La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/01/2014 | FRANCE | N°11/09051

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 23 janvier 2014, 11/09051


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C



ARRÊT AU FOND

DU 23 JANVIER 2014



N° 2014/ 36













Rôle N° 11/09051







SA BPCA BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR





C/



[M] [J] épouse [Q]





















Grosse délivrée

le :

à :SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE

la SCP LATIL - PENARROYA-LATIL - ALLIGIER











<

br>




Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de DRAGUIGNAN en date du 10 Mai 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2010/955.





APPELANTES ET INTIMEES



SA BPCA BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR, prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration en exercice...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 23 JANVIER 2014

N° 2014/ 36

Rôle N° 11/09051

SA BPCA BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR

C/

[M] [J] épouse [Q]

Grosse délivrée

le :

à :SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE

la SCP LATIL - PENARROYA-LATIL - ALLIGIER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de DRAGUIGNAN en date du 10 Mai 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2010/955.

APPELANTES ET INTIMEES

SA BPCA BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR, prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration en exercice

dont le siège est sis [Adresse 2]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoué à la Cour

Madame [M] [J] épouse [Q]

née le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 2] BELGIQUE, demeurant [Adresse 1]

représentée par la SCP LATIL PENARROYA-LATIL ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Décembre 2013 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Yves ROUSSEL, Président

Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Agnès BAYLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Janvier 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Janvier 2014,

Rédigé par Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller,

Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La SARL MAISON JARDIN , qui a pour activité l'achat et la vente import-export de meubles et accessoires de décoration pour la maison et le jardin, a obtenu différents concours financiers de la BPCA :

' 1° par acte sous seing privé du 6 décembre 2006, l'ouverture d'un compte professionnel

' 2° par acte sous seing privé du 30 janvier 2008, un prêt professionnel de 21 525 €

' 3° par acte sous seing privé du 10 mai 2007, un prêt professionnel de 16 400 €

' 4° par acte authentique du 23 février 2007,un prêt professionnel de 80 000 €

Mme [Q], gérante, s'est portée caution solidaire de ces différents engagements :

'1° par acte sous seing privé du 12 février 2007, de tous engagements jusqu'à 30 000 €

'2° par acte sous seing privé du 30 janvier 2008, du prêt de 21 525 € à hauteur de 25 830 €

'3° par acte sous-seing-privé du 10 mai 2007, du prêt de 16 400 € à hauteur de 19 680 €

'4° par acte sous seing privé du 15 février 2007, du prêt notarié à hauteur de 96 000 €

Par acte du 15 février 2010, la BPCA a fait assigner la SARL MAISON JARDIN et Mme [Q] en règlement de diverses sommes au titre du solde débiteur du compte courant et des différents prêts dont elle a prononcé déchéance du terme suite à plusieurs incidents de paiement , la SARL MAISON JARDIN et Mme [Q], opposant divers moyens à cette action tels la disproportion manifeste du cautionnement , l'irrecevabilité de la demande en paiement relative au prêt notarié (4) faute de saisine préalable d'un conciliateur, la nullité ou l'erreur affectant les taux d'intérêts conventionnels des prêts, le jeu de la compensation avec les sommes dues par la BPCA .

Par jugement du 10 mai 2011, le tribunal de commerce de Draguignan a :

' rejeté la fin de non recevoir de la BPCA au titre de l'acquiescement de la demande

' débouté Mme [Q] de sa demande d'irrecevabilité au titre du cautionnement disproportionné

' condamné solidairement Mme [Q] à concurrence de 30 000 € et la SARL MAISON JARDIN à payer à la BPCA au titre du découvert en compte courant professionnel la somme de 53 766,14 € en principal assortie d'intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2009

' débouté la BPCA de ses demandes au titre du solde de 57 843,59 € du prêt notarié

' condamné solidairement la SARL MAISON JARDIN et Mme [Q] à payer à la BPCA au titre d'un prêt professionnel souscrit le 30 janvier 2008 la somme de 10 536,60 € en principal assortie d'intérêt au taux conventionnel de 7,60 % à compter du 11 décembre 2009

' condamné solidairement la SARL MAISON JARDIN et Mme [Q] à payer à la BPCA au titre d'un prêt professionnel souscrit le 10 mai 2007 la somme de 4061,40 € en principal assortie d'intérêts au taux conventionnel de 7 % à compter du 11 décembre 2009

' rejeté la demande d'irrecevabilité des demandes reconventionnelles formée par la BPCA

' prononcé la compensation avec les sommes des parts sociales et des placements HISSEO détenues par la BPCA au profit de la SARL MAISON JARDIN, à charge pour la BPCA de communiquer le montant des placements financiers à MAISON JARDIN dans le mois de la signification du jugement

' débouté la SARL MAISON JARDIN de sa demande en dommages-intérêts pour inexécution contractuelle

' ordonné la capitalisation des intérêts

' débouté la SARL MAISON JARDIN et Mme [Q] de leurs autres demandes

' condamné la SARL MAISON JARDIN et Mme [Q] aux entiers dépens et à payer à la BPCA la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a notamment :

-- retenu l'absence de disproportion manifeste des cautionnements donnés par Mme [Q]

' débouté la BPCA de sa demande au titre du prêt notarié faute d'actionnement préalable d'une mission de conciliation

-- rejeté les demandes en dommages-intérêts de la SARL MAISON JARDIN pour valoir compensation

' validé les taux d'intérêt appliqués aux prêts

Le 20 mai 2011 et le 15 juin 2011, la BPCA et Mme [Q] ont successivement interjeté appel de cette décision.

***

Vu les conclusions déposées et notifiées le 26 octobre 2012 par la BPCA qui soutient l'infirmation partielle de la décision en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande à l'encontre de Mme [Q] au titre du prêt notarié.

Elle sollicite :

' la condamnation de Mme [Q], en qualité de caution, en paiement de la somme de 57 843,59 € représentant le solde exigible du prêt du 23 février 2007 avec intérêts au taux conventionnel à compter de l'arrêté de compte du 11 décembre 2009 et avec capitalisation

' la confirmation du jugement pour le surplus

' le débouté des demandes de Mme [Q]

' la condamnation de Mme [Q] aux dépens et en paiement de la somme de 2000 et de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses prétentions et en réponse aux arguments qui lui sont opposés, la BPCA fait valoir :

' que Mme [Q] est valablement engagée comme caution à garantir le prêt notarié sans pouvoir s'abriter derrière la fait qu'aucune procédure de conciliation préalable, telle que prévue à l'acte de prêt, n'ait été tentée, cette disposition de l'acte devant être interprétée comme une exception personnelle au débiteur et non comme une exception inhérente à la dette

' que le patrimoine de Mme [Q] d'une valeur de 700 000 € répond suffisamment de ses engagements de caution

' que celle-ci s'est prévalu d'un tel patrimoine dans sa déclaration de ressources dispensant ainsi la banque de plus amples recherches

' que Mme [Q] ne peut se prévaloir de l'absence de consentement de son époux à son engagement de caution de 96 000 € du 15 février 2007, dès lors que, séparée de biens, ce consentement n'était pas requis et que celle-ci pouvait répondre sur sa part d'indivision de l'immeuble commun.

**

Vu les conclusions déposées et signifiées le 2 novembre 2012 par Mme [Q] qui soutient l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande visant à être déchargée des cautionnements souscrits pour disproportion manifeste.

Elle sollicite :

À titre principal :

' le constat du caractère manifestement disproportionné et sa décharge des cautionnements suivants :

... cautionnement du 12 février 2007 de 30 000 €

... cautionnement du 15 février 2007 de 96 000 €

... cautionnement du 10 mai 2007 de 19 680 €

... cautionnement du 30 janvier 2008 de 25 1830 €

À titre subsidiaire :

' le constat du caractère manifestement disproportionné et sa décharge des deux cautionnements suivants :

... cautionnement du 10 mai 2007 de 19 680 €

... cautionnement du 30 janvier 2008 de 25 1830 €

En tout état de cause :

' la confirmation du jugement en ses autres dispositions

' le débouté des demandes de la BPCA

' la condamnation de la BPCA aux dépens d'appel.

À l'appui de ses prétentions, Mme [Q] : fait valoir :

' le caractère manifestement disproportionné de son engagement de caution , son absence de ressources et l'appréciation inexacte de la valeur de son bien immobilier , celui-ci grevé d'un prêt et propriété de la communauté des époux.

' s'agissant du prêt notarié dont elle s'est portée caution à hauteur de la somme de 96 000 €, sa faculté de pouvoir opposer à la banque toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui sont inhérentes à la dette dont en particulier la nécessaire saisine de la commission de conciliation avant toute action en paiement

' l'impossibilité pour la banque de tenir compte de la valeur d'un patrimoine faisant partie de la communauté des époux sans le consentement de son mari.

Sur quoi

1) sur le prêt notarié de 80 000 € garanti par la caution de 96 000 € de Mme [Q] :

Aux termes de l'article 2313 du Code civil :

La caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette ;

Mais elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur.

Par ailleurs, l'article 2289 du Code civil dispose :

« Le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable.

On peut néanmoins cautionner une obligation, encore qu'elle pût être annulée par une exception purement personnelle à l'obligé, par exemple dans le cas de minorité »

Mme [Q] s'est portée caution du prêt de 80 000 € souscrit par la SARL MAISON JARDIN à hauteur de 96 000 € , selon acte authentique du 23 février 2007.

Entre autres dispositions, cet acte prévoit en page 10 sous le paragraphe intitulé :

' CONCILIATION CONVENTIONNELLE '

« en cas de litige, les parties conviennent préalablement à toute instance judiciaire, de soumettre leur différend au conciliateur qui sera missionné par le président de la chambre des notaires »

La BPCA n'a pas soumis le litige à la commission de conciliation. Or , celle-ci devait être actionnée avant toute démarche contentieuse . Pour cette raison, le tribunal a déclaré irrecevable l'action de la BPCA à l'encontre de la SARL MAISON JARDIN et , par ricochet, sa caution.

La BPCA ne peut valablement rechercher cette caution sauf à démontrer que l'exception qui aurait joué en faveur de la société emprunteuse lui soit strictement personnelle puisque ,dans ce cas, la caution ne pourrait l'invoquer.

Sur ce point , l'exigence d'un recours préalable à une procédure de conciliation avant l'engagement d'une action en justice telle que mentionnée dans l'acte notarié s'analyse comme une exception inhérente à la dette . En effet, cette prévision est indifférente à la personne du souscripteur et ne se rapporte qu'à l'obligation souscrite dont elle définit les modalités présidant à son admission et sa mise à exécution . Elle ne se présente donc pas comme une exception personnelle s'entendant seulement de celles marquées par l'intuitus personae , absent d'une telle spécification.

Il s'ensuit que l'appel de la banque est infondé et le jugement sera confirmé de ce chef

2) sur la disproportion manifeste du cautionnement :

Aux termes de l'article L341-4 du code de la consommation :

Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

L'appréciation du caractère manifestement disproportionné du cautionnement s'effectue à la date à laquelle il a été souscrit et à la date où la garantie est appelée.

À quatre reprises, Mme [Q] , gérante de la société SARL MAISON JARDIN , s'est portée caution solidaire de ses concours financiers :

'1° par acte sous seing privé du 12 février 2007, de tous engagements jusqu'à 30 000 €

'2° par acte sous seing privé du 30 janvier 2008, du prêt de 21 525 € à hauteur de 25 830 €

'3° par acte sous-seing-privé du 10 mai 2007, du prêt de 16 400 € à hauteur de 19 680 €

'4° par acte sous seing privé du 15 février 2007, du prêt notarié à hauteur de 96 000 € .

Le montant total de la garantie apportée s'élève à une somme de 171 510 €

S'agissant des trois engagements de caution subsistant (1,2,3) signés avec le consentement de son époux, Mme [Q] a complété trois fiches de renseignements dans lesquelles elle a déclaré la propriété d'un bien immobilier possédé en commun avec son mari, constitué d'une maison sur 2 ha de terrain à [Localité 1] , d'une valeur estimée de 700 000 € , dont à déduire , dans la rubrique charges , le remboursement d'un prêt de 80 000 € par mensualités de 902 € .

Mme [Q], supposée loyale dans ses rapports avec la banque, n'est pas fondée à remettre en cause l'estimation qu'elle avait elle-même donnée de son bien , en l'absence d'anomalies apparentes dispensant l' établissement bancaire de s'informer plus avant.

La possession d'un tel patrimoine couvre largement les garanties souscrites de sorte que la prétention à en obtenir décharge pour disproportion manifeste sera rejetée.

3) sur les autres chefs :

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions , et , succombant, l'une et l'autre dans leur appel, la BPCA et Mme [Q] seront déboutées de leurs demandes croisées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et se partageront la charge des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, publiquement et contradictoirement :

confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, y ajoutant :

' déboute la BPCA et Mme [Q] de l'ensemble de leurs demandes

' fait masse des dépens d'appel et dit que chaque partie en supportera la moitié dont distraction au profit des avocats de la cause.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 11/09051
Date de la décision : 23/01/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°11/09051 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-01-23;11.09051 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award