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05/02/2013 | FRANCE | N°12/09350

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 05 février 2013, 12/09350


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 05 FEVRIER 2013



N° 2013/













Rôle N° 12/09350





[A] [T]





C/



Société FONCIA MASSENA

































Grosse délivrée

le :

à :

Me Julien SALOMON, avocat au barreau de NICE



Me Antoine ANDREI, avocat au barreau de NICE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 26 Avril 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 11/633.







APPELANT



Monsieur [A] [T], demeurant [Adresse 4]



comparant en personne, as...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 05 FEVRIER 2013

N° 2013/

Rôle N° 12/09350

[A] [T]

C/

Société FONCIA MASSENA

Grosse délivrée

le :

à :

Me Julien SALOMON, avocat au barreau de NICE

Me Antoine ANDREI, avocat au barreau de NICE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 26 Avril 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 11/633.

APPELANT

Monsieur [A] [T], demeurant [Adresse 4]

comparant en personne, assisté de Me Julien SALOMON, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

Société FONCIA MASSENA, prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Antoine ANDREI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 12 Décembre 2012 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Yves ROUSSEL, Président

Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller

Madame Corinne HERMEREL, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Février 2013.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Février 2013.

Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [T] a été engagé au service de la société FONCIA MASSENA selon contrat à durée indéterminée daté du 8 avril 2002, à effet du 1er avril 2002, en qualité de gestionnaire de copropriété (agent de maîtrise, niveau 5, coefficient 315) et son salaire de 1.524,49 € brut (+ 13ème mois).

Le 1er octobre 2006, il a été promu directeur de copropriété (cadre, niveau 8, coefficient 440). Sa rémunération globale brute mensuelle a alors été fixée à 2.615,38 € (+ 13ème mois).

La relation contractuelle était soumise aux dispositions de la convention collective nationale de l'immobilier du 9 septembre 1988 (IDCC 1527).

Monsieur [T] a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 15 mars 2011 par une lettre visant notamment « les dénigrements personnels de la part de Monsieur [L], ancien directeur général ('), le non-respect des prérogatives afférentes à mon poste de directeur de service copropriété ('), les modifications de mes conditions de travail et un état de santé très lourdement affecté par le stress de mes conditions de travail ('), une charge de travail anormalement élevée('), des heures travaillées hebdomadaires effectuées oscillant entre 50 à 60 h voire plus »  et a saisi le conseil de prud'hommes de différentes demandes, lequel, statuant par jugement du 26 avril 2012, a rejeté ces dernières et l'a condamné à payer à la société FONCIA la somme de 500 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, Monsieur [T] indique que, selon avenant du 7 mai 2008, pour masquer un complément de salaire, il a été décidé par FONCIA que ses frais de déplacement seraient remboursés sur présentation de factures, dans la limite de 625 € par trimestre ; que ce montant n'a jamais varié ; qu'il s'agit là d'une pratique habituelle vis-à-vis des cadres travaillant à l'agence FONCIA MASSENA ; qu'en réalité, au moment du rachat du groupe FONCIA par la BPCA en 2007, il a été tenté de régulariser la situation en faisant établir par les salariés des listes de déplacements fictifs; que naturellement, la société FONCIA est dans l'impossibilité de produire les relevés de ses déplacements depuis 2008 ; qu'en sa qualité de directeur de service, il a largement contribué à la conclusion de mandats avec de nouvelles copropriétés, ceci en dépit d'un important «turnover » important des salariés , le caractère très « stressant » de l'ambiance de travail ayant conduit à une démission collective de salariés en 2008 ; qu'en dépit de ce que la société FONCIA MASSENA a tenté de le convaincre de rester, il a préféré prendre acte de la rupture du contrat de travail , après quoi, avec son ancien collègue de travail [J], il a acquis des parts d'une société dénommée AGENCE DU PORT, exerçant l'activité de syndic ; que la société FONCIA a introduit une action en concurrence déloyale à l'encontre de la SNC AGENCE DU PORT devant le tribunal de commerce de NICE , mais qu'elle ne démontre pas qu'il a commis le moindre acte positif de concurrence déloyale.

Il demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de dire que son salaire mensuel à prendre en considération est de 7027,36 euros ou, subsidiairement, de 6647 € ou de 4867,88 euros, de constater qu'il a accompli des heures supplémentaires sans être payé, de condamner la société FONCIA MASSENA à lui verser la somme de 153.553,86 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, ou à titre subsidiaire celle de 125.493,75 euros, sous forme de provision ou à titre définitif, avant dire droit de condamner la société FONCIA MASSENA à produire l'ensemble des procès-verbaux d'assemblée générale et autres comptes rendus de conseils syndicaux des copropriétés dont il assumait la gestion de 2006 à 2011,ainsi que le contrat de syndic conclu avec la copropriété AZUR MERCANTOUR, et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard courant 8 jours après signification de l'arrêt à intervenir, de constater que la société FONCIA MASSENA s'est abstenue de déclarer l'intégralité des heures de travail accomplies par lui et que cette abstention est intentionnelle , de la condamner à lui verser la somme de 42.164,16 euros , voire subsidiairement celle de 39.882 euros ou celle de 29.207,28 euros , à titre d'indemnité pour travail dissimulé, de la condamner à lui verser la somme de 80 413,10 euros, ou subsidiairement de 65 172,35 euros, à titre d'indemnité correspondant aux droits acquis en matière de contrepartie obligatoire en repos, de la condamner à lui verser la somme de 7027,36 euros ou, subsidiairement, celle de 6647 € ou celle de 4867,88 euros, à titre d'indemnité pour défaut d'information fourni par l'employeur quant à la contrepartie obligatoire en repos, de la condamner à lui payer la somme de 7027,36 euros, ou subsidiairement celle de 6647 € ou celle de 4867,88 euros, à titre d'indemnité pour défaut de visite médicale d'embauche, de constater l'existence de différents manquements de l'employeur concernant le défaut de paiement des nombreuses heures supplémentaires accomplies, le défaut de déclaration par l'employeur de l'ensemble des heures de travail effectuées et même de l'obligation dans laquelle il a été placé de solliciter le paiement de prétendues indemnités kilométriques en lieu et place de certaines de ses heures de travail, l'absence de visite médicale d'embauche, le dénigrement personnel de la part de son supérieur hiérarchique, l'absence de respect par son employeur de ses prérogatives contractuelles, la modification de ses conditions de travail et de sa rémunération, la charge de travail anormalement élevée, de juger que ceux-ci sont d'une gravité suffisante pour justifier la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié, que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec toutes conséquences de droit, en conséquence de condamner la société FONCIA MASSENA à lui verser à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de 84.328,32 euros , voire subsidiairement 79.764 euros ou 58.414,56 euros , à titre d'indemnité de licenciement la somme de 15.811,56 euros, voire subsidiairement 14.978,25 euros ou 10.732,31 euros , à titre d'indemnité de préavis la somme de 10.541,04 euros, voire subsidiairement 9.985,50 euros ou 7.301,82 euros, à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur l'indemnité de préavis et les heures supplémentaires la somme de 16.409,49 euros, voire subsidiairement 16.353,97 euros ou 16.085,57 euros, à titre du solde du 13e mois la somme de 1.753,02 euros, voire subsidiairement 1.583,28 euros ou 550 euros , à titre de dommages-intérêts eu égard aux conditions de la rupture la somme de 40.000 euros, d'enjoindre à la société FONCIA MASSENA de lui fournir les documents sociaux (certificat de travail, reçu pour solde de tout compte, attestation Pole emploi, bulletins de paye) rectifiés, sous astreinte de 100 € par jour de retard courant 90 jours durant à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de dire que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal à compter du 13 avril 2011, avec capitalisation des intérêts, de condamner la société FONCIA MASSENA à lui verser la somme de 4.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens de l'instance, de dire que, dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées aux termes du jugement à intervenir, l'exécution forcée devra être réalisée par voie d'huissier de Justice, le montant des sommes retenues par cet huissier sur le fondement de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 relatif à la tarification des huissiers, devant être supporté par la débitrice en sus de toute autre condamnation.

La société FONCIA indique que Monsieur [A] [T] n'a jamais fait part de la moindre difficulté et qu'au regard de l'absence de preuve de ses prétentions, le conseil des prud'hommes a justement rejeté l'ensemble de ses demandes.

Elle demande à la cour de dire qu'elle n'a commis aucun manquement, de constater aussi que Monsieur [T] a développé déloyalement une activité concurrente en reprenant l'AGENCE DU PORT, de juger que la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission, de rejeter l'ensemble de ses demandes, de constater qu'en vertu de son statut de cadre il était libre d'organiser son temps de travail comme bon lui semblait, qu'il n'a jamais adressé de demande en paiement d'heures supplémentaires et de dire que sa demande de ce chef n'est pas fondée, de le débouter également de sa demande en paiement de l'indemnité pour travail dissimulé et au titre du repos compensateur, de rejeter sa demande concernant le défaut de visite médicale d'embauche et de le condamner aux dépens, ainsi qu'à lui payer la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En cours de délibéré, la société FONCIA MASSENA a communiqué à la cour le jugement en date du 17 décembre 2012 par lequel le tribunal de commerce de Nice a condamné la SNC AGENCE DU PORT à payer des dommages-intérêts à la société FONCIA MASSENA, pour concurrence déloyale, notamment.

Cette pièce, non sollicitée, ne sera pas prise en compte.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, il est renvoyé au jugement entrepris, aux pièces et aux conclusions déposées et oralement reprises.

SUR CE, LA COUR,

1.M. [T] demande le paiement d'heures supplémentaires. Il fait valoir qu'en travaillant de 7h du matin à 19h, il accomplissait 3 heures supplémentaires quotidiennes, outre les heures supplémentaires consacrées à des assemblées générales ou des réunions de conseils syndicaux organisés en soirée ou le samedi matin ; qu'il appartient à la Société FONCIA MASSENA de produire l'ensemble des procès-verbaux d'assemblée générale et autres comptes rendus de conseils syndicaux auxquels il a assisté de 2006 à 2011, ainsi que le contrat de syndic conclu avec la copropriété AZUR MERCANTOUR ;que le PV de l'assemblée générale de la copropriété AZUR MERCANTOUR du samedi 15 décembre 2007 à 14 heures (pièce n° 32) est la preuve de sa présence, puisqu'il a signé ce document ; que sa demande en paiement d'heures supplémentaires à hauteur de 153.553,86 euros se décompose comme suit (taux horaire majoré pour les heures supplémentaires : 36,29 € (x 1,25 pour les 8 premières heures) ou 43,55 € (x 1,5 au delà) ; nombre d'heures supplémentaires revendiquées par semaine : 15 heures (3h/jourx 5 jours) soit 8 au taux majoré de 25 % et 7 au taux majoré de 50 % ; nombre d'heures supplémentaires revendiquées au taux majoré de 25% 2.064 heures (8h x 4,3 semaines x 60 mois) soit 74.902,56 € ; nombre d'heures supplémentaires revendiquées au taux majoré de 50 % : 1.806 heures (7h x 4,3 semaines x 60 mois) soit 78.651,30 € ; 74.902,56 + 78.651,30 = 153.553,86 ).

Il fait valoir que même en prenant en considération 5 semaines de congés payés et 12 journées de RTT par an, le nombre d'heures supplémentaires accomplies justifie un rappel de 125.493,75 €.

2. La société FONCIA oppose à la demande le fait que M. [T] était un cadre dirigeant, comme tel non soumis au régime de droit commun sur la durée du travail.

Mais cet argument est inopérant, dès lors que, selon la fiche de poste (pièce 26) il était directement rattaché au dirigeant ; qu'en particulier son pouvoir de gestion du personnel était explicitement encadré, puisqu'il ne pouvait recruter, licencier ou muter un salarié qu'en accord qu'avec le dirigeant et qu'il était, par ailleurs, soumis au régime des RTT (bulletin de paie en pièce n° 5), ainsi qu'aux horaires de travail de l'entreprise ( clause du contrat : « Vous vous conformerez à l'horaire de travail de notre société, plus le temps nécessaire à la bonne marche de l'entreprise »).

3. La société FONCIA fait aussi valoir que Monsieur [T] était directeur de copropriété, statut cadre, ceci impliquant une certaine autonomie de jugement et d'initiative ; qu'un directeur de copropriété a vocation à gérer l'ensemble d'un service ainsi qu'une partie du personnel ; qu'il représente la direction auprès des mandants et autres prestataires de service et organise le contrôle, le suivi et la gestion des dossiers ; que M. [T] ne peut donc se prévaloir des horaires d'ouverture et de fermeture de l'agence comme horaire de travail, étant soumis aux dispositions de l'article 19.8 de la convention collective applicable fixant un horaire annuel sur la base d'une référence horaire ; qu'il lui appartenait donc d'organiser son temps de travail à l'intérieur du forfait annuel de 1.600 heures par an ; qu'il démontre d'ailleurs cette gestion personnelle de son temps de travail en ayant posté sa lettre de démission un jour ouvrable à 16 h ; qu'en vertu de l'article 19. 8 de la convention collective, il lui appartenait de remettre à son employeur, pour validation un relevé des heures accomplies au cours du mois précédent, ce qu'il n'a jamais fait ; qu'il n'a d'ailleurs jamais demandé le paiement d'heures supplémentaires.

Mais, si la section 2 de l'article 19 de la convention collective applicable, permettait à l'employeur d'appliquer un forfait annuel, c'est à la condition de le prévoir au moyen d'une convention individuelle, ce qui n'a pas été fait.

4. M. [T] est donc fondé, sur le principe, à réclamer le paiement des heures de travail accomplies au-delà de la durée légale et conventionnelle de 35h de travail effectif hebdomadaire.

Au soutien de sa demande chiffrée, ci-avant rappelée, M. [T] fait valoir que, pour faire face au volume de travail, il prenait ses fonctions dès 7h du matin, et parfois plus tôt, puis terminait sa journée au plus tôt à 19h, et parfois plus tard ; qu'il assistait aussi à des assemblées générales et à des réunions de conseil syndical le soir et le samedi matin ; que ceci résulte des attestations produites , émanant de collaborateurs ou de copropriétaires (pièces n° 10 à 17), et notamment celles de Monsieur [D] (pièce n 14), responsable de copropriétés au sein de FONCIA MASSENA d'octobre 2004 à décembre 2009, qui certifie qu'il « était présent sur son lieu de travail bien avant 9h le matin et qu'il était encore présent le soir après 18h », de Monsieur [R] (pièce n° 15), en formation au sein de FONCIA MASSENA du 1er juin au 30 octobre 2003, qui indique qu'il « était fréquemment au bureau avant (son) arrivée au cabinet à 9h et restait travailler fréquemment le soir après (son) départ de l'agence à 17h30 », de Madame [I] (pièce n° 17), directrice de copropriétés chez FONCIA MASSENA de 2003 à 2006 qui atteste qu'il « était présent sur son lieu de travail dès 7 heures et même parfois avant et que le soir il assumait les réunions de conseil syndical ou d'assemblées générales après 18h, réunions qui se terminaient régulièrement après 20 heures » ; que ceci résulte aussi des courriers électroniques adressés au-delà des horaires d'ouverture de l'agence (pièce n° 30) et des exemples de réunions de conseil syndical et d'assemblées générales (pièces n° 31 et 32) ; que l'employeur connaissait parfaitement cette situation, puisqu'il lui avait confié la gestion d'un nombre de copropriétés et de lots bien supérieur à ce qui est admis dans le groupe FONCIA, qu'il l'accompagnait dans ses déplacements et qu'il le rémunérait même de manière détournée, en frais kilométriques et qu'il ne justifie pas des modalités de contrôles des horaires effectués par lui.

La société FONCIA fait valoir que le chiffrage est fantaisiste, puisqu'il prend en compte 365 jours de travail , ce qui ne correspond pas au temps effectivement travaillé ; que l'attestation de Madame [I] épouse [U], qui a quitté la société en 2006, ne permet pas de déterminer la durée du travail de M. [T] qui avait la possibilité d'organiser son temps de travail comme bon lui semblait ; que, quant au travail du samedi, la seule copropriété à tenir des assemblées générales le samedi était située à la Colmiane, suivant l'organisation décidée par M. [T] ; que l'attestation de Monsieur [J], émane d'un ancien salarié qui a manqué à son obligation de loyauté et qui est l'actuel associé de Monsieur [T] ; que les autres attestations délivrées par les autres salariés émanent de personnes soumises aux horaires de l'agence qui ne peuvent, par définition, attester de la présence de Monsieur [T] à son bureau à un moment ou eux-mêmes en étaient déjà partis ; qu'au surplus, la position de Monsieur [T] est pour le moins contradictoire, puisqu'il prétend avoir été déstabilisé par la suppression d'un certain nombre de prérogatives et de tâches, comme le transfert de copropriété vers d'autres structures juridiques du groupe FONCIA, ce qui est synonyme d'allégement de son travail et que, d'un autre côté il prétend avoir été surchargé de travail et avoir dû effectuer régulièrement des heures supplémentaires ; que, quant aux organigrammes qu'il produit, ils montrent que sa charge de travail était loin d'excéder la charge des autres salariés, puisque Monsieur [L] gérait 22 immeubles, Madame [K] [X], principal de copropriété, en gérait 53, Monsieur [E] [B], principal de copropriété, 54, par exemple ; qu'en 2010, le nombre de lots et d'immeubles confié à Monsieur [T] n'a pas augmenté avec 26 immeubles, soit moins que Madame [K] [X], Monsieur [E] [B] ou Monsieur [H] [G].

De fait, les attestations produites par M. [T] sont corroborés par les autres pièces qu'il verse aux débats , ce dont il résulte qu'il lui arrivait de pratiquer les horaires qu'il indique, encore qu'il n'est pas établi qu'il se fut agi d'horaires systématiquement appliqués par lui, l'employeur mettant , quant à lui, justement en évidence les libertés parfois prises par le salarié avec les horaires de travail et produisant devant la cour des pièces non sérieusement critiquées, dont il résulte que la charge de travail de M. [T] n'était ni excessive ni supérieure à celle de ses collègues.

Au regard de l'ensemble des éléments produits tant par l'employeur que par le salarié, la cour est en mesure d'arrêter à 4 heures, le nombre d'heures supplémentaires hebdomadaires effectuées par M.[T] qui n'ont pas été rémunérées.

En conséquence, sa créance sera liquidée à 34.112,60 euros, sur la base d'un salaire brut mensuel de 4403,55 euros , d'un taux horaire majoré pour les heures supplémentaires de 36,29 € (x 1,25 pour les 8 premières heures, selon l'article L3121-22 du code du travail), de cinq semaines de congés payés et de 12 journées de RTT par an, ceci pendant cinq ans.

A cette somme s'ajoutera l'indemnité compensatrice de congés payés d'un montant de 3411,26 euros.

4. M. [T] ne peut revendiquer la compensation de la contrepartie obligatoire en repos, par l'application combinée des articles L. 3121-11 et D. 3121-14-1 du Code du travail, puisqu'il n'a pas accompli d'heures supplémentaires au-delà de la limite du contingent annuel de 220 heures.

Il ne peut davantage invoquer le préjudice qui lui a été causé par le fait qu'il n'a pas été informé de la contrepartie obligatoire en repos, n'ayant acquis aucun droit à ce titre.

5. Monsieur [T] revendique le paiement d'une indemnité de 42 164,16 euros, ou subsidiairement de 39 882 € ou de 29 207,28 euros, correspondant à six mois de salaire, par application des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du Code du Travail , pour travail dissimulé.

Il fait valoir que la preuve de l'intention frauduleuse de la société FONCIA réside dans le fait qu'elle avait mis en place un système de rétribution maquillé sous la forme d'un remboursement de frais kilométriques  pour des déplacements fictifs ; que pour cela, les salariés devaient remplir un formulaire sur lequel ils notaient les AG auxquelles ils avaient participé et le nombre d'heures de travail effectuées à partir de 18h, ainsi que les caractéristiques de leur véhicule et un nombre de kilomètres prétendument effectués ; qu'à partir du mois de novembre 2006, le système a été modifié, la société FONCIA demandant aux salariés de remplir un document intitulé « demande de remboursement d'indemnités kilométriques » mentionnant la liste des déplacements plus détaillée ; qu'à compter du mois de mai 2008, soit après le rachat du groupe FONCIA par la BPCA en 2007, l'employeur a tenté d'officialiser le paiement d'heures supplémentaires, raison pour laquelle l'avenant du 7 mai 2008 (pièce n° 4) a limité le remboursement des prétendus frais kilométriques à hauteur de 625 € par trimestre, avec, en plus, l'obligation de produire des justificatifs des déplacements ; que, toutefois, ceci n'était qu'un leurre seulement destiné à masquer le paiement d'un complément de rémunération ; qu'en réalité, il disposait d'un véhicule de fonction mis à sa disposition par FONCIA, de sorte qu'il n'y avait aucune raison de lui rembourser des indemnités kilométriques.

Mais son affirmation selon laquelle il disposait d'un véhicule de fonction est contredite par le fait que son contrat de travail ne prévoyait pas un tel avantage, l'article 6 du contrat signé le 1er octobre 2006 mentionnant même que l'exécution du contrat impliquait de nombreux déplacements nécessitant l'usage d'un véhicule personnel et la Société FONCIA MASSENA, observant justement, par ailleurs, que le remboursement des frais kilométriques, n'a pas donné lieu à observations de l'URSSAF, lors des contrôles effectués en 2001 et 2003.

Dans ces conditions, les factures d'entretien produites par Monsieur [A] [T] semblent s'appliquer à l'entretien du véhicule de service auquel il avait accès, la cour ne pouvant, en toute hypothèse, déduire des pièces qu'il lui soumet la preuve qu'il existait une fraude au paiement des heures supplémentaires maquillées en frais de déplacements.

Par ailleurs, la position hiérarchique de Monsieur [A] [T], qui lui offrait, de fait, toute latitude pour organiser son emploi du temps, exclut l'intention frauduleuse de l'employeur, quant à la non-déclaration des heures supplémentaires sur les bulletins de salaire.

En conséquence, la demande d'indemnité sera rejetée.

6. La société FONCIA a manqué à son obligation de sécurité de résultat, pour n'avoir pas soumis Monsieur [A] [T] à la visite médicale d'embauche, lequel est fondé à obtenir une indemnité de 250 euros, en réparation.

7. Monsieur [T] indique qu'il était le numéro trois de la hiérarchie de FONCIA MASSENA, dont le numéro un était Monsieur [N], Président du secteur METROPOLE NICOISE et le numéro deux Monsieur [L], directeur général, lui-même étant directeur du service copropriété ; qu' au début du mois d'août 2010, Monsieur [N] lui a proposé une mutation à [Localité 5] ; qu'il a décidé de la refuser , l'agence de [Localité 5] étant dans une situation difficile ;qu'en réalité, il s'agissait pour l'employeur de l'éloigner de [Localité 7], où sa position risquait d'être renforcée par le départ programmé de MM. [N] et [L]; que Monsieur [J] en atteste en pièce n° 10; que devant son refus de partir pour [Localité 6], l'employeur a mis en 'uvre une entreprise de déstabilisation, en commençant par le dénigrer auprès des collaborateurs et des fournisseurs , puis lui a ôté certaines de ses prérogatives contractuelles , désorganisant le service ; qu'il a également transféré des copropriétés vers d'autres structures juridiques du groupe, sans information préalable et sans compensation financière sur son intéressement en fin d'année ; qu'il a également pris prétexte d'un accident de la circulation survenu en novembre 2010 pour tenter de lui attribuer un véhicule 2 places TOYOTA AYGO au lieu du véhicule quatre places dont il disposait comme véhicule de fonction ; que l'employeur a également diminué sa rémunération en janvier 2011, en intégrant sur le bulletin de salaire à un montant moindre, la prime de 650 € qu'il percevait à titre d'acompte chaque mois jusqu'à la fin 2010 ; qu'ainsi, au mois de février 2011, le différentiel en sa défaveur a été de 6,71 euros et en mars de 45,37 euros ; qu'il est le seul salarié à s'être vu traiter de la sorte ; que sa charge de travail dépassait largement celle prévue au sein du groupe FONCIA et qu'il s'est trouvé dans un état de stress et de surmenage qui l'a contraint à consulter un médecin et à prendre des médicaments.

FONCIA MASSENA fait valoir que Monsieur [L] a quitté la direction le 30 septembre 2010 et que c'est seulement six mois plus tard que M. [T] lui a imputé des agissements, sans aucune preuve.

Elle conteste les autres reproches du salarié, lui opposant, en particulier, l'attestation de M.[L] et l'absence de preuves produites par lui, ainsi le fait qu'il ne disposait pas d'un véhicule de fonctions, ce qui a été vu précédemment.

Toutefois, concernant le grief relatif au non-respect des prérogatives de Monsieur [T], la société FONCIA, qui détient tous les éléments objectifs relatifs à l'organisation qu'elle a mise en place, n'en communique aucun qui permettrait d'apprécier le degré de pertinence des reproches du salarié, lequel affirme avoir dû affronter des changements importants dans le fonctionnement du service dont il avait la responsabilité, ceci par le biais de mutations de personnels, affectation d'immeubles à certains collaborateurs et transfert d'immeubles à d'autres structures juridiques du groupe FONCIA, sans aucun avantage pour la société autre que celui de le pénaliser.

Par ailleurs, la société FONCIA ne s'explique pas sur la modification de la structure de sa rémunération, qui quoiqu'ayant une incidence pécuniaire modeste n'en est pas moins réelle et caractérise l'exécution de mauvaise foi du contrat de travail.

8. La prise d'acte doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle sérieuse des lors que l'employeur a commis ces manquements, dont la gravité est avérée, ceci sans qu'il soit nécessaire d'examiner plus avant les autres griefs, par ailleurs contestés.

9. Pour la liquidation des différentes indemnités qu'il réclame, Monsieur [T] demande à la cour de dire que son salaire brut mensuel moyen réel s'élevait à 7.027 36 euros, après ajout à la rémunération moyenne de 4867,88 euros de la prime perçue à hauteur de 650 € par mois , non déclarée par l'employeur, et des heures supplémentaires effectuées, sur la base de 3h00 par jour pendant 21 jours par mois, soit 1.509,48 € (63 x 23,96).

Mais, outre le fait que le calcul de Monsieur [A] [T] n'est pas exact, il n'y a pas lieu d'ajouter à la rémunération contractuelle les heures supplémentaires, dont l'accomplissement dépendait de la seule décision de l'employeur.

L'employeur ne contestant pas le chiffre de 4867,88 euros, qui est celui porté sur les documents de fin de contrat, celui-ci sera retenu comme étant la rémunération brute à prendre en compte.

10. À titre de dommages-intérêts, Monsieur [A] [T] réclame la somme de 84 328,32 euros, ou, à titre subsidiaire, celle de 79.764 € ou encore celle de 58.414,56 €, équivalant à douze mois de salaires, ceci au motif de son ancienneté et de ce qu'il a été contraint d'abandonner désormais le salariat pour l'exercice d'une profession indépendante mais précaire.

Toutefois, il sera tenu compte de ce qu'il n'a pas connu de période de chômage et il lui sera accordé l'équivalent de six mois de salaire, soit 29.208 €.

Monsieur [A] [T] ne fait pas la preuve d'un préjudice autre que celui qui vient d'être indemnisé, en sorte que sa demande tendant au paiement de la somme de 40 000 € destinée à réparer les conditions de la rupture sera écartée.

11. L'article 33 de la convention collective nationale de l'immobilier dispose qu'après deux ans de présence, le salarié licencié reçoit une indemnité de licenciement calculée sur la base de 1/4 du salaire global brut mensuel contractuel acquis à la date de cessation du contrat de travail par année de présence pro rata temporis.

Il sera accordé à Monsieur [A] [T], à ce titre, la somme de 10 732,31 euros.

12. Selon l'article 32 de la convention collective applicable, Monsieur [A] [T] aurait dû effectuer un préavis de trois mois. Ayant effectué un mois et demi de préavis, il lui reste dû la somme de 7301,82 euros, plus le 10e de cette somme, au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés.

13. Par application de l'article 38 de la convention collective nationale de l'immobilier, Monsieur [A] [T] revendique le paiement d'une rémunération complémentaire, dite de 13e mois, pour le mois et demi de préavis non effectué, ainsi que la revalorisation de la somme qui lui a déjà été payée par l'employeur, ceci par la prise en compte d'un salaire mensuel brut de 7027,36 euros.

Mais, il a été vu précédemment que le salaire contractuel de Monsieur [A] [T] s'élevait à la somme de 4867,88 euros.

Dans ces conditions, l'indemnité due sera calculée sur cette base et il ne sera fait droit qu'à la demande subsidiaire de Monsieur [A] [T], qui s'élève à la somme de 550 €.

14. Il sera ordonné à la société FONCIA MASSENA de fournir à Monsieur [A] [T] les documents sociaux rectifiés, ceci sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Les indemnités allouées porteront intérêts au taux légal dans les conditions indiquées au dispositif.

La société FONCIA MASSENA sera condamnée aux dépens, toute autre demande étant rejetée, y compris celles présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'équité commandant qu'il n'y soit pas fait droit.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

REÇOIT l'appel,

INFIRMANT le jugement entrepris,

CONDAMNE la Société FONCIA MASSENA à payer à Monsieur [A] [T], la somme de 34.112,60 euros, à titre de rappel pour heures supplémentaires, celle de 3.411,26 €, au titre de l'indemnité de congés payés afférente et la somme de 250 euros en réparation du préjudice causé par l'absence de visite médicale d'embauche,

DIT QUE la prise d'acte de la rupture émanant du salarié, s'analyse en un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

CONDAMNE la société FONCIA MASSENA à payer à Monsieur [A] [T] la somme de 29.208 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, celle de 10 732,31 euros au titre de l'indemnité de licenciement, celle de somme de 7301,82 euros, au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, plus le 10e de cette somme, au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés et celle de 550 € au titre du 13e mois,

ORDONNE la remise par la Société FONCIA MASSENA à Monsieur [A] [T] des documents sociaux rectifiés, en accord avec le présent arrêt,

DIT QUE les créances de nature salariale produiront des intérêts au taux légal à compter de la citation devant le bureau de conciliation, avec capitalisation des intérêts échus et dus pour plus d'une année à compter de la demande formée en cause d'appel,

REJETTE toute autre demande,

CONDAMNE la société FONCIA MASSENA aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 12/09350
Date de la décision : 05/02/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°12/09350 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-02-05;12.09350 ?
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