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08/04/2014 | FRANCE | N°13/07501

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 08 avril 2014, 13/07501


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 08 AVRIL 2014



N°2014/

MV/FP-D













Rôle N° 13/07501







SAS APF AROMES ET PARFUMS





C/



[Z] [Q]













































Grosse délivrée le :

à :

Me Olivier BONIJOLY, avocat au barreau de MONTPELLI

ER



Me Fabio FERRANTELLI, avocat au barreau de NICE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CANNES - section C - en date du 28 Mars 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/108.





APPELANTE



SAS APF AROMES ET PA...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 08 AVRIL 2014

N°2014/

MV/FP-D

Rôle N° 13/07501

SAS APF AROMES ET PARFUMS

C/

[Z] [Q]

Grosse délivrée le :

à :

Me Olivier BONIJOLY, avocat au barreau de MONTPELLIER

Me Fabio FERRANTELLI, avocat au barreau de NICE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CANNES - section C - en date du 28 Mars 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/108.

APPELANTE

SAS APF AROMES ET PARFUMS, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Olivier BONIJOLY, avocat au barreau de MONTPELLIER ([Adresse 1])

INTIMEE

Madame [Z] [Q], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Fabio FERRANTELLI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 10 Février 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller

Madame Martine ROS, Conseiller

Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Avril 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Avril 2014

Signé par Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller faisant fonction de Président et Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame [Z] [Q] a été engagée à compter du 2 octobre 2006 par la société APF AROMES ET PARFUMS en qualité d'assistante de direction tout d'abord dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée puis à compter du 24 juillet 2007 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée moyennant la rémunération mensuelle brute en dernier lieu de 2750 euros.

À compter du 6 septembre 2011 elle a été en arrêt de travail pour maladie.

Lors de la première visite de reprise le 8 novembre 2011 le médecin du travail la déclarait « inapte temporaire au poste d'assistante de direction et à tout autre poste dans l'entreprise. A revoir dans 15 jours conformément à la réglementation »

et lors de la seconde visite de reprise le 22 novembre 2011 « inapte définitif au poste d'assistante de direction et à tout autre poste dans l'entreprise ».

Le 15 décembre 2011 elle était convoquée à un entretien préalable fixé au 23 décembre 2011 reporté au 3 janvier 2011 et le 6 janvier 2012 elle était licenciée aux motifs suivants :

« Je fais suite à l'entretien que nous avons eu le 3 janvier au siège de notre société.

Dans la mesure où vous n'êtes pas à même d'exécuter le préavis, la date de première présentation de la présente fixera la date de rupture de votre contrat de travail.

Les motifs de ce licenciement sont ceux qui vous ont déjà été exposés lors de l'entretien préalable du 3 janvier 2012 à savoir: inaptitude à votre poste et à tout poste constatée par le médecin du travail aux termes de 2 examens médicaux en date des 8 et 22 novembre 2011 et notre impossibilité de vous proposer un reclassement pour les motifs exposés dans notre courrier du 14 décembre.

Le médecin du travail a en effet conclu en ces termes:

" Inapte définitif au poste d'assistante de direction et à tout autre poste dans l'entreprise ".

Par courrier du 24 novembre 2011, nous nous sommes toutefois rapprochés du médecin du travail afin d'obtenir des conclusions complémentaires sur nos possibilités de vous reclasser, compte tenu de notre obligation en la matière.

Notre courrier lui présentait également les postes existants au niveau de la société, afin que le médecin nous précise si ces postes pouvaient être aménagés.

Par courrier du 1er décembre 2011, le médecin du travail nous a confirmé que vous étiez inapte à travailler dans l'entreprise au poste d'assistante de direction et à tout autre poste.

Nous avons persisté dans nos recherches de reclassement. Or, la société compte seulement les postes suivants: parfumeur, commercial, assistante commerciale, administration de ventes, de préparateur de production et de laboratoire, législation parfumerie, contrôle qualité, comptable et de gestion administrative du personnel.

Ces postes ne sont toutefois pas vacants à l'exception d'un poste de préparateur que la société envisage de créer. Nous nous sommes rapprochés du médecin du travail afin de lui indiquer que nous pouvions vous reclasser sur ce poste. Nous lui demandions également si d'autres postes pouvaient être aménagés, et ce par mail du 2 décembre 2011 .

Par courrier du 6 décembre 2011, le médecin nous a indiqué que ce poste n'était pas compatible avec votre état de santé et que vous ne pouviez être reclassée qu'à un poste externe à l'entreprise.

Aussi, malgré toutes nos recherches approfondies, nous n'avons pas été en mesure de proposer une mesure de reclassement au sein de la société, en l'état des conclusions du médecin du travail et de l'absence de postes vacants au niveau de la société, autre que celui de préparateur.

Au-delà de nos obligations légales, nous avons par ailleurs recherché un reclassement en externe auprès des sociétés suivantes: Astier-Demarest et Diffusions aromatiques. Ces sociétés nous ont répondu ne pas avoir à ce jour de poste vacant, ce qui n'a pas permis votre reclassement externe.

Votre inaptitude et notre impossibilité de vous reclasser pour les raisons susvisées nous conduisent donc à vous notifier votre licenciement... »

Contestant son licenciement et sollicitant un rappel de salaire au titre de la prime de 13e mois Madame [Q] a le 2 mars 2012 saisi le conseil des prud'hommes de Cannes.

PROCEDURE

Par lettre recommandée postée le 10 avril 2013 la société APF AROMES ET PARFUMS a régulièrement relevé appel du jugement rendu le 28 mars 2013 par le Conseil de Prud'hommes de CANNES qui a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, a condamné la société APF AROMES ET PARFUMS à verser à Madame [Q] les sommes de :

13 750 € au titre de rappel de la prime de 13e mois suivant l'accord du 1er juin 1968,

1375 € au titre des congés payés y afférents,

500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

a débouté Madame [Q] de surplus de ses demandes,

a débouté la société APF AROMES ET PARFUMS de ses demandes reconventionnelles,

a dit que les créances salariales ne porteront pas intérêts au taux légal capitalisé à compter de la demande en justice,

et condamné la société APF AROMES ET PARFUMS aux dépens.

La société APF AROMES ET PARFUMS conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouté Madame [Q] des demandes y afférentes et à son infirmation en ce qu'il l'a condamnée au paiement d'un rappel de prime de 13e mois sur le fondement de l'accord du 1er juin 1968 et aux congés payés y afférents et demande en conséquence de débouter Madame [Q] de l'intégralité de ses demandes et de la condamner à lui verser la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [Q] demande de dire et juger que la société APF AROMES ET PARFUMS a manqué à son obligation de sécurité de résultat, que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, de condamner la société APF AROMES ET PARFUMS à lui verser les sommes de :

5615,84 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

561,58 euros au titre des congés payés y afférents,

25 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

13 750 € à titre de rappel de salaire (prime de 13e mois),

1375 € au titre des congés payés y afférents,

de dire que les créances salariales porteront intérêts au taux légal capitalisé à compter de la demande en justice,

de condamner la société APF AROMES ET PARFUMS à lui verser enfin la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour renvoie pour plus ample exposé aux écritures reprises et soutenues par les conseils des parties à l'audience d'appel tenue le 10 février 2014.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement,

Attendu que Madame [Q] fait valoir que son inaptitude a manifestement pour origine l'exécution fautive du contrat de travail par l'employeur et le harcèlement et la pression dont elle a fait l'objet de la part de ce dernier, Monsieur [B] [V], indiquant que cette origine professionnelle a été expressément reconnue par son médecin psychiatre et par ses deux médecins généralistes ;

Attendu qu'aux termes de l'Article L1152-1 du code du travail :

« Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel »,

de l'article L4121. 1 du même code :

« L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes »

et de l'article L. 1154.1 du code du travail de.

« Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152. 1 à L. 1152. 3 et L. 1153. 1 à L. 1153. 4,... le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles » ;

Attendu que les seuls faits établis par Madame [Q] permettant de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral sont un avis d'arrêt de travail du 27 septembre 2011 émanant du docteur [R], psychiatre, faisant mention d'un «état anxio-dépressif réactionnel à des difficultés professionnelles », un courrier de ce même médecin adressé le 3 octobre 2011 à l'un de ses confrères mentionnant avoir reçu en consultation Madame [Q] « pour un état dépressif réactionnel à une souffrance professionnelle à type de harcèlement moral. Je l'ai mise sous antidépresseur et anxiolytique et préconisé un arrêt de travail », un courrier du docteur [Y] en date du 4 novembre 2011 adressé à une « cons'ur » indiquant «je revois ce jour Madame [Q] qui présente un état anxio-dépressif réactionnel à son milieu professionnel. Il me paraît que cette patiente ne peut reprendre son activité dans cette entreprise de manière définitive. Je pense qu'elle pourrait bénéficier d'une inaptitude définitive au travail dans cette entreprise. Je vous laisse juge de la décision à prendre » et produit par ailleurs quelques mails adressés entre juin 2010 et juin 2011 par Monsieur [G] [V], fils de Monsieur [B] [V], supérieur hiérarchique de Madame [Q] et désigné par cette dernière comme ayant exercé tant à l'encontre de son fils qu'à l'encontre d'elle-même un harcèlement moral ;

Attendu que la société APF AROMES ET PARFUMS démontre quant à elle par la production d'un certificat médical émanant du docteur [N], médecin psychiatre, que les conditions de travail de Monsieur [G] [V] « n'ont pas eu d'effet délétère sur son état de santé » l'intéressé ayant d'ailleurs lui-même indiqué dans un mail du 23 février 2011 « je suis allé voir le médecin hier et son diagnostic m'a fait froid dans le dos. Je souffre d'une maladie génitale qui entraîne de gros troubles neurologiques qui me créent des dépressions à répétition ! Bref ce n'est vraiment pas la joie. Malgré ce je vais essayer de venir cet après-midi pour essayer d'avancer. Pardonnez-moi », ce qui démontre que Madame [Q] ne peut sans mauvaise foi utiliser les absences diverses et l'état de santé de Monsieur [G] [V] pour en tirer argument de ce que ce dernier aurait été comme elle victime de harcèlement moral de la part de son père ;

Attendu par ailleurs que si Madame [Q] produit les certificats médicaux mentionnés plus haut, les praticiens consultés ne peuvent - n'étant par définition pas présents au sein de l'entreprise - que s'en référer aux dires de leur patiente sur l'origine de l'état anxio-dépressif constaté de sorte que ces certificats médicaux sont insusceptibles d'établir à défaut de tout autre élément que l'état de Madame [Q] serait en relation avec ses conditions de travail et ce d'autant que dans son entretien d'évaluation du 17 juillet 2008 elle a répondu « plutôt oui » aux questions « depuis l'entretien précédent, estimez-vous vous être épanoui ' » et « globalement êtes-vous satisfaite de travailler chez APF » ;

Attendu qu'il n'existe en conséquence aucun élément démontrant l'exécution fautive du contrat de travail par l'employeur ou l'existence de la part de ce dernier d'un comportement humiliant ou vexatoire ou harceleur commis à l'encontre de Madame [Q] , de sorte que l'inaptitude de cette dernière ne peut nullement être imputée à l'employeur ;

Attendu que la société APF AROMES ET PARFUMS démontre par ailleurs avoir par courrier très détaillé du 24 novembre 2011, suite aux deux avis médicaux du médecin du travail en date du 8 et 22 novembre 2011, interrogé celui-ci afin qu'il lui indique « quels emplois ou quels types d'emplois seraient susceptibles de permettre son reclassement, compte-tenu de ses capacités et aptitudes médicales' Nous vous demandons de bien vouloir nous indiquer clairement et de façon positive les types de poste de travail qui pourraient être compatibles avec l'état de santé de Madame [Q] au besoin par voie d'aménagement'de transformation des postes de travail existant ou de mutations' de nous communiquer vos contre-indications' »

ce à quoi le médecin du travail répondait le 1er décembre 2011 :

« je réponds à votre courrier du 24 novembre 2011'

J'ai déclaré Madame [Z] [Q] inapte au poste d'assistante de direction à la suite de deux visites médicales'

Madame [Z] [Q] est inapte à travailler au sein de votre entreprise en tant qu'assistante de direction et à tout autre poste' » ;

Attendu toutefois que la société APF s'estimant mal renseignée par le médecin du travail écrivait à nouveau à ce dernier le 2 décembre 2011 :

« je fais suite à votre courrier reçu par fax le 1er décembre 2011.

Je ne trouve pas dans ce courrier les réponses aux questions qui vous étaient posées.

En particulier, quelles sont les tâches qui pourraient être confiées à Madame [Q] et a contrario les tâches qui ne peuvent lui être confiées.

Merci de bien vouloir répondre précisément à ces questions au plus tôt »

puis à nouveau le 6 décembre 2011 :

« merci de m'avoir rappelé ce matin suite à mon mail ci-dessous.

Faisant suite à notre échange je vous informe que je pourrais proposer un poste de préparateur.

Vous voudrez bien m'indiquer si ce reclassement est possible.

À défaut merci de me préciser qu'aucun aménagement des postes listés dans mon courrier du 24 novembre n'est envisageable en vue du reclassement de Madame [Q].

Dans l'attente de votre courrier »

ce à quoi le médecin du travail répondait par courrier du même jour :

« l'état de santé de Madame [Z] [Q] ne lui permet pas d'occuper un poste de préparateur au sein de votre entreprise.

Madame [Z] [Q] ne peut être reclassée qu'à un poste externe à l'entreprise »

ce qui établit qu'aucun reclassement en interne n'était possible ;

Attendu par ailleurs que la société APF AROMES ET PARFUMS démontre, alors qu'elle n'appartient pas un groupe et qu'elle n'était donc pas tenue de rechercher un reclassement externe, avoir contacté deux sociétés externes le 8 décembre 2011 (société Astier Demarest et société Diffusion aromatiques) qui lui ont répondu négativement ;

Attendu que la société APF AROMES ET PARFUMS a donc respecté loyalement son obligation d'une recherche de reclassement et devant l'impossibilité de celui-ci a à juste titre licencié Madame [Q] pour inaptitude et impossibilité de reclassement, cette dernière ayant donc à juste raison été déboutée de ses demandes en paiement des indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur la demande de rappel de salaire,

Le 1er juin 1968 le syndicat national des fabricants et importateurs d' huiles essentielles et produits aromatiques naturels de la région de [Localité 1] a signé avec le syndicat autonome des salariés de l'industrie des matières premières aromatiques et du syndicat des matières premières aromatiques (CGT), organisations syndicales de salariés, un protocole d'accord prévoyant notamment « l'octroi d'un 13e mois de salaire à tous les salariés relevant du présent protocole devient obligatoire. En conséquence, les gratifications doivent être au moins égales au 13e mois. Ce mois sera égal au salaire réel du mois de décembre » .

Le 13 décembre 1973 le syndicat national des fabricants et importateurs d' huiles essentielles et de produits aromatiques naturels a fusionné avec le syndicat national des fabricants aromatiques de synthèse pour créer le syndicat patronal «PRODAROM » à savoir le syndicat national des fabricants de produits aromatiques ;

Attendu que la société APF AROMES ET PARFUMS, créée en 1993, a adhéré au syndicat PRODAROM et soutient d'une part que les organisations signataires du protocole du 1er juin 1968 ayant disparu du fait de la fusion, cette disparition a entraîné la mise en cause de l'accord de 1968 et donc sa survie pour une période limitée laquelle a pris fin le 12 mars 1975 et qu'en conséquence cet d'accord ne lui est pas opposable, d'autre part que l'adhésion au syndicat PRODAROM ne peut avoir pour effet d'imposer à une entreprise l'application d'un accord alors que ce syndicat n'a pas lui-même adhéré à cet accord et encore moins étendu son champ d'application à l'ensemble des adhérents et qu'enfin cet accord ne concernait que les fabricants et importateurs d' huiles essentielles et produits aromatiques naturels de la région de [Localité 1] alors qu'elle a pour activité essentielle la fabrication de produits aromatiques de synthèse et que quand bien même serait admis la survie de l'accord à la fusion des deux syndicats patronaux, une telle fusion ne peut avoir eu pour effet d'élargir le champ d'application de cet accord à des entreprises ne relevant pas de son champ d'application initial ;

Attendu toutefois que lors de la fusion en décembre 1973 du syndicat national des fabricants et importateurs d' huiles essentielles et produits aromatiques naturels de la région de [Localité 1] avec le syndicat national des fabricants de produits aromatiques de synthèse pour créer le nouveau syndicat PRODAROM il apparaît que le premier cité n'a pas préalablement à la fusion dénoncé l'accord collectif qu'il avait lui-même signé le 1er juin 1968 et que le syndicat PRODAROM n'a pas davantage lors de sa naissance dénoncé l'accord en question de sorte que malgré la disparition juridique des personnes morales fusionnantes et la constitution d'une personne morale nouvelle il y a eu, du fait de cette absence de dénonciation, transmission et apport de cet accord dans le nouveau syndicat PRODAROM ;

Attendu dès lors que l'article L 132-8 alinéa 7 ducode du travail devenu l'article L2261. 14 disposant :

« lorsque l'application d'une convention ou d'un accord est mise en cause dans une entreprise déterminée en raison notamment d'une fusion, d'une cession, d'une scission ou d'un changement d'activité, cette convention ou cet accord continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis prévu à l'Article L2261-9, sauf clause prévoyant une durée supérieure.

Lorsque la convention ou l'accord mis en cause n'a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans les délais précisés au premier alinéa, les salariés des entreprises concernées conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis, en application de la convention ou de l'accord, à l'expiration de ces délais.

Une nouvelle négociation doit s'engager dans l'entreprise concernée, à la demande d'une des parties intéressées, dans les trois mois suivant la mise en cause, soit pour l'adaptation aux dispositions conventionnelles nouvellement applicables, soit pour l'élaboration de nouvelles stipulations »

ne saurait être appliqué dans la mesure où malgré la fusion des deux syndicats, l'un signataire de l'accord de 1968 l'autre non signataire, il n'y a pas eu au sens du texte susvisé du seul fait de la fusion - en l'espèce de deux syndicats - pour autant « mise en cause » de l'accord de 1968 ;

Attendu en effet que le syndicat national des fabricants et importateurs d'huiles essentielles et produits aromatiques naturels de la région de [Localité 1] n'a disparu que sur le plan juridique et formel mais non dans son essence puisqu'il a en réalité été aspiré - comme l'autre syndicat des fabricants de produits de synthèse - dans la constitution du syndicat commun qui s'est ainsi substitué en les absorbant aux 2 syndicats qui l'ont constitué de sorte que l'accord de 1968, signé uniquement par le premier syndicat, a de ce fait été apporté et intégré par glissement et faute de dénonciation dans l'objet du nouveau syndicat PRODAROM ;

Attendu en outre que la société APF AROMES ET PARFUMS ne produit pas les statuts du syndicat national des fabricants et importateurs d' huiles essentielles et produits aromatiques naturels de la région de [Localité 1] ni les statuts du syndicat des fabricants des produits de synthèse de sorte qu'il est impossible de vérifier si, comme elle le soutient, le premier cité était dédié à la défense des intérêts des seules entreprises ayant comme champ d'application « les produits naturels » comme le laisserait supposer son appellation ou était dédié à la défense des intérêts d'entreprises ayant un champ d'application plus large, et ne peut dès lors soutenir pour s'exonérer de l'application de l'accord de 1968 que le syndicat PRODAROM poursuivrait un but différent du syndicat des fabricants de produits naturels du seul fait qu'il serait également constitué par le syndicat des fabricants des produits de synthèse ;

Attendu qu'il y a donc lieu de considérer que le syndicat PRODAROM constitue un nouveau groupement ayant des buts - bien qu'élargis - en réalité identiques aux deux précédents syndicats dont il a réalisé la synthèse pour défendre de façon globale la profession des fabricants de produits aromatiques, que ces produits soient naturels ou de synthèse ;

Attendu qu'aux termes de l'article L2262-1 du code du travail :

« Sans préjudice des effets attachés à l'extension ou à l'élargissement, l'application des conventions et accords est obligatoire pour tous les signataires ou membres des organisations ou groupements signataires »

de sorte que le syndicat PRODAROM s'étant substitué notamment au syndicat national des fabricants et importateurs d' huiles essentielles et produits aromatiques naturels de la région de [Localité 1], lui-même signataire de l'accord de 1968, il se trouve lié par cet accord, peu importe qu'il ne l'ait pas signé lui-même et que le syndicat des fabricants de produits de synthèse auquel il s'est également substitué ne l'ait pas signé non plus ;

Attendu enfin que le protocole d'accord du 1er juin 1968 n'indique pas, contrairement à ce que soutient la société APF AROMES ET PARFUMS, son champ d'application professionnel de sorte qu' ayant été à l'époque signé, en dehors des deux syndicats salariés, par le syndicat national des fabricants et importateurs d' huiles essentielles et produits aromatiques naturels de la région de [Localité 1] dont les statuts ne sont pas produits il ne peut être retenu comme la société APF AROMES ET PARFUMS le soutient que l'application de l'accord serait « limité » aux entreprise ayant pour activité essentielle la fabrication de produits naturels et ne serait pas applicable aux entreprises ayant comme elle pour activité essentielle la fabrication de produits aromatiques de synthèse;

Attendu qu'il résulte enfin du compte rendu de la réunion de la commission d'études sociales du syndicat PRODAROM en date du 22 novembre 2011, sous le titre « conclusions juridiques sur les accords locaux », à savoir :

« les conclusions de Maître [K] sont distribuées aux participants.

HPB [Monsieur [O] P. [I], président de PRODAROM ] dit que malgré la disparition d'un syndicat les accords restent valables et devront donc être appliqués par les sociétés membres du syndicat pour leur personnel en pays grassois »

que - malgré un courrier non déterminant du 10 décembre 2013 dans lequel Monsieur [I] susvisé et Monsieur [U] indiquent que cette déclaration « n'est pas une prise de position de PRODAROM mais bien la transcription de l'analyse de Maître [K] » et que « PRODAROM n'a jamais pris position sur la validité de ces accords locaux et souhaite laisser la justice trancher sur ce point » - le président du syndicat a nécessairement parlé lors de cette réunion en qualité de mandataire du bureau pour admettre que l'accord de 1968, malgré la disparition du syndicat signataire, doit être appliqué par les sociétés adhérentes ;

Attendu que la société APF AROMES ET PARFUMS étant en conséquence adhérente du syndicat PRODAROM l'accord signé le 1er juin 1968 lui est opposable en ce qui concerne notamment sa disposition relative à la prime de 13e mois ;

Attendu qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré qui a condamné la société APF AROMES ET PARFUMS à verser à Madame [Q] les sommes non subsidiairement contestées dans leur quantum de 13 750 € au titre de rappel de la prime de 13e mois et de 2375 € au titre des congés payés y afférents ainsi que celle de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que ces sommes porteront intérêts au taux légal capitalisé à compter du 12 mars 2012 date de convocation de la société APF AROMES ET PARFUMS devant le bureau de conciliation ;

Attendu qu'il y a lieu de condamner la société APF AROMES ET PARFUMS à verser à Madame [Q] en cause d'appel la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La cour,statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Y ajoutant,

Dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal capitalisé à compter du 12 mars 2012,

Rejette toute demande plus ample ou contraire,

Condamne la société APF AROMES ET PARFUMS aux dépens ainsi qu'à verser à Madame [Z] [Q] la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE CONSEILLER FAISANT FONCTION

DE PRESIDENT

G. BOURGEOIS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 13/07501
Date de la décision : 08/04/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°13/07501 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-04-08;13.07501 ?
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