COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
18e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 19 JUIN 2014
N°2014/313
Rôle N° 12/06304
[Y] [B]
C/
[V] [H]
Grosse délivrée le :
à :
- Me Régis NALBONE, avocat au barreau de TOULON
- Me Philippe MESTRE, avocat au barreau d'AVIGNON
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FREJUS - section Activités Diverses - en date du 16 Mars 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 10/292.
APPELANTE
Madame [Y] [B],
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Régis NALBONE, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Franck BORREAU, avocat au barreau de TOULON
INTIMEE
Madame [V] [H],
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Philippe MESTRE, avocat au barreau d'AVIGNON (Centre d'affaires les Naïades, [Adresse 1])
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 Février 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Fabienne ADAM, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Gisèle BAETSLE, Président
Madame Fabienne ADAM, Conseiller
Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Julia DELABORDE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Juin 2014
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2014, prorogé au 19JUIN 2014
Signé par Madame Gisèle BAETSLE, Président et Mme Fabienne MICHEL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Madame [Y] [B] a relevé appel le 2 avril 2012 d'un jugement du conseil de prud'hommes de Fréjus, rendu le 16 mars 2012 en ces termes :
'Reconnaît l'existence d'un contrat de travail liant Mme [Y] [B] et Mme [V] [H];
Constate que la procédure de licenciement n'a pas été respectée;
Dit et juge sans cause réelle et sérieuse le licenciement opéré par Mme [T] ;
CONDAMNE Madame [V] [T] - [K] à payer à Mme [Y] [B] les sommes suivantes :
- 1220 € bruts au titre des salaires dûs sur la période de mars 2009 à mars 2010
- 122 € bruts au titre des congés payés y afférents
-160 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis
-16 € bruts au titre des congés payés y afférents
-160 € au titre des dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement
-240 € au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
ORDONNE la remise de l'attestation destinée à Pôle Emploi et du certificat de travail dans les trente jours suivant la notification du présent jugement et sous astreinte de 10 € par jour de retard, le Conseil se réservant le droit de liquider cette astreinte.
ORDONNE la compensation avec les loyers avancés en guise de salaires par Mme [T] pour le compte de Mme [B], fixés à 4200 €pour toute la période concernée.
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement.
Condamne Mme [T] aux dépens'.
' Dans ses écritures développées à la barre, l'appelante demande à la cour de :
'INFIRMER l'arrêt en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a reconnu l'existence d'un contrat de travail et statuant nouveau
CONDAMNER Madame [T] à régler à Madame [B] les salaires pour la période du 13 février 2009 au 10 mars 2010, à savoir la somme de 9 100 € bruts et à remettre les bulletins de salaire pour la période correspondante sous astreinte de 150 € par jour de retard
CONDAMNER Madame [T] à régler à Madame [B] la somme de 910 € à titre d'indemnité de congés payés sur salaires
CONSTATER DIRE ET JUGER le licenciement de Madame [B] dépourvu de cause réelle et sérieuse
EN CONSEQUENCE
CONDAMNER Madame [T] à régler à Madame [B] :
700,00 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis
70,00 € bruts à titre d'indemnité de congés payés sur préavis
700,00 € nets à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement
2 100, 00 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
4 200,00 € nets au titre de l'indemnité forfaitaire de six mois dans le cadre du travail dissimulé (art. L.8223-1 du Code du travail)
CONDAMNER Madame [T] à régler à Madame [B] la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
CONDAMNER Madame [T] aux entiers frais et dépens '.
' Dans ses écritures également soutenues sur l'audience, l'intimée Madame [V] [H] demande à la cour de :
' ~ AU PRINCIPAL
Réformer le jugement du Conseil de prud'hommes de Fréjus en ce qu'il a considéré l'existence d'un contrat de travail entre Mme [T] et les époux [B],
Statuant à nouveau,
~ DIRE et juger qu'aucun contrat de travail n'a existé entre Mme [T] et Mr et Mme [B],
~ DIRE et juger que la commune intention des parties était l'occupation de l'immeuble au [Localité 1] en échange de menus travaux.
En conséquence,
Débouter Mr et Mme [B] de l'intégralité de leurs demandes.
~ SUBSIDIAIREMENT
Confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Fréjus en ce qu'il a admis la compensation judiciaire;
~ DIRE et juger que les loyers dus par Mr et Mme [B] au profit de Mme [T] compensent les salaires dus.
~ En conséquence, ordonner la compensation judiciaire entre les sommes dues au titre des loyers et les sommes dues au titre des salaires
En tout état de cause condamner Mr et Mme [B] à payer à Mme [T] la somme de 2000,00€ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamner également Mr et Mme [B] aux entiers dépens tant de première instance que d'appel'.
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures oralement soutenues à l'audience.
MOTIFS DE L'ARRÊT :
Sur la recevabilité de l'appel :
La recevabilité de l'appel n'est pas discutée. Les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d'office.
Sur le fond :
Des pièces versées aux débats il est constant que :
-Mme [H] recherchait un couple de gardiens pour une propriété sise au [Localité 1] dans le Var, le logement étant fourni en échange de l'entretien courant de la maison et du jardin (offre diffusée sur internet en novembre 2008 ) ;
-un bail a été conclu entre, d'une part, la SCI du GRAND JAS, représentée par sa gérante, Mme [H] et, d'autre part, M. [G] [B] et Mme [Y] [B], le 23 janvier 2009, à compter du 1er mars 2009, concernant le rez de chaussée meublée de la villa '[Adresse 4], pour un loyer mensuel de 600€ plus 100€ de charges, payable au plus tard le premier de chaque mois (contrat de location ) ;
- Mme [H] a proposé à M. [G] [B] et Mme [Y] [B] de les employer pour l'entretien de la maison et du jardin pour 550 heures annuelles minimum à 840 heures annuelles maximum au tarif horaire de 10€ et de commencer dès la deuxième semaine de février 2009, le paiement s'effectuant par chèque emploi service le 5 de chaque mois suivant (courrier du 19 janvier 2009).
- les époux [B] ont été mis en demeure de payer l'intégralité des loyers échus de mars 2009 à février 2010, soit la somme de 8.400€ avant le 9 mars 2010 et de bien vouloir communiquer leur nouvelle adresse ( courrier recommandé du 25 février 2010 ).
Il n'est pas véritablement discuté, d'une part que les époux [B] n'ont pas réglé le loyer et ce, dès la première échéance intervenue le 1er mars 2009 et, d'autre part que Mme [H] n'a versé aucune rémunération, étant précisé que la première rémunération aurait dû intervenir le 5 mars 2009, et qu'elle n'a remis aucun bulletin de salaire, ( sur ce dernier point, en tous cas jusqu'à une lettre de mise en garde et de rappel des textes en date du 16 février 2010 d'un contrôleur du travail saisi d'une plainte des époux [B] ).
En effet, Mme [H] a expliqué dans sa lettre en réponse au contrôleur du travail en date du 3 mars 2010, que les époux [B] ne s'étaient jamais acquittés d'un seul terme du loyer et qu'ils avaient délibérément décidé de compenser la jouissance de l'appartement par leur prestation considérant qu'il s'agissait d'une contrepartie en nature. Elle précisait qu'elle n'était pas d'accord sur cette façon de procéder et voyant la difficulté qui allait en résulter qu'elle avait pris la décision de mettre un terme à cette situation en faisant procéder au paiement des loyers et en régularisant par le versement de chèques emploi service sur la base du forfait qui avait été envisagé.
Mme [B] affirme qu'un contrat de travail la liait à Mme [H].
.../...
En revanche, cette dernière soutient qu'il n'y a pas de contrat de travail dans la mesure où si les époux [B] peuvent établir avoir effectué une activité pour le compte d'autrui, ils sont dans l'incapacité de démontrer avoir perçu une rémunération et surtout de démontrer l'existence d'un lien de subordination. L'intimée conclut que, s'il avait été envisagé (emploi du conditionnel dans le courrier du 19 janvier 2009) une relation contractuelle de travail, celle ci n'a finalement pas été concrétisée, les époux [B] ayant eu l'intention incontestable de procéder à la novation du contrat en demandant une location gratuite de la villa du [Localité 1] en échange de menus travaux. De plus, il est produit plusieurs attestations de personnes venues à la villa qui ont constaté qu'elle n'était pas entretenue.
C'est à celui qui invoque l'existence d'un contrat de travail de le prouver.
Un contrat de travail se caractérise par trois éléments : un travail pour autrui, une rémunération en réponse à ce travail, et le tout exercé sous un lien de subordination.
En l'espèce, Mme [B] ne verse aucun élément démontrant le travail effectué, il ne conteste pas ne pas avoir été rémunéré puisqu'elle sollicite le paiement de salaire pour la période du 13 février 2009 au 10 mars 2010 et enfin elle ne fournit aucune pièce établissant un lien de subordination, par exemple des ordres, des directives ou l'exercice d'un pouvoir disciplinaire par Mme [Z].
Par suite, ses demandes, toutes fondées sur l'existence d'un contrat de travail, ne peuvent être que rejetées. Le jugement entrepris sera donc infirmé et Mme [B] sera déboutée de l'ensemble de ses demandes.
Les dépens seront supportés par moitié par chacune des parties. Aucune considération d'équité ne commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile. Les parties seront déboutées de leurs demandes respectives faites en ce sens.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, en matière prud'homale, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,
Reçoit l'appel,
Infirme le jugement entrepris,
Et statuant à nouveau,
Constate l'absence de contrat de travail entre Madame [V] [H] et Madame [Y] [B],
Déboute Madame [Y] [B] de l'ensemble de ses demandes,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes respectives faites sur ce fondement,
Dit que les dépens de première instance et d'appel seront supportés par moitié par chacune des parties.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT