COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 12 DECEMBRE 2013
N° 2013/522
Rôle N° 11/06333
[L] [O] épouse [K]
C/
SA LE CREDIT LYONNAIS
SA GESTION ET TITRISATION INTERNATIONALES
Grosse délivrée
le :
à :ERMENEUX
CHERFILS
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de commerce d'AIX-EN-PROVENCE en date du 14 Mars 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2010/5312.
APPELANTE
Madame [L] [O] épouse [K]
née le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 1] (ITALIE), demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Agnes ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant par Me Gaëlle BAPTISTE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituant Me Martial VIRY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEES
SA GESTION ET TITRISATION INTERNATIONALES intervenant volontaire en sa qualité de gestionnaire du FONDS COMMUN DE TITRISATION 'HUGO CREANCES 2", venant aux droits du CREDIT LYONNAIS en vertu d'un bordereau de cession de créances conforme aux articles L214-421 et L241-43 du CMF, en date du 6 juillet 2012, dont le siège est sis [Adresse 1]
représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constitué aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués et plaidant par Me Nicole AGOSTINI avocat de l'Association USANNAZ-JORIS / AGOSTINI NICOLE, avocat au barreau de MARSEILLE substituant Me Alain USANNAZ-JORIS, avocat
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COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 Novembre 2013 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Yves ROUSSEL, Président
Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Décembre 2013
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Décembre 2013,
Rédigé par Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller,
Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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La SARL EUROBAT MAÇONNERIE PLÂTRERIE CARRELAGES , dont Mme [O] épouse [K] est la gérante, dispose d'un compte courant ouvert dans les livres du CRÉDIT LYONNAIS depuis le 11 mai 2006.
La SARL EUROBAT MAÇONNERIE PLÂTRERIE CARRELAGES a par ailleurs souscrit trois prêts auprès de cette banque :
' par acte du 29 juin 2006 , un prêt de 16 500 € au taux de 3,85 % remboursable en 60 mensualités de 306,71 € pour l'acquisition d'un camion benne
' par acte du 14 décembre 2006 , un prêt de 10 000 € au taux de 6,70 % remboursable en 60 mensualités de 199,10 € pour l'acquisition de matériel de chantier
' par acte du 8 août 2008, un prêt de 10 000 € au taux de 5,50 % remboursable en 36 mensualités de 359,92 €
Mme [K] s'est portée caution du CRÉDIT LYONNAIS pour le deuxième prêt du 14 décembre 2006 dans la limite de 11 500 € et a également souscrit le 9 octobre 2007 un engagement de caution solidaire à objet général dans la limite de 39 000 € .
Par jugement du 9 septembre 2010, le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL EUROBAT MAÇONNERIE PLÂTRERIE CARRELAGES , désignant Me [N] en qualité de mandataire liquidateur.
Par acte du 10 mai 2012 , le CRÉDIT LYONNAIS a fait assigner Me [N] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL EUROBAT MAÇONNERIE PLÂTRERIE CARRELAGES et Mme [O] épouse [K] pour voir fixer sa créance et condamner la caution à son paiement s'agissant du découvert en trésorerie et du solde impayé des trois prêts dont avait été prononcé déchéance du terme le 16 novembre 2009.
Par jugement du 14 mars 2011, le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence a :
' condamné Mme [O] épouse [K] , prise en sa qualité de caution de la SARL EUROBAT MAÇONNERIE PLÂTRERIE CARRELAGES à payer au CRÉDIT LYONNAIS les sommes de 6 614,38 € / 7 427,40 € / 8 953,74 € et 39 000 €
' ordonné la capitalisation des intérêts.
' condamné Mme [O] épouse [K] aux dépens et à payer au CRÉDIT LYONNAIS la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
' autorisé Mme [O] épouse [K] à se libérer en 24 versements d'égale valeur.
Le 6 avril 2011, Mme [O] épouse [K] a interjeté appel de cette décision.
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Vu les conclusions déposées le 14 octobre 2011 par Mme [O] épouse [K] qui soutient l'infirmation du jugement et sollicite :
À titre principal :
' la déchéance de ses engagements de caution pour disproportion manifeste
À titre subsidiaire :
' la déchéance des indemnités et pénalités de retard pour manquement par la banque à son devoir d'information
En tout état de cause :
' l'octroi des plus larges délais pour s'acquitter de la dette
' la condamnation de la banque aux entiers dépens et en paiement de la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
À l'appui de ses prétentions, Mme [O] épouse [K] fait valoir :
'la disproportion manifeste de son engagement de caution en regard de ses revenus et de son patrimoine
' le manquement par la banque à son obligation d'information résultant des articles L. 313-22 du code monétaire et financier et 47 II al 3 de la loi du 11 février 1994
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Vu les conclusions déposées le 17 janvier 2013 par la SA GESTION et TITRISATION INTERNATIONALES (GTI ) qui intervient volontairement aux débats comme venant aux droits du CRÉDIT LYONNAIS par l'effet d'un bordereau de cession de créance du 6 juillet 2012, et qui sollicite la confirmation en toutes ses dispositions du jugement et la condamnation de Mme [O] épouse [K] aux dépens et en paiement de la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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Par conclusions du 16 août 2011 CRÉDIT LYONNAIS a sollicité la confirmation en toutes ses dispositions du jugement attaqué et la condamnation de Mme [K] aux dépens et en paiement de la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
À l'appui de ses prétentions, la banque indique que Mme [K] ne rend pas compte de la totalité de ses avoirs, occultant en effet ses revenus fonciers , alors , d'autre part , que les perspectives de gains qui s'offraient à sa société étaient suffisants à lui permettre de tenir ses engagements financiers .
Sur quoi
Aux termes de l'article L341-4 du code de la consommation :
Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Mme [K] a souscrit deux engagements de caution.
Le premier de 11 500 € afférent à un prêt , en date du14 décembre 2006.
Le second de 39 000 € de caractère général , en date du 9 octobre 2007.
À l'époque de souscription du premier engagement de caution, Mme [K] , qui produit son avis d'imposition 2007, justifie d'un revenu annuel de 12 343 € compatible avec cette dernière obligation d'un montant tout relatif qui n'excède pas 11 500 € .
À l'époque de souscription du deuxième engagement de caution , Mme [K] se limite à verser aux débats un bulletin de salaire du mois d'octobre 2007 faisant état d'une rétribution mensuelle brute de 1254 , 31 € et nette de 1025,63 € . Elle ne produit aucun autre justificatif sur cette période
Or , il est objecté par le CRÉDIT LYONNAIS que Mme [K] aurait perçu des revenus fonciers en complément de sa rémunération jusqu'à hauteur de 11 636 €.
Cette allégation n'est pas démentie par Mme [K] qui ne s'en explique pas alors qu'il lui suffisait de produire son avis d'imposition 2008 pour rendre compte de l'ensemble de ses revenus tant du travail que du capital.
En s'abstenant de produire ce document , Mme [K] est défaillante dans l'administration de la preuve qui lui revient d'établir du caractère manifestement disproportionné de son engagement de caution par rapport à ses revenus et à ses biens.
Le jugement sera confirmé de ce chef sauf à réduire à 39 000 € et 11 500 € les condamnations prononcées à l'encontre de Mme [K], sa garantie étant en effet plafonnée à ces montants sans qu'elle puisse les excéder.
Par ailleurs, la banque justifie avoir satisfait à son obligation d'information envers la caution en produisant la copie des courriers simples qu'elle lui a adressés en mars 2007, 2008 et 2009 et en l'avisant par LRAR du 16 novembre 2009 du premier impayé de sorte que la demande de Mme [K] tendant à voir prononcer la déchéance des intérêts et pénalités sera rejetée.
Cette dernière bénéficiera du délai de paiement de 24 mois que lui a octroyé le tribunal de commerce , disposition non remise en question par les parties en phase d'appel.
Succombant principalement , Mme [K] supportera les dépens sans qu'il y ait lieu d'envisager sa condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, aussi bien en première instance qu'en appel, dès lors que son recours est partiellement justifié quant au caractère excessif des condamnations prononcées à son encontre.
PAR CES MOTIFS
La cour, publiquement et contradictoirement :
' reçoit la SA GESTION ET TITRISATION INTERNATIONALE (GTI) en sa qualité de gestionnaire du fonds commun de titrisation HUGO CRÉANCES 2 en son intervention volontaire comme venant aux droits du CRÉDIT LYONNAIS en vertu d'un bordereau de cession de créances du 6 juillet 2012
' confirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes de Mme [K] tendant à la décharge de ses engagements de caution et à la déchéance des intérêts et pénalités , en ce qu'il lui a octroyé un délai de paiement de 24 mois pour s'acquitter des sommes dues et en ce qu'il l'a condamnée aux dépens de première instance.
l'infirme sur ses autres dispositions et, statuant à nouveau :
' condamne Mme [O] épouse [K], en sa qualité de caution de la SARL EUROBAT MAÇONNERIE PLÂTRERIE CARRELAGES , à payer à la SA GESTION ET TITRISATION INTERNATIONALE (GTI) en sa qualité de gestionnaire du fonds commun de titrisation HUGO CRÉANCES 2 comme venant aux droits du CRÉDIT LYONNAIS , la somme de 11 500 € et celles de 39 000 €
' dit que les intérêts se capitaliseront par années entières
' dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile
' condamne Mme [O] épouse [K] aux dépens d'appel dont distraction au profit des avocats de la cause.
Le GreffierLe Président