COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 23 JANVIER 2014
N° 2014/38
Rôle N° 11/09261
[Z] [U] divorcée [Y]
C/
CAISSE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE - CRCAM
Grosse délivrée
le :
à :SCP DESOMBRE
la SCP LATIL - PENARROYA-LATIL - ALLIGIER
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 05 Mai 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 09/14864.
APPELANTE
Madame [Z] [U] divorcée [Y]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/009504 du 01/09/2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX EN PROVENCE)
née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 1] (MAROC), demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Martine DESOMBRE-MICHEL de la SCP DESOMBRE M & J, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me Henry FOURNIER, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
CAISSE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE - CRCAM prise en la personne de son représentant légal en exercice dont le siège est sis [Adresse 1]
représentée par Me Jérôme LATIL de la SCP LATIL PENARROYA-LATIL ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me AUBERT Elise avocat au barreau d'Aix en Provence substituant Me Karine DABOT, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
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COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 10 Décembre 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Yves ROUSSEL, Président
Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Agnès BAYLE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Janvier 2014
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Janvier 2014,
Rédigé par Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller,
Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Par acte du 27 juin 2003 , les époux [Y] [U] se sont portés acquéreurs d'un fonds de commerce de boulangerie pâtisserie au moyen d'un prêt de 29 000 € souscrit auprès du CRÉDIT AGRICOLE , remboursable en 84 mensualités de 422,26 € au taux de 5,90 %.
Ce prêt a été garanti par un nantissement et par le privilège du vendeur de fonds de commerce.
Le 14 janvier 2004, les époux [Y] ont , par ailleurs, ouvert un compte joint professionnel dans les livres du CRÉDIT AGRICOLE prévoyant une ouverture de crédit en compte courant de 1000 € pour une durée indéterminée au taux de 8,67 %.
Par jugement du 10 juillet 2006 la liquidation judiciaire de M. [F] [Y] a été prononcée.
Par LRAR du 18 septembre 2006, la CRCAM a produit sa créance au passif auprès de Me [W], mandataire liquidateur .
Entre-temps, les époux [Y] ont été vainement mis en demeure d'avoir à régler le solde débiteur du compte courant ainsi que le montant restant dû du prêt dont la déchéance du terme a été prononcée le 27 octobre 2006.
C'est dans cet état que, par acte du 9 novembre 2009, la CRCAM Alpes Provence a sollicité condamnation en paiement de Mme [U] épouse [Y] , celle-ci opposant la faute de la banque d'avoir laissé perdre les sûretés dont elle disposait sur le fonds de commerce.
Par jugement du 5 mai 2011, le tribunal de grande instance de Marseille a :
' débouté Mme [U] de ses contestations
' condamné Mme [U] à payer à la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE la somme de 2802,82 € au titre du solde débiteur du compte bancaire outre intérêts au taux de 14 % à compter du 28 octobre 2006 et la somme de 26 055,60 € au titre du contrat de prêt outre intérêts au taux de 5,90 % à compter du 28 octobre 2006
' dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile
' dit que les dépens seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle
Le 24 mai 2011, Mme [U] a interjeté appel de cette décision.
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Vu les conclusions déposées le 10 octobre 2011 par Mme [U] , entre-temps divorcée de M. [Y] , qui soutient l'infirmation du jugement et sollicite :
' le débouté des demandes du CRÉDIT AGRICOLE
' subsidiairement, sa condamnation en paiement de la somme de 28 858,42 € majorés des intérêts , avec compensation des créances respectives
' sa condamnation aux dépens
À l'appui de ses prétentions, Mme [U] soutient que le contrat de financement était garanti par des privilèges que n'a pas mobilisés le CRÉDIT AGRICOLE préférant prendre une hypothèque provisoire sur son propre bien et laissant perdre , par sa propre carence, le bénéfice de sa créance privilégiée.
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Vu les conclusions déposées et signifiées le 22 septembre 2011 par la CRCAM Alpes Provence qui sollicite la confirmation du jugement, le débouté de Mme [U] de toutes ses demandes, la capitalisation des intérêts échus dans les conditions de l'article 1154 du Code civil, la condamnation de Mme [U] aux entiers dépens et en paiement de la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
À l'appui de ses prétentions, la CRCAM Alpes Provence fait valoir que Mme [U], débitrice principale solidaire, ne peut s'exonérer de son obligation à remboursement en se prévalant de la perte d'une garantie précisément censée la prémunir contre sa propre défaillance.
Elle ajoute que l'actionnement de la sûreté n'aurait , en tout état de cause, pas permis de recouvrer l'intégralité de sa créance.
Sur quoi
Mme [U] est , avec son ex époux M. [Y], co titulaire du compte joint ouvert dans les livres du CRÉDIT AGRICOLE et co emprunteuse du prêt octroyé par cette même banque .
Elle est donc co débitrice solidaire tenue à paiement.
Les sûretés dont elle évoque la perte par le fait de la carence de la banque , soit le privilège du vendeur et le nantissement sur le fonds de commerce , se présentent comme des garanties données à la banque pour la prémunir du risque d'inexécution de l'obligation à paiement pesant sur les débiteurs principaux .
À ce seul titre , Mme [U] est mal fondée à invoquer la perte d'une sûreté qui ne profite qu'à la banque ou à la caution subrogée en application de l'article 2314 du Code civil , laquelle peut, en effet, obtenir décharge de son engagement quand, par la faute du créancier, la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges dont il bénéficiait ne peut plus s'opérer.
Telle n'est pas la situation de Mme [U] , débitrice solidaire, tenue, en tant que telle, à paiement et ne pouvant chercher à en être dispensée par l'actionnement d'une garantie instituée au contraire pour pallier son inexécution
Mme [U] est , par ce fait même, mal fondée à rechercher la faute de la banque de l'avoir assignée en paiement alors de surcroît qu'elle ne lui prête aucune intention de nuire et évoque simplement sa carence.
Le jugement sera ainsi , et par substitution de motifs , confirmé en toutes ses dispositions sauf à prévoir la capitalisation des intérêts échus sur les sommes dues par année entière dès lors que les conditions de l'article 1154 du Code civil se trouvent réunies.
Les dépens seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle , Mme [U] étant bénéficiaire de cette aide à 100 % et il n'y a pas lieu, tenant sa situation de précarité, d'envisager sa condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
PAR CES MOTIFS
la cour, publiquement et contradictoirement :
' confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf à dire que les intérêts échus produiront des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil à compter de la demande qui en a été faite par assignation du 6 novembre 2009.
Y ajoutant :
' dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile
' dit que les dépens seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle dont bénéficie Mme [U] à 100 % avec distraction au profit de la SCP Latil, avoué
Le GreffierLe Président