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16/05/2013 | FRANCE | N°11/01729

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 16 mai 2013, 11/01729


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 16 MAI 2013



N° 2013/





Rôle N° 11/01729





SA BT SERVICES AGENCE D'[Localité 1]

Société BT SERVICES (agence d' [Localité 1])





C/



[J] [K]





















Grosse délivrée

le :



à :



Me Franck BLIN, avocat au barreau de PARIS



Me Emilie SALVADO, avocat au barreau de MARSEILLE








Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 18 Janvier 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 09/1306.







APPELANTES



SA B...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 16 MAI 2013

N° 2013/

Rôle N° 11/01729

SA BT SERVICES AGENCE D'[Localité 1]

Société BT SERVICES (agence d' [Localité 1])

C/

[J] [K]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Franck BLIN, avocat au barreau de PARIS

Me Emilie SALVADO, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 18 Janvier 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 09/1306.

APPELANTES

SA BT SERVICES AGENCE D'[Localité 1], dont le siège social est sis [Adresse 2], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Franck BLIN, avocat au barreau de PARIS

Société BT SERVICES (agence d' [Localité 1]), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Franck BLIN, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Madame [J] [K], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Emilie SALVADO, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 Mars 2013 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre

Monsieur Philippe ASNARD, Conseiller

Madame Nathalie VAUCHERET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2013.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2013.

Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

[J] [K] a été engagée par la société CISI, suivant contrat à durée indéterminée à effet du 1er décembre 1996 en qualité d'analyste programmeur principal position 3.3, la convention collective applicable étant celle nationale des bureaux d'études techniques et société de conseil, dénommé Syntec; en septembre 2004, elle a été positionnée cadre 2.2 coefficient 130 en janvier 2005, elle sera promue ingénieur d'études puis manager de projet à compter du 1er octobre 2006.

En décembre 2007, la société CISI a été reprise par la société BT Services, cette dernière faisant partie du Groupe BT ( British Télécom), opérateur de télécommunications historique britannique et proposant en France, ses services aux grandes entreprises, notamment les multinationales et multi-sites, qui ont des besoins complexes en matière de communications et de système d'information, de sorte que le contrat de travail de la salariée a été transféré à la société BT Services.

Estimant avoir été lésé en termes de rémunération minimale garantie par la convention collective et n'avoir pas eu de suites à ses demandes amiables, [J] [K] (comme d' autres de ses collègues de travail par instances séparées) a le 14 septembre 2009 saisi le conseil de prud'hommes d' Aix-en-Provence aux fins d'obtenir divers rappels de salaires et dommages et intérêts.

Le 1er novembre 2009, la relation contractuelle entre [J] [K] et la société BT Services

prenait fin par suite du transfert de son contrat de travail de celui -ci à la société Datalliance.

Par jugement en date du 18 janvier 2011, la juridiction prud'homale section encadrement , a:

*ordonné à la société BT Services de positionner [J] [K] à la position I 2.3 à compter du 1er octobre 2006 et que le salaire brut de base du salarié s'établit à 3.284,40 € au 30 octobre 2009,

*condamné l'employeur à payer au salarié les sommes suivantes :

-21147,17 € bruts au titre du rattrapage salarial pour les années 2004 à 2009 incluses et 2115€ bruts pour les congés payés afférents,

- 17 093,24 € bruts au titre du rattrapage salarial entre l'indice 130 et 150 pour les années 2006 à 2009 incluses et 2901 € pour les congés payés afférents,

-6568 € bruts au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

-500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

*ordonné à l'employeur de remettre au salarié un bulletin de paie rectificatif sous astreinte de 20 € par jour de retard à compter du 20 ième jour suivant la notification du jugement, le bureau de jugement se réservant le droit de liquider l'astreinte,

*débouté l'employeur de ses demandes reconventionnelles,

* condamné l'employeur aux entiers dépens.

La société BT Services Agence d' [Localité 1] a le 31 janvier 2011 interjeté régulièrement appel de ce jugement.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions, l'appelante demande à la cour de:

* à titre principal,

-constater que les dispositions de l'article 3 de l'accord de branche du 22 juin 1999 ne peuvent être invoqués par l' intimée,

-dire qu'il relève uniquement des dispositions de l'accord d'entreprise du 13 juillet 2000,

-constater par ailleurs que l'intimée ne respecte pas les dispositions de l'article 32 de la convention collective des Bureaux d'Etudes techniques précisant les modalités de vérification du respect des salaires minima mensuels conventionnels,

-constater que l'intimée ne démontre pas devoir relever du niveau 2.3 coefficient 150 au regard du contenu de ses tâches, notamment du fait qu'ils ne prouvent pas encadrer d'autres cadres,

-infirmer en conséquence le jugement déféré en ce qu'il a fait droit aux demandes indemnitaires infondées et injustifiées de l' intimée,

-débouter l'intimée de l'intégralité de ses demandes,

* à titre infiniment subsidiaire,

-constater que l'intimée établit ses calculs sur des bases erronées et réduire substantiellement le montant de leurs demandes au regard des calculs effectués par l'intimé,

*en tout état de cause, appeler en la cause la société Datalliance nouvel employeur de ce salarié condamner l'intimé à lui verser 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient sur le respect des minimas conventionnels que les premiers juges qui ont combiné les dispositions de l'accord d'entreprise ( durée et organisation ) et de l'accord de branche ( rémunération minimale majorée en considération de la durée du travail appliquée), suivant en cela le raisonnement de l'intimé ont fait une application erronée des dispositions conventionnelles, qu'en ajoutant sur la base de l'article L 1235-1 du code du travail que le doute profitait au salarié, ils ont étendu ce texte qui était limité au droit disciplinaire;

Elle invoque au principal,

- la subsidiarité de l'accord de branche Syntec du 22 juin 1999 prévue dans l'article 1er du chapitre 11 alinéas 4 et 5 du dit accord considérant que les partenaires sociaux signataires de l'accord d'entreprise du 13 juillet 2000 se sont inscrits spécifiquement dans le cadre de la faculté offerte par les signataires de l'accord de branche, que l'accord d'entreprise,

-l'innovation par l'accord d'entreprise au motif que si la cour devait estimer que l'accord de branche Syntec n'a pas un caractère supplétif, il y a lieu de considérer à tout le moins que l'accord de branche ne pouvait s'appliquer en l'occurrence compte tenu de la possibilité par accord d'entreprise de prévoir des dispositions plus adaptées à celle-ci et ce sur le fondement de l'article L. 132-23 du code du travail ce qui est intervenu sur l'horaire hebdomadaire, le plafond annuel de jours à travailler, l'organisation du temps de travail, et les heures supplémentaires de sorte que les salariés de la société BT Services travaillent nécessairement 12 jours de moins par an que les salariés qui se voient appliquer l'accord de branche.

Elle prétend subsidiairement, que l'intimée ne respecte pas dans sa réclamation les dispositions conventionnelles de branche en matière de vérification du respect des salaires minima et invoque à ce titre l'article 32 de la convention collective Syntec sur les éléments de rémunération à prendre en compte et la méthode de calcul à appliquer, la rémunération à comparer aux appointements mensuels minimaux garantis s'entendant de la rémunération annuelle perçue lissée sur 12 mois.

Elle fait valoir sur le changement de coefficient au principal que l'intimée qui se revendique responsable d'équipe 2.3 coefficient 150 ne peut prétendre à ce niveau, faute de remplir les conditions cumulatives fixées par la convention collective, ayant occupé le poste d'ingénieur d'études et de développement sans fonction managériale jusqu'en septembre 2006, date à laquelle elle est devenue manager de projet, qu'elle ne démontre pas être en pleine possession de son métier ni avoir encadré d'autres ingénieurs et cadres, que l'intimée n'est aucunement placée dans une situation identique à celle des salariés bénéficiant du coefficient 150 et ne peut dans ces conditions invoquer une égalité de traitement avec eux, au subsidiaire, que la demande faite à ce titre est manifestement disproportionnée, l'intimé revendiquant un rappel de salaires sur la base du même calcul erroné que sa demande relative au minima conventionnel.

Aux termes de ses écritures, l'intimée conclut :

* à l'application à la relation contractuelle l'unissant à la société BT Services, des dispositions de l'article 3 du chapitre 2 de l'accord national du 22 juin 1999 étendu par arrêté du 21 décembre 1999 publié au journal officiel le 24 décembre 1999 et annexé à la convention collective nationale Syntec,

et à ce qu'il soit dit qu'au regard de ses fonctions et responsabilité de chef de projet confiées à compter du mois de janvier 2004 mais également en vertu du principe d'égalité de traitement entre les salariés, elle aurait du être positionnée cadre 2.3 à compter de 1er octobre 2006 et donc percevoir un salaire de base correspondant au minimum fixé par la convention collective pour le coefficient de rémunération 150 afférent à ce positionnement,

*à la condamnation de l'appelante à lui payer 10 000 € à titre de dommages et intérêts, distincts du non paiement des salaires au titre du préjudice moral et financier qu'il a subi du fait de l'exécution fautive de son contrat de travail par l'employeur sur la période de 2004 à 2009,

* au débouté de toutes les demandes de l'appelante,

* à la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que, depuis le mois de septembre 2004, son salaire mensuel brut de base a toujours été inférieur au minimum fixé par le convention collective applicable sur la base du coefficient 130 correspondant à la classification de cadre position 2.2 depuis le mois de septembre 2004, qu'à compter du mois de janvier 2005, elle aurait de surcroît du être positionnée cadre 2.3 au regard des fonctions et responsabilités d'encadrement et donc percevoir le salaire mensuel de base correspondant au minimum fixé par la convention collective pour le coefficient de rémunération 150 afférent à ce positionnement, que c'est de manière abusive et préjudiciable à son endroit que l'employeur n'a jamais fait droit aux demandes de régularisation amiable et en ce qu'il a condamné l'employeur à lui payer 500 € pour frais irrépétibles,

* à sa réformation sur le chiffrage du montant des rappels de salaires alloués et des dommages et intérêts au titre du préjudice distinct du non paiement des salaires et statuant à nouveau sur ces points à la condamnation de l'appelante à lui payer:

- à titre principal

-23 922,77 € à titre de rappel de salaires dus sur la base du coefficient de rémunération 130 pour la période de travail non prescrite de septembre 2004 à octobre 2009 inclus et 2392,27 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

-16 851,39 € en complément à titre de rappels de salaire dus sur la base du coefficient de rémunération 150 pour la période non prescrite de octobre 2006 à octobre 2009 inclus et 1685,13 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

-à titre subsidiaire si la cour venait à considérer qu'il y a lieu de multiplier le salaire de base garanti sur 12 mois et non sur 13 pour le calcul des rappels de salaires dus sur la base du minimum conventionnel applicable en l'espèce:

-12932,04 € à titre de rappel de salaires dus sur la base du coefficient de rémunération 130 pour la période de travail non prescrite de septembre 2004 à octobre 2009 inclus et 1293,20 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

- 13 746,05 € en complément à titre de rappels de salaires dus sur la base du coefficient de rémunération 150 pour la période de travail non prescrite de janvier 2005 à octobre 2009 inclus et de

13 74,60 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

-en tout état de cause, les sommes suivantes de:

-10000 € nette de toutes charges et cotisations sociales à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct du non paiement des salaires légalement dus depuis septembre 2004,

*à la remise par l'appelante d'un bulletin rectificatif mentionnant la totalité des sommes judiciairement allouées sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 15 ème jour de la notification de l'arrêt à intervenir,

* à la condamnation de l'employeur à lui payer 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens.

Elle précise sur l'application de l'article 3 de l'accord de branche que peu importe le nombre de jours effectivement travaillés sur l'année ( soit égal ou inférieur à 219 jours) ou sur le nombre d'heures de travail effectivement réalisé, que c'est l'autorisation de dépassement forfaitaire de 10% qui rend obligatoire le règlement d'une rémunération au moins égale à 115% du minimum conventionnel de la catégorie dont les salariés en réalisation de missions relèvent.

Elle réfute les affirmations volontairement erronées de l'appelante et s'insurge contre sa mauvaise foi déconcertante.

Elle insiste sur le fait que dès lors que la rémunération minimale fixée par la convention collective est mensuelle et non pas annuelle et que son contrat stipule expressément le règlement de 13 mois de salaire par an, le salaire mensuel minimum fixé par la convention collective doit être multiplié par 13 mois et non par 12, qu'en l'espèce pour savoir si sur une année déterminée, il a ou perçu une rémunération conforme au minimum mensuellement garanti par la convention collective applicable dans sa catégorie et pour déterminer si un rappel de salaire est du, il convient de retrancher de la rémunération annuelle minimale garanti ainsi reconstituée conformément à la convention collective et au contrat de travail, les 13 salaires mensuels qu'il a perçu au cours de la même année.

Elle rappelle que la relation contractuelle a pris fin par suite de son transfert à la société Datalliance le 1er novembre 2009.

Elle souligne que contrairement à l'argumentation de l'appelante, la convention collective ne limite pas les fonctions d'encadrement à l'encadrement d'autres salariés uniquement cadres, qu'à compter du 1er octobre 2006 soit après 10 ans d'expérience confirmé en qualité d'ingénieur d'études, elle s'est vu confier le poste de manager de projet pour la mise en oeuvre de projets impliquant la responsabilité et le commandement d'une équipe de 3 à 5 personnes ainsi qu'elle en justifie par le curriculum vitae de son parcours professionnel document interne à la société BT Services qui est remis au client quand l'entreprise propose de la missionner ainsi que les attestations qu'elle produit.

Pour plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures déposées par les parties et réitérées oralement à l'audience.

SUR CE

En premier lieu, il convient de constater que l'appelante ne s'explique sur la nécessité d'appeler en la cause la société Datalliance contre qui il n'est au demeurant rien demandé. De plus il s'avère que

que la présente procédure concerne la période contractuelle antérieure au transfert du salarié à cette dernière société de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de mise en cause.

I Sur la demande de rappel de salaires par rapport aux minima conventionnels,

Comme le relève à juste titre l'appelante, les premiers juges ne pouvaient faire référence pour résoudre la question posée à l'article L 1235-1 du code du travail qui concerne exclusivement le droit disciplinaire.

1° sur l'application de l'accord de branche,

En premier lieu, il convient de constater que les textes auxquels font référence les parties tant l'accord national de branche du 22 juin 1999 étendu par arrêté du 21 décembre 1999 que l'accord d'entreprise du 13 juillet 2000 sur l'organisation, l'amélioration et la réduction du temps de travail sont antérieurs à la loi 2004-391 du 4 mai 2004 sur la formation professionnelle et sur le dialogue social, loi qui prévoit dans son article 45 que 'la valeur hiérarchique accordée par les signataires aux conventions et accords conclus avant l'entré en vigueur de la dite loi, demeure opposable aux accords de niveaux inférieurs.'

Dès lors que la loi sus visée ne s'applique pas en l'espèce aux accords en litige lesquels restent soumis à la hiérarchie des normes conventionnelles et au principe de faveur en vigueur avant la dite loi, il ne peut être retenu que les salariés dont l'intimé ne pourraient invoquer utilement l'accord de branche et seraient soumis au seul accord d'entreprise.

Il convient en outre de relever que l'accord de branche a prévu l'intervention d'un accord d'entreprise sur deux points à savoir sur les modalités de gestion applicables aux salariés non concernés par les modalités standards ou les réalisations de mission en complète autonomie à savoir tous les ingénieurs et cadres avec possibilité d'extension par accord d'entreprise à d'autres catégories ce qui a été fait pour les ETAM, et la limite maximum du nombre de jours travaillés pour les dits salariés fixé à 219 jours qui peut être abaissé par accord d'entreprise ce qui a été fait par l'accord du 13 juillet 2000 ayant opéré une réduction de ce nombre à 217 jours.

Par contre, l'accord de branche ne prévoit pas la possibilité d'une dérogation par accord d'entreprise dans un sens moins favorable aux salariés et encore moins de la possibilité de déroger sur la question de la rémunération.

C'est ainsi que l'article 6 - rémunérations- de l'accord d'entreprise qui est ainsi rédigé : « conformément à l'accord Syntec, la société CS-SI s'engage à ne pas diminuer les salaires bruts de base du fait de la réduction du temps de travail..... » n'écarte pas l'accord de branche mais renvoie expressément sur la question des rémunérations à l'accord de branche.

En l'absence de dispositions spécifiques de l'accord d'entreprise relatives à la rémunération des salariés en réalisation de missions, et dès lors qu'il est acquis au débat que le salarié relève de cette catégorie et qu'il est autorisé à dépasser l'horaire hebdomadaire de 35 heures dans la limite de 10%

c'est à bon droit que l'intimé demande qu'il lui soit fait application de l'article 3 intitulé 'réalisation de missions' de l'accord de branche du 22 juin 1999, article prévoyant dans ses deux derniers alinéa que : « Le personnel ainsi autorisé à dépasser l'horaire habituel dans la limite de 10 % doit bénéficier d'une rémunération annuelle au moins égale à 115% du minimum conventionnel de sa catégorie . L'adaptation de ces modalités de gestion du temps de travail ne peut entraîner une baisse du salaire brut en vigueur à la date de ce choix».

Au demeurant et ainsi que le relève à juste titre l'intimée, l' article L 132-23 alinéa 3 et 4 du code du travail recodifié à l'article L2253-3 a toujours disposé qu'en matière de salaires minima, de classifications, de garanties collectives complémentaires mentionnées à l'article L912-1 du code de la sécurité sociale et de mutualisation des fonds de la formation professionnelle, une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement ne peut comporter des clauses dérogeant à celles des conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels.

Dans ces conditions, le jugement déféré qui a retenu sur le principe l'application de l'article 3 de l'accord de branche sus visé doit être confirmé .

2° sur les modalités de calcul et les conséquences à en tirer, sur les calculs à opérer

L'article 32 de la convention collective Syntec dispose :

« (..)Caractère forfaitaire de la rémunération des ingénieurs et Cadres («.)

Etant donné le rôle dévolu aux ingénieurs et cadres, il est fréquent que leurs heures de présence ne puissent être fixées d'une façon rigide; elles correspondent aux nécessités de l'organisation du travail et de la surveillance de son exécution.

Les appointements minimaux découlent des coefficients et des valeurs du point et correspondent à l'horaire légal de références.

Les valeurs du point seront fixées aux mêmes dates que celles des Etam ( c'est à dire deux fois par an par la commission paritaire)

Les appointements de I.C ont un caractère forfaitaire. Ce forfait, dans le cadre de l'horaire normal de l'entreprise, correspond aux conditions réelles de travail de l'I.C et englobe notamment les heures supplémentaires occasionnelles de l'I.C et le cas échéant l'adaptation aux horaires habituels des clients avec lesquels il travaille............

Dans les barèmes des appointements minimaux garantis afférents aux positions définies, sont inclus les avantages en nature évalués d'un commun accord et mentionnés dans la lettre d'engagement ainsi que les rémunérations accessoires en espèces, mensuelles ou non, fixées par la lettre d'engagement (ou par la lettre de régularisation d'engagement ou par un accord ou une décision ultérieure).

Pour établir si l'ingénieur ou cadre reçoit au moins le minimum le concernant, les avantages prévus au paragraphe ci-dessus doivent être intégrés dans la rémunération annuelle dont le douzième ne doit, en aucun cas, être inférieur à ce minimum.

Par contre, les primes d'assiduité et d'intéressement, si elles sont pratiquées dans l'entreprise, les primes et gratifications de caractère exceptionnel et non garanties ne sont pas comprises dans le calcul des appointements minimaux non plus que les remboursements de frais, et les indemnités en cas de déplacement ou de détachement».

En application de cet article, il convient de déterminer les éléments de comparaison à savoir:

-d'une part le minimum conventionnel garanti afférent à la catégorie du salarié se situant dans un cadre mensuel, pour lequel il doit être pris pour base la valeur du point tel que défini par l'avenant conventionnel applicable à la période en cause et le coefficient affecté au salarié mais également non seulement le calcul sur 115 % de ce minimum en application de l'article 3 de l'accord de branche sus visé et en y intégrant s'agissant d'un calcul au mois un 12 ième supplémentaire correspondant au 13ième mois contractuellement prévu,

-d'autre part, la rémunération mensuelle perçue chaque mois par le salarié en la calculant par prise en compte de sa rémunération annuelle perçue y compris le 13 mois et en la divisant par 12.

Par ailleurs, s'agissant de la période en litige compte tenu de la date de saisine de la juridiction prud'homale ( 14 septembre 2009) et de la prescription quinquennale, elle doit s'étendre du 14 septembre 2004 à la fin de la relation contractuelle par suite du transfert dans un autre entreprise soit le 1er novembre 2009.

A titre de rappel de salaire, il convient de constater que le calcul opéré par les premiers juges dont le détail figure sur un tableau annexé au jugement ne peut être confirmé et ce dans la mesure où il n'est pas tenu compte du 13 ème mois ni dans le minimum garanti ni dans les salaires réglés au salarié mais à part et que la somme réclamée à titre de rappel en appel est en toute hypothèse inférieure à celle allouée par les premiers juges.

Par contre, il y a lieu d'entériner les calculs effectués par la salariée dans ses écritures et qui a tenu compte du fait qu'elle était au coefficient 130 pour la période de septembre à décembre 2004 puis au coefficient 150, de la valeur du point en fonction des différents avenants intervenus, du fait qu'en 2008 suite à une régularisation partielle, il a perçu ce qui lui était du, sauf toutefois à retrancher la période du 1er au 14 septembre 2004 c'est à dire pour 2004 un reliquat du de 1904,42 € au lieu de 2176,36 €.

En conséquence, le rappel de salaire s'élève à 23 650,83 € outre les congés payés afférents.

II sur la demande au titre du positionnement au niveau.2.3 coefficient 150 et ses conséquences,

L'annexe II de la convention collective Syntec dite de classification des ingénieurs et cadres

définit,

* La position II Niveau 2.1 :

Ingénieurs ou cadres ayant au moins deux ans de pratique de la profession, qualités intellectuelles et humaines leur permettant de se mettre rapidement au courant des travaux d'études. Coordonnent éventuellement les travaux de techniciens, agents de maîtrise, dessinateurs ou employés, travaillant aux mêmes tâches qu'eux dans les

corps d'état étudiés par le bureau d'études

*la position II Niveau 2.2 coefficient 130

Remplissent les conditions de la position 2.1 et, en outre, partant d'instructions précises de leur supérieur, doivent prendre des initiatives et assumer des responsabilités que nécessite la réalisation de ces instructions ; étudient des projets courants et peuvent participer à leur exécution. Ingénieurs d'études ou de recherches, mais sans fonction de commandement

* la Position II Niveau 2.3 coefficient 150

Ingénieurs ou cadres ayant au moins six ans de pratique en cette qualité et étant en pleine possession de leur métier; partant des directives données par leur supérieur, ils doivent avoir à prendre des initiatives et assumer des responsabilités pour diriger les employés, techniciens ou ingénieurs travaillant à la même tâche »

Il appartient à la salariée qui revendique le poste de responsable d'équipe niveau.2.3 coefficient 150 à compter de janvier 2004 de rapporter la preuve qu'elle remplit les conditions pour y prétendre.

En l'espèce, cette dernière produit au débat:

- ses bulletins de paie,

-le curriculum vitae interne établi sur papier à entête de BT Infrastructures Critiques la concernant,

-les supports d'entretiens annuels du 23 février 2007, du 25 avril 2008,

-le curriculum vitae interne concernant [U] [Q] et le bulletin de salaire de janvier 2005 où il est mentionné que ce denier était au 1er janvier 2005 positionné 2.3 coefficient 150,

-les attestations d' [Y] [I] manager de contrats, de [R] [D] , de [V] [X] d' [O] [L] et de [A] [G], informaticiens, de [E] [Z] et de [F] [H] ingénieurs informaticien, précisant que l'intimée a travaillé comme chef de projet d'octobre 2006 à juin 2007, encadrant une équipe de cadres et de non cadres sur les projets Arpège Fusion Martinique et Arpège PSI.

L'appelante pour sa part verse au débat à titre d' éléments de comparaison:

- la hiérarchie de l'équipe de [P] [N] architecte, ainsi que les entretiens d'évaluation concernant de ce dernier du 18 février 2003, du 10 février 2004, 27 janvier 2007, du 12 mai 2006, et le bilan de développement du 28 mai 2009,

-la hiérarchie de [P] [B] manager responsable opérationnel et les entretiens d'évaluation de ce dernier du 18 mars 2003, du 10 février 2004, du 27 janvier 2005, du 12 mai 2006 et le bilan de développement du 9 février 2010.

Au vu de ces pièces, le jugement déféré doit être confirmé sur le principe du positionnement revendiqué que ce soit au titre des critères d'attribution de la grille de classification que le principe de l'égalité de traitement.

En effet sur le premier point, les éléments apportés par la salariée démontrent qu'elle a exercé des fonctions d'encadrement notamment d'autres cadres, que rien n'établit comme le soutient l'employeur qu'elle n'aurait pas été en possession de son métier, alors même avait plus de 10 ans d'expérience comme ingénieur d'études quand elle s'est vu nommé chef de projet,

D'autre part, la demande de l'intimée est également justifiée sur l'égalité de traitement et ce dans le curriculum vitae concernant [U] [Q] qu'il invoque à titre d'élément de comparaison révèle que ce dernier qui est positionné sur le poste d' ingénieur d'étude, qui a une ancienneté inférieure à celle de l'intimé ne paraît avoir occupé de fonctions managériales alors que malgré ce il a accédé au niveau 2. 3.

Ce fait laisse supposer en l'état une inégalité de traitement entre ces deux salariés.

Or, l'appelante qui n'évoque même pas le cas de [U] [Q] cité par l'intimée ne produit aucun élément permettant de justifier les raisons objectives de cette différence de traitement et ne permet pas à la cour d'ainsi d'en contrôler concrètement la réalité et la pertinence.

Les cas de [P] [N] architecte et de [P] [B] manager responsable opérationnel qui n'occupent pas le poste d'ingénieur d'études et qui ne sont pas dans la même situation que l'intimée ne peuvent être utilement invoqués par l'appelante pour s'opposer à la demande.

En conséquence, c'est à bon droit que l'intimée revendique le positionnement au niveau 2.3 à compter du 1er octobre 2006.

Eu égard à ce positionnement et au calcul fait par l'intimé dans ses écritures, le rappel restant dû s'élève à 16 851,39 € en complément à titre de rappels de salaire dus sur la base du coefficient de rémunération 150 pour la période non prescrite d' octobre 2006 à octobre 2009 inclus et 1685,13 € pour les congés payés afférents.

III Sur les autres demandes,

La réclamation à titre de dommages et intérêts distincts du non paiement des salaires doit être accueillie dans son principe dès lors qu'eu égard au rappel de salaire ci dessus accordé, l'exécution fautive du contrat de travail ne peut être contesté; il doit être alloué à ce titre 3000 € pour la réparation de son préjudice moral et financier.

La remise d'un bulletin rectificatif conforme au présent arrêt s'impose sans qu'il y ait lieu de prévoir une astreinte.

Il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à ce titre une indemnité complémentaire de 500 €, celle octroyée en première instance étant confirmée.

L'employeur qui succombe ne peut bénéficier de cet article et doit être tenu aux dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré sauf sur la motivation au titre du positionnement au niveau 2.3 sur les modalités de calculs et le montant des rappels de salaires allouées et des dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

Statuant à nouveau sur ce point, sur les points réformés et y ajoutant,

Condamne la société BT Services à payer à [J] [K] les sommes suivantes:

-23 650,83 € à titre de rappel de salaire pour le rattrapage du 14 septembre 2004 à octobre 2009 par rapport au minimum conventionnel garanti,

- 2365,08 € pour les congés payés afférents,

-16 851,39 € en complément à titre de rappels de salaire dus sur la base du coefficient de rémunération 150 pour la période non prescrite d' octobre 2006 à octobre 2009 inclus,

- 1685,13 € pour les congés payés afférents,

-3000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

- 500 € à titre d'indemnité complémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

Ordonne la remise par la société BT Services à [J] [K] et d'un bulletin de salaire récapitulatif conforme au présent arrêt,

Condamne la société BT Services aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 11/01729
Date de la décision : 16/05/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-16;11.01729 ?
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