COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 14 JANVIER 2014
J.V
N°2014/
Rôle N° 13/02703
EPIC SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS
C/
Comité d'établissement CHSCT [1]
Grosse délivrée
le :
à :ME CIANFARANI
ME JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 11 Janvier 2013 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 12/05356.
APPELANTE
EPIC SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS prise en la personne de ses représentants légaux, DELEGATION JURIDIQUE TERRITORIALE MEDITERRANEE [Adresse 2]
représentée et plaidant par Me Vanina CIANFARANI, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
Comité d'Hygiène, de sécurité et des conditions de travail, CHSCT [1] Pris en la personne de son représentant légal Monsieur [E] en exercice y domicilié, [Adresse 1]
représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me Jérôme FERRARO, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 02 Décembre 2013 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean VEYRE, Conseiller, et Monsieur Olivier BRUE, Conseiller, chargés du rapport.
Monsieur Jean VEYRE, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Paul LACROIX-ANDRIVET, Président
Monsieur Jean VEYRE, Conseiller
Monsieur Olivier BRUE, Conseiller
Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Janvier 2014.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Janvier 2014.
Signé par Monsieur Jean-Paul LACROIX-ANDRIVET, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu l'ordonnance rendue le 11 janvier 2013 par le président du tribunal de grande instance de Marseille dans le procès opposant la SNCF au Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail [1] (CHSCT) ;
Vu la déclaration d'appel de la SNCF du 07 février 2013 ;
Vu les conclusions déposées par la SNCF le 03 mai 2013 ;
Vu les conclusions récapitulatives déposées par le CHSCT le 26 novembre 2013.
SUR CE
Attendu que le 15 juin 2012, le Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) de l'Unité de Production Traction Voyages Provence a sollicité de son Président, la réunion du CHSCT, afin d'analyser les risques liés à la présence d'amiante dans les engins moteurs ; que le 11 juillet 2012, le CHSCT a déposé un rapport préventif sur le risque d'inhalation de poussières d'amiante auprès de l'inspecteur du travail et du Directeur d'Etablissement Traction PACA ; que le 1er août 2012, le CHSCT a déposé un droit d'alerte au motif d'un danger grave et imminent sur la présence d'amiante et/ou de particules d'amiante en suspension dans les engins moteur ; qu'une enquête a été réalisée par l'employeur, mais qu'en raison d'un désaccord sur la nature du risque, le CHSCT, lors de sa réunion extraordinaire du 02 août 2012 a demandé une expertise pour évaluer le risque amiante, la mission confiée à l'expert devant porter notamment sur les points suivants :
- analyser les postes de travail des agents de conduite, assistants formation, dirigeant de proximité et cadres traction ligne,
- évaluer le risque lié a l'amiante dans les locomotives BB25600, BB22200, BB7200, BB67400, BB67200 en rapport aux postes de travail,
- analyser l'empoussièrement en fonction des contraintes liées au poste de travail des agents et en fonction des interventions des technicentres en charges de désamianter les engins,
- aider le CHSCT à avancer des propositions de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail ;
Attendu que la SNCF, estimant que les conditions justifiant le recours à une expertise, énumérées par le Code du travail, ne sont pas réunies, sollicite l'annulation de la délibération du 02 août 2012 désignant le cabinet SECAFI en qualité d'expert ;
Attendu qu'aux termes de l'article L 4614-12 du Code du Travail, 'le Comité d'Hygiène de Sécurité des Conditions de Travail peut faire appel à un expert agréé :
'1°) lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constatée dans l'établissement,
2°) en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail prévues à l'article L 4612-8" ;
Attendu qu'il est constant qu'une partie des locomotives en cause comportent de l'amiante ; qu'outre des considérations générales sur les dangers de l'amiante, le CHSCT fait notamment valoir que l'évaluation menée par l'ITGA à l'initiative de l'employeur le 17 juillet 2012 sur une locomotive à la gare [1] a révélé qu'il n'y avait pas d'isolement de la zone travail du conducteur, aucune installation de décontamination, ni appareil de protection respiratoire, ni filtration, et que depuis une analyse nationale de 2009, les conducteurs ne doivent plus rentrer dans les armoires haute tension des locomotives pour dépanner les machines ;
Attendu cependant que le rapport précité de l'ITGA conclut que les mesures effectuées n'ont pas révélé la présence de fibres d'amiante sur les quatre engins moteurs objets de l'évaluation en situation de conduite ; que les autres études produites par la SNCF mettent en évidence l'absence de fibres d'amiante dans l'air présent dans les engins moteurs et des concentrations dans les composés comprenant de l'amiante inférieures aux normes autorisées ; que si le risque d'amiante est reconnu lors d'une intervention de dépannage dans l'armoire haute tension ou dans le cas exceptionnel de défrettage du niveau 2 avec présence d'amiante, il s'agit de situations exceptionnelles pour lesquelles des procédures sont prévues, la consigne étant notamment de ne pas intervenir dans le compartiment haute tension pour les conducteurs, et les réparations étant conduites en atelier de maintenance ne dépendant pas de l'unité traction et qu'il n'apparaît pas qu'un conducteur ait été exposé en situation de conduite ;
Qu'il s'ensuit que l'existence d'un risque grave constaté au sien de l'unité de production Traction Voyages Provence, tel qu'exigé par l'article L 4614-12 du Code du travail n'est pas démonté et qu'il convient d'annuler la décision du CHSCT du 02 août 2012 ;
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L 4614-13 du même Code que le coût de l'expertise et celui de contestation éventuelle doivent être supportés par l'employeur dès lors qu'aucun abus du CHSCT n'est établi, ce qui est le cas en l'espèce ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris du chef de la condamnation aux honoraires d'avocats et de condamner en outre la SNCF à payer au CHSCT 4 784 euros au titre des honoraires d'avocats exposés en appel, ainsi qu'aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme l'ordonnance entreprise du chef de la condamnation aux honoraires d'avocats et aux dépens,
La réformant pour le surplus et y ajoutant,
Annule la délibération du 02 août 2012 ayant désigné le cabinet SECAFI en qualité d'expert,
Condamne la SNCF à payer au CHSCT de l'unité de production Traction Provence Voyage 4 784 euros au titre des honoraires d'avocat exposés en appel,
Condamne la SNCF aux dépens d'appel et dit qu'ils seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT