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05/03/2013 | FRANCE | N°11/16004

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 05 mars 2013, 11/16004


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 05 MARS 2013



N°2013/209















Rôle N° 11/16004







[E] [G]





C/



Sarl ETANCHEITE 83

CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DES CONGES PAYES DU VAR (CICPV)

AIST 83



























Grosse délivrée le :

à :

- Me Jean GADET, avocat au barreau de TOULON

-

Me Robert CLAVET, avocat au barreau de TOULON

- Me Lauriane COUTELIER, avocat au barreau de TOULON

- Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 05 MARS 2013

N°2013/209

Rôle N° 11/16004

[E] [G]

C/

Sarl ETANCHEITE 83

CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DES CONGES PAYES DU VAR (CICPV)

AIST 83

Grosse délivrée le :

à :

- Me Jean GADET, avocat au barreau de TOULON

- Me Robert CLAVET, avocat au barreau de TOULON

- Me Lauriane COUTELIER, avocat au barreau de TOULON

- Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 30 Août 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/680.

APPELANT

Monsieur [E] [G], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Jean GADET, avocat au barreau de TOULON

INTIMEES

Sarl ETANCHEITE 83, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Robert CLAVET, avocat au barreau de TOULON

CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DES CONGES PAYES DU VAR (CICPV), demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Lauriane COUTELIER, avocat au barreau de TOULON

AIST 83, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 04 Décembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Christine LORENZINI, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Gisèle BAETSLE, Président

Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller

Madame Christine LORENZINI, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Julia DELABORDE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Mars 2013

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Mars 2013

Signé par Madame Christine LORENZINI, Conseiller, pour le Président empêché et Mme Julia DELABORDE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Rappel des faits et de la procédure :

Monsieur [E] [G] est appelant d'un jugement en date du 30 août 2011 rendu par le Conseil de Prud'hommes de TOULON qui l'a débouté de l'ensemble de ses demandes, confirmé qu'il n'a dirigé aucune demande envers la CICPV, débouté l'AIST et la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 de leurs demandes reconventionnelles, en laissant à Monsieur [G] la charge des entiers dépens.

L'appel a été formalisé par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 12 septembre 2011, la notification du jugement étant en date du 8 septembre 2011.

Dans ses écritures développées à la barre, Monsieur [G] demande à la Cour de :

- réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- dire et juger que L'AIST est une personne morale de droit privé dont l'objet social est de recevoir des mandats onéreux de ses adhérents afin d'accomplir les actes qui leur incombent pour satisfaire à leur obligation propre de sécurité de résultat,

- condamner l'AIST 83 à lui payer la somme de 1000€ en réparation du préjudice subi du fait de la pression exercée par le médecin du travail,

- qualifier la visite du salarié au médecin du travail du 26 février 2002 de visite de reprise,

- juger le refus du médecin du travail de statuer sur l'aptitude avec invite à rencontre son employeur pour conclure une rupture conventionnelle gravement fautive,

- condamner solidairement la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 et l'AIST 83 à payer à Monsieur [G] la somme de 50 000€ en réparation du préjudice subi, à savoir la perte d'une chance d'obtenir le prononcé de son inaptitude à tous postes en une seule visite pour le danger immédiat que constitue le harcèlement moral,

- condamner la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 à payer à Monsieur [E] [G] la somme de 1224€ d'indemnité de congés payés acquis en cours de suspension du contrat de travail pour cause de maladie, à raison de deux jours par mois,

- écarter les attestations produites par l'employeur,

- annuler les sanctions des 16 avril 2008, 26 octobre et 9 décembre 2009,

- constater que Monsieur [G] établit les griefs qu'il formule contre l'employeur ainsi que le harcèlement moral subi,

- dire et juger que la prise d'acte de la rupture produit les effets d'un licenciement nul,

- condamner la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 à lui payer en conséquence la somme de 6000€ dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi, outre 12 000€ en réparation du caractère illicite de la rupture,

- condamner l'intimée au paiement de diverses sommes au titre de l'indemnité de préavis et de congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement,

- à défaut,

dire et juger que la prise d'acte de la rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse et condamner la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement et 5000€ de dommages et intérêts,

- la condamner au paiement de la somme de 500€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et des entiers dépens.

Dans ses écritures en réponse, la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 demande à la Cour de :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- débouter Monsieur [G] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- le condamner au paiement de la somme de 2500€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Dans ses écritures en réplique, l'AIST 83 demande à la Cour de :

- se déclarer incompétente au profit du tribunal d'instance de TOULON,

en tout état de cause :

- confirmer le jugement en date du 30 août 2011 du Conseil de Prud'hommes de TOULON en ce qu'il a débouté Monsieur [G] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- le condamner au paiement de la somme de 2000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et des entiers dépens.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures oralement soutenues à l'audience.

Monsieur [G] se désiste de son appel à l'encontre de la CICPV. Celle-ci réclame la condamnation de Monsieur [G] à lui payer la somme de 500€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ayant constitué avocat.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel :

La recevabilité de l'appel n'est pas discutée. Les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d'office.

Sur la demande de la CICPV :

Monsieur [G] avait attrait à l'instance devant le Conseil de Prud'hommes de TOULON la Caisse de congés payés, la CICPV, sans diriger aucune demande contre elle, ainsi que cela résulte du jugement entrepris. Celle-ci avait cependant constitué avocat.

Monsieur [G] a formé appel du jugement en date du 30 août 2011, cet appel étant également dirigé contre la CICPV, laquelle a, de nouveau, constitué avocat et s'est présentée à la barre, la procédure étant orale. Monsieur [G] s'est désisté de cet appel, ce qu'accepte la CICPV sous réserve du paiement de ses frais par l'allocation de la somme de 500€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

L'équité commande de faire droit à cette demande.

Sur l'exception d'incompétence :

Monsieur [G] a attrait l'AIST 83 - Association Interprofessionnelle de Santé au Travail - à l'instance en exposant que celle-ci est un organisme se substituant aux obligations légales de l'employeur en ce qui concerne le service de santé prévu par la loi. Il affirme que l'AIST est responsable du fait fautif de l'un des médecins qu'elle a sous sa subordination, lequel ne lui a pas délivré de certificat d'inaptitude en une seule visite et a cherché à le convaincre d'accepter une rupture conventionnelle.

L' AIST soulève l'incompétence de la juridiction prud'homale et, subsidiairement, le débouté des demandes de Monsieur [G].

Le fait qu'en application des obligations légales, l'employeur adhère à un service de santé ne permet pas de retenir que ce service de santé se substitue à lui alors que les missions qui sont confiées à ce service sont exclusives, fixée par la loi et lui assignent un rôle neutre visant à l'amélioration des conditions de vie et de travail dans l'entreprise, avec conduite d'actions autonomes de santé. L'AIST n'a donc pas comme objet social de recevoir des mandats onéreux de ses adhérents pour accomplir les actes qui leurs incombent pour satisfaire à leur obligation propre de sécurité de résultat mais elle assure une mission de service public.

En outre, Monsieur [G] poursuit l'AIST 83 pour des fautes supposées d'un des médecins placés sous sa subordination dont il demande réparation.

Il en résulte que l'AIST 83 ne peut être mise en cause aux côtés de l'employeur et qu'elle ne saurait se substituer à lui pour l'exécution de ses obligations.

Aux termes de l''article L.1411-1 du code du travail, le conseil de prud'hommes règle les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu'ils emploient. L'AIST n'étant pas un organisme qui se substitue aux obligations légales de l'employeur, les demandes dirigées à son encontre, qui ne relèvent pas de ces dispositions, sont irrecevables.

Sur le fond :

rappel des faits :

Monsieur [E] [G] a été engagé le 8 janvier 2007 par la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 en qualité d'ouvrier d'exécution en Contrat Nouvelle Embauche.

La visite médicale d'embauche, réalisée le 15 février 2007, le déclare apte au poste d'étancheur et le place en salarié catégorie déclarée : surveillance médicale renforcée, la visite médicale périodique étant fixée au 11 octobre 2007. Le médecin traitant dont l'avis a été sollicité indique qu'il n'y a pas de contre-indication à l'emploi d'étancheur.

Monsieur [G] est en arrêt-maladie du 16 au 25 mai 2007.

Le 4 avril 2008, l'employeur le convoque dans le cadre d'une procédure pouvant aller jusqu'au licenciement mais notifie ensuite un avertissement au salarié le 16 avril 2008.

Le 25 février 2009, Monsieur [G] est victime d'un accident du travail. Cet arrêt prend fin le 13 mars 2009 et il reprend le travail. Le salarié est en arrêt-maladie sur accident du travail du 15 au 25 septembre 2009.

Le 5 octobre 2009, une nouvelle procédure est initiée par l'employeur pouvant aller jusqu'au licenciement, entretien préalable à licenciement fixé au 8 octobre 2009, reporté au 22 octobre 2009, à l'issue duquel Monsieur [G] reçoit un blâme le 26 octobre 2009, sanction contestée le 12 novembre 2009 par le salarié .

Celui-ci est en arrêt-maladie à compter du 17 novembre 2009 et saisit le Conseil de Prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail en visant l'abus de pouvoir disciplinaire, le non paiement des heures supplémentaires et graves manquements à ses obligations essentielles.

Le 23 novembre 2009, une troisième procédure de licenciement est mise en oeuvre, aboutissant, le 9 décembre 20029, à une mise à pied disciplinaire de deux jours avec privation du salaire, sanction contestée le 6 février 2010, par le salarié qui demande le bénéfice d'une visite médicale, n'entendant pas poursuivre son arrêt maladie.

Celle-ci est organisée par l'employeur et le salarié convoqué pour le 2 mars 2010. Monsieur [G] se présente cependant spontanément au médecin du travail le 26 février 2010.

L'arrêt-maladie de Monsieur [G] se poursuit, la CPAM refusant le maintien de sa prise en charge à compter du 9 août 2010.

Le 6 octobre 2010, Monsieur [G] prend acte de la rupture de son contrat de travail.

C'est dans ces conditions qu'est intervenue la décision querellée.

La convention collective applicable est celle du bâtiment (3258).

Sur la nature de la visite médicale du 26 février 2010 et ses conséquences :

Monsieur [G] a écrit à la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 le 6 février 2010 pour demander l'organisation d'une visite médicale par le médecin du travail à partir du 26 février 2010, en indiquant 'je ne demande pas un nouvel arrêt de travail '.

Monsieur [G] soutient que l'employeur a sciemment indiqué sur la lettre de convocation une date erronée de la visite médicale de reprise, 2 février 2010, afin de l'obliger à reprendre le travail le 26 février et faire pression sur lui, d'autant que la convocation de l' AIST n'était pas jointe à la lettre.

La SARL ÉTANCHÉITÉ 83 réplique qu'à la demande du salarié qui avait indiqué ne pas demander de nouvel arrêt de travail, elle a sollicité l'AIST qui a fixé un rendez-vous à Monsieur [G] pour le 2 mars 2010, ce dont l'employeur a immédiatement informé son salarié en sorte qu'elle a satisfait à ses obligations légales.

Dans ses écritures (page 9), soutenues à la barre, Monsieur [G] précise qu'il s'est présenté le 26 février 2010 à l'AIST pour ' connaître le jour de l'examen légal qui ne pouvait être celui indiqué sur la convocation de l'employeur ', reconnaissant ainsi tant l'erreur matérielle de date - qu'un simple appel téléphonique de sa part aurait suffi à réparer - que le fait que son déplacement à la médecine du travail le 26 février ne concernait en rien une visite de reprise. La visite médicale à cette date est donc, ainsi que le médecin du travail l'a noté sur la fiche de visite, une visite 'spontanée', c'est à dire d'initiative du salarié et ne dispensait pas celui-ci de se présenter le 2 mars 2010, ainsi que cela est rappelé sur cette fiche laquelle constate par ailleurs l'aptitude du salarié à son poste.

En outre, Monsieur [G] ne pouvait présumer le 6 février 2010 de l'appréciation de son état de santé que ferait son médecin traitant vingt jours plus tard, d'autant que son arrêt de travail s'est manifestement prolongé au moins jusqu'en septembre 2010, en sorte que ni le 6 ni le 26 février 2010, il ne se trouvait en situation de reprise du travail.

En tout état de cause, une visite organisée à la demande du salarié n'est pas une visite médicale de reprise mais une visite de pré-reprise ayant pour but de faciliter la recherche des mesures nécessaires ( art. R.4624-23 du Code du Travail alors applicable ). Seule, la visite médicale de reprise à l'initiative de l'employeur met terme à la suspension du contrat de travail ou peut être considérée comme la visite d'inaptitude (R 4624-21 et 22). Cette visite était fixée au 2 mars 2010 et Monsieur [G] ne conteste pas ne pas s'y être présenté ni que son arrêt-maladie était déjà prolongé à cette date, rendant de facto cette visite médicale de reprise sans objet. C'est donc à bon droit que, le 26 février 2010, le médecin du travail n'a pas délivré de certificat de reprise après maladie.

Aucun des éléments du dossier ne permet de retenir que le médecin du travail n'a pas informé Monsieur [G] de la date de visite médicale de reprise alors que celui-ci indique s'être rendu dans ces locaux afin de la connaître. Il n'est pas non plus établi que ce médecin, le Docteur [A], lui ait déclaré qu'il était obligé de retourner travailler, et ait tenté de le persuader de négocier une rupture conventionnelle, ces éléments ne ressortant que des dires du salarié.

Monsieur [G] ne saurait en conséquence faire grief d'une perte de chance d'obtenir le prononcé de son inaptitude à tous postes en une seule visite pour danger immédiat, quelqu'en soit la cause.

La demande de voir qualifier cette visite du salarié au médecin du travail le 26 février 2010 de visite de reprise sera en voie de rejet tout comme celle de dommages et intérêts pour perte de chance.

Sur les manquements à l'obligation de résultat :

Monsieur [G] invoque, dans ce cadre, le retard apporté à la visite médicale d'embauche et l'absence de visite médicale de reprise après accident du travail du 25 février 2009.

La SARL ÉTANCHÉITÉ 83 reconnaît le retard dans l'organisation de la visite médicale d'embauche mais soutient que cela n'a causé aucun préjudice au salarié, d'autant que celui-ci aurait subi un tel examen médical dans les six mois précédents . En ce qui concerne l'accident du travail du 25 février 2009, sa réponse est la même, à savoir que Monsieur [G] n'a subi aucun préjudice du fait de l'absence de visite médicale de reprise, puisqu'il avait passé une visite au cours des six mois précédents.

L'analyse de l'employeur ne saurait prospérer. En effet, il n'est pas établi qu'au cours des six mois précédent son embauche au sein de cette société, Monsieur [G] a subi une visite médicale d'aptitude au même poste. Quant à la visite médicale d'aptitude après accident du travail, elle aurait dû être organisée dans un délai de huit jours afin de déterminer l'aptitude à la reprise du travail par le salarié.

Monsieur [G], qui a demandé la communication de son entier dossier à l'AIST ne produit pas celui-ci dans son intégralité mais ne conteste pas avoir subi les visites médicales annuelles, lesquelles ont conclu à son aptitude.

Cependant le retard apporté à l'organisation de la visite d'embauche ainsi l'absence de visite médicale de reprise dans un délai de huit jours après l'accident du travail cause nécessairement un préjudice au salarié.

Il sera alloué à Monsieur [G] en réparation de ce préjudice la somme de 1000€ de dommages et intérêts.

Sur la demande d'annulation des sanctions disciplinaires :

Monsieur [G] sollicite l'annulation des sanctions prononcées à son encontre les 16 avril 2008, 26 octobre 2009 et 9 décembre 2009, ainsi que de voir écarter des débats les attestations produites par l'employeur au motif qu'elles émaneraient de personnes liées à l'entreprise, qu'elles seraient dupliquées et faites pour les besoins de la cause.

La SARL ÉTANCHÉITÉ 83 réplique que tous les avertissements reçus ont été fondés et que trois sanctions en dix-huit mois ne sauraient caractériser un abus de droit disciplinaire.

Le fait que les attestations produites émanent de membres de la société ou de son personnel ne saurait en soit conduire à les écarter sauf à dénier à l'employeur le droit légitime de rapporter la preuve de faits se déroulant à l'intérieur de l'entreprise.

En l'espèce, les attestations produites par la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 ont été établies dans les formes légales, versées aux débats et soumises au contradictoires, en sorte qu'elles sont recevables et ne seront pas écartées des débats.

Il résulte des attestations de Messieurs [F], [B] et [P] qu'en avril 2008, Monsieur [G] a fait montre de violence verbale envers sa supérieure hiérarchique en lui disant qu'il n'avait pas 'd'ordre à recevoir d'une fille 'et qu'elle' [ aille] se faire voir'. Ces propos justifient parfaitement l'avertissement qui a été donné au salarié le 16 avril 2008.

Quant au blâme du 26 octobre 2009, il se fonde sur un renouvellement de propos grossiers du salarié envers son supérieur hiérarchique, Monsieur [C], celui-ci attestant qu'il a tenu envers lui le même genre de propos en octobre 2009, qu'il a violemment claqué la porte du bureau, attestation corroborée par celle de Madame [D], ainsi que sur le fait de s'être livré à des occupations de loisir sur le lieu de travail avec l'ordinateur de la société, Madame [Z] attestant l'avoir vu occupé à des jeux de cartes sur cet ordinateur au lieu de préparer le compte rendu de sa journée de chantier à l'aide de cet outil informatique.

La mise à pied disciplinaire (qui n'a pas connu d'effet en raison de l'arrêt-maladie de Monsieur [G]) en date du 9 décembre 2009 a été prononcée au regard des propos tenus par le salarié dans un courrier adressé à l'employeur le 12 novembre 2009. Cette sanction est, au regard des incidents antérieurs, proportionnée aux faits dans la mesure ou, dans sa lettre, Monsieur [G] accuse l'employeur de mauvaise foi et de malhonnêteté dans des termes cavaliers et excessifs, remettant en cause son pouvoir de direction ; il y a lieu d'observer que cette lettre avait été précédée d'une autre en date du 12 octobre 2009, non sanctionnée par l'employeur, mais dont les termes étaient déjà excessifs tant sur la forme que sur le fond, en sorte qu'il était légitime pour l'employeur de désirer mettre un terme à cette escalade.

Il en résulte que les sanctions prononcées ont été justifiées, nonobstant les dénégations du salarié concerné.

La demande d'annulation de ces sanctions sera en voie de rejet.

Sur la demande de requalification de la prise d'acte de la rupture en licenciement nul :

Monsieur [G] a pris acte de la rupture par lettre volontairement non datée, aux torts de l'employeur, sans préciser les torts en cause. Cette lettre a été présentée à l'employeur le 9 octobre 2010, sa date d'expédition étant le 6 octobre 2010.

Il fait état désormais de quatre séries de griefs à l'encontre de l'employeur :

- l'abus de pouvoir disciplinaire,

- la contestation du bien fondé de la suspension du contrat de travail pour cause de maladie,

- la réticence dolosive de l'employeur à délivrer les documents permettant au salarié de percevoir ses indemnités journalières de la Sécurité Sociale,

- la volonté de l'employeur d'échapper au prononcé de l'inaptitude pour mise en danger de la santé du salarié et la demande d'intervention du médecin du travail afin qu'il le convainque de mettre fin au contrat de travail par une rupture conventionnelle alors même qu'une action en résiliation judiciaire était pendante devant le Conseil de Prud'hommes.

Les sanctions disciplinaires n'ayant pas été annulées et étant fondées sur des comportements d'insubordination avérée de Monsieur [G], le grief d'abus de pouvoir disciplinaire n'est pas opérant.

En ce qui concerne la contestation par l'employeur du bien fondé de la suspension du contrat de travail pour cause de maladie qui serait, selon l'appelant, établie par la demande de contrôle médical ainsi que par une lettre de l'employeur félicitant la CPAM de partager son avis et de refuser le paiement d'indemnités journalières, il y a lieu de constater que seule figure au dossier la lettre de contestation de Monsieur [G] en date du 6 octobre 2010 (pièce 34), contestant le fait que son arrêt-maladie n'est plus justifié à compter du 9 août 2010. La circonstance que la CPAM ait informé l'employeur de sa décision, par lettre du 16 juillet 2010 (pièce 20 de l'employeur) n'est que la conséquence de son devoir d'information et ne saurait permettre de retenir que le contrôle de cet organisme ait été suscité par la SARL ÉTANCHÉITÉ 83. Enfin, c'est sans doute par erreur que Monsieur [G] affirme que le caractère professionnel de la maladie a été reconnu le 20 octobre 2010, la pièce 41 visée n'étant que la convocation à expertise, cette convocation étant également produite en pièce 37. Ce grief n'est donc pas opérant. En tout état de cause, il ne produit aucun élément de nature à étayer le grief formulé, qui sera rejeté.

Monsieur [G] invoque également la réticence dolosive de la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 à délivrer les documents lui permettant de percevoir ses indemnités journalières de la Sécurité Sociale. Il se fonde sur la lettre de la CPAM du 27 janvier 2010, qui lui réclame une attestation patronale, des indemnités journalières de la Sécurité Sociale lui ayant cependant été versées. La SARL ÉTANCHÉITÉ 83, dans sa lettre du 12 février 2010, affirme que cette attestation lui a été retournée dans des délais normaux. En tout état de cause, Monsieur [G] ne soutient pas plus qu'il ne démontre avoir subi une interruption dans le versement de ses indemnités ou d'une demande de remboursement de trop-perçu du fait d'une inertie fautive de l'employeur ou d'une refus délibéré de la part de ce dernier de communiquer les documents sociaux nécessaires.

Quant au dernier grief, Monsieur [G] ne produit aucun élément de nature à laisser présumer l'existence d'une collusion entre l'employeur et le médecin du travail afin de lui faire accepter une rupture conventionnelle, laquelle n'a au demeurant pas été proposée au salarié ; la lettre du Docteur [A] en date du 26 février 2010, remise au salarié, ne fait manifestement que reprendre les termes d'une discussion entre ce médecin et Monsieur [G], étant observé que le Docteur [A] avait déjà suivi ce salarié dès la visite médicale d'embauche, dont il avait noté la tardiveté et au cours de laquelle il avait pris des mesures de garantie de la santé au travail du salarié (pièces 3 et 42 appelant). Le fait que, dans sa lettre du 12 février 2012 informant le salarié de la date de sa convocation médicale, l'employeur indique que ' dès que le médecin du travail aura confirmé votre aptitude au poste, vous reprendrez le travail ' ne peut caractériser une telle collusion, cette phrase ne venant que rappeler les dispositions légales, à savoir que seule la visite médicale de reprise met fin à la suspension du contrat de travail et que le salarié ne peut reprendre le travail tant que le médecin du travail ne s'est pas prononcé sur son aptitude. L'utilisation des termes ' aura confirmé' ne fait manifestement que référence à la lettre du salarié dans laquelle il indique ne pas désirer prolonger son arrêt-maladie mais vouloir rencontrer le médecin du travail sans jamais faire référence à son inaptitude ou à son désir de ne plus travailler, l'employeur n'étant pas tenu d'interpréter les termes d'un courrier. Ce grief n'est donc pas opérant.

Il convient de rappeler que les feuilles d'arrêt-maladie adressées à l'employeur respectent le secret médical et ne précisent jamais le motif de l'arrêt, sinon pour préciser - s'il y a lieu - qu'il s'agit d'un accident du travail. En conséquence, la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 n'avait pas connaissance du motif des arrêts-maladie de son salarié.

Il résulte de l'analyse des faits présentés par le salarié, pris dans leur ensemble, que ceux-ci ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Monsieur [G] sera, en conséquence, débouté de sa demande de voir la prise d'acte de la rupture du contrat de travail requalifiée en licenciement nul ainsi que de ses demandes tendant à voir l'employeur condamné à lui payer diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ainsi qu'en réparation de la rupture du contrat de travail.

Sur la demande de requalification de la prise d'acte de la rupture en licenciement sans cause réelle ni sérieuse pour défaut d'organisation de la visite de reprise à la suite de l'accident du travail :

Il n'est pas contesté que le salarié a repris le travail à l'issue d'un arrêt de travail supérieur à huit jours dû à un accident du travail, soit du 26 février au 13 mars 2009, et que l'employeur n'a pas organisé une visite médicale de reprise à l'issue de cet arrêt.

L'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit en assurer l'effectivité ; il lui incombe en conséquence de prendre l'initiative de la visite médicale de reprise dès que le salarié qui remplit les conditions pour en bénéficier se tient à sa disposition pour qu'il y soit procédé.

La circonstance que Monsieur [G] a passé une visite médicale périodique dix jours avant l'accident du travail dont il a été victime et que la visite périodique suivante l'ait considérée comme toujours apte à son poste ne peut suppléer à la visite médicale de reprise qui a pour objet de déterminer l'aptitude à la reprise du travail par le salarié.

Cette carence à organiser une visite médicale de reprise dans le délai de huit jours constitue de la part de la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 un manquement suffisamment grave pour justifier la prise d'acte par Monsieur [G] de la rupture de son contrat de travail.

Cette prise d'acte de la rupture sera, en conséquence, requalifiée en licenciement sans cause réelle ni sérieuse à compter du 6 octobre 2010.

Sur les conséquences de la requalification :

Monsieur [G], qui avait une ancienneté supérieure à deux ans au sens de la convention collective applicable, a droit au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, à savoir deux mois de salaire, soit la somme de 3109.24€, outre indemnité de congés payés afférents, soit la somme de 310.92€.

Compte tenu des dispositions de la convention collective, il a également droit à une indemnité de licenciement égale à 1/10eme de mois de salaire par année de présence, soit 1420.06€.

Il sera également fait droit à la demande de Monsieur [G] de se voir allouer la somme de 5000€ de dommages et intérêts.

Sur les congés payés acquis en cours de maladie :

Monsieur [G] soutient que l'employeur lui doit 1224€ pour les congés payés acquis en cours de suspension du contrat de travail pour cause de maladie, à raison de deux jours par mois.

La SARL ÉTANCHÉITÉ 83 considère que Monsieur [G] ne remplit pas les conditions légales pour l'ouverture des droits, à savoir dix jours de travail effectif dans la période de référence.

L'argumentation de l'employeur ne saurait prospérer, compte tenu de la jurisprudence de la Cour de Justice Européenne.

Au vu des certificats de la Caisse de congés payés, il y a lieu de faire droit à la demande de Monsieur [G] et de condamner la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 à lui payer la somme de 1224€ bruts au titre des congés payés acquis pendant la période de maladie.

Sur les demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens :

L'équité commande de laisser à Monsieur [G] et à la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 la charge de leurs propres frais et dépens.

Par des considérations tirées de l'équité, Monsieur [G] devra verser à l'AIST 83 la somme de 1000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière prud'homale, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au Greffe, le cinq mars deux mil treize,

REÇOIT l'appel régulier en la forme,

DONNE ACTE à Monsieur [G] de son désistement d'appel à l'encontre de la CICPV,

CONSTATE que l'AIST 83 n'a donc pas comme objet social de recevoir des mandats onéreux de ses adhérents pour accomplir les actes qui leurs incombent pour satisfaire à leur obligation propre de sécurité de résultat,

DÉCLARE irrecevables les demandes de Monsieur [G] à l'encontre de l'ASSOCIATION INTERPROFESSIONNELLE DE SANTÉ AU TRAVAIL - AIST 83,

CONFIRME partiellement le jugement en date du 30 août 2011 du Conseil de Prud'hommes de TOULON en ce qu'il a refusé d'annuler les sanctions et de déclarer nul le licenciement,

L'INFIRME pour le surplus,

Et statuant sur le tout pour plus de clarté,

DIT que la visite médicale en date du 26 février 2010 ne constitue pas une visite de reprise,

DÉBOUTE Monsieur [G] de sa demande de condamnation de l'employeur pour perte de chance,

DIT le droit à congés payés pendant la période de maladie acquis à raison de deux jours par mois,

CONDAMNE la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 à payer de ce chef à Monsieur [E] [G] la somme de MILLE DEUX CENT VINGT QUATRE EUROS (1224€) bruts,

CONSTATE que l'employeur a organisé avec retard la visite médicale d'embauche et n'a pas organisé de visite médicale de reprise à l'issue de l'accident du travail du 26 février 2009,

CONDAMNE la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 à payer à Monsieur [G], en réparation du préjudice subi de ce fait, la somme de MILLE EUROS (1000€) de dommages et intérêts,

DIT n'y avoir lieu à écarter les attestations produites par l'employeur,

DÉBOUTE Monsieur [G] de sa demande d'annulation des sanctions disciplinaires des 16 avril 2008, 26 octobre 2009 et 9 décembre 2012,

DÉBOUTE Monsieur [G] de ses demandes relatives à un harcèlement moral,

DIT que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail ne constitue pas un licenciement nul,

DÉBOUTE Monsieur [G] de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral et pour caractère illicite de la rupture,

DIT que la prise d'acte de la rupture par Monsieur [G] de la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse à compter du 6 octobre 2010,

CONDAMNE la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 à payer à Monsieur [G] les sommes suivantes:

- TROIS MILLE CENT NEUF EUROS et VINGT-QUATRE CENTS (3109.24€) bruts d'indemnité compensatrice de préavis,

- TROIS CENT DIX EUROS et QUATRE-VINGT-DOUZE CENTS (310.92€) bruts au titre des congés payés sur préavis,

- MILLE QUATRE CENT VINGT EUROS et SIX CENTS (1420.06€) d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- CINQ MILLE EUROS (5000€) de dommages et intérêts,

DÉBOUTE Monsieur [G] du surplus de ses demandes,

CONDAMNE Monsieur [G] à payer sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel :

- CINQ CENTS EUROS (500€) à la Caisse Interprofessionnelle des Congés Payés du Var,

- MILLE EUROS (1000€) à l'ASSOCIATION INTERPROFESSIONNELLE DE SANTÉ AU TRAVAIL - AIST 83,

LAISSE à Monsieur [G] et à la SARL ÉTANCHÉITÉ 83 la charge de leurs propres frais et dépens.

LE GREFFIER.LE CONSEILLER

POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 11/16004
Date de la décision : 05/03/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°11/16004 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-03-05;11.16004 ?
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