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28/11/2013 | FRANCE | N°13/01407

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre c, 28 novembre 2013, 13/01407


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE



1ère Chambre C



ARRÊT

DU 28 NOVEMBRE 2013



N° 2013/824

A. J.













Rôle N° 13/01407







S.A.S. FIBRE EXCELLENCE TARASCON



C/



C.H.S.C.T. DE LA SOCIÉTÉ FIBRE EXCELLENCE TARASCON



S.A.S. SECAFI CHANGEMENT TRAVAIL SANTÉ - CTS









Grosse délivrée

le :

à :





Maître LIBERAS



SCP TOLLINCHI


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Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rendue en la forme des référés par le président du tribunal de grande instance de TARASCON en date du 10 janvier 2013 enregistrée au répertoire général sous le N° 12/00407.







APPELANTE :



S.A.S. FIBRE EXCELLENCE TARASCON,

dont le ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1ère Chambre C

ARRÊT

DU 28 NOVEMBRE 2013

N° 2013/824

A. J.

Rôle N° 13/01407

S.A.S. FIBRE EXCELLENCE TARASCON

C/

C.H.S.C.T. DE LA SOCIÉTÉ FIBRE EXCELLENCE TARASCON

S.A.S. SECAFI CHANGEMENT TRAVAIL SANTÉ - CTS

Grosse délivrée

le :

à :

Maître LIBERAS

SCP TOLLINCHI

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue en la forme des référés par le président du tribunal de grande instance de TARASCON en date du 10 janvier 2013 enregistrée au répertoire général sous le N° 12/00407.

APPELANTE :

S.A.S. FIBRE EXCELLENCE TARASCON,

dont le siège est [Adresse 3]

représentée par Maître Pierre LIBERAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Maître Jacques BARTHELEMY, avocat au barreau de NIMES, substitué par Maître Jérémy CREPIN, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉES :

C.H.S.C.T. DE LA SOCIÉTÉ FIBRE EXCELLENCE TARASCON,

dont le siège est [Adresse 2]

représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Maître Corinne CANO, avocat au barreau d'AVIGNON

S.A.S. SECAFI CHANGEMENT TRAVAIL SANTÉ - CTS,

dont le siège est [Adresse 1]

représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Maître Karine THIEBAULT, avocat au barreau de LYON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Octobre 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur André JACQUOT, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Serge KERRAUDREN, président

Monsieur André JACQUOT, conseiller

Madame Laure BOURREL, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Serge LUCAS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2013.

ARRÊT :

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2013,

Signé par Monsieur Serge KERRAUDREN, président, et Monsieur Serge LUCAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*-*-*-*-*-*

EXPOSE DU LITIGE

La SAS Fibre Excellence Tarascon qui emploie plus de 330 salariés fabrique de la pâte à papier. La loi du 9 novembre 2010 sur la réforme des retraites prévoyant des dispositions en faveur des salariés effectuant des tâches pénibles, des discussions ont été engagées au sein de l'entreprise en vue d'élaborer un plan d'action soumis à l'avis du C.H.S.C.T..

Contestant la pertinence des critères de pénibilité proposés par la SAS Fibre Excellence Tarascon, le CHSCT a voté le 6 septembre 2012, à l'unanimité de ses membres, le recours à l'expertise prévue à l'article L 4614-12 du code du travail et a désigné la société SECAFI CTS avec mission de :

- établir un diagnostic sur les expositions aux facteurs de pénibilité,

- établir un diagnostic sur les enjeux en termes de prévision de la pénibilité,

- aider le C.H.S.C.T. à participer à l'élaboration d'un plan d'action de prévention de la pénibilité.

La SAS Fibre Excellence Tarascon a contesté cette délibération devant le juge des référés de Tarascon qui a rejeté sa demande par ordonnance contradictoire du 10 janvier 2013 dont elle a relevé appel plaidant pour l'essentiel dans ses conclusions du 19 avril 2013 que :

- la pénibilité du travail ne caractérise pas à elle seule le risque grave,

- c'est à l'employeur seul de déterminer la proportion de salariés exposés,

- le bilan annuel 'Hygiène Sécurité 2011" précisant l'absence de risque grave contredit l'affirmation du C.H.S.C.T.,

- l'expertise n'a pas vocation à en rechercher l'existence et ne peut avoir lieu qu'après sa découverte,

- un projet important au sens de l'article L 4614-12 du code du travail pouvant fonder l'expertise litigieuse, est inapplicable en l'espèce, puisqu'il s'agit d'un diagnostic préalable pour lequel l'employeur peut s'adjoindre les services d'un Cabinet spécialisé en la matière (ici le cabinet Itaque), le C.H.S.C.T. étant associé à la démarche de prévention,

- l'évaluation réalisée retient que plus de 50 % des salariés sont exposés à au moins un facteur de pénibilité ce qui nécessite la conclusion d'un accord ou à défaut d'un plan d'action,

- aucune collusion ne peut lui être imputée avec le cabinet Itaque puisque les seuils de pénibilité retenus sont souvent en deçà des seuils légaux,

- le C.H.S.C.T. se refuse à émettre un avis sur le projet de plan d'action nonobstant le nombre de réunions qui y ont été consacrées.

La SAS Fibre Excellence Tarascon conclut à l'infirmation de l'ordonnance et à l'annulation de la délibération contestée du 6 septembre 2012.

Le C.H.S.C.T. de la SAS Fibre Excellence Tarascon et la société SECAFI soutiennent en réplique dans leurs conclusions du 16 octobre 2013 que :

- la loi du 9 novembre 2010 donne une compétence nouvelle au C.H.S.C.T. qui doit être consulté par l'employeur pour analyser l'exposition des salariés aux facteurs de pénibilité,

- le premier juge a retenu l'existence d'un risque grave pour les salariés exposés aux bruits, fumées, poussières et agents chimiques dangereux,

- le diagnostic réalisé par le cabinet Itaque est insuffisant et incomplet et le C.H.S.C.T. doit pouvoir recourir à une expertise dans les termes de l'article L 4614-12 précité,

- l'expertise réalisée par la société SECAFI démontre les carences du rapport Itaque et ses préconisations sont en cours de mise en oeuvre.

Les intimés concluent à la confirmation de l'ordonnance et au paiement par l'appelante de la somme de 4.903,60 euros pour frais de procédure.

DISCUSSION

La loi du 9 novembre 2010 modifiant l'article L 4612-2 du code du travail a confié au C.H.S.C.T. une prérogative nouvelle par ajout des termes : 'Il procède à l'analyse de l'exposition des salariés à des facteurs de pénibilité'.

L'article L 4614-12 du même code autorise le C.H.S.C.T. à recourir à un expert dans deux hypothèses :

- lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail ou une maladie professionnelle est constaté dans l'établissement,

- en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail.

Considérant que l'existence reconnue de plusieurs facteurs de pénibilité est 'susceptible d'exposer les salariés à un risque grave' et que 'la mission et la consultation du C.H.S.C.T. au cours de la phase d'élaboration du plan d'action seraient purement et simplement vides de sens si le comité n'avait pas la possibilité de recourir à une expertise', le premier juge a maintenu la désignation du cabinet SECAFI.

La SAS Fibre Excellence Tarascon critique à juste titre cette analyse. En effet :

- l'obligation générale de sécurité à laquelle est tenu l'employeur, les consultations et avis du C.H.S.C.T. auxquels il doit recourir ne confèrent pas à ce dernier un droit général à l'expertise,

- il n'appartient pas au juge de se substituer au législateur qui a ajouté au texte de l'article L 4612-2 sans modifier pour autant l'article L 4614-12 du code du travail,

- le risque grave qui n'exige pas la survenance d'un accident ou d'une maladie professionnelle, doit être préalable à l'expertise, c'est-à-dire objectivement constaté, la pénibilité au travail ne pouvant à elle seule le caractériser ; en l'espèce si les intimés produisent des mise en demeure de l'administration et rappel de la réglementation faisant suite à une inspection ou encore une injonction de la CPAM, ils n'expliquent pas pour autant en quoi ces initiatives caractérisent l'existence d'un risque grave. La SECAFI rappelle en outre que le bilan hygiène et sécurité 2011 ne retient aucune situation de danger grave,

- en tout état de cause, le risque grave ne saurait résulter d'une différence d'appréciation entre l'employeur et le C.H.S.C.T. quant à l'évaluation des facteurs de pénibilité.

En définitive, si le souhait du C.H.S.C.T. de disposer d'une analyse globale de la situation des salariés exposés à des tâches pénibles apparaît légitime dans un souci d'améliorer leurs conditions de travail et de sécurité, l'expertise externe ne peut être imposée à l'employeur si les conditions de l'article L 4614-12 précitées ne sont pas réunies, sauf à reconnaître au C.H.S.C.T. un droit général à l'expertise à l'occasion des consultations dont-il est saisi mais qui ne ressort d'aucune disposition légale ou réglementaire.

**********

Au visa de l'article L 4614-13 du code du travail la succombance du C.H.S.C.T. en appel ne prive pas de rémunération, sauf abus nullement allégué en l'espèce, les conseils qu'il a mandatés pour assurer sa comparution en justice.

Pour les mêmes motifs les dépens demeureront à la charge de la SAS Fibre Excellence Tarascon.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Annule la décision du C.H.S.C.T. de la SAS Fibre Excellence Tarascon en date du 6 septembre 2012 désignant la société SECAFI en qualité d'expert,

Condamne la SAS Fibre Excellence Tarascon à prendre en charge les frais et honoraires exposés par le C.H.S.C.T. à concurrence de 3.000 euros,

Laisse les dépens à la charge de la SAS Fibre Excellence Tarascon et autorise leur recouvrement aux formes de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre c
Numéro d'arrêt : 13/01407
Date de la décision : 28/11/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1C, arrêt n°13/01407 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-11-28;13.01407 ?
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