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14/03/2014 | FRANCE | N°12/03474

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 14 mars 2014, 12/03474


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2014



N°2014/



Rôle N° 12/03474







SA THERBIO





C/



[J] [G]

















Grosse délivrée le :



à :



Me Jean philippe PASSANANTE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



Me Jean-louis BONNABEL, avocat au barreau de MARSEILLE





Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :




Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section E - en date du 17 Janvier 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 10/1249.





APPELANTE



SA THERBIO, demeurant [Adresse 2]



représentée...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2014

N°2014/

Rôle N° 12/03474

SA THERBIO

C/

[J] [G]

Grosse délivrée le :

à :

Me Jean philippe PASSANANTE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Me Jean-louis BONNABEL, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section E - en date du 17 Janvier 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 10/1249.

APPELANTE

SA THERBIO, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Jean philippe PASSANANTE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me BONETTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIME

Monsieur [J] [G], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Jean-louis BONNABEL, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 29 Janvier 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nathalie VAUCHERET, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre

Monsieur Philippe ASNARD, Conseiller

Madame Nathalie VAUCHERET, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2014

Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

[J] [G] a été engagé le 5 mars 2007 en qualité de directeur général adjoint, cadre position III B, coefficient 180, par la SA Sodetrex, moyennant une rémunération fixe annuelle brute de 80 000 €.

Les relations contractuelles sont régies par la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

La SA Sodetrex, dont le seul actionnaire était la SA Theolia, société mère du groupe Theolia, est devenue par simple changement de dénomination sociale, la SA Therbio en juillet 2007.

Le groupe Theolia est composé de diverses sociétés appartenant soit à son «  pôle environnement », soit à son « pôle éolien ».

A l'époque des faits, le pôle environnement du groupe Theolia comprenait, outre la SA Therbio et sa filiale Ecoval 30 qui détient une délégation de service public en matière de traitement des déchets, Seres Environnement, société spécialisée dans la conception et la fabrication d'équipements environnementaux d'analyses ainsi que Ecoval Technology, société spécialisée dans le traitement de l'eau.

[J] [G] a exercé différents mandats sociaux au sein des sociétés du pôle environnement du groupe Theolia. Il a ainsi été nommé :

-le 3 mai 2007, représentant permanent de Sodetrex au conseil d'administration d'Ecoval 30,

-le 28 septembre 2007, administrateur de Therbio,

-le 23 novembre 2007, président de la SAS Seres Environnement,

-le 13 octobre 2008, président du conseil d'administration et directeur général de Seres Environnement Maghreb,

-le 19 décembre 2008, président du conseil d'administration de Seres Environnement Technology (BEIJING).

A compter de 2008, le groupe Theolia a été contraint de réorganiser son pôle environnement. La SA Therbio, a quant à elle, dû abandonner son activité « montage d'affaires » et se séparer de l'ensemble de ses salariés dans le cadre de mutations concertées au sein du groupe mais aussi dans le cadre de licenciements pour motif économique.

[J] [G], ayant refusé de rejoindre une autre société du groupe, est resté l'unique salarié de la SA Therbio, dont l'activité a été réorientée vers la prestation de services à destination des autres sociétés du pôle environnement et, notamment, de la société Seres Environnement.

Son salaire était ainsi refacturé par la SA Therbio aux sociétés du pôle environnement en fonction du temps de travail réel passé sur chacune des sociétés bénéficiaires de ses services, précision étant faite que 70 % de son salaire étaient refacturés à la société Seres Environnement.

Au début de l'année 2009, le groupe Theolia a décidé de recentrer ses activités sur le marché de l'éolien et d'organiser la cession de la société Seres Environnement. [J] [G] a présenté une offre de rachat qui, jugée insuffisante, n'a pas été acceptée. Le salarié a alors clairement fait part de sa décision de quitter le groupe Theolia et a formulé, le 5 juillet 2010, une proposition de rupture conventionnelle.

Le groupe Theolia n'a pas entendu négocier le départ immédiat du salarié dont la présence a été jugée nécessaire pour accompagner la cession de la société Seres environnement, alors dans une situation difficile.

Le 25 septembre 2010, [J] [G] a démissionné de l'ensemble de ses mandats sociaux, dont le mandat de président de la société Seres Environnement.

La direction générale de Theolia a organisé, dès le 11 octobre 2010, un rendez-vous avec le salarié qui s'est vu remettre une lettre redéfinissant ses objectifs à court terme, à savoir :

-mise à jour du budget 2011 de la société Seres Environnement, sous la supervision du département contrôle de gestion de la SA Theolia,

-analyse complète de la situation de Seres Environnement en matière d'accord collectif, prise en charge de toutes les tâches relatives aux relations sociales de cette société sous la supervision du département RH de la SA Theolia,

-gestion de la trésorerie de Seres Environnement sous la supervision du département trésorerie de la SA Theolia,

-analyse complète des filiales marocaine et chinoise de Seres Environnement sous la supervision du département contrôle de gestion et du département juridique de la SA Theolia,

-toute autre action en relation avec Seres Environnement confiée par la SA Theolia,

précision étant faite que les fonctions du salarié devaient être assurées au siège de Theolia situé à [Localité 1].

Le 12 octobre 2010, [J] [G] a été placé en arrêt de travail pour maladie.

Par courrier du 21 octobre 2010 adressé à [X] [Q], directeur général de la SA Therbio, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail, pour modification essentielle et unilatérale de celui-ci, en ces termes :

«(...) En premier lieu, je vous rappelle que j'ai été engagé par contrat à durée indéterminée (') en qualité de directeur général adjoint placé sous la seule autorité hiérarchique du directeur général de la société, avec bénéfice du statut de cadre dirigeant (...).

J'exerçais mon activité au siège de la société (...) à [Localité 1] (').

Mon contrat renferme également une clause spécifique de rémunération et le bénéfice, sauf faute lourde, en cas de licenciement du versement en sus des indemnités de rupture d'une indemnité de 12 mois de salaire brut.

Il est clair que toutes les conditions du contrat de travail revêtent à mes yeux un caractère essentiel (').

En second lieu, votre correspondance organise clairement un transfert de mon contrat de travail, de mes attributions et fonctions, que je considère comme essentiels à la société Theolia, situation que je n'accepte pas.

De plus mes fonctions s'y trouvent unilatéralement modifiées (').

Votre lettre m''impartit en effet d'exécuter mes fonctions sous la responsabilité de plusieurs membres d'encadrement de la société Theolia sur le terrain financier, social, trésorerie, filiale etc.

Je me vois ainsi placé sous la subordination juridique de personnes de rangs hiérarchiques inférieurs au mien.

Afin de mieux permettre le contrôle de mon activité par ce personnel d'encadrement, il m'est demandé maintenant d'exercer mes fonctions chez Theolia et non plus chez Therbio, comme le prévoyait mon contrat de travail.

Il est ainsi porté atteinte, dans un contexte de déclassement professionnel à mes prérogatives et à mon statut de directeur général adjoint de la société Therbio, cadre dirigeant placé sous la seule autorité hiérarchique du directeur général de cette société.

(...) La cessation de mon contrat de travail aura dès lors lieu avec effet immédiat (').

Je considère être contraint dans les circonstances rappelées ci-dessus à la prise d'acte de rupture de mon contrat de travail dont les conséquences devront être supportées entièrement par la société Therbio.

J'ajoute que les modifications apportées unilatéralement à mon contrat de travail, dans un contexte contraignant de pression, ne sont pas sans lien avec la dégradation actuelle de mon état de santé, ayant nécessité un arrêt maladie à compter du 12 octobre 2010, etc... ».

Par courrier du 2 novembre 2010, le directeur général de la SA Therbio a pris acte de cette rupture et indiqué au salarié que la société renonçait expressément à la clause de non concurrence prévue à l'article 13 de son contrat de travail. Par courrier du 5 novembre 2010, il lui a précisé contester le bien-fondé de sa décision. Enfin, par courrier du 26 novembre 2010, il lui a fait observer, d'une part, que les objectifs définis par courrier du 11 octobre 2010 ne devaient pas être interprétés comme des modifications de son contrat de travail mais comme des propositions de mission s'inscrivant dans le cadre de la politique de transversalité du groupe, d'autre part, que le siège social de Theolia était situé à moins de deux kilomètres de celui de Seres Environnement abritant celui de la SA Therbio, dépourvue de locaux propres depuis le 1er janvier 2009, enfin, que son contrat comportait une clause de mobilité géographique sur tout le territoire national.

Le 28 octobre 2010, [J] [G] a saisi le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence, section encadrement, d'une demande tendant à voir condamner la SA Therbio à lui payer différentes sommes au titre d'une rupture illégitime et dommageable de son contrat de travail.

La juridiction prud'homale, par jugement en date du 17 janvier 2012, a:

*dit que la prise d'acte s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*condamné l'employeur à payer au salarié :

-100 018 € au titre de l'indemnité de rupture contractuelle prévue à l'article 4 du contrat de travail,

-25 002 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

-2500 € pour les congés payés afférents,

-6700 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

-60 009,60 € à titre d'indemnité compensatrice de clause de non-concurrence,

- 1000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

*débouté le salarié du surplus de ses demandes et l'employeur de sa réclamation reconventionnelle,

* condamné l'employeur aux dépens.

La SA Therbio a, le 21 février 2012, interjeté régulièrement appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 24 janvier 2012.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions, la société appelante demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et de :

-dire que la prise d'acte produit les effets d'une démission,

-dire qu'aucune indemnité compensatrice de clause de non-concurrence n'est due à [J] [G],

-le débouter de l'ensemble de ses demandes et le condamner à payer à la société 25 002 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

-le condamner à rembourser à la société la somme de 27 502 €,

-le condamner à lui verser 1500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et à prendre en charge les dépens.

Elle soutient que :

-la décision du groupe, qui n'a pas entendu négocier le départ du salarié, a heurté les plans de carrière de ce dernier qui projetait de rejoindre la société Alcolock France,

-la démission, en septembre 2010, du salarié de tous ses mandats et notamment de son mandat de président de Seres environnement a aggravé la situation très délicate de cette dernière société,

-les objectifs définis le 11 octobre 2010 visaient essentiellement à élaborer les bases du budget 2011 de Seres Environnement dans la perspective de sa session,

-[J] [G] était, aux termes de son contrat de travail, chargé d'assurer le suivi de gestion de l'ensemble des sociétés du pôle environnement,

-en décembre 2010, le salarié a commencé à travailler pour le compte de la société Alcolock France dont il a été nommé directeur général dès le mois de janvier 2011,

-c'est lui qui avait cédé, à un prix extrêmement bas, à la société Alcolock France, en novembre 2009, l'activité éthylométrie de Seres, qui était son actif le plus rentable,

-la lettre du 11 octobre 2010 ne constitue pas une modification de son contrat de travail et les missions temporaires qu'elle a assignées au salarié ne sont pas entrées en vigueur puisque ce dernier a été placé en arrêt de travail juste après la réception de cette lettre, de sorte que la prise d'acte doit produire les effets d'une démission.

Aux termes de ses écritures, l'intimé conclut à :

-la confirmation du jugement déféré, en ce qui concerne l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité de rupture contractuelle, l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'indemnité compensatrice de clause de non-concurrence, le tout avec intérêts de droit du jour de la demande en justice et bénéfice de l'article 1154 du Code civil

-son infirmation en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour rupture illégitime et dommageable du contrat de travail.

Il demande, à ce titre,la condamnation de la SA Therbio à lui payer 200 000 €.

Il fait observer que :

-la SA Therbio n'a pas relevé appel du chef du jugement l'ayant condamnée au titre de l'indemnité compensatrice de la clause de non-concurrence, de telle sorte qu'à défaut d'appel incident général, ce chef du jugement est devenu définitif,

-en tout état de cause, ce n'est que par courrier du 5 novembre 2010 envoyé le 9 novembre 2010 que la clause de non-concurrence a été dénoncée, or l'indemnité est due si la clause n'est pas dénoncée dans le délai de huit jours de la notification de la rupture,

-la lettre du 11 octobre 2010, qui ne fait pas état de « missions temporaires », qui emportait transfert d'employeur et lui impartissait d'exercer ses fonctions sous le contrôle de cadres de la Sa Theolia, modifiait de façon importante ses attributions et entraînant une baisse de ses responsabilités,ce qui ne pouvait être mis en 'uvre sans son accord,

-il devait ainsi, depuis les locaux de Theolia, gérer Seres Environnement alors même qu'il venait de démissionner de son mandat de président non rémunéré,

-c'est au nom et pour le compte de la société Seres, dont il était le mandataire social, avec l'aval de l'actionnaire majoritaire Theolia notamment quant au prix de cession, qu'il a procédé à la vente de l'activité éthylométrie de Seres,

Pour plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures déposées par les parties et réitérées oralement à l'audience.

SUR CE

I-Sur la portée de l'appel principal :

C'est à tort que l'intimé soutient que la société Therbio n'a pas relevé appel du chef du jugement l'ayant condamnée à lui payer la somme de 60 009,60 € au titre de l'indemnité compensatrice de la clause de non-concurrence puisque l'acte d'appel mentionne que son objet est « notamment » la réformation de différents chefs de la décision et la confirmation de celui ayant débouté le salarié du surplus de ses demandes.

Ainsi, le fait que tous les chefs de la décision portant condamnation dont il est demandé l'infirmation ne soient pas listés, ne signifie pas, en présence de l'adverbe « notamment », qu'il n'est pas relevé appel de tous.

Cet acte d' appel a d'ailleurs été enregistré au greffe de la cour comme un appel général. La cour est donc saisie de l'entier litige.

II- Sur la prise d'acte :

En cas de prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse , si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission. Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige. Le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

Les premiers juges ont dit, après avoir relevé que le contrat de travail du salarié n'avait jamais été modifié, que le courrier du 11 octobre 2010 adressé par la société Therbio au salarié constituait « une modification essentielle et substantielle de son contrat de travail ».

Le salarié a été recruté par la société Sodetrex devenue la SA Therbio, le 5 mars 2007, en qualité de cadre dirigeant et plus spécialement de directeur général adjoint (chief operating officier), placé sous l'autorité hiérarchique du directeur général de l'entreprise.

Les pièces produites établissent que c'est dans un contexte de pertes financières importantes - 244,1 millions d'€ sur l'exercice 2008 - et sur un fond de crise mondiale, que le groupe a, notamment, décidé de céder ses activités non éoliennes.

Le salarié ne conteste pas que étant demeuré le seul salarié de la SA Therbio, il a vu son activité totalement changer pour être réorientée vers la prestation de services à destination des autres sociétés du pôle environnement et principalement de la société Seres Environnement.

[J] [G] s'est porté candidat à la reprise de la SA Seres Environnement et a clairement indiqué à la société Theolia, société mère du groupe, dans un courrier du 20 mai 2010 (pièce 6 de l'appelante) que dans l'hypothèse où il ne serait pas donné suite à son offre, il était à sa disposition pour discuter «des conditions d'accompagnement de la cession et des conditions de sa sortie en tant que président de Seres Environnement ».

Le groupe ayant refusé cette reprise, il a proposé une rupture conventionnelle avec un calendrier prévoyant :

-une démission de ses mandats sociaux et le versement de ses indemnités conventionnelles,

-l'établissement d'un contrat d'accompagnement à la cession de Seres Environnement,

-un mi-temps du 1er octobre au 31 décembre 2010.

Il a démissionné de ses mandats de Seres Environnement et de ses filiales chinoises lorsqu'il a su que le groupe n'entendait pas signer un protocole d'accord transactionnel (pièce 14 de l'appelante) et a pris acte de la rupture de son contrat de travail après réception de la lettre du 11 octobre 2010 dans laquelle le Directeur général de Therbio, également directeur général de la société mère du groupe, lui fixait, toujours dans la perspective de la cession de cette société, des objectifs centrés sur la société Seres Environnement pour « les prochaines semaines ».

Afin de démontrer que cette lettre ne portait pas modification unilatérale du contrat de travail du salarié, la société appelante fait observer :

-que le fait de demander à [J] [G] de collaborer avec certains salariés de la société mère du groupe ne constituait pas un déclassement puisqu'il s'agissait d'une simple obligation de « reporting » mise en place pour assurer une bonne transmission des informations au sein du groupe,

-que cette obligation de reporting ne pouvait être assimilée à un lien de subordination ou à un quelconque déclassement dans la mesure où elle était exclusive de tout pouvoir de donner des ordres, de contrôler et de sanctionner,

-que le salarié connaissait cette obligation de reporting puisqu'il avait toujours travaillé en collaboration avec les salariés de la SA Theolia,

-que son contrat de travail prévoyait une clause de mobilité et que la société Therbio ne disposait plus de locaux propres depuis le 1er janvier 2009,

-qu'il n'y a pas eu de modification de son contrat de travail puisqu'il ne s'était agi que d'objectifs à court terme c'est-à-dire de missions temporaires exceptionnelles justifiées par la situation délicate dans laquelle se trouvait Seres Environnement et que, dans le cadre de ses fonctions salariées, [J] [G] pouvait être amené à travailler pour le compte des autres sociétés du pôle environnement.

Dans la mesure où le contrat de travail du salarié n'a jamais été modifié, alors même que l'évolution tant de la société Therbio que des activités de ce dernier l'eussent imposé, les arguments de la société appelante, qui se réfère à ce qu'étaient devenues, au fil du temps, la SA Therbio et les fonctions du salarié, sont inopérants.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont dit que le courrier du 11 octobre 2010 adressé au salarié constituait une modification substantielle de son contrat de travail, qui ne pouvait lui être imposée.

La cour confirme, en conséquence, le jugement querellé, qui a dit que la prise d'acte s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Les premiers juges ayant fait une juste appréciation des droits du salarié s'agissant de l'indemnité de rupture contractuelle prévue à l'article 4 du contrat de travail, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, ainsi que de l'indemnité conventionnelle de licenciement, la cour confirme également ces chefs du jugement entrepris.

La cour infirme, en revanche, le jugement déféré en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts et lui accorde, au regard des circonstances de la rupture, de son âge, de son ancienneté et de sa situation professionnelle après la rupture, la somme de 40 000 € à titre de dommages et intérêts. 

III- Sur l'indemnité compensatrice de clause de non-concurrence  :

L'article 13 du contrat de travail du salarié mentionne dans son dernier alinéa que la société « se réserve la possibilité de renoncer à la clause de non-concurrence et donc de libérer [J] [G] de l'interdiction de concurrence en notifiant à celui-ci sa décision dans les huit jours qui suivent la notification de la rupture du contrat de travail ».

Le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur par courrier du 21 octobre 2010 remis en mains propres le 25 octobre 2010.

Les pièces produites par l'employeur, en l'espèce, deux courriers simples des 2 et 5 novembre 2010, ne permettent pas, faute d'accusé de réception, d'établir si le salarié avait reçu la renonciation de la société avant le 2 novembre 2010 à minuit.

Les premiers juges ayant, là encore, fait une juste analyse des pièces produites et des droits des parties, la cour confirme la décision déférée de ce chef.

Vu le résultat du présent litige, les demandes reconventionnelles de l'appelant doivent être rejetées.

Aucune demande n'est formulée, en cause d'appel par l'intimé sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, la cour infirme l'indemnité allouée de chef en première instance.

L'employeur, qui succombe, ne peut bénéficier de cet article et doit être tenu aux dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement entrepris, sauf en ses dispositions ayant débouté [J] [G] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en celles lui ayant alloué une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la SA Therbio à payer à [J] [G], en sus des indemnités confirmées, la somme de 40 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Dit que les intérêts au taux légal avec capitalisation en application de l'article 1154 du Code civil sont dus sur la créance salariale ( rappel de salaires, indemnités de licenciement et de préavis) à compter du 2 novembre 2010, date de l'accusé de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation, et à compter du présent arrêt pour les autres sommes,

Condamne la SA Therbio aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 12/03474
Date de la décision : 14/03/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9B, arrêt n°12/03474 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-14;12.03474 ?
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