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16/05/2013 | FRANCE | N°11/15309

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 16 mai 2013, 11/15309


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 16 MAI 2013



N°2013/





Rôle N° 11/15309







Société STTS GROUP





C/



[Y] [V]















Grosse délivrée le :



à :



Me Pascal GORRIAS, avocat au barreau de TOULOUSE



Me Gaëtan LE MERLUS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE







Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :<

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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 28 Juillet 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/1145.





APPELANTE



Société STTS GROUP, demeurant [Adresse 1]



représentée par Me Pascal GO...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 16 MAI 2013

N°2013/

Rôle N° 11/15309

Société STTS GROUP

C/

[Y] [V]

Grosse délivrée le :

à :

Me Pascal GORRIAS, avocat au barreau de TOULOUSE

Me Gaëtan LE MERLUS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 28 Juillet 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/1145.

APPELANTE

Société STTS GROUP, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Pascal GORRIAS, avocat au barreau de TOULOUSE

substitué par Me ROCA, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

Monsieur [Y] [V], demeurant [Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Gaëtan LE MERLUS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre

Monsieur Philippe ASNARD, Conseiller

Madame Nathalie VAUCHERET, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Mai 2013, prorogé au 16 Mai 2013

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2013

Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

[Y] [V] a été engagé après une période d'intérim ayant débouté le 1er septembre 2007, par la société STTS, suivant contrat à durée indéterminée en date du 30 janvier 2008 en qualité d'étancheur aéronautique, qualification P2 niveau 2, échelon 3 coefficient 190, moyennant une rémunération mensuelle brute qui était dans le dernier état de la relation contractuelle de 1635,15 € pour un horaire à 151h 67 outre une prime d'équipe et un montant de repos acquis.

L'employeur a notifié au salarié deux avertissements : le premier par lettre du 29 janvier 2010 remise en mains propres le 1er février 2010 pour manquement professionnel, le second le 26 février 2010 réceptionné le 9 mars 2010 pour manquement à la discipline pour avoir contesté l'autorité du contrôleur qualité qui lui avait demandé d'effectuer des retouches peintures.

Suivant courrier du 7 mars 2010, invoquant le fait qu'il n'a jamais manqué de respect et a toujours correctement effectué son travail et que les incidents évoqués sont les premiers depuis son entrée au service de l'entreprise en 2007, le salarié a sollicité la bienveillance de l'employeur aux de voir annuler le dernier avertissement au motif qu'il va grever la prochaine augmentation. Par lettre du 15 mars 2000, l'employeur a maintenu cette sanction.

Le 8 juin 2010, après refus de remise en mains propres, l'employeur a adressé la convocation à un entretien préalable fixé au 17 juin 2010 avec mise à pied conservatoire en chronopost.

Par lettre recommandée du 21 juin 2010 avec avis de réception, l'employeur l' a licencié en ces termes :

« Le 28 mai 2010, votre responsable, M. [K], a reçu un appel téléphonique de notre client signalant des problèmes répétitifs de suivi de travaux chaîne sur la chaîne W4. Après contrôle de votre responsable, il s'est avéré que vous cumuliez « 34 tampons de retard sur l'avancement du PR. Cela signifie que notre client était dans l'incertitude sur les états de finition d'application PR sur 34 zones sur différents appareils! en effet, la chaîne W4 est divisé en neuf cellules d'avancement des appareils, à chacune des cellules correspondent des panneaux d'affichage avec un écart réservé au PR qui doit donc être tamponnés à la fin de chaque phase.

En tant qu'opérateur qualifié et habilité à ces travaux, vous n'êtes pas sans savoir l'importance des tampons pour le suivi des machines et les problèmes que cela engendre notamment celui de bloquer les sorties d'appareils.

La même semaine le 26 mai 2010 nous nous sommes aperçus lors d'un contrôle de qualité que « le bourrage PR » avait été effectué sur les quatre portes de l'appareil REF003 alors que les joints baillaient. Or les procédures sur lesquels vous avez été formé et sensibilisé, insistent sur l'attention apportée lors du bourrage PR des portes écureuil, et préconise de prévenir les maîtrises de ECF et STT S et de ne surtout pas faire l'application PR. En effet, si le joint baille, alors que le PR est fait et sec, il y a un énorme travail de reprise avec des coûts financiers et humains très importants.

Lors de la remise en mains propres de la convocation, le 8 juin 2010 vous avez non seulement refusé de prendre la lettre et de vous rendre à l'entretien, mais surtout vous avez eu un comportement inacceptable avant le respect envers le responsable du site, M. [K]. Vous avez nié en bloc les motifs évoqués par votre responsable pour cette convocation, et avez tenu des propos injurieux, dont notamment un « vous ( STTS)voulez m'enculer ! ». En plus de M. [K], deux autres salariés STTS confirment par écrit vous avoir entendu sortir du bureau de manière très agitée en criant « il n'y a que des putes ici » et vous avez quitté le site ayant terminé votre vacation.

Ce comportement et ses propos injurieux totalement inacceptables constituent, à notre sens, une violation de notre règlement intérieur ainsi qu'une atteinte à la discipline et au bon fonctionnement de notre entreprise. Il constitue également un acte d'insubordination caractérisée dans la mesure où vous ne respectez pas vos supérieurs. Cette situation manifeste une volonté délibérée de votre part de porter atteint aux pouvoirs de direction.

Nous nous sommes donc vus dans l'obligation d'engager une procédure disciplinaire à votre égard et nous vous avons informé par chronopost le 8 juin 2010 d'une mise à pied conservatoire pendant le déroulement de cette procédure. Par ce même courrier , nous vous convoquions à un entretien préalable pour le 17 juin 2010.

Lors de cet entretien du 17 juin 2010 et en présence de M [L], délégué du personnel, nous vous avons exposé les motifs qui nous ont amené à engager cette procédure et nous avons recueilli vos explications.

Vous avez affirmé n'avoir jamais insulté quiconque et cela malgré des témoignages écrits. Témoignages que Melle [M] a pris la peine de vérifier auprès des personnes concernées qui ont confirmé leurs déclarations.

Quant aux fautes professionnelles qui vous sont reprochées, vos arguments sont ' que cela peut arriver à tout le monde de faire des erreurs et qu'il n'y a pas mort d'homme'; quant aux retards dans les tampons , ils seraient liés à la présence d'un nouvel embauché sur chaîne. Or, après vérification, votre nouveau collègue ne présentait qu'un seul tampon de retard après seulement deux semaines de formation.

Vos explications ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits qui vous sont reprochés.

Votre comportement est d'autant plus inacceptable que vous avez déjà fait l'objet de sanctions disciplinaires pour des faits similaires:

-avertissement remis en main propre le 1 février 2010 suite au non respect du process spécifiant un dégraissage avant l'application hydrofuge,

-avertissement recommandé reçu le 9 mars 2010 suite à votre insolence envers le contrôleur qualité, M [D] [P].

M [V], votre irrévérence répétée envers vos supérieurs et les manquements à vos obligations profesionnelles perturbent le fonctionnement de votre équipe et ont des répercussions sur notre organisation. Ils sont constitutifs d'un manquement grave :

- à vos obligations professionnelles qui nous le rappelons, exigent que vous respectiez les procédures auxquelles vous avez été formé et habilité,

- à la discipline générale de l'entreprise.

Ils constituent également un acte d'insubordination caractérisée dans la mesure où vous ne respectez pas vos supérieurs ; cette attitude manifestement une volonté délibérée de votre part de porter atteint au pouvoir de direction.

Force est de constater que vous ne tenez absolument pas compte de nos observations et de nos avertissements.

En conséquence, vous comprendrez aisément qu'il nous est impossible de maintenir de notre relation contractuelle et nous avons le regret de vous confirmer les effets de la mise à pied à titre conservatoire et notifier votre licenciement pour faute grave pour les motifs suivants: manquement à vos obligations professionnelles et insubordinations la rupture de votre contrat de travail interviendra dès la présentation de la présente».

Après avoir contesté par lettre du 5 juillet 2010, et les avertissements et le licenciement, [Y] [V] a le 12 octobre 2010 saisi le conseil de prud'hommes de Martigues lequel section industrie par jugement en date du 28 juillet 2011 a:

*dit que la faute grave n'est pas constituée, que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ,

*condamné l'employeur à payer au salarié:

- 1159 € à titre de rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire et 115,90 € pour les congés payés afférents,

- 3090€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 309 € pour les congés payés afférents,

- 618 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 10'000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 12'00 € à titre de frais irrépétibles,

*rappelé l'exécution provisoire de plein droit en application des dispositions combinées des articles R. 1454 - 23 et R. 1454 - 28 du code du travail, fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 1770 € et ordonne l'exécution provisoire par application de l'article 515 du code de procédure civile,

*dit que la société STTS devra remettre l'attestation destinée à pôle emploi au salarié afférente à l'ensemble des sommes restituées ainsi que le motif du licenciement, sous astreinte de 50 € par jour à compter du 15 ème jour suivant la notification du jugement, le conseil se réservant la liquidatione de l'astreinte,

*débouté l'employeur de sa demande pour frais irrépétibles,

*dit qu' à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans le jugement à intervenir, l'exécution forcée devra être réalisée par l'intemédiaire d'un huiisier et le montant des sommes de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 n° 96:1080 ( tarif des huissiers) devra être supporté par le débiteur,

*dit que les intérêts légaux seront comptabilisés à compter du 12 octobre 2010 et ce en application de l'article 1153-1 du code civil,

*mis les entiers dépens à la charge de l'employeur.

La SAS STTS Group a le 29 août 2011 interjeté régulièrement appel de ce jugement.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions, la SAS STTS Group demande à la cour de réformer le jugement déféré,dire le licenciement justifié, débouter l'intimé de l'ensemble de ses demandes et de le condamner au paiement de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle critique la décision entreprise au motif que la matérialité des manquements professionnels

est avérée, rappelant que le salarié travaillait à [Localité 1] sur le site d'Eurocopter, client unique de la société, que chaque tâche effectuée obéit à un cahier des charges précis, que l'intimé a fait l'objet d'avertissements portant sur des faits de même nature, que les injures et insultes proférées justifient à elles seules le licenciement.

Elle ajoute que le salarié n'a subi aucun discrimination ni différence de traitement par rapport aux autres salariés de l'entreprise.

Aux termes de ses écritures, l'intimé conclut :

*à la constatation qu'il a été sanctionné disciplinairement pour des faits prescrits, à ce qu'il soit dit que les sanctions disciplinaires n'étaient pas fondées,

*à la constatation que l'employeur n'apporte pas la preuve de la réalité des faits reprochés notamment ' l'existences de la plainte du client du 28 mai 2010, le retard sur l'avancement du PR, la preuve que ce retard lui est imputable exclusivement, les faits reprochés du 26 mai 2010 et la preuve que ce reproche lui est imputable exclusivement, l'attestation en bonne et due forme de M [K] relatif aux propos injurieux qu'il aurait tenus, l'attestation des deux autres salariés relatifs aux propos qu'il aurait tenus',

* à la constatation que l'employeur n'apporte pas la preuve de son intention malveillante dans ses propos,

* à ce qu'il soit jugé que l'insuffisance professionnelle qui lui est reprochée ne pouvait servir de fondement à un licenciement pour faute grave,

* à la confirmation du jugement déféré dans toutes ses dispositions , sauf sur la base de son ancienneté à compter du 1er septembre 2007 ( première embauche dans la société en qualité d'intérimaire) et d'un salaire de référence de 1545 € voir augmenter les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 20 000 € et à voir porter l'astreinte pour la remise de l'attestation Pôle Emploi à 100 € par document et par jour de retard et les frais irrépétibles à 3000 €.

Il relève qu'il a formellement contesté les deux avertissements ainsi que le licenciement.

Il fait valoir sur la rupture:

- au principal que le délai pris par l'employeur pour le convoquer démontre que son maintien au regard de ses manquements professionnels reprochés n'était pas impossible de sorte que le caractère de gravité fait manifestement défaut,

-au subsidiaire, d'une part, que l'insuffisance professionnelle qui lui est reprochée sur le terrain disciplinaire ne peut être retenue dès lors que l'employeur ne démontre pas que l'exécution défectueuse serait due à son abstention volontaire ou à sa mauvaise volonté et que d'autre part, le refus de prendre en main propre la lettre de convocation ne constitue pas une insubordination, qu'enfin, il n'a fait qu'exprimer son opinion au sein de l'entreprise, que les faits reprochés ne sont pas constitutifs d'une injure, qu'aucun abus n'est démontré.

Il argue avoir été victime de discrimination au motif que l'employeur l'a traité différemment des autres salariés ayant pu à commettre des erreurs de même nature et qui n'ont pas été sanctionnés.

Pour plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures déposées par les parties et réitérées oralement à l'audience.

SUR CE

I les avertissements

Le contrôle judiciaire a vocation à s'exercer sur les avertissements en litige dans les termes des articles suivants:

L'article L1333-1 du code du travail dispose que:

' En cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction.

L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction.

Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.'

L'article L 1333-2 précise: ' le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise'

*Le premier avertissement du 29 janvier 2010 est ainsi libellé:

«le 27 janvier 2010, vous êtes intervenu afin d'assurer une prestation d'application de produit hydrofuge dans la salle de lavage du bâtiment Z sur une structure Super Puma suite à la demande de votre chef d'équipe [B] [H].....Vous avez été accompagné par un peintre du A4 pour vous aider dans cette tâche . Il ne connaissait pas le travail, vous l'avez donc guidé dans le travail à accomplir. Cependant, dans le cadre de cette application, vous n'avez pas suivi le process décrit dans l'IMFA associée ainsi que dans l'IT-PR 008-EC spécifiant un dégraissage avant l'appplication hydrofuge, comme toute application étanchéité de façon générale. Le non respect du process a eu pour conséquence un impact important en production provoquant des retards avec le client et un surcoût due à cette reprise. Ces faits constituent un manquement à vos obligations professionnelles dans la mesure où vous n'avez pas respecté le process sur lequel vous avez été qualifié et sensibilisé notamment sur le dégraissage avant l'application de produits hydrofuge le 1er septembre 2009. Nous vous notifions en conséquence pa la présente un avertissement conformément au règlement intérieur en vigueur dans l'entreprise..... ».

En l'état, il n'y a pas lieu d'annuler cette sanction. En effet, il s'avère:

-que la procédure suivie n'est pas contestée,

-que contrairement à l'argumentation du salarié, les faits objet de cet avertissement sont en date du 27 janvier 2010 , la date du 1er septembre 2009 se rapportant à la formation qu'il a suivie sur le dégraissage avant l'application des produits hydrofuge, de sorte que le moyen de prescription ne peut être utilement invoqué,

-qu'enfin même s'il tente de minimiser sa responsabilité dans sa lettre du 5 juillet 2010, le salarié ne conteste pas les faits en eux mêmes , c'est à dire le fait de n'avoir pas respecté le process alors qu'il a reçu une formation spécifique sur le dégraissage avant application des produits hydrofuge qu'il ne conteste pas avoir suivi.

*Le second avertissement en date du 26 février 2010 est est ainsi libellé :

« le 17 février 2010, Mr. [D] [P], contrôleur, vous a demandé d'effectuer des retouches sur un appareil avant la « sortie pluie ». Retouches que vous avez effectuées mais seulement après avoir contesté l'autorité de M. [P] au motif « qu'il n'était pas un chef d'équipe mais simplement contrôleur ».Lors de l'entretien du 24 février 2010, vous avez reconnu les faits et vous vous êtes défendu en prétextant que M. [P] avait lui-même utilisé un ton acéré. Ces explications ne justifient en aucun cas votre comportement. Ces faits constituent manquement grave à la discipline générale. Vous notifiez en conséquence par la présent avertissement, conformément règlement intérieur en vigueur dans notre entreprise.. ».

Cette sanction n'a pas lieu non plus d'être annulée et ce dans la mesure où dans son courrier du 7 mars 2010 juste après les faits, si le salarié demande certes cette annulation à l'employeur, c'est pour ne pas entraver la future augmentation qu'il espérait, il reconnaît toutefois la réalité de l'incident intervenu le 17 février et implicitement avoir contesté l'autorité de M [P] .

En conséquence, le jugement déféré qui n'a pas considéré les avertissements fondés doit être réformé.

II sur le licenciement

La faute grave, qui seule peut justifier une mise à pied conservatoire, résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise; il appartient à l'employeur d'en rapporter la preuve.

La SAS STTS verse au débat:

- les attestations établies par [U] [K] responsable du site in situ d'Eurocopter , celle dactylograhiée du 9 juin 2010 et celle manuscrite en date du 8 novembre 2010 en bonne et due forme lequel relate l'incident du 8 juin 2010 et les propos injurieux proférés par le salarié et repris dans la lettre de licenciement mais également le fait que ce dernier s'en également pris à [D] [P], celle en date du 12 janvier 2011 certifiant avoir reçu un appel téléphonique le 28 janvier 2010 du responsables de la chaîne écureuil afin de lui reprocher un manque de suivi et le manque de tampon sur sa chaîne par les opérateurs,

-les attestations de [D] [P], contrôleur qualité, l'une en date du 9 juin 2010 dactylographiée la seconde manuscrite en date du 8 novembre 2010, qui fait état de l'incident du 8 juin 2010 et des propos tenus par le salarié à l'encontre de [U] [K] mais également des invectives dont lui-même a été l'objet, [Y] [V] 'l'accusant de remonter que ses défauts, d'être raciste et d'en vouloir aux gitans',

- les attestations de [I] [Q] magasinier, l'une dactylographiée et l'autre manuscrite témoignant avoir vu [Y] [V] le 8 juin 2010 sortir du bureau de [U] [K] vers 13:45 de manière agitée et en criant « il n'y a que des putes ici »,

- l'attestation de présence de [Y] [V] à la formation suivante le 26 mai 2010 ( sans indication d'heure le jour même des faits reprochés): sensibilisation des attentions apportées lors du bourrage PR des portes écureuils,

-l'attestation de [G] [X] responsable secteur STTS Marignane, qui décrit le fonctionnement de l'étanchéité sur la chaîne écureuil bâtiment W4 et l'exigence une fois l'opération réalisé du tampon nominatif portant un numéro spécifique permettant d' identifier l'opérateur et d'assurer la traçabilité interne et le suivi par le client quant à l'avancement des opérations sur les différentes machines,

- la notice spécifique applicable à l'étanchéité de d'hélicoptères écureuil, tâche n ° IT - PR 60106 ECF.

Au vu de ces pièces, si les éléments produits ne permettent pas d'identifier l'exécution défectueuse par [Y] [V] et le caractère délibéré de ses agissements pour le premier grief du 28 mai 2010 concernant la non apposition des tampons mais également concernant le second grief du 26 mai 2010 sur le bourrage PR en présence de joints baillants alors que la formation semble avoir été faite après l'incident, il apparaît toutefois, que le grief d'insubordination est par contre lui parfaitement établi, les propos tenus le 8 juin 2010 dépassant la liberté d'expression de tout salarié et étant bien constitutifs d'injures envers le supérieur hierarchique.

Considérant que cette insubordination est intervenue après un précédent avertissement pour le même motif et avant la notification de la convocation à l'entretien préalable, elle rendait bien impossible le maintien du salarié dans l'entreprise de sorte qu' en l'espèce , elle est constitutive à elle seule d'une faute grave, étant précisé que l'employeur n'a nullement tardé à engager la procédure alors même que c'est le salarié qui a refuse la convocation à l'entretien préalable.

Par ailleurs, le moyen tiré par le salarié de l'existence d'une discrimination à son endroit ne peut prospérer et ce dans la mesure où au vu du compte rendu de l'entretien préalable par le conseiller qui l'a assisté et de divers ordonnances du Docteur [N] intervenues après le licenciement, l'intimé n'apporte pas le moindre élément laisant présumer l'existence d'une discrimination, étant précisé que le seul fait qu'il ait été sanctionné par des avertissements, qu'il s'est vu notifié une mise à pied conservatoire et qu'il a été licencié pour faute grave, ce qui relève de l'exercice par l'employeur de son pouvoir diciplinaire ne peut être constitutif d' une inégalité de traitement en l'absence d'abus démontré .

Dans ces conditions, le licenciement du salarié pour faute grave doit être déclaré justifié et l'intimé débouté de l'ensemble de ses demandes.

Le jugement déféré qui a fait droit aux demandes du salarié doit être infirmé.

III Sur les demandes annexes

Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile àl'une quelconque des parties ni pour la procédure de première instance ni pour celle d'appel.

L'intimé doit être tenu aux dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Dit les deux avertissements et le licenciement pour faute grave fondés,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne [Y] [V] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 11/15309
Date de la décision : 16/05/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9B, arrêt n°11/15309 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-16;11.15309 ?
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