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07/10/2014 | FRANCE | N°13/02738

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre a, 07 octobre 2014, 13/02738


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 07 OCTOBRE 2014

A.D

N° 2014/













Rôle N° 13/02738







[D] [B] épouse [I]





C/



[R] [W]





















Grosse délivrée

le :

à :ME VAN DE GHINSTE

ME DRAGON

















Décision déférée à la Cour :



Juge

ment du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 08 Janvier 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 09/05105.





APPELANTE



Madame [D] [B] épouse [I]

née le [Date naissance 1] 1979 à [Localité 1] ([Localité 1]), demeurant [Adresse 2]



représentée et plaidant par Me Elise VAN DE GHINSTE, avocat au barreau de NICE subs...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 07 OCTOBRE 2014

A.D

N° 2014/

Rôle N° 13/02738

[D] [B] épouse [I]

C/

[R] [W]

Grosse délivrée

le :

à :ME VAN DE GHINSTE

ME DRAGON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 08 Janvier 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 09/05105.

APPELANTE

Madame [D] [B] épouse [I]

née le [Date naissance 1] 1979 à [Localité 1] ([Localité 1]), demeurant [Adresse 2]

représentée et plaidant par Me Elise VAN DE GHINSTE, avocat au barreau de NICE substituée par Me Angélique TOUATI, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

Mademoiselle [R] [W]

née le [Date naissance 2] 1971 à [Localité 1], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Paul DRAGON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Pierre CHAMI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 01 Septembre 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme DAMPFHOFFER, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Georges TORREGROSA, Président

Monsieur Olivier BRUE, Conseiller

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Octobre 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Octobre 2014,

Signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, prétentions, procédure :

Mme [B] [I] est infirmière et affirme qu'elle a collaboré , sur la période janvier 2008/ octobre 2008, à un cabinet d'infirmières, situé [Adresse 1], à [Localité 1].

Reprochant à Mme [W] d'avoir rompu, sans préavis, son contrat à la date du 15 octobre 2008 , elle l'a fait assigner en paiement de prestations effectuées, demeurées impayées, ainsi que de diverses autres sommes à titre de dommages et intérêts.

Le tribunal de grande instance de Grasse, statuant par jugement contradictoire du 8 janvier 2013, retenant que le contrat de collaboration devait être écrit alors que la demanderesse ne justifiait d'aucun document répondant à cette exigence, a statué ainsi qu'il suit :

- constate que Mme [B] [I] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un contrat écrit de collaboration d'infirmière libérale entre elle-même et Mme [W] et dit en conséquence que Mme [B] [I] ne peut invoquer un quelconque manquement de Mme [W] à ses obligations contractuelles,

- déboute Mme [B] [I] de ses demandes contre Mme [W] fondées sur l'existence d'un contrat de collaboration,

- rejette la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts de Mme [W] pour procédure abusive,

- ordonne l'exécution provisoire du jugement,

- condamne Mme [B] [I] à payer la somme de 2500€ à Mme [W] par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

Par déclaration du 9 février 2013, Mme [B] [I] a relevé appel de cette décision.

Au terme de ses dernières conclusions en date du 6 août 2014, Mme [B] [I] demande à la cour :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

- infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau,

à titre principal,

- constater l'existence d'un lien de collaboration de nature contractuelle, constater qu'un contrat de collaboration libérale a été conclu le 15 janvier 2008, contrat verbal à durée indéterminée, constater que Mme [W] a abusivement reporté la signature en fraude de ses droits,

- constater que Mme [W] a manqué à ses obligations contractuelles en ne respectant pas le délai de préavis,

- constater la rupture abusive du contrat de collaboration verbale,

- constater que Mme [W] lui est redevable de diverses prestations effectuées dans le cadre de cette collaboration et demeurées impayées,

- en conséquence, condamner Mme [W] à lui verser la somme de 4594,43 € au titre des prestations effectuées, la somme de 20'000 € à titre de dommages et intérêts du fait du non-respect du délai de préavis, et la somme de 3000 € au titre de son préjudice moral,

à titre subsidiaire,

- constater, au visa de l'article 1382 du code civil, la rupture brutale et unilatérale de la relation de travail et le préjudice en résultant et en conséquence, condamner Mme [W] à lui verser la somme de 20'000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, et 4594,43 € au titre des prestations effectuées demeurées impayées,

- à titre infiniment subsidiaire, constater que le mode de fonctionnement du cabinet s'analyse en une société de fait, que le départ de chaque membre de cette société obéit à des conditions prévues par l'article 1869 du Code civil, que le départ de Mme [B] [I] unilatéralement décidé par Mme [W], contrevient aux règles précitées et en conséquence,

- condamner Mme [W] à lui verser la somme de 20'000 € à titre de dommages et intérêts et de 4594,43€ au titre des prestations effectuées impayées,

- en tout état de cause,

- débouter Mme [W] de toutes ses demandes,

- condamner Mme [W] à lui verser la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, celle de 3000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

Par conclusions du 22 août 2014, Mme [W] demande à la cour de :

- révoquer en tant que de besoin l'ordonnance de clôture,

- confirmer le jugement entrepris,

- débouter Mme [B] [I] de ses demandes,

- la condamner sur le fondement de l'article 1382 du Code civil au paiement de la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts pour l'exercice abusif des voies de droit

et à la somme de 3500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture a été prise le 1er septembre 2014.

Motifs

Sur la recevabilité de l'appel :

Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas contestée ; que rien au dossier ne conduit la cour à le faire office.

Attendu que l'appel sera donc déclaré recevable.

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture :

Attendu que l'ordonnance de clôture ayant été prise le 1er septembre 2014, cette demande est sans objet.

Sur le fond :

Attendu que la demande de Mme [B] [I] tend à l'indemnisation d'un préjudice invoqué de deux chefs : paiement de prestations , et dommages et intérêts pour rupture abusive de la collaboration alléguée.

Attendu que cette demande est fondée, à titre principal sur l'existence d'un contrat de collaboration au visa notamment des articles 1101, 1134 1147 du Code civil , à titre subsidiaire, sur l'article 1382 du Code civil, et à titre infiniment subsidiaire, sur l'existence d'une société de fait et l'article 1869 du Code civil.

Attendu en droit, qu'il résulte des dispositions, applicables à l'espèce, non contestées par les parties, et notamment de l'article 18 de la loi du 2 août 2005 que le contrat de collaboration libérale 'doit être conclu dans le respect des règles régissant la profession' ; que ce contrat 'doit, à peine de nullité, être établi par écrit', que cet écrit doit préciser sa durée ,ses modalités de rémunération et les conditions d'exercice de l'activité.

Attendu en fait, qu'il n'est pas discuté qu'aucun contrat écrit n'a été conclu entre Mme [B] [I] et Mme [W];

Attendu également que Mme [B] [I] ne démontre pas avoir, à un quelconque moment, vainement protesté de cette situation auprès de Mme [W], aucune demande en ce sens qui aurait été rejetée par Mme [W] n'étant produite, étant relevé que le courrier d'une autre infirmière faisant état, en septembre 2009, de la même situation la concernant ne peut caractériser la réalité de cette situation pour Mme [B] [I], et qu'il en est de même pour celui, plus récent, d'une autre collaboratrice se plaignant, quant à elle, des conditions de l'exercice de ses fonctions .

Attendu, par ailleurs, que le caractère consensuel, qui préside, certes, au droit des contrats, ne s'impose cependant qu'à défaut d'une loi spéciale énonçant des exigences différentes , et que tel est précisément le cas en l'espèce compte tenu des dispositions sus visées de la loi du 2 août 2005.

Attendu que la demande sur ce fondement ne peut donc qu'être rejetée.

Attendu que la demande est également formée au visa de l'article 1382 du Code civil.

Attendu que l'application de ces dispositions exige, à la charge de celui qui réclame l'indemnisation, qu'il rapporte la triple preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute et ce préjudice.

Attendu que la Cour, analysant de ce chef les différentes pièces versées, retiendra :

- que les enregistrements constatés par huissier à la date du 29 juillet 2014 relativement à des échanges téléphoniques qui auraient eu lieu en octobre 2008, n'ont aucune valeur probante dès lors que rien, dans ce document, ne permet d'authentifier l'identité des personnes enregistrées, ni la date des conversations ainsi reproduites,

- que les autres pièces, susceptibles d'établir l'existence d'une collaboration entre Mme [B] [I] et Mme [W] sur la période janvier 2008 à octobre 2008, consistent dans un courrier de cette dernière daté du '11 janvier 2007" à l'intention de la DDASS, dans lequel elle cite Mme [B] [I] en qualité de collaboratrice, la domiciliant alors [Adresse 3] à [Localité 1], d'envois faits à cette même adresse par les mutuelles de santé, destinés à la rémunérer en date des 3 et 15 septembre 2008, de feuilles de soins également établis à son nom, avec la mention de cette même adresse, de l'attestation d'une de ses patientes, Mme [U] qui relate seulement que Mme [W] lui a annoncé, en octobre, la venue d'une nouvelle infirmière, ainsi que du courrier daté du 10 septembre 2008, aux termes duquel Mme [W] y annonce la fin de leur collaboration, dans les termes suivants :

« Suite à la proposition d'il y a une dizaine de jours de partir du cabinet, j'obtempère à ton désire et je mets fin à notre collaboration à partir de ce jour.

Prends toutes les dispositions nécessaires au niveau de la DDASS pour changer ton adresse professionnelle.».

Mais attendu que si les documents sus cités démontrent la réalité d'une collaboration, puis d'une cessation de celle ci, ils sont cependant insuffisants, en l'absence d'autres éléments, à caractériser l'imputabilité à Mme [W] d'une rupture unilatérale et sans motif légitime.

Attendu que Mme [B] [I] , qui ne peut, non plus, utilement se prévaloir de ses propres lettres de contestation écrites à réception du courrier du 10 septembre, ne rapporte donc pas la preuve de ce qu'elle a été privée de sa possibilité de travailler par suite d'une faute imputable à Mme [W].

Attendu, de surcroît, que les autres documents versés par Mme [B] [I] relativement à son préjudice ne sont que des pièces unilatéralement établies par elle-même, ou des relevés de soins établis sous le nom de Mme [W] et qu'ils sont inopérants à démontrer la réalité et le quantum du manque à gagner invoqué ; qu'aucun document comptable, de nature à établir tant l'importance de son activité personnelle liée à l'exercice de ses fonctions avec Mme [W] que celle des charges générées par la collaboration litigieuse n'étant par ailleurs produit, la preuve du bien fondé de la demande d'indemnisation des divers préjudices matériels dont elle se plaint n'est , de toute façon, pas faite.

Attendu, enfin, que la demande est formée sur le fondement de l'existence d'une société de fait.

Attendu par suite, qu'il incombe à la demanderesse de démontrer d'une part, l'affectio societatis, et d'autre part, la réalité d' apports et le partage des bénéfices et des pertes.

Or ,attendu que Mme [B] [I] ne justifie, ni de la réalité d'un apport respectif des différents associés de fait, ni de ce que les professionnels collaborant à cette activité d'infirmière libérale ont tenu une comptabilité au nom de la société, ni de ce qu'ils ont fait une déclaration d'impôt pour celle ci, ni encore de qu'ils ont exercé leur activité au nom de la société (et non sous leur identité personnelle), aucun des pièces versées ne rapportant, en effet, la moindre preuve de ces éléments.

Attendu que le jugement sera donc confirmé et que l'appelante sera déboutée des fins de son recours, sauf à dire que l'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile .

Attendu qu'en raison de sa succombance, Mme [B] [I] supportera les entiers dépens de la procédure d'appel.

Attendu que l'équité ne commande pas, non plus, l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour.

Attendu, enfin, que l'exercice d'une action en justice est un droit qui ne dégénère en abus, susceptible de fonder une demande de dommages et intérêts, que s'il est établi une intention malicieuse ou une erreur grossière équipollente au dol, lesquelles ne sont présentement pas démontrées par Mme [W];

attendu que sa demande de dommages et intérêts sera donc rejetée.

Par ces motifs

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Reçoit l'appel

Confirme le jugement sauf en ses dispositions relatives à la condamnation sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile , toute demande de ce chef étant rejetée ,

y ajoutant :

rejette les demandes plus amples des parties,

Condamne Mme [B] [I] à supporter les entiers dépens de la procédure d'appel et en ordonne la distraction conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile .

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre a
Numéro d'arrêt : 13/02738
Date de la décision : 07/10/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°13/02738 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-07;13.02738 ?
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