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03/10/2013 | FRANCE | N°11/18561

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 03 octobre 2013, 11/18561


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 03 OCTOBRE 2013



N° 2013/





Rôle N° 11/18561





SAS SOCIETE SABATIER





C/



[S] [D]

















Grosse délivrée

le :



à :



Me Christian COLOMBIER, avocat au barreau de LYON



Me Serge AYACHE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE







Copie certifiée conforme délivrée aux parti

es le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 28 Septembre 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 11/403.







APPELANTE



SAS SOCIETE SABATIER, demeurant [Adresse 2]



représentée par...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 03 OCTOBRE 2013

N° 2013/

Rôle N° 11/18561

SAS SOCIETE SABATIER

C/

[S] [D]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Christian COLOMBIER, avocat au barreau de LYON

Me Serge AYACHE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 28 Septembre 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 11/403.

APPELANTE

SAS SOCIETE SABATIER, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Christian COLOMBIER, avocat au barreau de LYON

INTIME

Monsieur [S] [D], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Serge AYACHE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Juillet 2013 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre

Monsieur Philippe ASNARD, Conseiller

Madame Nathalie VAUCHERET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Octobre 2013.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Octobre 2013.

Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Par lettre du 15 juillet 1996, avec effet au 16 septembre 1996, la SAS SABATIER, société du Groupe SOUDRONIC, ayant pour principales activités la conception, la fabrication et la

commercialisation de machines destinées à l'emballage métallique, a engagé [S] [D], en qualité de responsable du bureau d'études, position III B, indice 180, selon la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, qui régissait la relation de travail.

La rémunération brute du salarié, était fixée à 435.000 FRF sur 14 mois, « pour l'horaire de l'entreprise et incluant les heures normales et les heures supplémentaires pour les nécessités du service. »

Après avoir été, par courrier recommandé en date du 9 juillet 2009, convoqué à un entretien préalable à son éventuel licenciement, qui s'est tenu le 22 juillet 2009, le salarié a été licencié pour faute grave, par courrier recommandé du 27 juillet 2008 dans les termes suivants :

« Je vous rappelle qu'au cours de l'année 2008, la Direction de la société a souhaité utiliser le déploiement d'un nouveau système de gestion de production informatique afin de structurer les changements d'organisation qu'elle jugeait nécessaires pour réaliser des objectifs stratégiques précédemment définis.

Un Cabinet en organisation a alors été mandaté pour aider l'entreprise à revoir et améliorer l'ensemble de ses processus.

A la suite d'un audit en ressources humaines, réalisé au second semestre 2008, tous les cadres directement rattachés au PDG, dont les responsables de service, ont été invités à participer au cours du premier trimestre 2009 à une formation management destinée à redonner de la cohésion et des pratiques de management communes à l'équipe d'encadrement de l'entreprise.

Au cours du premier semestre 2009, vous avez été averti à plusieurs reprises que certains de vos comportements et attitudes entravaient le projet d'entreprise défini par la Direction.

Vos rigidités, résistances et réticences dans le cadre des travaux de réorganisation en cours, dont ceux conduits par le Cabinet en organisation, freinaient l'avancement de ces travaux.

Vos comportements managériaux ont été directement mis en cause, tant par le médecin du travail que par le Comité d'entreprise au cours du second semestre 2008.

Ils étaient difficilement compatibles avec le travail de conviction et de pédagogie que la Direction entendait mettre en oeuvre afin d'obtenir l'adhésion d'un maximum de cadres au projet d'entreprise.

Votre refus catégorique de participer à la formation management, malgré l'insistance de la Direction, a d'ailleurs contribué à vous marginaliser du reste de l'équipe de direction.

C'est dans ce contexte difficile que le 30 juin dernier, vous avez pris l'initiative de téléphoner au Directeur Opérationnel du groupe Soudronic, actionnaire de la société, et avez tenu des propos désobligeants visant le PDG de la société Sabatier que je suis, dans un but manifeste de déstabilisation.

Vous avez prétendu, à cette occasion, que plusieurs des salariés ayant quitté l'entreprise au cours des dernières années l'avaient fait pour témoigner leur désaccord avec la Direction de l'entreprise, ce qui est faux et vous ne l'ignoriez pas.

Début juillet, dans le cadre d'un nouvel entretien téléphonique, cette fois avec le Président du groupe, vous m'avez de nouveau calomnié et attaqué personnellement en ma qualité de PDG de la société.

Vous avez même confirmé cette position, le 02 juillet, en adressant un email au Président du Groupe dont les termes m'ont été communiqués.

Peuvent être cités à titre d'illustration du dénigrement opéré :

" ... Monsieur [R] s'est enfermé dans une stratégie d'opposition quasi-systématique vis à vis de ses principaux cadres...."

"...incapable d'un management direct de son encadrement..."

"...il s'est entouré d'une cour féminine d'assistantes administratives qui jouit progressivement des tâches et informations dévolues aux managers techniques..."

fait preuve la plupart du temps d'un comportement passif et attentiste face aux problèmes des clients et incite ses collaborateurs à en faire de même..."

Il m'a ensuite été rapporté que cette attitude de dénigrement s'était également manifestée auprès de plusieurs salariés de l'entreprise.

Par cette appréciation injurieuse de la gestion et même de la personne du PDG de la société, vous avez poursuivi une entreprise de déstabilisation et de dénigrement public qui constitue une faute grave rendant impossible toute poursuite de votre contrat de travail.

Décision a, par conséquent, été prise de vous notifier votre licenciement pour faute grave, faute privative de préavis et d'indemnité de licenciement. »

Contestant le bien fondé de la rupture de son contrat de travail et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits, le salarié a saisi le conseil des prud'hommes de Martigues qui a, par jugement du 28 septembre 2011  :

Dit que la faute grave évoquée lors du licenciement du salarié n'est pas avérée, mais que ce licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,

condamné la Société SABATIER à verser au salarié les sommes de :

-5 625,54 € au titre d'indemnité compensatrice de préavis,

-5 562 € au titre d'indemnité de congés payés sur l'indemnité compensatrice de préavis,

-4 458,31 € au titre de rappel de salaire sur la retenue indue du fait de la mise à pied conservatoire,

-445,83 € au titre d'indemnité de congés payés sur le rappel de salaire du 16 juin 2007 au 3 juillet 2007,

-55 625,54 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

-55 625 € au titre de dommages et intérêts (équivalent à 6 mois de salaire),

-1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté le salarié du surplus de ses demandes.

La SAS SABATIER et [S] [D], ont interjeté appel de cette décision, respectivement les 25 et 26 octobre 2011 .

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La SAS SABATIER, conclut à la réformation du jugement entrepris en ses dispositions qui lui sont défavorables, et demande subsidiairement que le quantum des créances salariales et des dommages intérêts soient réduit.

La société intimée, expose que le nouveau président, [O] [R], nommé lors d'une assemblée générale des actionnaires tenue fin décembre 2006, a décidé de mettre en place un nouveau système informatique de gestion de production, qu'il a mandaté un cabinet en organisation pour accompagner ce nouveau dispositif.

Elle reproche au salarié:

-de s'être opposé à la mise en place du nouveau système de gestion informatique et ce de manière virulente par des écrits caractérisant une attitude d'obstruction,

-d'avoir refusé de participer à la formation management, alors que ses comportements managériaux à l'égard du personnel placé sous son autorité, étaient critiquables.

Elle soutient, que les propos tenus par le salarié à l'encontre de M [R], outrepassent la liberté d'expression dont jouit tout salarié, contreviennent à son obligation de loyauté, renforcée de par sa qualité de cadre, et caractérisent un véritable dénigrement, de nature à nuire aux intérêts de l'entreprise.

Elle estime, qu'en tout état de cause, les calculs du salarié sont erronés et que, pour le cas ou son licenciement serait jugé sans cause réelle et sérieuse, les dommages intérêts susceptibles de lui être alloués ne sauraient excéder 6 mois de salaire.

Dans le dernier état de ses conclusions, le salarié appelant qui conclut à la réformation partielle du jugement entrepris, demande de :

dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

fixer son salaire moyen à 9.270,92 €,

condamner la société SABATIER à lui payer les sommes suivantes :

-55.625,54 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

-5.562,55 € pour l'indemnité de congés payés sur l'indemnité compensatrice de préavis,

-4.937,88 € au titre de la prime de participation sur rappel de salaire brut sur l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, selon le taux de 8.07% appliqué sur la période,

-6.167,76 € au titre de la prime d'intéressement sur rappel de salaire brut sur l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, selon le taux de 10.08% appliqué sur la période,

-4.458,31€ au titre de rappel de salaire sur la retenue indue du fait de la mise à pied conservatoire,

-445,83 € pour indemnité de congés payés sur le rappel de salaire sur la retenue indue du fait de la mise à pied conservatoire,

-395,76 € au titre de la prime de participation sur rappel de salaire brut sur la retenue indue du fait de la mise à pied conservatoire et congés payés afférents, selon le taux de 8.07% appliqué sur la période,

-494,34 € au titre de la prime d'intéressement sur rappel de salaire brut la retenue indue du fait de la mise à pied conservatoire et congés payés afférents, selon le taux de 10.08% appliqué sur la période,

-8.520 € correspondant aux 50% de prime de « Bonus management » retenus de façon indue en mai 2009,

-278.148€ au titre de rappel de salaire pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004,

-27.814,80€ de congés payés sur rappels de salaire pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004,

-27.169,50 € au titre de la prime de participation sur rappel de salaire brut pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004 et congés payés afférents, selon le taux moyen de 8.88% appliqué sur la période,

-24.905,37 € au titre de la prime d'intéressement sur rappel de salaire brut pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004 et congés payés afférents, selon le taux moyen de 8.14% appliqué sur la période,

-55.625,54 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

-170.000€ de dommages et intérêts pour licenciement abusif, sans cause réelle et sérieuse,

-140.000 € de dommages et intérêts pour le préjudice moral,

-12.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il critique la mise en place du nouveau système de gestion informatique ADONIX par M [R], malgré les mises en garde de M [Z], depuis licencié. Il soutient que cette mise en place s'est accompagnée de dysfonctionnements qu'il a signalé, que contrairement à ce qui lui est reproché, il a collaboré de façon constructive, en essayant de trouver des solutions aux difficultés, que ces difficultés ont été reconnues par tous, y compris la direction, qui a d'ailleurs mis fin à l'expérience en 2012.

Il soutient, que ses performances en matière de management étaient excellentes et qu'il avait d'ailleurs bénéficié systématiquement d'un bonus management depuis son arrivée dans l'entreprise, qu'aucun objectif pour l'année 2008 ne lui avait été défini, que les difficultés d'organisation étaient liés à l'introduction du nouveau système de gestion, mais que M [R] a cherché à accréditer l'idée que ces difficultés étaient dues aux lacunes de management, et que, dans ce contexte il était fondé à refuser de participer à la formation au management .

Il fait valoir, que les propos qu'il a tenu, ne caractérisent nullement un dénigrement, mais étaient dictés par l'intérêt de l'entreprise, en raison de l'inquiétude qu'il éprouvait concernant l'évolution de la société SABATIER depuis l'arrivée de M [R], évolution négative qu'il n'était pas le seul à dénoncer, d'autres cadres, également licenciés depuis, l'ayant également critiquée.

Il allègue en outre, que M [R] avait entrepris de liquider tous les cadres placés à des postes clés avant son arrivée, susceptibles d'émettre un avis personnel sur sa direction et que les faits qui lui sont reprochés, n'étaient qu'un prétexte pour l'éliminer.

Pour plus ample exposé, il est renvoyé aux écritures des parties déposées à l'audience et réitérées lors des débats oraux.

SUR CE

Sur les demandes liées à l'exécution du contrat de travail

sur le rappel de bonus management

Il n'est fourni par l'employeur aucune explication sur le défaut de paiement du bonus, contrairement aux autres années, alors qu'il n'est pas contesté que ce bonus était calculé à 50% sur les résultats du groupe, qui étaient excellents, et qu'aucun objectif en la matière n'avait été fixé au salarié pour l'année 2008, sur la base de laquelle ce bonus était calculé.

L'employeur sera donc condamné, de ce chef, au paiement de la somme de 8520€, selon les données fournies par le salarié.

Sur les heures supplémentaires

Il n'a été signé entre les parties aucun contrat de travail, seule une lettre d'embauche émanant de l'employeur étant produite.

Il en résulte, que la mention portée dans ce document, selon laquelle la rémunération incluait les heures supplémentaires, n'est pas une convention de forfait valable, opposable au salarié, et que ce dernier a bien qualité pour réclamer des heures supplémentaires selon le droit commun.

En application de l' article L 3171-4 du code du travail, si la preuve des heures supplémentaires n'incombe spécialement à aucune des parties il appartient, cependant, au salarié de fournir préalablement au juge des éléments suffisants, de nature à étayer sa demande et permettant à l'employeur d'y répondre en fournissant ses propres éléments.

Il est constant et non contesté, que l'horaire de travail dans l'entreprise, était défini du lundi au vendredi de 8H à 12H et de 13h à 17h.

Pour étayer sa demande, le salarié verse au débat :

- les attestations de M [Z], ancien directeur administratif et financier de la SAS SABATIER, de M [V], ancien directeur commercial, et de M [J] ancien directeur de production, qui relatent qu'il effectuait des heures supplémentaires,

- copie de 424 mails horodatés, émis le matin avant 8h soit après 17 h30 ou encore les samedi et dimanche, 68 mails émis de 8h à 8h59, 41 émis de 17h à 17 h30 adressés depuis son poste de travail, à des collaborateurs, à des clients à des fournisseurs,

- une liste de courriels adressés après 17h30, dont certains de 0h à 1h36, 4 le samedi et 9 le dimanche.

Le salarié fait valoir, sans être contredit, que M [R] ne pouvait ignorer les heures supplémentaires effectuées, dès lors qu'il a été lui même destinataire de 71 de ces mails.

Il ressort des attestations de Messieurs [Z] et [J], que les objectifs de réalisation des affaires clients imposaient d'effectuer des heures supplémentaires, ce qui établit que l'employeur était nécessairement informé de la nécessité d'effectuer des heures supplémentaires pour atteindre ces objectifs, et que, par conséquent, ces heures de travail n'ont pu être effectuées qu'avec son accord.

Ces éléments, étayent suffisamment la demande du salarié.

Contrairement à ce que soutient l'employeur, le fait que le salarié n'ait pas réclamé d'heures supplémentaires au cours de la relation de travail ne permet pas d'en déduire qu'elles ne sont pas dues.

L'employeur ne fournissant pas aux débats ses propres éléments, de nature à établir les horaires réels effectués par le salarié, il convient de retenir que le salarié a effectué la totalité des heures supplémentaires qu'il réclame, pour le montant qu'il revendique, dont le calcul n'est pas utilement discuté.

En conséquence, l'employeur sera condamné de ce chef à payer au salarié les sommes de :

-278.148€ au titre de rappel de salaire pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004,

-27.814,80€ de congés payés sur rappels de salaire pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004,

-27.169,50 € au titre de la prime de participation sur rappel de salaire brut pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004 et congés payés afférents, selon le taux moyen non contesté de 8.88% appliqué sur la période,

-24.905,37 € au titre de la prime d'intéressement sur rappel de salaire brut pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004 et congés payés afférents, selon le taux moyen non contesté de 8.14% appliqué sur la période.

Sur les demandes liées à la rupture du contrat de travail

sur la faute grave

La faute grave, dont la preuve incombe à l'employeur, résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du

salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

Force est de relever que les premiers juges, bien que retenant que le licenciement du salarié était causé, lui ont alloué des dommages intérêts et que, de ce seul chef, la décision entreprise doit être infirmée.

Sur l'attitude d'opposition

Les différents écrits de [S] [D] et le courrier de M [Y] démontrent, contrairement à ce qu'il soutient, que le salarié s'est enfermé dans une attitude d'opposition, nullement constructive, au nouveau système de gestion de production informatique, résultant de son conflit avec la nouvelle direction.

Il convient de souligner, à cet égard, qu'il n'a pas fait montre d'une disponibilité suffisante, alors que la situation l'exigeait, comme en fait foi le mail du 7 janvier 2009, qu'il a adressé à M [Y], et ceux qu'il a reçus de son employeur en réponse, auxquels il ne justifie pas avoir répondu et que, si effectivement des difficultés dans la mise en place de ce nouveau système ont été rencontrées, il n'apparaît pas que son attitude ait contribué à les solutionner.

Ce grief, doit donc être retenu.

sur le refus de participer à une formation en management

Tant la réunion exceptionnelle du comité d'entreprise du 17 juillet 2008, que le rapport de visite d'entreprise du 18 juillet 2008 du Docteur [G], médecin du travail, que le rapport d'une consultante en ressources humaines, établissent que le comportement de [S] [D] a été source de stress et de plaintes de certain salariés sous sa responsabilité, l'un de ces documents notant des remarques déplacées et blessantes à l'égard du personnel féminin et des difficultés relationnelles avec son adjoint, tous éléments démontrant les difficultés de management rencontrées alors par le salarié, difficultés qu'il avait d'ailleurs déjà connues auparavant, même si celles ci n'avaient donné lieu à aucune observation de son employeur.

Dans ce contexte, le fait pour le salarié, de ne pas participer à une formation en management qui lui avait été proposée, est illégitime et ne peut se justifier par les considérations qu'il invoque dans ses écrits.

Par ailleurs, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la circonstance que M [R] n'ait pris aucune mesure pour remédier à la situation, ne permet pas d'écarter toute faute du salarié.

Ce grief, doit donc être pris en compte.

Sur le dénigrement

Par application de l'article L. 1121-1 du code du travail, sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression, et il ne peut être apporté à celle-ci que des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché.

Or, aucun des propos tenus par le salarié et aucun de ses écrits ne comporte de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs, peu important la qualité de cadre du salarié, ces critiques n'ayant en outre été exprimées qu'en interne et non à l'égard de tiers .

En conséquence, le grief de dénigrement, qui fait d'ailleurs double emploi pour partie avec celui d'obstruction ou d'opposition, en revanche retenu plus haut, doit être rejeté.

Il convient donc de juger, au vu de ce qui précède, que le licenciement du salarié est fondé sur une cause réelle et sérieuse et non sur une faute grave.

Sur les conséquences

La mise à pied conservatoire n'étant pas justifiée en l'absence de faute grave, il convient de condamner l'employeur au paiement des sommes de 4458,31€ au titre de la retenue indue de salaire qu'il a effectuée, et 445,83€ au titre des congés payés afférents.

Ce rappel de salaire, ouvre droit, à prime de participation et prime d'intéressement, pour les montants non utilement discutés de 395,76€ et 494,34€, que l'employeur sera condamné à payer.

Le salarié, qui n'a pas exécuté son préavis du fait de l'employeur, est en droit d'obtenir, en vertu de la convention collective applicable, les sommes suivantes :

-55 625,54€ au titre du préavis en fonction d'un salaire de base de 9270,92€, tel que résultant de la moyenne des 12 derniers mois de salaire,

-5562,55€ au titre des congés payés afférents,

-4937,88€ du chef de la prime de participation, selon le taux non contesté de 8.07% appliqué sur la période et congés payés afférents,

-6167,76€ du chef de la prime d'intéressement selon le taux non contesté de 10.08% appliqué sur la période, et congés payés afférents.

En application de l'article 29 de la convention collective, il est du au salarié une indemnité conventionnelle de licenciement, qui ressort au montant, non utilement contesté, de 55 625,54€.

L'employeur, sera également condamné au montant de cette somme.

Sur le préjudice moral

Le licenciement étant causé, le salarié ne peut prétendre à réparation d'un préjudice moral distinct, résultant des circonstances de la rupture et sera dès lors, par voie de conséquence, débouté de cette prétention.

Sur la communication du registre d'entrée et de sortie du personnel

Il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande, sans intérêt pour la solution du litige.

Sur les autres demandes

Sur l'article 700 du code de procédure civile, il sera alloué au salarié une somme de 800€ au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.

Succombant partiellement en appel, la société intimée sera condamnée aux entiers dépens.

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande fondée sur le tarif des huissiers de justice, le droit visé à l'article 10 n'étant pas dû lorsque le recouvrement ou l'encaissement est effectué sur le fondement d'un titre exécutoire constatant une créance née de l'exécution d'un contrat de travail ou une créance alimentaire.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau :

Dit que le licenciement de [S] [D] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Condamne la société SABATIER à payer à [S] [D] les sommes de :

-55.625,54 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

-5.562,55 € pour l'indemnité de congés payés sur l'indemnité compensatrice de préavis,

-4.937,88 € au titre de la prime de participation sur rappel de salaire brut sur l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents,

-6.167,76 € au titre de la prime d'intéressement sur rappel de salaire brut sur l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents,

-4.458,31€ au titre de rappel de salaire sur la retenue indue du fait de la mise à pied conservatoire,

-445,83 € pour indemnité de congés payés sur le rappel de salaire sur la retenue indue du fait de la mise à pied conservatoire,

-395,76 € au titre de la prime de participation sur rappel de salaire brut sur la retenue indue du fait de la mise à pied conservatoire et congés payés afférents,

-494,34 € au titre de la prime d'intéressement sur rappel de salaire brut la retenue indue du fait de la mise à pied conservatoire et congés payés afférents,

-8.520 € correspondant aux 50% de prime de « bonus management » retenus de façon indue en mai 2009,

-278.148€ au titre de rappel de salaire pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004,

-27.814,80€ de congés payés sur rappels de salaire pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004,

-27.169,50 € au titre de la prime de participation sur rappel de salaire brut pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004 et congés payés afférents, selon le taux moyen de 8.88% appliqué sur la période,

-24.905,37 € au titre de la prime d'intéressement sur rappel de salaire brut pour 20 heures supplémentaires par semaine, depuis le 28 juillet 2004 et congés payés afférents, selon le taux moyen de 8.14% appliqué sur la période,

-55.625,54 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société SABATIER aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 11/18561
Date de la décision : 03/10/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9B, arrêt n°11/18561 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-10-03;11.18561 ?
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