COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
17e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 24 JANVIER 2013
N° 2013/40
AB
Rôle N° 11/10573
[G] [E]
C/
[F] [Y]
[K] [C]
Grosse délivrée le :
à :
Monsieur [G] [E]
Me Didier LODS, avocat au barreau de GRASSE
Me Jean-Jérôme MONDOLONI, avocat au barreau de NICE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 26 Avril 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 09/1394.
APPELANT
Monsieur [G] [E],
demeurant [Adresse 2]
comparant en personne
INTIMES
Madame [F] [Y],
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Didier LODS, avocat au barreau de GRASSE
Maître [K] [C], avocat, pris en sa qualité d'administrateur du Cabinet de Maître [P] [Z], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Jean-Jérôme MONDOLONI, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 04 Décembre 2012 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Alain BLANC, Président
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller
Madame Brigitte PELTIER, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Fabienne MICHEL.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Janvier 2013.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Janvier 2013.
Signé par Monsieur Alain BLANC, Président et Madame Monique LE CHATELIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
Monsieur [G] [E] a régulièrement relevé appel d'un jugement rendu le 26 avril 2011 par le Conseil de Prud'hommes de NICE qui :
- a mis hors de cause Maître [K] [C].
- a dit que la rupture du contrat de travail de Madame [F] [Y] est un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- l'a condamné à verser à Madame [F] [Y] les sommes suivantes :
- 5 699,05 euros à titre de rappel de salaire ;
- 4 481,64 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;
- 6 722,46 euros au titre de l'indemnité de préavis ;
- 672,25 euros au titre des congés payés sur préavis ;
- 13 682,52 euros à titre de dommages et intérêts ;
- 1 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par des moyens qui seront analysés dans le corps du présent arrêt, l'appelant demande à la Cour de :
- réformer le jugement en toutes ses dispositions,
Au principal,
- constater que Madame [Y] a usé de fausses allégations sur son expérience professionnelle et sa présence au sein de l'entreprise, qui ont été déterminantes dans son consentement à la conclusion du contrat de travail,
- constater que Madame [Y] a volontairement caché qu'elle avait fait l'objet, de la part de son prédécesseur d'un licenciement pour motif économique,
- constater que son consentement est entaché d'un vice,
- dire et juger le contrat de travail dont s'agit nul et de nul effet,
- dire et juger que la nullité du contrat prive l'intimée de toute possibilité de formuler une quelconque demande au titre de la rupture de ce contrat et la débouter en conséquence de l'ensemble de ses demandes,
- constater que l'embauche de l'intimée était prévue dans l'acte même de cession et directement liée à la cession elle-même, et a été réalisée sur instruction formelle de l'administrateur,
A titre subsidiaire,
- en l'état, d'une vente non parfaite, le prix de cession n'ayant pas été réglé et le cessionnaire n'étant pas en possession de tous les éléments de la vente (comptabilité et dossiers enlevés par le cédant), d'une administration du cabinet toujours en cours, et de l'action en résolution de la vente initiée le 23 janvier 2009,
- surseoir à statuer dans l'attente de la procédure pendante devant le tribunal de grande instance de Nice relative à la nullité de la cession, et dire et juger qu'en tout état de cause, la présente décision sera opposable à maître [K] [C] es qualité d'administrateur du cabinet [Z].
- condamner tout succombant au paiement de la somme de 5 000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Madame [Y] demande à la Cour de :
- condamner Monsieur [E] à lui payer les sommes suivantes :
- salaire du mois de juillet 2009 : 2 280,42 euros
- salaire du mois d' août 2009 / du 1er au 19 : 1 442,27 euros
- salaire du mois d'octobre 2009 : 1 976,36 euros
- indemnité de licenciement : 4 481,64 euros
- indemnité de 13 ème mois pour l'année 2009 : 2 280,42 euros
- indemnité de congés payés : 1 232,45 euros
- dommages et intérêts pour violation des obligations du contrat de travail : 10 000,00 euros
- indemnité pour licenciement sans motif réel et sérieux: 68 412, 50 euros
- indemnité de préavis : 6 722,46 euros
- indemnité de congés payés sur préavis : 672,25 euros .
Elle demande, au cas où la seconde lettre de licenciement, notifiée le 30 novembre 2009, devrait être prise en considération, de condamner l'appelant au paiement d'une somme de 2 280,42 euros au titre du salaire du mois de novembre 2009.
Elle conclut également à la condamnation de l'appelant au paiement d'une somme de 3 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur [K] [C] demande à la Cour de :
- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel , le déclarer mal fondé,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé sa mise hors de cause,
Subsidiairement,
- constater que ses fonctions en qualité d'administrateur du cabinet de Maître [P] [Z] ont pris fin et que le cédant est Monsieur [D] [Z], héritier de Maître [P] [Z],
- constater que la demande en résolution pendante devant la troisième chambre du tribunal de grande instance de NICE est dirigée à rencontre de Monsieur [D] [Z],
- le mettre par conséquent hors de cause,
Plus subsidiairement encore, dire que la demande sollicitant la substitution d'employeur est dépourvue de tout fondement et débouter l'appelant de toutes fins, conclusions ou prétentions
Il conclut également à la condamnation de l'appelant au paiement d'une somme de 3 000,00 euros en applications des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Vu les conclusions des parties oralement soutenues à l'audience ;
Attendu que Madame [R] secrétaire au sein du cabinet de Maître [P] [Z] depuis le 10 janvier 2005 et que cette dernière étant décédée, le cabinet a été cédé le 30 septembre 2008 par ses héritiers à Maître [G] [E] ;
qu'un contrat de travail a été signé le 1er octobre 2008 entre Maître [E] [E] et Madame [Y] pour une rémunération annuelle de 27 365,00 euros ;
qu'il apparaît que l'appelant , qui n'était pas inscrit au Barreau de NICE mais à celui de PERPIGNAN, n'a plus réglé les salaires de l'intimée à partir du 1er juillet 2009 ;
qu'il apparaît également qu'une ordonnance de référé rendue par le Tribunal de Grande Instance de NICE, le 3 septembre 2009, a prononcé son explusion en suite du non règlement des loyers et qu'ainsi le cabinet a été fermé ;
que la juridiction prud'homale ayant été saisie, le 7 octobre 2009, le Bureau de Conciliation, a alloué à la salariée la somme de 3 000,00 euros à titre de provision sur salaire et congés payés ;
que, le 28 octobre 2009, Monsieur [E] a adressé à l'intimée lc courrier suivant :
' Je vous informe par la présente que nous sommes amenés à procéder và votre licenciement économique compte tenu de la fermeture du cabinet. Je me rapproche de l'expert comptable pour procéder à ce licenciement dans les plus brefs délais Quant à votre attestation de salaire, je vous l'ai déjà expédiée mais vous en fait parvenir une copie jointe à ce courrier ' ;
Attendu que, le 30 novembre 2009, l'appelant a adressé à l'intimée une lettre recommandée avec avis de réception rédigée en ces termes :
' Suite à notre entretien du 19 Novembre 2009, nous vous informons que nous sommes contraints de vous licencier pour le motif économique suivant :
En effet, ayant demandé la résolution de la vente, nous avons fermé le Cabinet situé à [Localité 6] en septembre 2009. Par conséquent, nous nous voyons contraint de procéder à votre licenciement pour motif économique.
Lors de votre entretien préalable, nous avons envisagé votre reclassement à l'ensemble des postes de l'entreprise qui pouvaient vous être proposés, mais aucun ne correspond à vos qualifications, ni à votre expérience.
Durant l'année qui suivra la fin de votre préavis, vous bénéficierez d'une priorité de réembauchage dans notre entreprise, à condition de nous avoir informés dans les 12 mois suivant la fin de votre préavis de votre désir de faire vouloir cette priorité. Celle-ci concerne les postes compatibles avec votre qualification et également ceux qui correspondraient à une nouvelle qualification acquise après le licenciement (sous réserve cependant que vous la fassiez connaître).
Par ailleurs, nous vous rappelons que conformément aux dispositions de la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005, vous pouvez bénéficier du dispositif des conventions de reclassement personnalisé dont nous vous avons remis la documentation lors de notre entretien du 19 Novembre 2009.
Vous disposerez pour cela d'un délai de 21 jours courant à compter de la date du 19 Novembre 2009 qui est portée sur le bulletin d'acceptation que nous vous avons remis avec la notice de présentation de cette convention lors de notre entretien. Au jour d'envoi de cette lettre, il ne reste que 7 jours pour exprimer votre choix,
En conséquence, si le 10 Décembre 2009 au plus tard, vous ne nous avez pas fait connaître votre réponse sur la proposition de reclassement personnalisé, ou, bien entendu, si vous l'avez refusée, la présente lettre constituera la notification de votre licenciement pour motif économique, et la date à laquelle cette lettre vous aura été présentée marquera le point de départ de votre préavis de 2 mois.
Votre droit individuel à la formation est de 26 heures 40.
Enfin, au terme de votre préavis, nous vous remettrons votre solde de tout compte, votre certificat de travail, ainsi que votre attestation ASSEDIC.
Sur ce,
Attendu que le jugement sera confirmé en ce qu'il a justement mis hors de cause Maître [C] ;
Attendu que c'est en vain que l'appelant invoque la nullité du contrat de travail alors que, dès avant la cession du cabinet de Maître [Z], il avait manifesté son intention d'engager cette salariée, aux mêmes conditions de rémunération et d'ancienneté en tenant compte des droits acquis avant son précédent licenciement ;
que le dol ainsi invoqué par l'appelant n'est pas établi, aucun vice du consentement ne ressortant des éléments de la cause ;
Attendu qu'il est constant que la salariée n'a plus perçu de salaire à compter du 1er juillet 2009 et que, dès lors, elle est bien fondée à réclamer le paiement de sommes à ce titre que la Cour est en mesure, en fonction d'un décompte non sérieusement discuté par l'appelant , de fixer à 2 280,42 pour le mois de juillet 2009, 1 976,36 euros pour le mois d'août 2009, et 2 280,42 euros pour le mois d'octobre 2009 et 2 280,42 euros pour le mois de novembre 2009, la rupture devant être fixée au 30 novembre 2009, date de la lettre de licenciement, la précédente ne faisant état que d'un projet de licenciement ;
Attendu qu'en ce qui concerne le licenciement est suffisamment motivée pour faire mention de la fermeture du cabinet de [Localité 6] ce qui implique la cessation d'activité ;
Attendu également que la salariée s'est vue proposer une convention de reclassement personnalisé et qu'il ne saurait être invoqué, la salariée l'ayant acceptée le 18 décembre 2009, une absence de tentative de reclassement , la salariée ne contestant pas sa propre signature ;
que cependant, l'employeur ne justifiant pas du versement à l'indemnité due à ce titre à Pôler Emploi, l'intimée est bien fondée à réclamer la paiement d'une indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents ;
Attedu en conséquence que le licenciement est fondé et que le jugement sera réformé en, ce qu'il a alloué à l'intimée une sommem à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que l'intimée est fondée à réclamer la paiement d'une indemnité conventionnelle de licenciement justement calculée en fonction de son âge et de son ancienneté ;
qu'elle est également bien fondée à réclamer le paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés eu égard au reliquat de 11 jours de congés payés qu'elle avait acquis ;
Attendu que l'intimée est bien fondée à réclamer le paiement d'une indemnité au titre du 13 ème mois pour l'année 2009 et justement fixée à la somme de 2 280,42 euros ;
Attendu enfin qu'en ne procédant pas au règlement des salaires de l'intimée pendant plusieurs mois, l'appelant a commis de graves manquements à ses obligations contractuelles ayant entraîné un préjudice distinct pour cette salariée et qui sera réparé par l'allocation de la somme de 5 000,00 euros;
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,
Confirme le jugement en ce qu'il a mis hors de cause Maître [K] [C] ainsi qu'en ce qui concerne les sommes allouées à Madame [F] [Y] à titre de rappels de salaire, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents , d'indemnité de licenciement sosu déduction de la somme de 3 000,00 euros allouée à titre de provision par le bureau de concliation ;
Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau,
Dit que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse et déboute Madame [F] [Y] de sa demande en paiement de dommages-intérêts de ce chef ;
Y ajoutant,
Condamne Monsieur [G] [E] à payer à Madame [F] [Y] les sommes suivantes :
- 2 280,42 euros à titre de salaire pour le mois de novembre 2009,
- 2 280,42 euros à titre de 13 ème mois pour l'année 2009,
- 1 232,45 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
- 5 000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour manquements aux obligations contractuelles,
- 2 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne l'appelant à supporter les entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT