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10/09/2013 | FRANCE | N°12/10301

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 10 septembre 2013, 12/10301


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 10 SEPTEMBRE 2013



N°2013/

CH/













Rôle N° 12/10301







[F] [J]

SA G RODRIGUEZ





C/



[G] [B]



CGEA AGS DE [Localité 2] - DELEGATION REGIONALE DU SUD-EST

























Grosse délivrée le :

à :

Me Jonathan TURRILLO, avocat au barreau de GRASSE>


Me Philippe LASSAU, avocat au barreau de GRASSE



Me Isabelle JOGUET, avocat au barreau de NICE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 06 Juin 2012, enregistré au réperto...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 10 SEPTEMBRE 2013

N°2013/

CH/

Rôle N° 12/10301

[F] [J]

SA G RODRIGUEZ

C/

[G] [B]

CGEA AGS DE [Localité 2] - DELEGATION REGIONALE DU SUD-EST

Grosse délivrée le :

à :

Me Jonathan TURRILLO, avocat au barreau de GRASSE

Me Philippe LASSAU, avocat au barreau de GRASSE

Me Isabelle JOGUET, avocat au barreau de NICE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 06 Juin 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 11/00018.

APPELANTS

Maître [F] [J] Es qualité de Commissaire à l'éxécution du plan de la SAS GROUPE RODRIGUEZ, prise en la personne de son représentant légal, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Jonathan TURRILLO, avocat au barreau de GRASSE

SA G RODRIGUEZ, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Jonathan TURRILLO, avocat au barreau de GRASSE

INTIME

Monsieur [G] [B], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Philippe LASSAU, avocat au barreau de GRASSE

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

CGEA AGS DE [Localité 2] - DELEGATION REGIONALE DU SUD-EST, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Isabelle JOGUET, avocat au barreau de NICE substitué par Me Richard PELLEGRINO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 29 Mai 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Corinne HERMEREL, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Yves ROUSSEL, Président

Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller

Madame Corinne HERMEREL, Conseiller

Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Septembre 2013

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Septembre 2013

Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 1 Février 1989, [G] [B] a été embauché par la société SNP RODRIGUEZ SARL, devenue G.RODRIGUEZ SAS, en qualité de grutier, selon contrat de travail à durée indéterminée, moyennant une rémunération nette mensuelle de 10 000 francs.

Le 1 Août 2010, [G] [B] est devenu directeur de chantier et a bénéficié du statut cadre, niveau VII coefficient 144, avec une rémunération mensuelle brute de 8610,03 euros.

La convention collective applicable est celle des entreprises relevant de la navigation de plaisance du 31 Mars 1979.

Par lettre recommandé en date du 16 juillet 2010, le salarié a été convoqué à un entretien fixé au 29 juillet 2010.

Le 2 Août 2010, le salarié a été licencié en ces termes :

« Vous ne vous êtes pas présenté à cet entretien, de sorte que nous n'avons pas été en mesure de recueillir vos observations sur les divers agissements dont nous avons eu connaissance depuis la fin du mois de juin, à la suite de doléances formulées par des salariés de la société.

Des salariés de la société se sont en effet plaints de ce que vous aviez pour habitude de les solliciter durant leurs heures de travail pour réaliser des travaux d'entretien, de réparation et de décoration de 4 bateaux vous appartenant, amarrés au port de [Localité 1].

Après enquête et audition de plusieurs salariés de la société, il est apparu que les agissements dénoncés étaient avérés.

Ainsi, sans informer les salariés de ce que les bateaux sur lesquels ils intervenaient (« MAGALY », «AMIRAL HENRI », « BRIANDE » et « KIRAN »), étaient votre propriété, vous avez demandé à ceux-ci de réaliser des travaux et prestations de services aux frais de l'entreprise.

Nos investigations nous ont permis de savoir que vos bateaux ont bénéficié des travaux et prestations de services suivants:.

- le « BRIANDE » bénéficie d'une sortie annuelle, d'un lavage 2 fois par semaine durant la période estivale, de révision diverses tous les ans, ainsi que des travaux d'électronique et de sellerie;

- le« KIRAN » a été presque entièrement restauré au frais de l'entreprise (plomberie, mécanique, charpentier, chaudronnerie, polish, et sellerie), et bénéficie d'un entretien mensuel de 10 heures;

- le« MAGALY», a fait l'objet de 6 mois de travaux (sellerie, mécanique, plomberie, carénage, changement d'anode et de ligne d'arbre) ;

- 1'« AMIRAL HENRI» a fait l'objet de 4 mois de travaux (plomberie, mécanique, sablage, rabotage, électronique, traitement anticorrosion, antifouling, changement d'anode et de ligne d'arbre).

Nous avons également appris que vous aviez demandé au service Sellerie de vous confectionner de nombreux articles pour votre domicile (à titre d'exemple: parasols, bains de soleil, coussins de décoration, bâches, etc.).

Or vous n'avez jamais fait établir par les secrétaires de la société de factures pour les divers travaux et prestations effectués par l'entreprise, ce qui démontre une volonté manifeste de votre part de ne pas régler ce que vous deviez à l'entreprise.

Plus encore, nous avons eu connaissance de ce que vous avez pour habitude de demander aux salariés de l'entreprise d'effectuer des travaux à votre domicile durant leurs heures de travail (transport de meubles, pose de tapisserie murale, divers petits travaux de maçonnerie ... ).

Vous n'ignorez pourtant pas que de telles pratiques sont contraires à la législation du travail, outre le fait que nos assurances ne garantissent pas les accidents susceptibles de survenir dans de telles circonstances.

De la même manière, vous utilisez régulièrement les véhicules utilitaires de la société pour effectuer des trajets ou transporter des marchandises, à des fins étrangères à l'activité de l'entreprise.

En agissant ainsi, vous avez manifestement abusé de vos fonctions de Directeur du Chantier en usant de votre autorité d'une part, pour contraindre vos collègues à effectuer des travaux et prestations à des fins exclusivement personnelles, et d'autre part, pour dissimuler les sommes que vous deviez à l'entreprise au titre de ces prestations.

Ces agissements sont constitutifs de vols, détournements des moyens de l'entreprise à des fins personnelles et d'abus de fonctions.

Chacune de ces fautes est d'une gravité suffisante pour justifier à elle-seule votre licenciement.

Un tel comportement est d'autant plus grave qu'il émane d'un cadre de votre niveau hiérarchique se devant de faire preuve d'un comportement exemplaire.

Vous comprendrez que votre comportement ne peut être toléré par notre société, en ce qu'il est radicalement incompatible avec l'obligation de loyauté inhérente à votre contrat de travail, et plus généralement, contraire à la probité.

Votre absence à l'entretien du 29 juillet 2010 ne nous a pas permis de recueillir auprès de vous des explications susceptibles de modifier notre appréciation à ce sujet.

Par conséquent, nous vous notifions par la présente lettre recommandée avec accusé réception, votre licenciement pour faute grave.

Le licenciement prend donc effet immédiatement dès première présentation de la présente lettre et votre solde de tout compte sera arrêté à cette date, sans indemnité de préavis, ni indemnité de licenciement ».  

Le 6 Janvier 2011, le salarié a saisi le Conseil de Prud'hommes de Grasse aux fins de contester son licenciement et demander des indemnités de rupture, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour harcèlement moral.

Selon jugement du 6 Juin 2012, le Conseil de Prud'hommes de GRASSE a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la SAS G RODRIGUEZ à payer à [G] [B] les sommes de :

*2583 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis

*2583 euros au titre des congés payés y afférents

*10000 euros au titre de l'indemnité de licenciement

*51660,18 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

*1000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile

*Débouté Monsieur [B] de ses autres demandes

*Ordonné à la SAS RODRIGUEZ de rembourser à POLE EMPLOI les indemnités de chômage payées au salarié dans la limite de six mois.

*Débouté l'employeur de toutes ses demandes

*Ordonné la mise hors de cause du CGEA AGS

*Condamné la SAS G RODRIGUEZ aux dépens.

Le 8 Juin 2012 la société RODRIGUEZ a interjeté appel du jugement .

Elle demande à la Cour :

*d'infirmer la décision du Conseil de Prud'hommes de GRASSE du 6 juin 2012 en toutes ses dispositions.

*de constater que la SAS G RODRIGUEZ a eu connaissance des agissements graves et fautifs de Monsieur [B] à compter du mois de juillet 2010 et ce après une brève enquête interne.

*de dire et juger que le délai de prescription arrivait à terme le 1 er septembre 2010

De constater que le délai de prescription a été interrompu par la convocation à un entretien préalable du 16 juillet 2010.

De juger que les faits reprochés ne sont pas prescrits.

* de débouter Monsieur [B] de toutes ses demandes

*de juger que Monsieur [G] [B] a fait preuve d'un comportement constitutif de faute grave.

*de dire que la procédure de licenciement pour faute grave est régulière, que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

*de condamner Monsieur [G] [B] à payer à la SAS G. RODRIGUEZ, au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, la somme de 5000,00 € .

* de condamner Monsieur [G] [B] aux entiers dépens.

Monsieur [B] demande pour sa part à la Cour de :

*Confirmer le jugement rendu le 6 juin 2012 par le Conseil de Prud'hommes de GRASSE en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

En conséquence, de

*Condamner l'employeur au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis de trois mois, 8 610 € x 3 = 25 830 € plus le dixième à titre de congés payés sur préavis soit la somme de 2 583 €.

*Condamner l'employeur au paiement de l'indemnité de licenciement, soit la somme de la somme de 18 176,66 €.

*Condamner l'employeur à payer au titre de la mise à titre conservatoire sur un demi-mois la somme de 4 305 € plus le dixième à titre de congés payés soit la somme de 430,50 €.

*Condamner l'employeur au paiement de la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

*Condamner l'employeur au paiement de la somme de 206 640 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

*Dire l'ensemble des sommes assimilées à des salaires, ainsi que les indemnités légales de rupture, productives d'intérêts de droit, capitalisés d'année en année, à compter de la citation devant le Bureau de Conciliation, et ce, jusqu'à parfait paiement.

*Dire que les rappels de salaire, préavis, congés payés sur préavis et congés payés découlent du contrat de travail et sont exclus en conséquence de l'article 10 du tarif des huissiers résultant du décret du 8 mars 2001.

*Dire que les sommes allouées à titre de dommages et intérêts seront des sommes nettes, exemptes de toutes charges de CSG et de CRDS qui seront à la charge de l'employeur.

*Condamner l'employeur au paiement de la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Le condamner aux entiers dépens.

Le CGEA demande à la Cour de :

*Constater l'intervention forcée des concluants et l'y dire bien fondée

*Constater que la Société G RODRIGUEZ SA GOLFE JUAN n'est pas en état de cessation des paiements, qu'elle est in bonis; que Monsieur [B] a été licencié pour faute grave le 2 août 2010 soit plus d'un mois après l'arrêté du plan de sauvegarde

Vu l'article L 625-1 du Code du Commerce

*Confirmer la décision entreprise

*Mettre hors de cause les concluants;

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure des moyens et des prétentions des parties, il est renvoyé au jugement entrepris, aux pièces de la procédure, et aux conclusions des parties oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement

La Cour constate que les faits fautifs visés par la lettre de licenciement sont précis, circonstanciés, matériellement vérifiables. Ils sont par ailleurs démontrés par les nombreuses attestations produites par l'employeur et notamment celles de Monsieur [O], « j'ai exécuté les ordres de travail de mon supérieur direct Monsieur [B], dont certains travaux sur des bateaux en 2005 et 2006 et n'a appris que plus tard que le Briande et le Magaly lui appartenaient », de Monsieur [R], « j'ai travaillé durant mes heures de travail à la demande de Monsieur [B] sur les bateaux suivants ; Birande 7 jours, Kiran 5 jours, Amiral Henri 35 jours, Magaly 20 jours », de Monsieur [Q], « à la demande du directeur, [G] [B], j'ai effectué des travaux sur les quatre bateaux lui appartenant Magaly  amiral Henri, Birande, Kiran..le temps passé pendant les heures de travail pour la totalité de ces travaux s'évalue à environ 5 mois pour les bateaux », de Monsieur [L] , plombier mécanicien « j'ai travaillé en 2009 sur le bateau Amiral Henri à la demande de mon directeur durant une journée de 7 heures effectuées en ignorant totalement le nom du propriétaire du bateau », de Madame [V], secrétaire comptable « depuis le 12 Février 2001, date de mon embauche, j'établis des factures sur demande de mon responsable [G] [B]. En ce qui concerne les bateaux MAGALY et amiral HENRY, à ce jour, aucune facture n'a été émise », de Monsieur [T], sellier au chantier naval, atteste avoir réalisé pour Monsieur [B] « une bâche pergola, une semaine de travail, des vaigrages des cabines AR du Magaly, une semaine de travail,.. »., de Madame [A] « à la demande de Monsieur [B], j'ai confectionné à quelques reprises, des rideaux, des transats, des galettes de chaises, des coussins de salons et un parasol. Ces travaux ont été effectués sans rémunération ou compensation matérielle et dans une période de quasi inactivité pendant mes heures de travail »..etc

D'autres attestations, confortant ces témoignages, démontrent suffisamment la réalité des faits invoqués à l'appui du licenciement.

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

Or, le fait, pour un salarié de statut cadre, d'utiliser des salariés et du matériel de l'entreprise à des fins personnelles pour réaliser des travaux d'une importance non négligeable à son domicile ou sur ses biens, caractérise la faute grave qui empêche le maintien du salarié dans l'entreprise pendant le délai du préavis.

Les premiers juges ont considéré que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse au motif qu'il était impossible de savoir si les faits étaient ou non prescrits.

Selon l'employeur, la réalité des agissements fautifs de Monsieur [B] ( à savoir la réalisation de travaux aux frais de l'entreprise sur les bateaux appartenant à Monsieur [B] et à son domicile) est apparue après la réalisation d'une enquête interne.

Selon le salarié, les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont prescrits.

Il résulte des dispositions de l'article L 1332-4 du Code du Travail « qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance à moins que ce fait n'ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales...».

S'il est exact que la date de commission des faits fautifs n'est pas indiquée dans la lettre de licenciement, il résulte toutefois des termes de ce courrier de rupture que c'est à la suite de la dénonciation de certains salariés de divers agissements du salarié qu'une enquête a été diligentée pour en vérifier la teneur au travers de l'audition d'un grand nombre d'entre eux.

Dans ses écritures, l'employeur explique qu'il n'a pu engager la procédure de licenciement qu'après avoir vérifié la teneur des plaintes proférées à l'encontre de Monsieur [B] et s'être assuré de la réalité et de l'ampleur du comportement dénoncé.

C'est à la suite des auditions des salariés de l'entreprise qu'il a eu la révélation de ce que la délation initiale était fondée. C'est cette date, à laquelle l'employeur a pris connaissance de la réalité et de l'ampleur de la faute, qui marque le point de départ du délai de deux mois visé par l'article L 1332-4 du Code du Travail.

L'employeur produit les attestations que les salariés ont rédigé à l'occasion de cette enquête, entre le 8 et le 12 Juillet 2010, soit moins de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement.

Il en résulte que la procédure de licenciement, introduite le 16 Juillet 2010, a été engagée conformément aux dispositions de l'article L 1332-4 du Code du Travail, alors que l'employeur avait eu connaissance de la réalité et de l'ampleur des faits fautifs dénoncés depuis moins de deux mois.

Le salarié invoque également avoir été victime d'un licenciement « verbal » qui prive de cause réelle et sérieuse celui qui lui a été ensuite notifié.

Il produit le contenu de messages téléphoniques des 12 et 15 juillet 2010 par lesquels la secrétaire de la société lui a demandé de ramener sur le lieu de travail son véhicule de fonction, son téléphone portable et les clefs du chantier, ce qui correspondrait selon lui à un licenciement verbal.

La cour considère qu'il s'agit d'une directive de l'employeur adressée à un salarié en congé maladie qui n'a donc nul besoin de ses accessoires de travail. Cette instruction ne saurait être l'équivalent d'un licenciement verbal.

Le rejet de la prise en charge de la mutuelle du 20 Juillet 2010, qui peut de surcroît résulter d'une erreur, n'est pas significatif d'un quelconque licenciement verbal de Monsieur [B].

Le jugement déféré sera en conséquence infirmé en toutes ses dispositions et le salarié débouté de ses demandes.

Sur le harcèlement moral

Aux termes des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 du code du travail aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.  

Selon l'article L. 1154-1 du même code, en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.  

En application de ces textes, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral.

[G] [B] évoque un harcèlement moral sans en préciser les contours. Il produit :

*un certificat médical en date du 4 Mai 2010 attestant de ce que le patient souffre de palpitations depuis 8 jours.

*un courrier en date du 7 Juillet 2010, adressé par son médecin au médecin du travail, faisant état de ce que le patient souffre d'insomnie sévère et d'une anxiété majeure et mentionne:' Ceci survient lors d'un harcèlement au travail avec harcèlement moral, menace, propos mensongers, dans une entreprise qui selon ses dires a des soucis pour sa survie et des soucis avec la justice'.

* un courrier de son médecin à un psychologue dans lequel est évoquée 'une anxiodépression réactionnelle suite à un harcèlement au travail dans un contexte de règlement de comptes familiaux et problèmes judiciaires au sein de son entreprise'.

* des certificats médicaux.

* une attestation du docteur [M], médecin du travail qui déclare avoir suivi le patient de septembre 2007 à Juillet 2010, que le 7 Janvier 2010 , il était tendu et angoissé, qu'il lui a fait part de la situation grave dans son travail (licenciements) et conclut 'c'est un homme que je crois franc et loyal'.

Il produit enfin une copie de déclaration de main courante en date du 18 Juin 2010 dans laquelle il se plaint d'avoir été menacé verbalement par [E] [D], qui 'pense que je suis une balance dans l'affaire Rodriguez' et qui lui a dit 'on va s'occuper de toi'

Le salarié ne fait donc état d'aucun fait précis susceptible de caractériser le harcèlement qu'il invoque.

Sur les frais irrépétibles

Il serait inéquitable de laisser la SAS RODRIGUEZ supporter la charge de ses frais irrépétibles au titre desquels Monsieur [B] sera condamné à lui verser 2000 euros.

Les dépens seront supportés par Monsieur [B].

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale

Confirme le jugement en ce que le CGEA-AGS a été mis hors de cause et en ce que [G] [B] a été débouté de sa demande au titre du harcèlement moral.

Infirme le jugement déféré pour le surplus.

Dit que le licenciement pour faute grave est justifié.

Déboute [G] [B] de ses demandes.

Condamne [G] [B] à verser à la SAS RODRIGUEZ la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamne [G] [B] aux dépens de l'instance.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 12/10301
Date de la décision : 10/09/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°12/10301 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-09-10;12.10301 ?
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