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20/02/2014 | FRANCE | N°13/16006

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre b, 20 février 2014, 13/16006


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 20 FEVRIER 2014



N°2014/111

BP













Rôle N° 13/16006







L'ASSOCIATION HOSPITALIERE SAINTE MARIE





C/



[O] [U] épouse [B]





















Grosse délivrée le :

à :



Me Patrick MARGULES, avocat au barreau de SAINT QUENTIN



Me Bertrand D'ORTOLI, avocat au barreau

de NICE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE - section AD - en date du 25 Juin 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/774.





APPELANTE



L'ASSOCIATION HO...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 20 FEVRIER 2014

N°2014/111

BP

Rôle N° 13/16006

L'ASSOCIATION HOSPITALIERE SAINTE MARIE

C/

[O] [U] épouse [B]

Grosse délivrée le :

à :

Me Patrick MARGULES, avocat au barreau de SAINT QUENTIN

Me Bertrand D'ORTOLI, avocat au barreau de NICE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE - section AD - en date du 25 Juin 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/774.

APPELANTE

L'ASSOCIATION HOSPITALIERE SAINTE MARIE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Patrick MARGULES, avocat au barreau de SAINT QUENTIN substitué par Me Marion BEAURAIN, avocat au barreau de SAINT QUENTIN

([Adresse 3])

INTIMEE

Madame [O] [U] épouse [B], demeurant Chez Mme [Y] [B] - [Adresse 2]

représentée par Me Bertrand D'ORTOLI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 09 Janvier 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte PELTIER, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Madame Brigitte PELTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Caroline LOGIEST.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Février 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Février 2014

Signé par Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre et Madame Caroline LOGIEST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nice en date du 25 juin 2013 ;

Vu les conclusions des parties, déposées et développées oralement à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions ;

Par déclaration en date du 22 juillet 2013, l'association hospitalière Sainte-Marie a interjeté appel d'un jugement au terme duquel le conseil de prud'hommes de Nice, saisi le 19 juin 2012, s'est dit compétent pour statuer quant aux demandes de Mme [O] [U], formées au titre de la rupture du contrat souscrit avec cette dernière en qualité de famille d'accueil, et lui a alloué paiement des sommes de 4.504,50 euros bruts outre congés payés y afférents à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 7.882,87 euros à titre d'indemnité de licenciement, 27.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, tout en ordonnant délivrance des documents sociaux et paiement d'une somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'association hospitalière [1] conclut à l'infirmation de la décision ; elle demande qu'il soit dit que Mme [U] n'était pas titulaire d'un contrat de travail et que la juridiction prud'homale est incompétente pour connaître du présent litige, lequel relèverait le cas échéant de la compétence d'attribution du tribunal de grande instance de Nice ; elle conclut en conséquence au débouté adverse outre paiement d'une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient qu'il n'a pas existé de contrat de travail, le contrat signé le 1er mars 2002 avec le centre hospitalier [1] de [Localité 1] étant étranger aux débats ; que ses relations avec Mme [U] s'inscrivent dans le cadre d'un contrat d'entreprise trouvant son fondement dans l'article 1779 du code civil ; que c'est à celui qui se prévaut de l'existence d'un contrat de travail d'en apporter la preuve ; que l'accueil familial thérapeutique organisé par l'arrêté du 1er octobre 1990 a pour but de permettre la continuité du projet thérapeutique en vue d'une insertion ou réinsertion sociale de certains malades ; qu'en application de l'article 8 de cet arrêté, le directeur de l'établissement hospitalier recrute le membre des familles d'accueil thérapeutique sur proposition du médecin psychiatre, après enquête de l'équipe de soins et met fin à leur participation dans les mêmes conditions, circonstances allant à l'encontre du statut de salarié ; que l'accueillant doit être agréé par le président du conseil général, situation également incompatible avec la notion de contrat de travail ; qu'il doit souscrire une assurance de responsabilité civile par application de la loi du 10 juillet 1989, exigence non imposée à un salarié ; que la rémunération versée dépendait du nombre de personnes accueillies et incluait des indemnités d'entretien de loyer et qu'ainsi elle n'était jamais régulière ni constante ; que Mme [U] s'occupait des malades de façon autonome et indépendante tout en respectant ses instructions ; que le règlement intérieur de l'accueil familial thérapeutique sont incompatibles avec l'existence d'un contrat de travail ; que l'article 3 de ce document énonce que l'indemnisation ne doit pas être le revenu de base et représenter la principale ressource financière de la famille d'accueil ; que contrairement aux prétentions adverses l'article L. 443-10 du code de l'action sociale et des familles présente les accueillants familiaux thérapeutiques comme des agents non titulaires de l'établissement, statut relevant du droit public ; que l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986 invoquée par l'intimée comporte des dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et lui est donc inapplicable en sa qualité d'association de droit privé ;

Mme [U] conclut à la confirmation du jugement déféré, à la requalification de sa prétendue démission en un licenciement abusif, au débouté de l'appelant et sa condamnation au paiement des sommes de 4.504,50 euros bruts outre congés payés y afférents à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 7.882,87 euros à titre d'indemnité de licenciement, 68.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que remise des documents sociaux sous astreinte.

Elle fait valoir qu'elle a été engagée en qualité de famille d'accueil par le centre hospitalier de Dignes les Bains le 1er mars 2002 puis a travaillé pour le compte du CHU de Sainte-Marie sous l'égide de la convention collective des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, à compter du mois de décembre 2004 ; qu'au dernier état de ses fonctions elle avait la responsabilité de l'accueil à son domicile de trois patientes ; qu'ayant été atteinte d'une grave pathologie cancéreuse elle a adressé un arrêt de travail du 2 décembre 2011 au 2 janvier 2012 et a procédé à la résiliation des contrats de famille d'accueil relatifs à ces patientes ; qu'elle a eu la surprise de recevoir au mois de janvier une attestation pôle emploi mentionnant sa démission comme motif de rupture de son contrat de travail, alors qu'elle se trouvait en arrêt maladie ; qu'après deux mises en demeure d'avoir à stopper la subrogation auprès de la sécurité sociale afin de lui permettre de toucher ses indemnités journalières, le CHU Sainte-Marie a confirmé que son initiative était assimilable à une démission et lui a adressé « un chèque d'un montant de 5.835,57 euros correspondant au remboursement de ses indemnités journalières perçues à tort par l'hôpital » ; que l'association hospitalière [1] lui a délivré des bulletins de salaire faisant mention de la convention collective comme des cotisations sociales applicables, d'une attestation pôle emploi ainsi que d'un certificat de travail ; qu'après avoir soutenu qu'elle était démissionnaire, ses moyens tirés de la nécessité d'un agrément ou d'une prétendue absence de lien de subordination manquent de pertinence ; que les dispositions de l'article L. 443-10 du code de l'action sociale régissent le statut des familles d'accueil thérapeutique et que la nature de droit privé du contrat de travail conclu par l'association résulte également de la loi du 9 janvier 1986 comme de l'instruction ministérielle DH/JB n°91-72 du 27/12/1991 sur l'AFT ; que la résiliation des contrats de famille d'accueil ne peut être qualifiée d'acte clair et non équivoque caractérisant une démission ;

SUR CE

En application de l'article L. 1411-1 du code du travail : « Le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient (...) » ; or, il y a contrat de travail quand une personne s'engage à travailler pour le compte et sous la direction d'une autre personne moyennant rémunération ; par ailleurs, le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un contrat de travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ;

Au soutien de ses demandes, Mme [U] produit ses contrats d'accueil en placement familial thérapeutique souscrit avec le centre hospitalier [1] de [Localité 2], ses bulletins de salaire, ses arrêts de travail à compter du 2 décembre 2011, son attestation de droit à l'assurance maladie, ses courriers du 20 mars et 23 mai 2012, la lettre de l'appelant en date du 4 juin 2012 lui adressant un chèque d'un montant de 5.835,57 euros, correspondant au remboursement de ses indemnités journalières perçues à tort par l'hôpital, l'attestation pôle emploi mentionnant une démission comme motif de rupture de son contrat à durée indéterminée ainsi que le certificat de travail délivrés par le centre hospitalier ;

L'association hospitalière [1] ne conteste pas avoir délivré des bulletins de salaire à Mme [U] mais soutient qu'il n'existerait pas de lien de subordination ; toutefois, il résulte du « règlement intérieur de l'accueil familial thérapeutique » versé aux débats que cet accueil est organisé par le centre hospitalier [1], son fonctionnement étant placé sous la responsabilité du directeur d'établissement dont « la responsabilité technique et médicale est confiée au médecin psychiatre (') qui coordonne l'action d'une équipe soignante pluridisciplinaire », lequel « avec le concours de l'équipe soignante (') dirige l'action de l'unité familiale d'accueil et participe à son soutien », l'équipe soignante consignant ses remarques éventuelles sur un livret remis à la famille d'accueil, tandis que « le directeur du centre hospitalier agrée le membre responsable de l'unité d'accueil familial thérapeutique (') » et peut retirer le dit agrément notamment en cas de manquement au règlement intérieur, et que l'unité d'accueil se doit notamment « de se conformer aux modalités du projet thérapeutique défini par l'équipe soignante et participer à sa mise en 'uvre, d'accepter un suivi médico-social régulier de la personne accueillie et permettre l'accès des locaux d'accueil à l'équipe soignante (...) » ; il s'ensuit que ces éléments caractérisent le lien de subordination liant l''association hospitalière [1], gestionnaire d'établissements de santé privés à Mme [U] et que les autres moyens opposés par l'appelante doivent être écartés comme inopérants ; le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a écarté l'exception d'incompétence soulevée ;

Par ailleurs, et alors d'une part que Mme [U] avait régulièrement transmis ses arrêts de travail, d'autre part que la démission ne se présume pas, l'association hospitalière [1] n'est pas fondée à soutenir qu'en procédant à la résiliation des contrats d'accueil des trois personnes dont elle avait la charge, Mme [U] a manifesté une volonté claire et non équivoque de mettre fin à son contrat de travail ; le jugement déféré sera donc également confirmé en ce qu'il a dit que cette rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et lui a alloué une indemnité compensatrice de préavis de deux mois outre indemnité de licenciement ; toutefois, il ressort des bulletins de salaire produits que Mme [U] percevait un salaire brut de 2.025 euros outre congés payés et non de 2.252,25 euros comme retenu par erreur par les premiers juges ; Dès lors il sera alloué de ces chefs les sommes respectives de 4.050 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre congés payés y afférents et 7.087,50 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;

Mme [U], bénéficiant d'une ancienneté de 7 ans, âgée de 58 ans à la date de la rupture, qui justifie avoir perçu des indemnités journalières à compter du 5 décembre 2011, les premiers juges ayant noté qu'elle avait été reconnue invalide 2ème catégorie, fait valoir que ses droits à la retraite se trouveront minorés du fait de la rupture de son contrat de travail ; il lui sera en conséquence alloué une somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts faute de démonstration d'un préjudice plus important ; elle justifie s'être trouvée dans une situation de grande détresse morale et financière du fait de l'employeur qui l'a considérée comme démissionnaire alors qu'elle se trouvait en arrêt-maladie, puis l'a privée de ses indemnités journalières durant 6 mois ; il lui sera dès lors alloué une somme de 1.000 euros au titre de ce préjudice complémentaire ;

Enfin, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a ordonné la délivrance des documents sociaux rectifiés sans qu'il n'y ait lieu cependant au prononcé d'une astreinte ;

Les dépens, ainsi qu'une somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, seront supportés par l'association hospitalière Sainte-Marie qui succombe.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, en matière prud'homale, et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré, en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence, dit que la rupture du contrat de travail s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et ordonné la délivrance des documents sociaux rectifiés.

L'infirme en ce qui concerne le montant des condamnations prononcées, et statuant de nouveau,

Condamne l'association hospitalière Sainte-Marie à payer à Mme [O] [U] les sommes de 4.050 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 405 euros au titre des congés payés y afférents, 7.087,50 euros au titre de l'indemnité de licenciement, 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1.000 euros à titre de préjudice moral, 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne l'association hospitalière Sainte-Marie aux entiers dépens.

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre b
Numéro d'arrêt : 13/16006
Date de la décision : 20/02/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°13/16006 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-02-20;13.16006 ?
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