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19/02/2013 | FRANCE | N°11/06379

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 19 février 2013, 11/06379


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 19 FÉVRIER 2013



N°2013/164















Rôle N° 11/06379

(Jonction avec le n°11/06557)







SARL VARCENCIEL BEAUTE SUD





C/



[O] [D]









































Grosse délivrée le :

à :

- Me Jean-Martin GUISIANO, av

ocat au barreau de TOULON



- Me Christelle ZINTHALER, avocat au barreau de TOULON



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 28 Février 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/134.





APPELANTE



...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 19 FÉVRIER 2013

N°2013/164

Rôle N° 11/06379

(Jonction avec le n°11/06557)

SARL VARCENCIEL BEAUTE SUD

C/

[O] [D]

Grosse délivrée le :

à :

- Me Jean-Martin GUISIANO, avocat au barreau de TOULON

- Me Christelle ZINTHALER, avocat au barreau de TOULON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 28 Février 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/134.

APPELANTE

SARL VARCENCIEL BEAUTE SUD, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Jean-Martin GUISIANO, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

Madame [O] [D], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assistée de Me Christelle ZINTHALER, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 20 Novembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Christine LORENZINI, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Gisèle BAETSLE, Président

Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller

Madame Christine LORENZINI, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Julia DELABORDE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Février 2013

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Février 2013

Signé par Madame Christine LORENZINI, Conseiller, pour le Président empêché et Mme Julia DELABORDE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Rappel des faits et de la procédure :

La SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD est appelante d'un jugement en date du 28 février 2011 rendu par le Conseil de Prud'hommes de TOULON qui a :

- déclaré la prise d'acte de la rupture formée par Madame [O] [D] à l'encontre de l'employeur et aux torts exclusifs de celui-ci justifiée et dit qu'elle produirait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD à payer à Madame [D] diverses sommes en conséquence de cette requalification,

- ordonné la remise des documents sociaux rectifiés sous astreinte de 50€ par jour de retard,

- condamné la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD aux dépens.

L'appel a été formalisé par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 4 avril 2011, la notification du jugement étant en date du 8 mars 2011.

Dans ses écritures développées à la barre, la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD demande à la Cour de :

- réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- dire et juger que la prise d'acte de la rupture de Madame [D] est une démission,

- la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- ordonner le remboursement de la somme de 14 220€ versée indûment,

- condamner Madame [D] au paiement de la somme de 158000€ au titre de l'indemnité de préavis non effectué,

- la condamner au paiement de la somme de 2500€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et des entiers dépens.

Dans ses écritures en réponse, Madame [D] demande à la Cour de :

- confirmer le jugement déféré sauf en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts qu'elle demande à voir porter à 9480€ et de l'indemnité compensatrice de congés payés au titre de laquelle elle sollicite 2238.33€,

- condamner la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD à lui payer la somme de 2500€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile outre les entiers dépens.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures oralement soutenues à l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il convient de prononcer la jonction des procédures n° 11/06379 et n° 11/066557 sous le n°11/06379.

Sur le fond :

rappel des faits :

Madame [O] [D] a été engagée le 18 juin 2001 en qualité d'esthéticienne en contrat à durée indéterminée.

Elle a été en arrêt-maladie du 8 août au 13 septembre 2008.

N'ayant pas ensuite repris le travail pour des motifs qui sont dans le débat, elle a écrit à l'employeur le 8 janvier 2010 pour prendre acte de la rupture aux torts exclusifs de ce dernier avec effet rétroactif au 4 septembre 2009.

Le 10 février 2010, Madame [D] saisissait le Conseil de Prud'hommes de TOULON de diverses demandes.

C'est dans ces conditions qu'est intervenue la décision querellée.

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission. L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixant pas les limites du litige, le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

Pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les faits invoqués par le salarié doivent non seulement être établis, mais constituer des manquements d'une gravité suffisante.

En l'espèce, Madame [D] soutient qu'à l'issue de son arrêt-maladie , l'employeur n'a pas organisé la visite médicale de reprise, lui a interdit de reprendre son poste, ne lui a versé aucun salaire sans pour autant la licencier. Des négociations sont intervenues à partir de janvier 2009 en vue d'une prise d'acte de la rupture qu'elle ne voyait finalisée qu'en juillet 2009 par la réception d'une convention de rupture et d'un chèque transmis par le conseil de l'époque de la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD. Elle signait finalement une convention le 4 septembre 2009, laquelle était entachée d'irrégularités et n'avait pas été soumise à la DDTEFP ; à cette convention était jointe la copie d'un chèque. Elle a renvoyé la convention et attendu le chèque, en vain, les originaux de la convention n'ayant pas été transmis à la DDTEFP ; elle a donc saisi le Conseil de Prud'hommes aux fins d'obtention de l'indemnité conventionnelle de rupture et des documents sociaux, demande dont elle a été déboutée, le contrat de travail subsistant à défaut d'homologation de la convention de rupture par la DDTE. Elle a donc pris acte de la rupture aux torts de l'employeur.

La SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD réplique que Madame [D] n'a pas repris son poste à l'issue de son arrêt-maladie, sans justification et sans en aviser son employeur. Une tentative de rupture conventionnelle a été tentée en septembre 2009, devant un avocat choisi en commun ; en raison de la négligence de ce conseil, dont l'appelante principale indique avoir mis en oeuvre la responsabilité, un litige est né entre les parties et a donné lieu à condamnation de l'employeur.

Il est constant que Madame [D] a été en arrêt-maladie du 8 août au 13 septembre 2008 et qu'elle n'a pas repris le travail ensuite. Si Madame [D] soutient que c'est en raison de l'attitude de son l'employeur, elle est défaillante à en rapporter la preuve. En effet, la seule attestation de Madame [T] ne saurait établir que l'employeur a interdit à sa salariée de reprendre le travail, cette personne attestant avoir déposé Madame [D] à l'institut de beauté et que celle-ci lui a demandé de revenir la chercher quinze minutes plus tard, affirmant que l'employeur ne voulait pas qu'elle reste à son poste ; l'attestation ne fait donc que reproduire les dires de la salariée.

Dans le même temps, l'employeur produit la plainte qu'il a déposé auprès de la gendarmerie, le 30 août 2008, faisant état des propos du compagnon de Madame [D], affirmant qu'elle ne reprendrait pas le travail le lundi suivant et qu'elle ne voulait plus travailler pour eux.

Les deux parties se sont ensuite rapprochées courant 2009 aux fins de rupture conventionnelle du contrat de travail mais celle-ci n'a pu aboutir, l'employeur mettant désormais en cause la responsabilité du conseil en charge son élaboration et Madame [D] ne contestant pas l'inaction de celui-ci ; en tout état de cause, le non aboutissement d'une procédure de rupture conventionnelle ne saurait constituer une faute de l'employeur de nature à justifier une prise d'acte de la rupture à ses torts.

Faute de volonté manifeste de reprise effective du travail par Madame [D], la visite médicale de reprise n'a pas pu être organisée. Madame [D] étant défaillante à démontrer que l'absence de reprise du travail est imputable à l'employeur, cette absence de visite médicale ne peut pas non plus lui être imputable.

Quant au fait que l'employeur aurait écrit au Trésor Public pour dire que Madame [D] avait abandonné son poste, malgré l'existence de pourparlers pour une rupture conventionnelle, il y a lieu de relever que le gérant de la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD a répondu à un avis à tiers détenteur émis le 24 novembre 2009 par le Trésor Public, ce qu'il devait faire s'il ne voulait pas voir sa responsabilité engagée, ainsi que cela résulte des termes mêmes de cet avis.

Il en est de même pour sa réponse à un autre avis de même nature en date du 7 janvier 2010.

Compte tenu de ces éléments, la Cour retient que Madame [D] ne rapporte pas la preuve des faits qu'elle impute à la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD et que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la prise d'acte de la rupture devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence, la prise d'acte de la rupture faite par Madame [D] produit les effets d'une démission au 11 janvier 2010, date de notification de cette prise d'acte.

La rupture du contrat de travail étant intervenue à la suite d'une prise d'acte produisant les effets d'une démission, aucune violation des règles de la procédure de licenciement ne peut être imputée à l'employeur. En conséquence, la salariée ne peut prétendre au versement d'une indemnité de préavis ou d'une indemnité conventionnelle de licenciement. Elle n'est pas non plus fondée à se voir allouer de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ou sérieuse.

Quant à la demande de rappel de salaires, elle ne peut prospérer en raison des précédents développements car s'il est constant que le contrat de travail a subsisté, pour autant aucun élément du dossier ne permet de retenir que si Madame [D] n'a pas travaillé, c'est parce que la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD ne lui a pas fourni de travail pendant la période considérée alors que l'employeur n'est jamais dans l'obligation de licencier un salarié défaillant.

De même, l'employeur est en droit de procéder à une retenue sur salaire proportionnelle à la durée de l'absence de la salariée, cette retenue étant la contre-partie de la non-exécution de son travail par celle-ci au cours de la même période.

La décision entreprise sera donc infirmée en toutes ses dispositions et Madame [D] déboutée de l'intégralité de ses demandes.

La restitution des sommes versées au salarié au titre de l'exécution provisoire n'étant que la conséquence de l'infirmation du jugement déféré et le présent arrêt ouvrant droit à cette restitution, il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande présentée par l'intimée.

En ce qui concerne la demande présentée par la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD de voir Madame [D] condamnée à lui verser la somme de 1580€ au titre de l'indemnité pour préavis non effectué, il y a lieu de retenir que l'obligation de respecter le préavis s'impose aux parties au contrat ; il s'en déduit que lorsqu'il n'en a pas été dispensé, le salarié qui n'a pas exécuté son préavis doit à l'employeur une indemnité compensatrice.

Compte tenu de son caractère forfaitaire indépendant du préjudice subi, cette indemnité de préavis non effectué sera allouée à l'employeur.

Sur les demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens :

L'équité commande de faire droit à la demande de la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Madame [D] sera déboutée de sa demande de ce chef et supportera les entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière prud'homale, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au Greffe, le dix-neuf février deux mil treize,

REÇOIT l'appel régulier en la forme,

ORDONNE la jonction des affaires enrôlées sous les n° 11/06379 et n° 11/066557 sous le n°11/06379,

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement en date du 28 février 2011 du Conseil de Prud'hommes de TOULON,

Et statuant de nouveau,

DIT que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par Madame [O] [D] produit les effets d'une démission au 11 janvier 2010,

DÉBOUTE Madame [D] de l'ensemble de ses demandes,

LA CONDAMNE à verser à la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD la somme de MILLE CINQ CENT QUATRE-VINGTS EUROS (1580€) au titre de l'indemnité compensatrice pour préavis non effectué,

LA CONDAMNE aux entiers dépens de l'instance,

LA DÉBOUTE de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

LA CONDAMNE à payer à la SARL VARCENCIEL BEAUTÉ SUD la somme de DEUX MILLE CINQ CENTS EUROS (2500€) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

LE GREFFIER.LE CONSEILLER

POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 11/06379
Date de la décision : 19/02/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°11/06379 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-02-19;11.06379 ?
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