COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
18e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 22 MAI 2014
N°2014/260
Rôle N° 12/09043
Association LES SOURCES D'AZUR
C/
[S] [A]
Grosse délivrée
le :
à :
- Me Luc BERGEROT, avocat au barreau de MARSEILLE
- Me Jérôme FERRARO, avocat au barreau de MARSEILLE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DRAGUIGNAN - section Activités Diverses - en date du 04 Mai 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 10/334.
APPELANTE
Association LES SOURCES D'AZUR, prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Luc BERGEROT, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Muriel DROUET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
Madame [S] [A], demeurant [Adresse 1]
comparante en personne, assistée de Me Jérôme FERRARO, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 08 Avril 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Gisèle BAETSLE, Président
Madame Fabienne ADAM, Conseiller
Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Julia DELABORDE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Mai 2014
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Mai 2014
Signé par Madame Gisèle BAETSLE, Président et Mme Julia DELABORDE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Dans le délai légal et par déclaration écrite reçue le 18 mai 2012 au greffe de la juridiction, l'association Les Sources d'Azur a relevé appel du jugement rendu le 4 mai 2012 par le conseil de prud'hommes de Draguignan qui a résilié à ses torts le contrat de travail qui la liait à Mme [S] [A], ce avec effet à la date du licenciement de l'intéressée le 17 mars 2011, et l'a condamnée à lui payer 1 786,50 € à titre de rappel de salaire de 2009 à 2011, 18 211,08 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 2 730 € à titre d'indemnité de préavis, 273 € d'indemnité de congés payés sur préavis, 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral, 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Selon ses écritures développées oralement à l'audience du 8 avril 2014, visées par la greffière, et auxquelles il est renvoyé pour un exposé de ses moyens et prétentions, l'association Les Sources d'Azur demande à la cour d'infirmer ledit jugement, débouter Mme [A] de toutes ses prétentions, la condamner à lui payer 2 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Selon ses écritures pareillement développées oralement, Mme [A] demande au contraire à la cour de confirmer en son principe le jugement entrepris, y ajoutant annuler les sanctions disciplinaires à elle notifiées les 13 janvier 2006, 19 janvier 2006, 16 mai et 13 octobre 2006, élever le montant des dommages-intérêts à lui allouer à 50 000 € pour rupture abusive, 15 000 € pour préjudice moral, et 3 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Sur ce :
L'association Les Sources d'Azur qui exploite à [Localité 1] (Var) une maison de retraite pour personnes âgées dépendantes, établissement classé EHPAD, dispose d'un effectif de 29 salariés régis par un accord collectif d'entreprise du 15 décembre 1995 et avenant du 31 mai 2001 ;
Elle a embauché Mme [S] [A] suivant contrat écrit du 26 novembre 2003 à temps partiel pour une durée indéterminée en qualité d'employée de collectivité au service restauration, moyennant un salaire de 1 077,47 € bruts pour 144 heures mensuelles ;
Mme [A] a été élue déléguée du personnel le 2 décembre 2005 ;
La salariée a saisi le 21 octobre 2010 la juridiction prud'homale d'une demande tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, et celui-ci condamné en conséquence à lui payer diverses indemnités ;
Pendant le cours de cette instance, d'abord absente pour cause de maladie du 3 décembre 2009 au 2 janvier 2011 puis du 21 janvier 2011 au 20 février 2011, Mme [A] a ensuite été déclarée inapte à son emploi par le médecin du travail selon avis définitif du 19 janvier 2011 ainsi libellé : « inapte à tous les postes de l'entreprise suite aux restrictions figurant sur la première visite du 4 janvier 2011 (pas de charges répétitives supérieures de 5 à 10 kg en particulier sollicitant le poignet droit. Serait apte à un poste de bureautique) et suite à l'absence de poste dans l'entreprise (lettre employeur du 7 janvier 2011) » ;
Après avoir été convoquée le 9 mars 2011 à un entretien préalable, elle a dans ces conditions été licenciée par lettre du 15 mars 2011 pour « inaptitude physique et impossibilité de reclassement », puis perçu 5 770,95 € d'indemnité légale de licenciement ;
Sur la demande de rappel de salaire :
Mme [A] soutient, avoir été rémunérée, en violation de l'article L. 3231-2 du Code du travail, de janvier 2009 à mars 2011 selon un salaire horaire inférieur au SMIC, lequel était de 8,71 € brut à partir de juillet 2008, 8,82 € à partir de juillet 2009, 8,86 € à partir de juillet 2009 et 9 € à partir de décembre 2010 ;
Les bulletins de paie de l'intéressée communiqués font cependant apparaître, indépendamment de la mention y figurant du salaire « indicé », que sa rémunération a effectivement été établie sur la base horaire brute de 9,60 € de janvier 2009 à septembre 2009, puis de 9,61 € d'octobre 2009 à mars 2011, donc sur une base supérieure au minima légaux ;
Sa réclamation est en conséquence infondée, et le jugement entrepris doit être infirmé de ce premier chef ;
Sur les demandes d'annulation de sanctions disciplinaires et de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur :
Mme [A] soutient avoir fait l'objet de harcèlement moral et de discrimination syndicale à la suite de son élection aux fonctions de déléguée du personnel en décembre 2005 ;
Elle fait ainsi d'abord grief à l'employeur, en réponse à une réclamation par elle émise en qualité de déléguée du personnel, de l'avoir informée par lettre du 12 décembre 2005 de l'instauration d'une réunion de l'ensemble du personnel pour consultation relativement à l'organisation du temps de repos quotidien des salariés ;
Or une telle initiative de l'employeur, loin d'apparaître comme une discrimination syndicale, traduit au contraire l'intérêt normalement porté par l'employeur à la revendication émise par la représentante du personnel de l'entreprise ;
L'avertissement par ailleurs notifié à Mme [A] par lettre du 13 janvier 2006 pour avoir refusé délibérément et sans motif légitime d'effectuer une tâche banale et conforme à ses fonctions d'employée de collectivité au service restauration, en l'espèce l'instruction reçue de servir des cafés, est établi et correspond bien à une insubordination fautive ;
Il en est de même des avertissements notifiés à l'intéressée les 19 janvier 2006, 16 mai et 13 octobre 2006, concernant de semblables faits réitérés d'insubordination caractérisée et aussi de maltraitance envers des personnes âgées pensionnaires de la maison de retraite, ainsi qu'il ressort des très nombreuses lettres et attestations détaillées émanant d'autres préposés de l'entreprise ou parents de résidents, Mme [W], Mme [D], Mme [M], Mme [K], Mme [G], Mme [B], Mme [F], Mme [H], Mme [V], Mme [C], Mme [P], Mme [G], Mme [I], Mme [X], M. [T], Mme [J] ;
L'attestation en sens contraire du 28 septembre 2007 de l'ancienne directrice de la maison de retraite Mme [W], qui déclare avoir subi « des pressions et harcèlement de ses supérieurs hiérarchiques pour licencier Mme [S] [A] » doit être considérée comme partiale et non probante car établie deux jours après le propre licenciement de Mme [W] pour faute grave, et sachant que le conseil de prud'hommes de Draguignan ensuite saisi par l'intéressée a jugé son congédiement fondé par décision du 30 novembre 2010 ;
Les mises à pied disciplinaires de 6 jours assortissant les avertissements des 16 mai et 13 octobre 2006 apparaissent en outre proportionnées aux manquements avérés et répétés de la salariée ;
Le fait par l'employeur d'avoir signifié à la salariée ces sanctions par huissier plutôt que par lettre recommandée est un mode de notification légal auquel il était loisible à l'association Les Sources d'Azur de recourir, eu égard à l'état conflictuel de la relation de travail entre les parties, sans que puisse en être déduit ni harcèlement moral ni intention discriminatoire ;
L'allégation de Mme [A] selon laquelle les plannings de travail du personnel auraient été modifiés en 2008 de manière discriminatoire à son égard n'est pas démontrée par les pièces produites ;
Il est constaté que le refus de l'inspecteur du travail par décision du 16 novembre 2007 d'autoriser son licenciement est explicitement intervenu au bénéfice d'un doute en faveur de salariée ;
Il s'en déduit que l'autorisation sollicitée n'était empreinte de légèreté blâmable mais au contraire sérieusement motivée ;
Il en est de même, à propos de nouveaux manquements commis par l'intéressée (fouille non autorisée le 6/7/2008 des bureaux et armoires du service administratif de l'entreprise ; insultes proférées envers d'autres salariés), de la seconde décision de refus d'autorisation de la licencier prise par l'inspecteur du travail le 28 novembre 2008 au motif que « les fautes reprochées à Mme [A] ne sont pas d'une gravité suffisante pour justifier d'un licenciement » ;
Il est enfin constaté que l'avis d'inaptitude de Mme [A] émis par le médecin du travail le 19 janvier 2011 est motivé pour des raisons purement physiologiques, sans nulle cause psychique en rapport avec un possible harcèlement ;
Il apparaît en conséquence que les manquements de la salariée à ses obligations professionnelles expliquent seuls les sanctions appropriées qui lui ont été infligées ;
Mme [A] ne justifiant d'aucun fait ou agissement de son employeur permettant de présumer l'existence à son encontre d'un harcèlement moral ou d'une discrimination syndicale, la demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'association Les Sources d'Azur doit par suite être rejetée comme infondée ;
Le jugement déféré sera dès lors infirmé de ce chef et Mme [A] déboutée tant de sa demande d'annulation des sanctions disciplinaires qui lui ont été infligées que de ses diverses demandes indemnitaires ;
Il est enfin constaté que l'intéressée ne remet pas en cause, même à titre subsidiaire, son licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de son reclassement à elle notifié par lettre du 15 mars 2011 ;
En application de l'article 700 du Code de procédure civile, il est enfin équitable d'allouer 800 € à l'association Les Sources d'Azur ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale ;
Infirme le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau ;
Dit Mme [S] [A] mal fondée en toutes ses demandes et l'en déboute ;
La condamne à payer 800 € à l'association Les Sources d'Azur sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
La condamne aux dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT