La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/03/2014 | FRANCE | N°11/10975

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2e chambre, 27 mars 2014, 11/10975


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

2e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 27 MARS 2014



N° 2014/ 150













Rôle N° 11/10975







SAS NAVI TRADE FORWARDERS (NTF)

[K] [L]





C/



Société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION (ELITE EUROPE N.V.)

Société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION (ELCA FRANCE)





















Grosse délivrée

le :

à :
>BADIE

BOULAN CHERFILS















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 27 Mai 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2010F01053.





APPELANTS



SAS NAVI TRADE FORWARDERS (NTF),

dont le siège social est sis [Adresse...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

2e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 27 MARS 2014

N° 2014/ 150

Rôle N° 11/10975

SAS NAVI TRADE FORWARDERS (NTF)

[K] [L]

C/

Société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION (ELITE EUROPE N.V.)

Société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION (ELCA FRANCE)

Grosse délivrée

le :

à :

BADIE

BOULAN CHERFILS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 27 Mai 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2010F01053.

APPELANTS

SAS NAVI TRADE FORWARDERS (NTF),

dont le siège social est sis [Adresse 1]

Monsieur [K] [L]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 2] ([Localité 2]),

demeurant [Adresse 2]

tous deux représentés par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL avoué, précédemment constituée

plaidant par Me Jean Pierre SPITZER, avocat au barreau de PARIS, et Me Gérard ABITBOL, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

Société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION (ELITE EUROPE N.V.),

dont le siège social est sis [Adresse 3] (BELGIQUE)

Société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION (ELCA FRANCE),

dont le siège social est sis [Adresse 4]

toutes deux représentées par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoué, précédemment constituée

plaidant par Me Thierry D'ORNANO, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Novembre 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame AUBRY CAMOIN, président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Janvier 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Mars 2014, après prorogation du délibéré,

Signé par Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

La société FILIPPO NARDI, commissionnaire de transport de droit italien, organisait tous les transports de la société Montedison devenu Montell/Basell (groupe pétrochimique), au départ et à l'arrivée des sites de production du sud de l'Europe, jusqu'à la création de la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION.

La société PHILIPPO NARDI sous traitait à la société TECHNOTRANS qui exerce une activité de commissionnaire de transport à [Localité 3], toutes les opérations de transport au départ et à l'arrivée des sites de raffinage de Berre, de la société Montell devenue Basell en 2007 après une nouvelle fusion.

Monsieur [K] [L] a été salarié de la société TECHNOTRANS du 10 mars 1994 au 28 décembre 2006 en qualité de responsable du service export 2.

A partir de l'année 2000, la société Basell a souhaité harmoniser ses opérations de transport et de logistique en Europe et les confier à un même opérateur le groupe ELITE.

C'est dans ces conditions qu'ont été créées :

- A Anvers, la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION dite ELITE EUROPE NV ayant pour associés la société ELITE PALOUME FORWARDERS NV et la société PHILIPPO NARDI SRL

- A [Localité 3], la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION dite ELCA FRANCE ayant pour associés la société TECHNOTRANS (24,5%), la société ELITE EUROPE NV (51%) et monsieur [L] (24,5%).

La société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION dite ELCA FRANCE ayant une activité de commissionnaire de transport a été immatriculée au registre du commerce de Marseille le 12 mai 2000.

La société ELCA FRANCE travaillait pour l'essentiel en sous traitance de son associé majoritaire la société ELITE EUROPE NV, signataire d'un contrat avec la société Basell le 1° septembre 2001.

La société ELCA FRANCE a donc remplacé la société TECHNOTRANS s'agissant des opérations de transport au départ et à l'arrivée des sites de raffinage de Berre réalisées par la société ELITE EUROPE NV pour le compte de Montell/Basell.

Le 28 décembre 2006, monsieur [L] a démissionné de son emploi dans le société TECHNOTRANS tout en demeurant associé de la société ELCA FRANCE.

Le 25 janvier 2007 a été immatriculée au registre du commerce la société NAVI TRADE FORWARDERS, créée par monsieur [L] et ayant pour activité le conseil en logistique et en organisation de transport.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 janvier 2007, la société ELCA FRANCE a mis en demeure monsieur [L] de cesser ses agissements qui 'portent atteinte au pacte social' en lui faisant grief de proposer ses services aux clients de la société ELCA FRANCE et de chercher à détourner sa clientèle.

Le 19 juin 2007, la société ELITE EUROPE NV et la société TECHNOTRANS actionnaires de la société ELCA FRANCE, ont décidé en assemblée générale extraordinaire la dissolution amiable anticipée de celle-ci avec effet au 30 septembre 2007 contre l'avis de monsieur [L].

Par requête du 25 octobre 2007, la société ELCA FRANCE et ses associés la société ELITE EUROPE NV et la société TECHNOTRANS ont saisi le Président du Tribunal de Commerce de Marseille aux fins de désignation d'un huissier ayant mission de constater les faits allégués de concurrence déloyale.

Par ordonnance du 25 octobre 2007, le Président du Tribunal de Commerce a fait droit à cette requête et a désigné un huissier de justice avec mission de se rendre dans les locaux de la société NAVI-TRADE FORWARDERS et notamment de 'se faire remettre et prendre copie de tous les documents commerciaux ou comptables y compris sur tous supports informatiques de nature à établir l'ampleur du détournement frauduleux de la clientèle d' ELCA FRANCE par la société NAVI-TRADE FORWARDERS'.

Le 3 décembre 2007, Maître [E] huissier de justice assisté de monsieur [S] expert en informatique, a exécuté l'ordonnance précitée et a établi un procès verbal de constat auquel ont été annexés le compte rendu de l'expert et le cd rom sur lequel ont été enregistrés les fichiers.

Le 9 avril 2008, Maître [E] agissant en exécution de l'ordonnance du 25 octobre 2007 assisté de monsieur [S] a extrait du compact disc annexé au procès verbal de constat du 3 décembre 2007, les fichiers les plus significatifs et a établi un constat complémentaire.

Par ordonnance du 18 juillet 2008, le Président du Tribunal de Commerce a :

- débouté monsieur [L] de sa demande de rétractation de l'ordonnance sur requête du 25 octobre 2007, d'annulation des procès verbaux de constat de Maître [E] et de restitution des copies de documents effectuées à cette occasion,

- ordonné une expertise judiciaire et désigné monsieur [N] en qualité d'expert avec mission notamment de déterminer le nombre de clients communs à la société NAVI-TRADE FORWARDERS et à la société ELCA FRANCE du 25 janvier 2007 date de la création de cette dernière au 19 juin 2007 date de sa dissolution.

Par acte du 12 août 2008, la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION- ELITE EUROPE NV et la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION-ELCA FRANCE ont assigné la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L] devant le Tribunal de Commerce de Marseille en concurrence déloyale.

Par jugement du 13 novembre 2009, le Tribunal de Commerce a sursis à statuer dans l'attente du rapport d'expertise judiciaire qui a été déposé le 22 décembre 2009.

Par jugement contradictoire du 27 mai 2011 rendu après remise au rôle de l'affaire, le Tribunal de Commerce a :

- dit que la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L] ont commis des actes de concurrence déloyale à l'égard de la société ELITE EUROPE NV et de la société ELCA FRANCE,

- condamné in solidum la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L] à payer à la société ELITE EUROPE NV la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- condamné in solidum la société NAVI TRADE FORWARDERS et monsieur [L] à payer à la société ELCA FRANCE la somme de 19 106 euros correspondant à la marge brute retirée des relations commerciales avec le client Ogo Faber,

- condamné conjointement la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L] à payer à la société ELITE EUROPE NV et à la société ELCA FRANCE la somme totale de 6 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté pour le surplus toutes autres demandes , fins et conclusions,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision,

- condamné conjointement la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L] aux dépens.

Par déclaration au greffe de la Cour du 22 juin 2011, la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [K] [L] ont régulièrement relevé appel de cette décision à l'encontre de la société de droit belge ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION( ELITE EUROPE NV ) et de la société de droit français ELITE LOGISTIQUE CONSULTANTS ASSOCIATION ( ELCA FRANCE).

Par ordonnance du 19 février 2013, le conseiller de la mise en état saisi par conclusions d'incident déposées par la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L], a rejeté leur demande de communication de pièces sous astreinte consistant dans l'acte

constitutif belge et l'extrait belge du registre du commerce de la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION ( ELITE EUROPE NV), motif pris de ce que ces pièces avaient déjà été communiquées.

Dans leurs dernières conclusions du 19 juin 2013, la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L] demandent à la Cour de :

Infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau

- dire la prétendue société ELITE EUROPE NV irrecevable en son action faute de justifier d'une qualité et d'un intérêt à agir,

Subsidiairement

- enjoindre à la prétendue société ELITE EUROPE NV de produire l'équivalent belge d'un extrait kbis retraçant chronologiquement les différents événements ayant trait à la vie sociale,

- donner acte aux appelants de ce qu'ils se réservent le droit d'invoquer l'absence de qualité à agir de cette société,

Sur le fond , si la Cour estimait recevable en son action la prétendue société ELITE EUROPE NV et/ou que cette dénomination sociale serait en réalité celle de la société ELCA NV

- débouter la société ELCA NV/ société ELITE EUROPE NV et la société ELCA FRANCE de l'intégralité de leurs demandes,

- les condamner conjointement et solidairement à rembourser l'intégralité des sommes versées en exécution du jugement attaqué avec intérêts à compter du jour du versement,

- les condamner conjointement et solidairement à verser aux concluants la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil avec exécution provisoire,

- les condamner conjointement et solidairement à verser aux concluants la somme de 60 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés en première instance et en cause d'appel avec exécution provisoire,

- les condamner conjointement et solidairement aux entiers dépens, ceux d'appel avec distraction par application de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions du 22 février 2013, la société de droit belge ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION ( ELITE EUROPE NV ) et la société de droit français ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION (ELCA FRANCE ) demandent à la Cour au visa des articles 1134 et suivants du code civil, de :

- infirmer partiellement le jugement déféré sur le montant des condamnations prononcées, et statuant à nouveau

- condamner solidairement la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L] à payer à la société ECLA FRANCE la somme de 127 439 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la perte d'une chance,

- condamner solidairement la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L] à payer à la société ELITE EUROPE NV la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la perte de confiance de la société BASELL par suite de la communication à celle-ci d'informations confidentielles,

- condamner solidairement la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L] à payer à la société ELITE EUROPE NV de la somme de 25 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L] aux entiers dépens en ce compris les frais et honoraires de l'expert judiciaire, ceux d'appel avec distraction par application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 octobre 2013.

Par conclusions d'incident du 5 novembre 2013, la société NAVI-TRADE FORWARDERS et monsieur [L] ont saisi le conseiller de la mise en état d'une demande de sursis à statuer dans l'attente d'une décision de la juridiction pénale saisie d'une plainte pour abus de biens sociaux déposée par monsieur [L].

Par conclusions au fond du 15 novembre 2013, monsieur [L] demande à la cour à titre principal de rabattre l'ordonnance de clôture et de surseoir à statuer dans l'attente de la procédure pénale du chef d'abus de biens sociaux en cours d'instruction, à titre subsidiaire de statuer au fond en reprenant ses précédentes demandes.

MOTIFS DE LA DECISION

1 - Sur la procédure

Les conclusions en date des 5 novembre et 15 novembre 2013 aux termes desquelles la société NAVI TRADE FORWARDERS et monsieur [L] demandent un sursis à statuer en raison d'une information judiciaire en cours du chef d'abus de biens sociaux seront déclarées irrecevables en l'absence de cause grave justifiant la révocation de l'ordonnance de clôture.

2 - Sur la qualité et l'intérêt à agir de la société ELITE EUROPE NV

Monsieur [L] et la société NAVI TRADE FORWARDERS soutiennent qu'il n'est pas établi que la société ELITE EUROPE NV serait la même société que la société ELCA NV, qu'il s'agit d'un simple établissement sans personnalité morale, que l'expert [U] sollicité par la concluante a effectué une analyse approfondie des documents versés au débat dont il ressort qu'une confusion est volontairement entretenue sur l'existence de la prétendue société ELITE EUROPE NV, que la preuve de son existence n'est pas rapportée.

La société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION dite ELITE EUROPE NV et la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION dite ELCA FRANCE font observer que la dénomination sociale exacte des sociétés ELITE parties à la procédure est ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION soit en abrégé ELCA, que la dénomination commerciale de la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION NV (ELCA NV) immatriculée à Anvers est ELITE EUROPE NV, que les certificats d'immatriculations et les statuts de ces sociétés ont été versés au débat, que depuis le 1° juillet 2013 le numéro d'entreprise attribué à la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION (ELCA) ayant pour dénomination commerciale ELITE EUROPE NV est 0466.849.716 qui correspond à son numéro de TVA intracommunautaire BE 466.849.716 et remplace l'ancien numéro du registre du commerce ( HRA336 790) et qu'il s'agit du numéro indiqué sur le contrat signé le 1° septembre 2001 avec la société Basell

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs argumentations respectives.

*

Il est constant que la dénomination sociale exacte des sociétés ELITE parties au litige est ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION soit en abrégé ELCA.

Par acte sous seing privé du 11 avril 2000, a été créée la société ELCA FRANCE entre la société ELCA NV immatriculée au registre du commerce d'Anvers sous le numéro 336790 , la société TECHNOTRANS et monsieur [L].

Le 1° septembre 2001 a été signé un contrat entre la société Basell et 'Elite Europe NV' numéro BE 466 849 716.

Selon les pièces produites, toute entreprise belge avait avant le 1° octobre 2003 deux numéros d'immatriculation, l'un délivré par le Service Public Fédéral Finance qui correspondait au numéro TVA et l'autre par le registre du commerce.

La société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION- ELCA dite ELITE EUROPE NV avait le numéro 466.849.716 auprès du Service Public Fédéral Finance et le numéro 336790 auprès du registre du commerce.

Depuis un arrêté du 24 juin 2003, le numéro du registre du commerce est désormais remplacé par le numéro de TVA précédé d'un 0.

Il est établi que la société de droit belge ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION (ELCA NV) dont le siège social est à Anvers, a été créée par acte notarié du 7 septembre 1999, que son numéro d'entreprise est le 0466.849.716 qui correspond à son numéro de TVA intracommunautaire BE 466 849 716 , que ce numéro figure sur le contrat signé le 1° septembre 2001 entre 'ELITE EUROPE NV' et la société Basell, et que son ancien numéro d'immatriculation au registre du commerce HRA 336790 figure sur les statuts de la société ELCA FRANCE.

La société ELCA NV dite ELITE EUROPE NV sont en conséquence la même entité pourvue de la personnalité morale, et la société ELITE EUROPE NV a intérêt et qualité à agir.

2 - Sur les faits de concurrence déloyale

La société ELCA FRANCE disposait d'une clientèle propre et par ailleurs travaillait en qualité de sous traitant de son associé majoritaire la société ELITE EUROPE NV concernant la société Basell.

Sa dissolution amiable a été décidée par assemblée générale extraordinaire du 19 juin 2007 avec effet au 30 septembre 2007, malgré sa bonne santé financière et contre l'avis de monsieur [L].

Les faits de concurrence déloyale dont elle fait grief à la société NAVI TRADE FORWARDERS et à monsieur [L] concernent en conséquence la période du 27 janvier 2007 date d'immatriculation de la société NAVI TRADE FORWARDERS au 30 septembre 2007 date de la dissolution effective de la société ELCA FRANCE soit une période de huit mois.

La société ELCA FRANCE et son associé majoritaire la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION dite ELITE EUROPE NV reprochent à monsieur [L] :

le détournement des fichiers ELCA FRANCE et le démarchage systématique et déloyal de sa clientèle afin de s'approprier celle-ci

la divulgation à la société Basell d'informations financières confidentielles leur appartenant, entraînant une perte de confiance de cette dernière à leur égard

ce, au détriment de la société ELCA FRANCE dont il était associé minoritaire et au profit de la société NAVI TRADE FORWARDERS créée par lui en janvier 2007.

Monsieur [L] et la société NAVI TRADE FORWARDERS contestent ces allégations en se fondant pour l'essentiel sur le rapport d'expertise amiable établi par monsieur [U].

Le détournement des fichiers clients de la société ELCA FRANCE et le démarchage de la clientèle afin de se l'approprier

Selon l'ordonnance du 18 juillet 2008 ayant désigné monsieur [N] en qualité d'expert, les clients de la société ELCA FRANCE concernés sont les suivants : BASELL, HM PLASTIC, KRATON POLYMERS, MUELSTEIN/PEGASUS chez Elite Paloume, FOREST FIBERS, OGGO FIBERS, ITAL FIBERS, FRANCETECH, KRATON chez Elite Paloum et IEH soit dix clients.

Concernant la société IEH RECYCLING BELGIUM, aucune pièce n'établit qu'elle aurait été cliente de la société ELCA FRANCE.

Suivant courrier de son directeur du 1° août 2008, la société IEH travaille en parallèle avec plusieurs prestataires, n'a jamais travaillé avec la société ELCA FRANCE pour les chargements export des marchandises au départ de France ([Localité 3] [Localité 1]) et a été présentée à ELITE ESPAGNE par monsieur [L] en 2006 pour ses exportations de marchandises au départ d'Espagne.

Au cours de l'assemblée générale extraordinaire du 19 juin 2007 de la société ELCA FRANCE, le président de la séance également gérant de la société a indiqué :

'Il n'existe aucun contrat entre ELITE FRANCE et BASELL. Il existe simplement une relation d'affaires entre ELITE FRANCE et ELITE EUROPE NV qui représente environ 85% du chiffre d'affaires et plus de 90% de la marge brute.

Les 10% restant sont principalement constitués par quelques clients dont FOREST FIBER (seul et unique client démarché par monsieur [L]) qui a laissé un impayé d'environ 100 000 euros'.

Il est en conséquence constant que la clientèle propre de la société ELCA FRANCE hors Basell sous traitée par la société ELITE EUROPE NV, était résiduelle de l'ordre de 10%.

Cet état de fait est confirmé par les conclusions de la société ELCA FRANCE et de la société ELITE EUROPE NV selon lesquelles 'après sept exercice, les associés d'ELCA FRANCE n'ont pu que constater l'échec de leur diversification et la dépendance persistante de la société vis à vis du trafic Basell traité pour le compte d'ELITE EUROPE NV. En effet, les quelques clients que la société ELCA FRANCE a réussi à fidéliser en dehors de la sous traitance pour le compte d' ELITE EUROPE NV du trafic Basell et notamment les clients Oggo Fibers, Forest fibers, Ital Fibers, HM Plastics, Kraton Polymers, Francetech, Pegasus ou encore IEH n'ont jamais représenté qu'une part négligeable de son activité.'

La balance des tiers de la société NAVI TRADE FORWARDERS pour la période du 25 janvier au 31 décembre 2007 figurant au constat d'huissier du 3 décembre 2007 révèle des relations commerciales avec les clients propres de la société ELCA FRANCE, Oggo Fibers, Francetech, et Pegasus Polymere, soit 3 clients sur 104.

L'expert judiciaire [N], répondant à l'un des chefs de la mission a par ailleurs relevé que durant la période comprise entre le 25 janvier et le 19 juin 2007 date de la décision de dissolution de la société ELCA FRANCE, le seul client commun entre les deux sociétés était la société Oggo Fibers pour une marge de 19 106 euros.

S'agissant de la société Oggo Fibers, il ressort des courriers électroniques datés de décembre 2006 que les relations se sont dégradées entre celle-ci et la société ELCA FRANCE en raison d'une modification unilatérale des conditions de paiement par la société ELCA FRANCE qui a exigé un paiement cash à l'embarquement au lieu du paiement à quinzaine antérieurement convenu, et de la décision de la société Oggo Fibers de travailler à l'avenir avec la société NAVI TRADE FORWARDERS.

Les relations commerciales entre la société NAVI TRADE FORWARDERS et les deux autres sociétés Francetech et Pegasus Polymere sont en conséquence postérieures au 19 juin 2007.

Concernant la société Francetech, son directeur a indiqué par courrier du 5 août 2008 qu'il travaillait avec de nombreux prestataires en parallèle et qu'il avait choisi de travailler avec monsieur [L] en raison de son expertise et de ses services en matière d'entreposage.

Concernant la société PEGASUS POLYMERE, monsieur [L] entretenait avec elle des relations professionnelles avant son embauche par la société TECHNOTRANS et a réalisé une seule affaire en juillet 2007 consistant dans l'envoi d'un unique conteneur en Colombie.

Aucune pièce n'établit que la société NAVI TRADE FORWARDERS aurait eu des relations commerciales avec les autres clients propres de la société ELCA FRANCE en 2007, en l'occurrence HM PLASTIC, KRATON POLYMERS, FOREST FIBERS, ITAL FIBERS, et KRATON, ni qu'elle les aurait démarché.

Si les courriers électroniques versés au débat révèlent des échanges de monsieur [L] avec certains clients de la société ELCA FRANCE concernant des informations sur la société NAVI TRADE FORWARDERS et des communication de tarifs, il n'est pas démontré que monsieur [L] a détourné des clients propres de la société ELCA FRANCE pendant la période considérée, ni qu'il aurait usé de moyens déloyaux pour concurrencer la société ELCA FRANCE et porté atteinte aux intérêts de celle-ci dont aucune pièce n'établit qu'elle aurait subi un quelconque préjudice entre le 25 janvier et le 30 septembre 2007 date de sa dissolution effective à laquelle monsieur [L] s'est opposé.

Le jugement déféré sera en conséquence infirmé de ce chef.

Divulgation d'informations confidentielles à la société Basell

Ce grief repose sur deux courriers électroniques des 18 et 20 juin 2007 d'où il ressort que monsieur [L] communique avec un responsable de la société Basell concernant notamment des tarifs, des statistiques, et des compagnies maritimes dont rien n'établit qu'il s'agirait de documents confidentiels.

Aucune pièce ne démontre l'existence d'une perte de confiance de la société Basell à l'égard de la société ELCA FRANCE ou de la société ELITE EUROPE NV ni d'une altération des relations commerciales entre elles, étant relevé à cet égard que la société ELITE EUROPE NV n'a pas souhaité communiquer d'information concernant son client Basell à l'expert judiciaire.

Ce grief est en conséquence inopérant.

Il convient dès lors d'infirmer le jugement entrepris et de débouter les sociétés ELCA FRANCE et ELITE EUROPE NV de leurs demandes, fins et conclusions du chef de concurrence déloyale.

Le présent arrêt infirmatif vaut titre exécutoire aux fins de restitution des sommes versées par la société NAVI TRADE FORWARDERS et monsieur [L] en exécution du jugement déféré, avec intérêts au taux légal à compter de la signification valant mise en demeure de l'arrêt infirmatif.

3 - Sur la demande de dommages et intérêts formée par la société NAVI TRADE FORWARDERS et monsieur [L]

la société NAVI TRADE FORWARDERS et monsieur [L] poursuivent la condamnation de la société ELCA FRANCE et de la société société ELITE EUROPE NV au paiement de la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civile en faisant valoir :

- que l'action en concurrence déloyale révèle l'intention de lui nuire, de le spolier et de parasiter son savoir faire,

- que la société ELCA FRANCE n'a toujours pas été liquidée et que ses éléments d'actif ont été transférés abusivement à la société ELITE MARSEILLE créée en septembre 2007,

- que le nom de monsieur [L] a été utilisé frauduleusement et volontairement sur le site de la société ELCA FRANCE en 2007 pour tromper les sociétés commerciales,

- que toute velléité d'un client de la société ELCA FRANCE de quitter cette société a fait l'objet de menaces de représailles,

- que les sociétés ELCA FRANCE et société ELITE EUROPE NV ont commis des actes de dénigrement à son encontre alors qu'il a toujours joui d'une réputation professionnelle sans tâche.

Le préjudice allégué afférent à l'absence de liquidation de la société ELCA FRANCE ne relève pas de la présente instance étant précisé qu'une instance est en cours du chef d'abus de majorité et annulation de la délibération de l'assemblée générale extraordinaire de la société ELCA FRANCE du 19 juin 2007.

L'action en concurrence déloyale engagée par monsieur [L] à l'encontre de la société ELCA FRANCE et de la société ELITE MARSEILLE pour utilisation de son nom a été définitivement jugée par arrêt de cette Cour du 20 octobre 2010.

Les menaces de représailles contre les clients de la société ELCA FRANCE souhaitant la quitter et les actes de dénigrement à l'encontre de monsieur [L] ne sont pas établis.

La société NAVI TRADE FORWARDERS et monsieur [L] ne démontrent pas qu'ils auraient subi un préjudice autre que celui résultant de l'obligation de plaider.

La demande de dommages et intérêts formée par la société NAVI TRADE FORWARDERS et monsieur [L] sera en conséquence rejetée.

4 - Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société ELCA FRANCE et la société ELITE EUROPE NV qui succombent ne sont pas fondées en leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et supporteront les entiers dépens, en ce compris le coût du constat d'huissier réalisé sur ordonnance judiciaire.

Il convient en équité de condamner solidairement la société ELCA FRANCE et la société ELITE EUROPE NV à payer à la société NAVI TRADE FORWARDERS et à monsieur [L] la somme de 10 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort,

En la forme,

Déclare irrecevables les conclusions du 5 novembre 2013 et du 15 novembre 2013 postérieures à l'ordonnance de clôture, aux fins de voir prononcer un sursis à statuer,

Déclare recevable l'action de la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION dite ELITE EUROPE NV,

Au fond,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

Déboute la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION dite ELCA FRANCE et la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION dite ELITE EUROPE NV de leurs demandes fins et conclusions,

Dit que le présent arrêt infirmatif vaut titre exécutoire aux fins de restitution des sommes versées en exécution du jugement entrepris, qui porteront intérêts au taux légal à compter de la signification valant mise en demeure de l'arrêt infirmatif,

Déboute la société NAVI TRADE FORWARDERS et monsieur [L] de leur demande de dommages et intérêts,

Condamne solidairement la société ELCA FRANCE et la société ELITE LOGISTIC CONSULTANTS ASSOCIATION-ELITE EUROPE NV à payer à la société NAVI TRADE FORWARDERS et à monsieur [L] la somme de 10 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 11/10975
Date de la décision : 27/03/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 02, arrêt n°11/10975 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-27;11.10975 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award