COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
2e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 28 MARS 2013
N° 2013/ 136
Rôle N° 11/13839
[T] [F]
C/
S.A.S.U. VISIPLUS
Grosse délivrée
le :
à :
BADIE
ERMENEUX
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de Grasse en date du 04 Avril 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2010F00174.
APPELANT
Monsieur [T] [F] exerçant en nom propre sous l'enseigne AUDIO STAR,
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représenté par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL avoué, précédemment constituée
INTIMEE
La S.A.S.U. VISIPLUS,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocats postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 21 Février 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame AUBRY CAMOIN, président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président
Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller
Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2013
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2013,
Signé par Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [T] [F] exploite en nom personnel à [Localité 1] un fonds de commerce à l'enseigne AUDIO-STAR ayant notamment pour activité la vente, pose, entretien de tous accessoires sur tous véhicules, qui dispose d'un site internet ainsi que d'une boutique en ligne.
La SAS VISIPLUS dont le siège social est à SOPHIA ANTIPOLIS est spécialisée dans le référencement des sites internet.
Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 21 décembre 2009, la société VISIPLUS a mis en demeure AUDIO STAR de lui régler la somme de 4 174,04 euros TTC en vertu d'une facture du 23 octobre 2009 et d'un bon de commande du 29 septembre 2009 relatif à un ' référencement bronze' pour le site de la boutique en ligne comprenant les prestations suivantes :
définition et référencement de quinze mots clef
garantie de positionnement sur 5 mots clef min
rapport trimestriel de positionnement
durée 12 mois
et prévoyant un règlement à la commande de 1 303,64 euros TTC et 4 versements de 717,69 euros chacun.
Le 14 juin 2010, monsieur [F] a formé opposition au greffe du tribunal de commerce de BEZIERS à l'ordonnance d'injonction de payer du 11 mai 2010 portant sur la somme de 4 174,04 euros en principal et 4,70 euros en accessoires, qui lui a été signifiée le 1° juin 2010.
Par jugement contradictoire du 4 avril 2011, le Tribunal de Commerce de GRASSE auquel le greffier du Tribunal de Commerce de BEZIERS a envoyé l'affaire, a :
- en la forme, reçu l'opposition à injonction de payer
- au fond, débouté monsieur [F] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- confirmé l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 11 mai 2010,
- condamné monsieur [F] à payer à la SAS VISIPLUS la somme de 4 174,04 euros avec intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2009,
- condamné monsieur [F] à payer à la SAS VISIPLUS la somme de 700 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire,
- condamné monsieur [F] aux dépens.
Par déclaration au greffe de la Cour du 3 août 2011, monsieur [T] [F] a régulièrement relevé appel de cette décision.
Par conclusions du 3 novembre 2011, monsieur [T] [F] demande à la Cour au visa des articles 1152, 1184, 1984 et suivants du code civil, de :
- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- à titre principal, constater la nullité du contrat souscrit par la préposée du concluant,
- à titre subsidiaire, prononcer la résolution du contrat souscrit auprès de la société VISIPLUS, et condamner la société VISIPLUS à 1 euro de dommages et intérêts,
- à titre subsidiaire, réduire la clause pénale à 1 euros,
- en toute hypothèse, condamner la société VISIPLUS au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Monsieur [F] fait valoir les moyens suivants :
- sur la nullité du contrat : le contrat a été signé par une de ses préposée qui n'avait pas qualité pour ce faire et qui a outrepassé ses fonctions .
La société VISIPLUS n'est pas fondée à invoquer l'existence d'un mandat apparent qui, selon jurisprudence de la Cour de cassation, ne peut être invoqué 'qu'à la condition que la croyance du tiers aux pouvoirs du prétendu mandataire soit légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisent le tiers à ne pas vérifier lesdits pouvoirs'.
Par ailleurs, dans une espèce similaire, la Cour de Cassation a jugé que seule la signature du gérant pouvait engager la société.
- à titre subsidiaire, il y a lieu de prononcer la résolution du contrat pour inexécution par la société VISIPLUS de ses obligations contractuelles.
- à titre très subsidiaire, il convient de réduire la clause pénale figurant à l'article 5.3 des conditions générales du contrat dès lors que la société VISIPLUS n'a effectué aucune prestation et que le contrat n'a été signé par la secrétaire du concluant que suite aux pressions et sollicitations par phoning et mailing.
Par conclusions du 26 décembre 2011, la SAS VISIPLUS demande à la Cour de :
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- condamner monsieur [F] au paiement de la somme de 2 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux entiers dépens.
La société VISIPLUS expose les moyens suivants :
- sur la validité du contrat : le contrat est valable soit comme ayant été signé par monsieur [F] lui même dès lors que la signature n'est pas identifiable, soit sur la base du mandat apparent comme ayant été signé par sa préposée.
- monsieur [F] ne peut demander la résolution judiciaire du contrat pour inexécution dès lors que le contrat est déjà résilié par application de la clause de résiliation de plein droit figurant à la clause 5.3 des conditions générales de vente.
En outre, la société concluante justifie qu'elle avait commencé le travail commandé.
- la clause pénale figurant aux conditions générales de vente n'est pas excessive.
MOTIFS DE LA DECISION
Le bon de commande signé le 20 octobre 2009 et les conditions générales de vente signées le 23 octobre 2009, supportent une signature identique à celle de mademoiselle [J] [L] figurant sur la lettre d'avertissement que lui a notifiée son employeur le 23 décembre 2009, ainsi qu'une date écrite de la même main, et le tampon du fonds de commerce Audio Star.
La signature de monsieur [F] figurant sur ses documents d'identité est totalement différente de celle figurant sur les documents concernés.
Les conditions générales de vente, reçues en pièces jointes le 23 octobre 2009 à 14 heures 33 avec demande de signature de la part de la société VISIPLUS ont été renvoyées par mademoiselle [J] [L] à 14 heures 38 avec le message suivant : 'suite à notre conversation téléphonique, je vous renvoie les CGV. Cordialement. [J]. Société Audio Star.'.
Les allégations de monsieur [F] selon lesquelles la signataire de ces documents contractuels est mademoiselle [J] [L] qui occupe dans son entreprise la fonction d'assistante de gestion, sont en conséquence confirmées par ces éléments.
Si une personne peut être engagée sur le fondement d'un mandat apparent, c'est à la condition que la croyance du tiers aux pouvoirs du prétendu mandataire soit légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisent le tiers à ne pas vérifier ces pouvoirs.
En l'espèce, la société VISIPLUS n'avait jamais auparavant entretenu de relations commerciales avec monsieur [F], aucun représentant de la société VISIPLUS n'a rencontré ce dernier , la signature du bon de commande a été précédée uniquement de communications téléphoniques et de courriers électroniques, le bon de commande et les conditions générales de vente qui ont été renvoyés par mademoiselle [L] ne mentionnent pas le nom du responsable, Audio Plus selon les pièces produites n'est pas une société ainsi que le mentionne le courrier électronique de mademoiselle [L] mais un nom commercial et une enseigne.
Ne saurait être retenue l'existence d'une ratification tacite de l'engagement pris par mademoiselle [L] dès lors que monsieur [F] n'a répondu à aucun des courriers électroniques adressés par la société VISIPLUS afin d'obtenir diverses informations relatives notamment à l'accès à son espace web et à l'accès à son outil statistique.
Monsieur [F] justifie en outre qu'il n'avait pas l'utilité de la prestation de service souscrite par sa salariée dès lors que les sites internet du fonds de commerce
et de la boutique en ligne sont gérés par un webmaster exerçant sous l'enseigne MAD-SYSTEM et qu'il avait souscrit depuis le 1° janvier 2009 un contrat de publicité auprès de google adwords.
Au regard de ces éléments d'appréciation, les circonstances imposaient au tiers de vérifier les pouvoirs de mademoiselle [L], seule interlocutrice et seule signataire du bon de commande et des conditions générales de vente.
Il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré en toutes ses disposition, de prononcer la nullité du contrat, et de débouter la société VISIPLUS de toutes ses demandes, fins et conclusions.
La société VISIPLUS qui succombe n'est pas fondée en sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et supportera les entiers dépens.
Il convient en équité de condamner la société VISIPLUS à payer à monsieur [F] la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau,
Met à néant l'ordonnance d'injonction de payer du 11 mai 2010,
Déboute la SAS VISIPLUS de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Déboute la SAS VISIPLUS de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS VISIPLUS à payer à monsieur [F] la somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS VISIPLUS aux entiers dépens de première instance et d'appel, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,