travail mensuel modifiant de la sorte son contrat de travail sans même l'en informer, motif pour lequel elle a continué à travailler sur la base du forfait sans conserver les pièces susceptibles d'étayer une demande en paiement des heures supplémentaires ; elle soutient que le comportement fautif de l'employeur l'a privée de toute garantie quant au contrôle de sa charge de travail et que cette situation a eu un impact direct sur son état de santé dans la mesure où elle a connu une longue période d'arrêt maladie en 2010 ;

La société Dimotrans Group fait valoir en premier lieu que la salarié a bénéficié chaque année d'un entretien individuel au cours duquel était évoquées ses conditions de travail ; toutefois, il ne ressort pas des compte-rendu produits que l'organisation, la charge de travail et l'amplitude des journées d'activité, telles que prévues par l'accord sus visé aient été évoquées, ni que le nombre de jours du forfait ait été comptabilisé ;

La société Dimotrans Group observe en second lieu que l'accord d'entreprise dont question a cessé de recevoir application, en vertu de l'article L. 2261-14 du code du travail, par l'effet de la fusion intervenue en 2008, et qu'ainsi la salariée ne pouvait plus s'en prévaloir à l'expiration du délai de survie, soit en avril 2009 ; de fait, lorsqu'une convention collective ou un accord collectif cesse de recevoir application dans une entreprise, il n'en résulte aucune modification des contrats de travail en vigueur ; par suite, si Mme [T] n'est pas fondée à contester la modification de son bulletin de paie, d'un montant identique établi, pour 151 heures de travail à compter du mois d'avril 2007, non constitutive d'une modification de son contrat de travail du fait de la fusion, elle le demeure à relever que bien que l'employeur reconnaisse que le régime du forfait était pleinement applicable jusqu'en avril 2009, il ne justifie pas avoir veillé à sa mise en 'uvre en lui permettant notamment de bénéficier des jours de RTT qui en étaient la contrepartie ; Mme [T] rappelle qu'elle a subi un long arrêt maladie en 2010 ; Il lui sera dès lors alloué à paiement d'une somme de 5.000 euros au titre du nécessaire préjudice ayant résulté de ce manquement ;

Sur la prise d'acte :

Il suit de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'analyser les autres griefs, que la société Dimotrans Group a gravement manqué à ses obligations en ne fixant pas d'objectif et en ne réglant pas le salaire contractuel dû à ce titre, et en pratiquant une retenue non justifiée sur le salaire de Mme [T], en ne veillant pas au respect des dispositions relatives au forfait jour applicable jusqu'au mois de mars 2009 ; ces graves manquements justifient en conséquence que la prise d'acte soit regardée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Il s'ensuit qu'il sera alloué à Mme [T] paiement des sommes non discutées en leur montant, fondées sur un salaire mensuel moyen de 5.134,65 euros, de 15.403,95 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre congés payés y afférents et celle de 13.863,55 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

Mme [T], âgée de 55 ans, qui bénéficiait d'une ancienneté de presque six ans et 9 mois, dans une entreprise comptant 333 salariés, fait valoir qu'elle n'a pas été prise en charge par Pôle Emploi s'agissant d'une prise d'acte et qu'elle a été limitée dans sa recherche d'emploi du fait de la clause de non concurrence la liant à l'employeur ; toutefois, elle ne justifie aucunement de sa situation économique et professionnelle postérieure à la date de la rupture et ne produit par ailleurs aucune recherche d'emploi ; Il lui sera dès lors alloué paiement d'une somme de 47.000 euros ;

Les dépens ainsi qu'une somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, seront supportés par la société Dimotrans Group qui succombe.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Dit que la prise d'acte du 1er juin 2012 produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Condamne la société Dimotrans Group à payer à Mme [R] [T] les sommes de 22.188,70 euros à titre de rappel de salaire sur prime d'objectif, 2.625 euros à titre de maintien de salaire durant l'arrêt maladie du 6 avril au 30 octobre 2010, 5.000 euros au titre du préjudice résultant du non respect du droit au repos et à la santé, 47.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.

Condamne Mme [R] [T] aux entiers dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre b
Numéro d'arrêt : 13/10260
Date de la décision : 30/10/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°13/10260 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-30;13.10260 ?
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