COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
18e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 14 MARS 2013
N° 2013/250
Rôle N° 10/08515
[Q]
C/
[U] [H]
AGS - CGEA DE MARSEILLE DELEGATION REGIONALE DU SUD-EST
Grosse délivrée
le :
à :
- Me Audrey JURIENS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
- Me Pierre MONTORO, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
- Me Josette PIQUET, avocat au barreau de TOULON
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FREJUS en date du 15 Avril 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 08/97.
APPELANTS
Maître [Q] agissant ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL TCL PROVENCE, demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Audrey JURIENS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIME
Monsieur [U] [H], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Pierre MONTORO, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
PARTIE INTERVENANTE
AGS - CGEA DE MARSEILLE DELEGATION REGIONALE DU SUD-EST, demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Josette PIQUET, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 28 Février 2013 en audience publique devant la Cour composée de :
Madame Gisèle BAETSLE, Président
Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller
Madame Christine LORENZINI, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Mme Julia DELABORDE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2013.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2013.
Signé par Madame Gisèle BAETSLE, Président et Mme Julia DELABORDE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS D ES PARTIES
M. [H] a été embauché le 26/07/2006 par la SARL TCL PROVENCE en qualité de conducteur routier.
Il a saisi le 11/02/2008 le conseil de prud'hommes de Fréjus de diverses indemnités.
Par jugement du 15/04/2010, le conseil de prud'hommes de Fréjus a dit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, que M. [H] avait effectué des heures supplémentaires et des heures de nuit sans bénéficier de repos compensateur et a condamné l'EURL TCL PROVENCE à payer à M. [H] les sommes suivantes :
- 1394,23 € d'indemnité compensatrice de repos compensateurs pour heures supplémentaires
- 633 € d'indemnité compensatrice de repos compensateurs pour heures de nuit
- 169,71 € au titre du rappel de salaire sur mise à pied injustifié
- 800 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
et a ordonné la rectification des bulletins de salaire.
La SARL TCL PROVENCE et Maître [J], administrateur judiciaire, ont régulièrement fait appel de ce jugement.
L'EURL TCL PROVENCE a fait l'objet d'un redressement judiciaire en date du 01/04/2010, suivi d'un plan de cession le 2/08/2010, suivi d'une liquidation judiciaire le 21/12/2010.
Maître [Q] a été désigné en qualité de mandataire judiciaire.
Maître [Q], es qualité, reprend à l'oral ses conclusions écrites et conclut à la réformation partielle du jugement entrepris et au débouté de M. [H] en toutes ses demandes. Subsidiairement, il demande que la créance de M. [H] au titre des repos compensateurs soit fixée à la somme de 482,16 € pour les années 2006 et 2007.
M. [H], reprenant également à l'oral ses conclusions écrites sollicite la confirmation du jugement concernant ses demandes en indemnités compensatrices de repos compensateurs, le rappel de salaire sur la mise à pied et les congés payés y afférents ainsi que'en ce qui concerne l'indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et sa réformation concernant ses autres demandes et sollicite :
- 1.520 € d' indemnité compensatrice de congés payés
- 1.471 € de rappel de salaire au titre du 13ème mois
- 147 € de congés payés y afférents
- 15.000 € de dommages-intérêts pour résistance abusive
- 496 € de rappel de salaire sur prime d'assiduité
- 49,60 € de congés payés y afférents
- 368 € de rappel de salaire sur prime de non accident
- 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
outre la rectification de ses bulletins de salaire.
L'AGS conclut au principal à la réformation partielle du jugement entrepris et au débouté de M. [H] et subsidiairement demande qu'il soit jugé qu'elle ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6 à 8 du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-15 et L 3253-17 du code du travail et que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.
MOTIVATION
Sur les repos compensateurs :
M. [H] demande une indemnité compensatrice de repos compensateur relatif aux heures supplémentaires depuis l'année 2006.
L'employeur soutient que les repos n'ayant pas été réclamés dans les trois mois comme prévu par le décret 2007-13 du 4/01/2007, la demande de M. [H] ne peut aboutir.
L'accord collectif de travail du 2/08/2007 mentionne expressément en son article 1 que 'de septembre 2001 au 31/12/2006, l'entreprise a manqué à son devoir d'information sur le droit au repos compensateur de ses conducteurs. De leur côté, les conducteurs n'ont à aucun moment fait valoir leur droit à repos compensateur.
Afin de régulariser cette situation, la société TCL Provence s'engage :
- à définir pour chaque salarié la quantité de repos compensateur dû
- à régler le passif arrêté au 31/12/2006 à chaque salarié encore en poste dans l'établissement avant le 31/08/2010 suivant les modalités de l'article 5.'
Il en résulte que l'employeur ne peut opposer à la demande le défaut de demande de prise de repos compensateur en raison de son propre défaut d'information.
-sur le repos compensateur au titre des heures supplémentaires :
Les parties ont produit chacune un calcul différent du repos compensateur dû.
Le salarié prend pour base l'ensemble des heures rémunérées au cours de l'année de référence.
L'employeur a fait chiffrer par expert le repos compensateur dû au salarié, lequel chiffrage tient compte à la fois des bulletins de salaire mais également des visios qui font ressortir le temps de service du salarié sur lequel seul le repos compensateur est dû.
En conséquence, sera retenu le calcul effectué par l'employeur -non contesté au demeurant par le salarié -qui fait ressortir une créance du salarié pour les années 2006 et 2007 de 482,16 €
-sur le repos compensateur pour heures de nuit :
Les bulletins de salaire montrent que M. [H] a perçu au titre des heures de nuit une majoration de 25% conformément à l'accord du 14/11/2001 et à la circulaire d'application en date du 30/07/2002 qui autorise la substitution du repos compensateur pour heures de nuit par le versement d'une prime de 25%.
Le salarié a donc été rempli de ses droits à ce titre.
Sur la demande en remise des disques :
Il convient de rappeler que M. [H] soutient qu'il a effectué beaucoup plus d'heures supplémentaires que celles retenues par l'employeur auquel il a demandé en vain la production des disques tachygraphes.
Or, et il n'est pas contesté, que M. [H] a reçu chaque mois le relevé d'activité dit 'visio' qui est une retranscription du disque tachygraphe.
Sa demande à ce titre n'est pas justifiée non plus que celle en paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive.
.Sur la prime d'assiduité et de non accident :
Les primes de qualité, d'assiduité et de non accident ont été remplacées, dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire de 2006, par une seule prime qualité de 100 € ou 150 € par mois.
Le protocole précise que 'tout système de prime antérieur au présent protocole est caduc '.
En conséquence, M. [H] ne peut réclamer les primes d'assiduité et de non accident qui sont devenues caduques.
Sur le rappel de prime de qualité :
Les protocoles d'accord sur la négociation annuelle obligatoire des années 2006 à 2008 prévoient le versement aux conducteurs ayant plus de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise d'une prime de qualité mensuelle de 150 €, qui récompense la ponctualité, l'assiduité et les efforts accomplis pour assurer un service d'excellence à la clientèle, les respect du matériel et des moyens mis à disposition par l'entreprise et dont l'attribution va dépendre du comportement du salarié au sein de l'entreprise au cours du mois écoulé.
Cette prime, qui vient en sus du salaire de base de l'intéressé, de par son objet ne constitue pas une sanction pécuniaire prohibée, à moins de la vider de tout son sens.
Le protocole d'accord précisé qu'une commission paritaire composée d'un délégué du personnel et d'un membre de la direction se réunira chaque fin de mois pour procéder à la validation de cette prime mensuelle pour chacun des salariés bénéficiaires et qu'en cas de contestation, chaque salarié pourra être reçu par cette commission paritaire afin d'être entendu et qu'en dehors des voies de recours en usage, en la matière, la décision définitive de la commission paritaire est souveraine.
M. [H] soutient que sa prime a varié de 20 à 150 € selon les mois mais ne justifie pas avoir contesté la décision de cette commission quant à l'attribution de cette prime ni avoir usé d'une quelconque voie de recours à son encontre.
En conséquence, sa demande à ce titre n'est pas fondée.
Sur la demande de salaire au titre de la mise à pied :
Le bulletin de salaire du mois d'octobre 2007 porte la mention d'une absence non rémunérée -sans autre précision- de 19h50 soit 3 jours que M. [H] analyse comme une mise à pied.
M. [H] qui n'a pas contesté la retenue de salaire dont il a fait l'objet en son temps ne justifie pas de la sanction qu'il dit avoir été prononcée à son égard.
Me [Q] et M. [H] n'ont de surcroît pas la même explication sur le fondement de cette mise à pied, l'un parlant d'altercation avec un client et l'autre d'une imprudence.
La demande à ce titre n'est pas suffisamment justifiée pour qu'il y soit fait droit.
Sur le rappel de congés payés :
M. [H] soutient que sur la période du 26/07/2006 au 31/03/2007, il a perçu un salaire total de 18 219 € et qu'en application de la règle du dixième en matière de congés payés, il aurait dû percevoir à ce titre une somme de 1822 € et qu'actuellement il lui reste dû 1521 €.
Me [Q] rappelle justement que le calcul des congés payés doit se faire sur la période de référence et que l'analyse doit porter sur chacune des périodes ; que de plus, le salarié n'explique pas ce qu'il inclut dans la somme de 18219 € alors que si la rémunération à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de congés payés est la rémunération totale du salarié, incluant les primes et indemnités versées en complément de salaire, en sont cependant exclues les primes et gratifications versées globalement couvrant l'ensemble de l'année, période de travail et de congés, telle la prime de 13ème mois, primes exceptionnelle..., remboursement de frais professionnels, prime de panier ...
En conséquence, la demande de M. [H] n'est pas suffisamment fondée pour qu'il y soit fait droit.
Il n'y a pas lieu d'accéder à la demande de rectification des bulletins de salaire et de l'attestation ASSEDIC.
Aucun élément tiré de l'équité ou de la situation économique des parties ne justifie en la cause l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en matière prud'homale,
REFORME le jugement entrepris en ce qui concerne la demande de rappel de salaire au titre de la mise à pied et l'indemnité de repos compensateur pour heures de nuit et le montant retenu pour l'indemnité de repos compensateur pour heures supplémentaires.
et statuant à nouveau
DÉCLARE M. [H] créancier de la liquidation judiciaire de la société TCL Provence pour la somme de 482,16 € outre les congés payés afférents pour 48,21 € au titre de l'indemnité pour repos compensateur pour heures supplémentaires.
Ordonne la rectification du dernier bulletin de salaire et de l'attestation ASSEDIC conformément aux dispositions de la présente décision.
DÉBOUTE M. [H] de toutes ses autres demandes.
Donne acte à l' AGS de ce qu'elle ne sera tenue à faire des avances que dans la limite des textes et plafonds réglementairement applicables.
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
DIT que les dépens seront inscrits en frais privilégiés de la procédure collective concernant l'employeur.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT