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11/07/2013 | FRANCE | N°11/09552

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 11 juillet 2013, 11/09552


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 11 JUILLET 2013



N°2013/



Rôle N° 11/09552







[E] [P]





C/



Société TODD







Grosse délivrée le :



à :



Me Jean yves CABRIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



Me David LEGRAIN, avocat au barreau de CAEN







Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour

:



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 03 Mai 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/395.





APPELANT



Monsieur [E] [P], demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Jean yves CABRIEL, avocat au ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 11 JUILLET 2013

N°2013/

Rôle N° 11/09552

[E] [P]

C/

Société TODD

Grosse délivrée le :

à :

Me Jean yves CABRIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Me David LEGRAIN, avocat au barreau de CAEN

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 03 Mai 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/395.

APPELANT

Monsieur [E] [P], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Jean yves CABRIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Société TODD, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me David LEGRAIN, avocat au barreau de CAEN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 03 Juin 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre

Monsieur Philippe ASNARD, Conseiller

Madame Nathalie VAUCHERET, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2013, prorogé au 11 juillet 2013.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Juillet 2013

Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

[E] [P] a été engagé la société GT Pièces et Services Paris Sud, dépendant du groupe Todd spécialisé dans le négoce et la distribution des pièces détachées poids lourds et l'intervention sur véhicules, suivant contrat à durée indéterminée en date du 3 septembre 2007 en qualité de directeur régional niveau 3 dégré B catégorie cadre, et affecté dans un premier temps sur le site de [Localité 4] puis sur le site d'[Localité 3].

Suivant avenant du 17 décembre 2007 à effet du 1er décembre 2007, le salarié a été muté auprès de la SAS Todd s'est vu confié le poste de directeur régional niveau IV degré A catégorie cadre et affecté à la région Méditerranée regroupant 6 sites ( [Localité 8] [Localité 5],[Localité 8] [Localité 6], [Localité 7] Terroir et [Localité 7] [Localité 2] et deux ateliers à [Localité 1]), moyennant une rémunération brute en partie fixe de 5000 € et une partie variable composée de primes brutes annuelles pour chaque établissement dont il a la responsabilité, la convention collective applicable étant celle des services de l'automobile.

Après convocation à un entretien préalable, par lettre recommandée du 24 avril 2008 avec avis de réception, l'employeur a licencié le salarié en ces termes :

«Nous vous avons reçu le 17 avril 2008 pour l'entretien préalable au licenciement que nous envisagions de prononcer à votre encontre.

Malgré les explications que vous nous avez fournies, nous avons décidé de vous licencier.

En effet, comme nous vous l'avons indiqué il apparaît clairement que vos aptitudes professionnelles ne sont pas compatibles avec vos fonctions de Responsable Régional. Ainsi :

' En matière de développement et d'organisation :

Alors que vous devez être force de proposition en harmonie avec les directives et instructions de la Direction, nous déplorons votre passivité, subissant et retranscrivant simplement les situations du quotidien.

Vous ne vous occupez pas activement des dossiers litiges préférant laisser cette tâche aux deux chefs d'ateliers, Messieurs [L] et [M], « détachés » temporairement par la Direction pour vous aider à réorganiser la région Provence. Vous nous avez expliqué que vous préférez régler les litiges dans votre bureau avec les clients mais à ce jour, nous ne constatons pas d'avancée dans les dossiers que vous avez soi-disant traité. Pour exemple :

*pour le rendez-vous avec [F] [Z], fournisseur des bâchages CRAMARO, c'est Mr [L] qui s'en est occupé de A à Z, prenant l'initiative de provoquer une conférence téléphonique avec le fournisseur et le client.

*Client [J] : les différents litiges et problèmes ont surtout été analysés par Mrs [L] et [M] de même que les solutions à apporter. Il en est ainsi de la présence d'eau dans une citerne, du problème de jeu dans les axes de mains de suspension, d'un problème de facturation et de temps passé sur une grosse réparation avec une prise en charge assurance.

Par ailleurs, si règlement des litiges il y a, nous ne pouvons nous contenter des quelques rapports succincts et inexploitables que vous nous transmettez, sachant que l'analyse de vos rapports doit être un indicateur fiable puisqu' indispensable au suivi de la Direction Commerciale. Vous nous avez expliqué au cours de l'entretien que vous faîtes sic « du relationnel ». Cette partie de vos fonctions est effectivement nécessaire mais elle doit être efficace et ne doit pas vous occuper à plein temps. Votre efficacité dans ce domaine ne semble pas correspondre par exemple au chef d'atelier de CITAIX, puisque ce dernier ne souhaite pas avoir à faire avec vous.

Des cadeaux clients (vin, coffrets) devaient être distribués, au plus tard pour le début d'année, aux principaux clients de GT Pièces et Services Provence Cette démarche vous permettait de vous présenter, de nouer contact avec les clients et de faciliter les relations commerciales.

A ce jour, vous avez reconnu que tout n'avait pas été distribué, ce qui nous amène à mettre en doute la régularité, voir la pertinence de vos visites clients, alors que vous maintenez faire beaucoup de relationnel.

Nous vous rappelons que nous vous avions déjà alerté sur ce sujet lors de la visite de Mr [N] le

31 Janvier 2008, visite suite à laquelle vous avez pris la décision d'emmener tous les coffrets restant à votre domicile, par mesure de facilité !!

' Au niveau atelier et magasin

Lors de votre proposition de mutation sur ces régions, nous vous avions bien expliqué la situation des sites de [Localité 8] et de [Localité 7], notamment concernant le retard accumulé dans le traitement des Ordres de Réparation.

A ce jour, vous vous contentez toujours de nous indiquer que ce retard ne se résorbe pas, malgré

l'assistance de Messieurs [L] et [M] sur le site de [Localité 8], sans apporter de solutions concrètes. Vous vous contentez de nous indiquer sic « je n'avais personne pour faire le travail » alors qu'il suffisait simplement de réorganiser le travail en demandant, par exemple, à un magasinier de saisir les bons de livraison sur achats externes à la place de la secrétaire. Le nouveau chef d'atelier, arrivé physiquement le 07 Avril 2008, a analysé immédiatement le problème et procédé à la mise en place d'une organisation enfin efficace.

Pour dissimuler votre incapacité à résoudre les problèmes, vous rejetez même la faute sur Monsieur [R] (Site de [Localité 7]) que vous accusez de faire autre chose que de la facturation lorsque vous avez le dos tourné.

Pire, la seule solution que vous ayez trouvé pour résoudre un problème de déséquilibre des stocks est de demander au responsable de magasin de ne pas comptabiliser toutes les pièces, indiquant sic on conserve ce qui est en rouge et on comptabilise dans le stock ce qui est en bleu » !! Votre attitude est inadmissible.

' En matière de gestion du personnel et de management :

Vous n'assumez absolument pas votre rôle d'encadrement et de véritable manager.

En effet, nous vous avions demandé de réorganiser la région Provence pour une meilleure efficience de son personnel. Cependant, mettre en place une réorganisation ne signifie pas procéder à des mutations et des changements de poste à tour de bras ! Vous vous êtes contenté de proposer des modifications de poste peu objectives (rendement faible vu son âge, vu son quotient intellectuel,...) et déraisonnées. De plus, nous ne pouvons accepter que vous vous permettiez de les soumettre aux salariés sans avoir eu l'accord de la Direction au préalable !

Dans un premier temps vous nous assurez n'avoir jamais rien divulgué de ces informations, rejetant une fois encore vos propres manquements sur d'autres personnes (Mis [L] et [S]). Puis lors de l'entretien, vous avez admis partiellement avoir commis une erreur dans fa communication des informations.

Vous ne pouvez pas toujours rejeter les conséquences de vos insuffisances sur les autres.

Enfin, dans le cadre de la GPEC, nous avons mis en place les entretiens d'appréciation de l'activité technique. A cette occasion, par mail en date du 24 janvier 2008, nous vous avons demandé, comme à tous les responsables de site, de procéder aux entretiens et de nous retourner les riches d'évaluation complétées avant le 23 février 2008.

Après de nombreuses relances de la part du service du personnel, vous avez finalement réalisé presque tous les entretiens vous-même, sans respecter les règles et directives mises en place : Ainsi :

*vous ne vous êtes appuyé que sur l'avis du réceptionnaire, adjoint au chef d'atelier, incapable d'évaluer les compétences de chaque salarié,

*vous avez fait signer les salariés avant d'y apposer vos commentaires inacceptables à leur égard: sic « élément en fin de carrière », « semble usé par le temps », « élément peu fiable »...

Votre rôle n'est pas de dénigrer vos salariés mais bien au contraire de valoriser leurs compétences et maximiser leur efficience.

Vous avez oublié d'évaluer un salarié et fournissant au service du personnel, à plusieurs reprises,

des informations erronées pour dissimuler votre manquement (« je vais chercher dans mes papiers », « le salarié est parti en congé avec sa fiche d'évaluation »...).

Là encore, votre attitude n'est absolument pas compatible avec les fonctions d'un Responsable régional, tant du point de vue de la gestion du personnel présent que dans le recrutement de nouveaux candidats puisque force est de constater que vous avez essayé de privilégier certaines de vos relations candidates au poste de chef d'atelier au détriment de candidatures au profil intéressant que vous avez délibérément écartées ou dissimulées à la Direction.

' En matière de gestion administrative :

Là encore, vous « laissez le soin » aux autres de régler les litiges dont vous avez la charge. Par exemple,

c'est le nouveau chef d'atelier, pourtant très occupé avec l'atelier, qui a dû s'occuper de toutes les démarches administratives et du dépôt de plainte auprès de la gendarmerie lors de la tentative d'effraction du 9 ou 10 avril 2008. C'était à vous de vous y rendre.

Vous ne pouvez pas déléguer à vos subordonnés toutes les tâches dont vous avez la charge. Vu le détail de votre emploi du temps que vous nous faites parvenir et de l'absence d'amélioration significative des résultats en terme de Chiffre d'Affaires et d'organisation, force est de constater votre insuffisance professionnelle en terme de management, d'encadrement et d'organisation du travail.

Enfin, il apparaît que vous rencontrez des difficultés à conserver des relations courtoises vis-à-vis de certains de nos salariés que vous jugez hiérarchiquement inférieurs à vous, notamment au sein des services administratifs, ce que nous ne pouvons admettre. Votre statut « cadre » ne vous autorise aucunement à fixer vos propres règles.

Si vous aviez des remarques à faire quant à l'organisation et à la marche du Groupe, il aurait été préférable que vous vous adressiez directement à la Direction plutôt que de vous en prendre aux salariés ou bien d'en faire part ouvertement à l'extérieur.

Nous sommes contraints de constater que vous n'êtes pas capable d'exercer les fonctions de Responsable et ceci malgré tous les appuis techniques et humains mis à votre disposition. Il apparaît clairement que vous êtes incapable de faire face à vos responsabilités et d'accomplir normalement les tâches qui vous incombent.

Nous considérons que ces faits mettent en cause la bonne marche de notre société et nous obligent à procéder à votre licenciement pour insuffisance professionnelle, les explications que vous nous avez fournies ne nous permettant pas d'envisager un quelconque changement.

Nous avons décidé de vous dispenser d'effectuer votre préavis de trois mois qui débutera à la première présentation de la présente lettre, votre rémunération vous étant intégralement payée aux échéances habituelles.

Vous disposez à la date de rupture du contrat d'un crédit de 14 heures de formation au titre du droit individuel à la formation. Vous pouvez demander, avant la fin de votre préavis, à bénéficier à ce titre d'une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation».

Suivant courrier du 14 mai 2008, la SAS Todd a relevé le salarié de son obligation de concurrence.

Contestant la légitimité de son licenciement, [E] [P] a le 19 juin 2008 saisi le conseil de prud'hommes d' Aix-en-Provence lequel section encadrement après radiation le 27 octobre 2009 et remise au rôle le 31 mars 2010 par jugement en date du 3 mai 2011 a:

*dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

*condamné l'employeur à payer au salarié:

- 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

*débouté le salarié du surplus de ses demandes et l'employeur de sa réclamation reconventionnelle,

* condamné l'employeur aux dépens.

[E] [P] a le 26 mai 2011 interjeté régulièrement appel de ce jugement.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions, l'appelant demande à la cour de:

*confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*l'infirmer en ce qu'il lui a octroyé des dommages et intérêts sous évalués quant à son véritable préjudice, en ce qu'il a dit que la clause de non concurrence le frappant a été dénoncée dans les formes et délais prévus par les dispositions légales et conventionnelles,

* dire que la libération de la clause de non concurrence a été mise en oeuvre tardivement,

* condamner la société intimée à lui payer:

-60 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, suite au préjudice qu'il a subi du fait de son déplacement précipité dans le sud de la France, de l'obligation pour l'ensemble de sa famille de l'y suivre, des conditions dans lesquelles le retour s'est effectué, nonobstant d'actives recherches de reclassement,

-60 000 € à titre au titre de la clause de non concurrence,

-2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ,

*dire que l'ensemble des sommes sauf celle pour frais irrépétibles porteront intérêts au taux légal à compter de la demande introduite devant le conseil de prud'hommes,

*dire qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décison à intervenir et en cas d'exécution par voir extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2002 portant modification du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées par la société Todd, en sus de l'indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

* condamner la société intimée aux dépens.

Il soutient:

-que la clause de non concurrence a pris effet compte tenu de la dispense d'exécution du préavis dès la notification de rupture,

-qu' en pareille circonstance et de jurisprudence constante, la renonciation doit intervenir au moment du licenciement,

-qu'il était donc en droit de prétendre dès son départ effectif de l'entreprise au versement de l'indemnité de non concurrence,

-qu'en tout état de cause, la convention collective ne prévoit aucune faculté d'aménagement contractuel de cette libération postérieurement au licenciement.

Il invoque sur la rupture

-le fait qu'il n'a pris ses fonctions que le 1er décembre 2007, dans le cadre d'une réorganisation de la société afin de rentabiliser à tout prix les 6 magasins et points de vente/ateliers du sud de la France qui connaissaient de graves difficultés d'organisation, de personnel et de rentabilité, là où son prédécesseur avait échoué après plusieurs années de service, ce qui ne peut se faire en quelques jours,

- le caractère particulièrement déloyal de la position de l'employeur, alors qu'il n'avait jamais fait l'objet du moindre reproche avant le licenciement.

Il considère qu'aucun des griefs mentionnés dans la lettre n'est existant ni ne justifie la rupture en un aussi bref laps de temps et les réfute un à un soulignant:

-sur le premier grief, que la direction n'a jamais apporté de réponses à ses interrogations dont il lui a fait part,

-sur le second grief, que l'employeur n'a pas tenu compte des explications qu'il a donné lors de l'entretien préalable et qu'en tout état de cause, il n'est donné aucune indication sur la date à laquelle ce grief a été élevé ou découvert,

-sur le troisième grief, que la totalité des litiges ont été réglés,

-sur le quatrième qu'il a sur deux mois entre le 11 février et 11 avril envoyé pas moins de 14 grands e-mails explicatifs et d'innombrables autres plus courts sur les points précis ou difficultés particulières, ce qui représente pas moins de 22 pages de comptes rendus divers,

-sur le cinquième qu'aucune carence ne peut lui être reproché, 19 cadeaux sur 25 ayant remis dans les délais, les 6 autres étant prévus avec le nouveau chef d'atelier,

-sur le sixième qu'il est fantaisiste, que les courriels des 3 mars et 2 avril démontrent son implication,

-sur le septième qu'il est mis en échec par con courrier électronique du 25 avril 2008,

- sur le huitième qu'il s'agit d'un reproche technique sur la lecture des nomenclatures des pièces, que le courrier électronique du 8 février 2008 en couleur n'est pas de sa main, que ce grief est inexistant, l'employeur apporte lui même la preuve que la difficulté a été levée de manière définitive le 28 avril 2008 puisque l'ensemble des pièces en stock a été comptabilisé valablement.

-sur le neuvième, qu'il a pris contrairement à ce qui est soutenu l'ensemble des diligences nécessaires pour réorganiser la région dont il a la gouvernance,

-sur le dixième, qu'il lui a été demande d'évaluer des salariés sous sa responsabilité sur trois sites distincts dans trois départements différents alors qu'il n'avait que deux mois de fonctions, que la tâche est complexe et qu'il n'a pas été formé ni informé, que le 7 avril 2008 l'employeur était en possession de toutes les fiches d'évaluation,

-sur le onzième, qu'il n'a jamais entendu fuir ses responsabilités, qu'en tout état de cause, il lui était impossible de se rendre au commissariat ayant un rendez vous sur le site de [Localité 1] prévu de longue date,

-sur le douzième, qu'il convient de se reporter aux résultats de la région Méditerranée de mars 2008 qui affiche une progression de chiffre d'affaires et un placement de la dite région à la 10 ème place sur 30, et le tableau 2007/2008 faisant ressortir un budget prévisionnel du chiffre d'affaire 2008 en progression de 28 %.

Il ajoute qu'il n'y a pas eu de recrutement pour le remplacer, qu'en fait son poste a été supprimé de sorte qu'il aurait du être éligible au bénéfice d'un licenciement économique.

Il insiste sur son préjudice, sur la difficulté de sa réinsertion ( 9 mois pour retrouver un emploi et sur conditions particulièrement déloyales d'exécution de son contrat de travail, avec pour corollaires l'obligation pour son épouse de démissionner de ses fonctions initiales pour le suivre et le fait que même si elle a bénéficié d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel, suite à la rupture de son contrat ,elle s'est également retrouvé elle aussi sans emploi.

Aux termes de ses écritures, la société intimée conclut;

* à l'infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions,

*à ce qu'il soit dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,

*au débouté de l'intégralité des demandes de l'appelant,

*à titre subsidiaire, si la cour devait considérer le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, à ce que les dommages et intérêts sollicités soient ramenés à de plus justes proportions,

*à titre reconventionnel, à ce que l'appelant soit condamné à lui payer 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens.

Elle souligne:

-que la procédure contractuelle de renonciation à l'obligation de non concurrence a été parfaitement respectée,

-que la circonstance que la levée de cette interdiction ne soit pas intervenue concomitamment à la notification de la rupture ne saurait en toute hypothèse constituer un quelconque grief dans la mesure où le salarié a bénéficié d'une dispense d'exécution rémunérée de son préavis.

Elle précise sur le licenciement:

-que la mutation du salarié vers le sud de la France ne s'est absolument pas faite dans la précipitation, que c'est en parfaite connaissance de cause, que le salarié a librement décidé de prendre en charge cette nouvelle région, que cette mutation a constitué une véritable promotion,

-que la première série de griefs illustre à elle seule l'insuffisance professionnelle caractérisée du salarié,

-que sur la second série de griefs, la carence du salarié est flagrante, les courriers électroniques qu'il verse lui même au débat prouve l'absence de prise en compte du problème lié au retard accumulé sur les ordres de réparations des sites concernés, que le courriel du 25 avril 2008 dont il fait état soit le lendemain de son licenciement illustre parfaitement son manque total de réactivité, le manque prétendu de personnel est insuffisant à justifier cette carence,

- que sur la troisième série de grief, la preuve des initiatives malheureuses du salarié sans concertation avec la direction est également rapportée par les pièces que l'appelant produit, que le grief sur les entretiens ne concerne pas tant le retard que la manière dont ils ont été conduits et des remarques et commentaires qu'il a cru devoir porté à propos des salariés,

-que sur la 4 ème série de grief, que l'argumentation de l'appelant à ce titre révèle son sens des responsabilités, que s'agissant de l'absence d'amélioration significative des résultats en termes de chiffres d'affaire de la région confié à ses soins, les pièces auxquelles l'appelant se réfère y sont étrangères et n'ont aucune valeur probante, qu'elle a procédé au remplacement de M [P] par un autre responsable [Q] [T].

Pour plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures déposées par les parties et réitérées oralement à l'audience.

SUR CE

I sur la clause de non concurrence

En premier lieu, il doit être constaté que la validité de la clause de non concurrence figurant au contrat liant les parties n'est pas remise en cause, la question en litige étant limitée à la levée tardive de la dite clause.

En droit, en l'absence de disposition conventionnelle ou contractuelle fixant valablement le délai de renonciation par l'employeur à la clause de non concurrence, celui ci ne peut être dispensé de verser la contrepartie financière de cette clause que s'il libére le salarié de son obligation de non concurrence ua moment du licenciement.

En l'état, il est constant que la convention collective applicable ne prévoit aucun disposition sur le délai de renonciation de l'employeur à la clause de non concurrence.

Par contre, l'avenant au contrat de travail en date du 17 décembre 2007 prévoit que:

' la société se réserve toutefois la faculté de vous libérer de cette interdiction de non concurrence et par là même se dégager du paiement de l'indemnité prévue en contrepartie, soit à tout moment au cours de l'exécution du contrat, soit à l'occasion de sa cession, sous réserve dans ce dernier cas de notifier sa décision par lettre recommandée au plus tard un mois suivant la notification de rupture du présent contrat de travail'.

En l'état, il n'est pas contesté que par lettre du 14 mai 2008, la SAS Todd a levée la clause de non concurrence.

Dès lors qu'il y a eu en l'espèce respect du délai contractuel, c'est à dire que la levée est intervenue moins d'un mois après la lettre de licenciement ( en fait trois semaines) et que le salarié était toujours en période de préavis même s'il a été dispensé de son exécution et qu'il était rémunéré, il n'y a pas lieu de considérer que la dite levée conforme aux stipulations contractuelles aurait été tardive.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté la réclamation à ce titre.

II sur le licenciement

Selon l'article L1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il

appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Aucune irrégularité de procédure n'est en l'espèce invoquée.

Sur le fond, le jugement déféré doit être confirmé.

En droit, l'insuffisance professionnelle constitue une cause légitime de licenciement lorsqu'elle est préjudiciable aux intérêts de l'entreprise et qu'elle repose sur des éléments concrets et objectifs pouvant être imputés au salarié.Si l'appréciation des aptitudes et de l'adaptation à l'emploi du salarié relève du pouvoir patronal et si le juge n'a pas à se substituer à cette appréciation, encore faut il que cette appréciation repose sur des éléments concrets et objectifs, matériellement vérifiables.

En l'espèce, la SAS Todd produit au débat très peu de pièces:

-dix e-mails envoyés par [E] [P] ou dont il été destinataire dont 7 concernent la période antérieure au 17 décembre 2007 et trois seulement la période en litige c'est à dire la période où il occupait les fonctions de directeur de la région Méditérranée, à savoir:

-celui du 17 décembre 2007 concernant la récupération du temps de travail,

-celui du 1er février 2007, concernant son logement pour la troisième semaine de février et l'embauche de son épouse,

- celui de [O] [U] service du personnel envoyé le 15 avril 2008 à [Y] [V]

mentionnant que '[E] [P] affirme que M [X] est parti avec sa fiche d'évaluation dont il ne pourra la faxer que le lundi matin qu'à son retour de congé, que cependant, d'après [H] [K], M [X] n'a pas passé d'entretien,' étant inscrit à la main sur la dite copie de mail que 'suite à la visite à l'INS le 9 avril 2008, j'ai rencontre M [X] qui m'a confirmé ne pas avoir passé l'entretien' suivi d'une signature dont on ignore qui en est l'auteur,

-un document (pièce 11) anonyme ni daté ni signé et dont ignore qui l'a rédigé ou quel service intitulé 'note sur déplacement à [Localité 8] du vendredi 14 mars 2008" et mettant en cause de manière décousue le manque d'implication et le comportement du responsable régional et manager dont certains éléments sont repris dans la lettre de licenciement,

-une pièce complementaire produite en appel à savoir la lettre en date du 5 novembre 2007 de [A] [N] prenant acte de la démission de M [W] et lui demandant la restitution du matériel ainsi que l'attestation dactylographiée comportant la signature de [G] [W] et [D] [S] sur la restitution du matériel par celui ci.

Le salarié verse pour sa part au débat notamment:

-les documents concernant l'offre à laquelle il a répondu, sa lettre de candidature, le contrat de travail et l'avenant,

-les documents concernant son épouse le contrat à durée indéterminée etc ...et divers mails concernant l'embauche de cette dernière sa démission,

-la lette de licenciement et le courrier de levée de la clause de non concurrence,

- de multiples courriers éléctroniques, le tableau des écarts d'inventaire, le tabeau commenté des cadeaux clients, le document previsionnel des emplois, la fiche individuelle d'évaluation, le guide d'appréiation des compétences.

En l'état, il ne peut être considéré comme l'ont retenu à juste titre les premiers que l'insuffisance professionnelle d'[E] [P] est établie.

En effet, la SAS Todd, employeur ne fournit le moindre élément concret, objectif et matérialement vérifiable sur aucun des séries de griefs qu'elle reproche au salarié, et sur les cas précis des dossiers qu'elle évoque; elle s'absentient même de communiquer des données comptables ou statistiques sur la gestion de la région en cause alors même qu'elle critique les éléments invoqués à ce titre par l'appelant. Par ailleurs, elle ne peut se retrancher derrière les pièces transmises par l'appelant pour prétendre que son insuffisance est démontrée alors même qu'elle se garde bien de pointer de façon précise les pièces qui pourraient en justifier.

Bien au contraire, l'appelant fournit des élements de nature à laisser présumer qu'il n'a pas failli à ses obligations; il en est ainsi des comptes rendus sur son activité que le salarié a bien adressé en 2008 ( soit les 7 mars 12 mars( compte rendu du 1er timestre), 10 mars ( prévisisionnel) 17 mars, 21 mars, 31 mars , 4 avril et 7 avril 2008, 11 avril 2008( sur le programme prévisionnel) , ou les réponses aux questions posées ( le 14 février 2008), les propositions concernant le traitement des heures supplémentaires et le 13 février 2008 la transmission aux agences des modalités de décompte des heures supplementaires, des directives qu'il a lui même adressé aux différents agences dont il a la responsabilité ( 23 janvier 2008, 29 janvier 2008 ) du cas du client Zamora pour lequel il fournit une lettre de remerçiement de ce dernier, la liste des cadeaux distribués, la justification des vérifications des ordres de réparation et le listing détaillé des ordres de réparation étant précisé que le salarié ne peut être tenu du retard pris avant son entrée en fonction ni du manque de personnel pour les traiter, la résorption des difficultés ( courriels des 3 mars et 2 avril mentionnant le résultat des relances clients) les diverses mails

concernant les stocks et les écarts d'inventaire dont il n'apparaît pas contrairement à l'argumentation de l'employeur qu'un quelconque manquement puisse être imputé au salarié, les demandes d'accord concernant différentes embauches, la justification des évaluations réalisées qui certes peuvent contenir des expressions maladroites mais qui ne traduisent aucun dénigrement de sa part, l'erreur sur l'évaluation de M [X] ne pouvant en outre constituée à elle seule un élément de nature à justifier l'insuffisance professionnelle.

Dans ces conditions, et eu égard au fait que le salarié n'a eu que très peu de temps pour faire ses preuves dans le cadre d'une nouvelle organisation mise en place, le licenciement doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse étant précisé que rien dans les pièces produites ne démontre que son poste aurait été supprimé et que le salarié aurait du être licencié pour motif économique.

Tenant compte de l'âge du salarié ( 49 ans ) au moment de la rupture, de son ancienneté ( 7 mois et 21 jours dont 4 mois comme responsable régional ) de son salaire mensuel brut (soit 5832 € pour la partie fixe y compris l'avantage véhicule, la participation au logement ) de la justification de ce qu' après la rupture, le salarié a bénéficié d'une prise en charge par Pôle Emploi pendant 6 mois à compter du 28 août 2008, qu'il a retrouvé un travail 9 mois après avoir reçu la lettre de licenciement mais sans qu'il soit produise le nouveau contrat qu'il a souscrit, et eu égard aux répercussions morales et familiales subies, il y a lieu de lui allouer une indemnisation à hauteur de 28 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

III sur les demandes annexes

Les intérêts au taux légal avec capitalisation sur le fondement de l'article 1154 du code civil sur la somme sus visée seront dus dans les conditions précisées au dispostif.

Il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à ce titre une indemnité complémentaire de 800 €, celle accordée par les premiers juges étant confirmée.

L'employeur qui succombe ne peut bénéficier de cet article et doit être tenu aux dépens.

Il résulte de l'article 11 du décret du 12 décembre 1996 modifié par le décret 2001-212 du 8 mars 2001 que le droit visé à l'article 10 du même décret n'est pas du lorsque le recouvrement ou l'encaissement est effectué sur le fondement d'un titre exécutoire constatant une créance née de l'exécution d'un contrat de travail de sorte que la demande faite à ce titre sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré sauf sur le montant des dommages et intérêts alloués pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau sur ce point et y ajoutant

Condamne la SAS Todd à payer à [E] [P] en sus de l'indemnité pour frais irrépétibles confirmée les sommes suivantes:

- 28000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-800 € à titre d'indemnité complémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Dit que les intérêts au taux légal avec capitalisation en application de l'article 1154 du code civil sont dus à compter du 3 mai 2011 date du jugement sur les dommages et intérêts à hauteur de 10000 € et sur les 1000 € à titre de frais iprrépétibles et pour le surplus des sommes allouées à compter du présent arrêt,

Condamne la SAS Todd aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 11/09552
Date de la décision : 11/07/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9B, arrêt n°11/09552 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-07-11;11.09552 ?
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