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17/01/2013 | FRANCE | N°11/01910

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 17 janvier 2013, 11/01910


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 17 JANVIER 2013



N°2013/



Rôle N° 11/01910







[T] [W]





C/



SAS GENERALE DE PROTECTION





















Grosse délivrée le :



à :



Me Christophe DUBOURD, avocat au barreau de NIMES



Me Cécile DEFAYE, avocat au barreau de MARSEILLE





Copie certifiée conforme délivrée aux par

ties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 07 Janvier 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 08/247.





APPELANT



Monsieur [T] [W], demeurant [Adresse 2]



comparant en personne, as...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 17 JANVIER 2013

N°2013/

Rôle N° 11/01910

[T] [W]

C/

SAS GENERALE DE PROTECTION

Grosse délivrée le :

à :

Me Christophe DUBOURD, avocat au barreau de NIMES

Me Cécile DEFAYE, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 07 Janvier 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 08/247.

APPELANT

Monsieur [T] [W], demeurant [Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Christophe DUBOURD, avocat au barreau de NIMES

INTIMEE

SAS GENERALE DE PROTECTION, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Cécile DEFAYE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 12 Décembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Françoise GAUDIN, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre

Madame Françoise GAUDIN, Conseiller

Monsieur Philippe ASNARD, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2013

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2013

Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La société GENERALE DE PROTECTION (anciennement dénommée PROTETCION ONE France SAS, elle-même venue aux droits de la société CET) est spécialisée dans les activités de sécurité électronique qu'elle commercialise et installe essentiellement auprès des professionnels.

M. [W] [U] a été embauché par la société CET, selon contrat de travail à durée indéterminée du 16 juillet 1992 en qualité de délégué commercial au sein de son agence de [Localité 6].

Dans le dernier état de la relation contractuelle, il était Ingénieur clientèle, statut cadre défini par la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985 et bénéficiait de la rémunération suivante :

. une rémunération fixe mensuelle brute de 1.758,23 €,

. une rémunération variable dépendant de son activité « new » (signature de nouveaux contrats) et du développement de son activité de gestion du parc client (reconduction de contrats, traitement des résiliations et des litiges avec les clients).

A partir de l'année 2006, la répartition de l'activité ne s'est plus effectuée géographiquement mais selon un portefeuille de fichiers clients.

Qu'estimant que la structure variable de sa rémunération avait été unilatéralement modifiée par cette répartition par fiche client, M.[W], par la voie de son Conseil, a fait savoir à la société GENERALE DE PROTECTION, par courrier du 18 octobre 2007, qu'il considérait que les termes de son contrat de travail n'étaient pas respectés, et a sollicité le rétablissement du secteur d'activité, et une indemnisation de cette baisse de rémunération.

Par courrier en réponse du 15 novembre 2007, la société GENERALE DE PROTECTION a répondu au conseil du salarié que le portefeuille attribué à M. [W] était le plus étayé de l'agence de [Localité 6] et a relevé l'existence d'un niveau d'encours, outre le fait que ses fonctions lui permettaient également de développer une activité « new » sans aucune limitation.

Contestant la position de son employeur, M. [W] a saisi le 31 mars 2008 la juridiction prud'homale d'une demande en condamnation de celui-ci au paiement des sommes de :

. 70.000 € à titre d'indemnité pour perte de rémunération,

. 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

. 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et d'une demande de le rétablir dans ses fonctions « d'ingénieur clientèle reconducteur » dans le secteur qui était le sien et lui réattribuer les clients qui étaient les siens au préalable ou un nombre de clients et un montant de contrats équivalents, sous astreinte.

Par jugement en date du 7 janvier 2011, le conseil des prud'hommes de MARTIGUES a débouté M. [W] de l'ensemble de ses demandes.

Devant la présente cour, Monsieur [W] soutient que :

. avant 2005, il était reconducteur exclusif sur un secteur géographique et l'employeur ayant remplacé les zones géographiques par la mise en place de parcs clients, a modifié le mode de calcul de sa rémunération variable sans son accord.

. ces manquements justifiaient la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur, laquelle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Monsieur [W] demande in limine litis le rejet des conclusions et pièces de la société intimée communiquées tardivement et l'infirmation du jugement entrepris, la condamnation de la société GENERALE DE PROTECTION à lui payer la somme de 87.906,85 € à titre de dommages et intérêts au titre de son préjudice contractuel, la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et sollicite la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur s'analysant en licenciement sans cause réelle et sérieuse et le paiement des sommes en découlant :

. 8.700 € au titre du préavis,

. 870 € à titre de congés payés y afférents,

. 15.460 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

. 69.600 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions, oralement reprises par son Conseil, la SAS GENERALE DE PROTECTION demande à la cour de confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions et conclut au rejet de la demande en résiliation judiciaire,

Elle fait valoir qu'il n'y a eu aucune modification du contrat de travail, ni aucun manquement de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail.

Elle sollicite la condamnation de Monsieur [W] au paiement de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

sur le rejet des conclusions et pièces de l'intimée

Attendu que la société GENERALE DE PROTECTION a communiqué ses conclusions et pièces le 7 décembre 2012 soit cinq jours avant l'audience.

Qu'elle a repris le même argumentaire qu'en première instance.

Que lesdites écritures étant susceptibles de faire l'objet d'un débat oral contradictoire le jour de l'audience, il n'y a pas lieu de les rejeter au visa de l'article 135 du code de procédure civile.

Que les pièces litigieuses ont déjà été communiquées en première instance, à l'exception des pièces numérotées 45 à 57, lesquelles seront écartées des débats car communiquées tardivement, sans respect du contradictoire.

sur la demande de résiliation judiciaire

sur son bien fondé

Attendu qu'au soutien de sa demande de résiliation, le salarié dénonce un comportement fautif de l'employeur caractérisé notamment par :

. une modification unilatérale de son contrat de travail au niveau de son socle contractuel, rémunération notamment.

. un non-respect des dispositions conventionnelles relatives à la répartition des clients se traduisant notamment par du favoritisme et par un détournement de clientèle à son égard.

Attendu qu'il y a donc lieu d'apprécier si l'inexécution de certaines obligations résultant du contrat synallagmatique présente un caractère de gravité suffisante pour en justifier la résiliation.

sur la modification du contrat de travail

Attendu que M. [W] allègue une modification unilatérale de son contrat de travail par l'employeur à partir de 2005, s'étant traduite par une modification de son secteur géographique de clientèle au profit de parcs clients et corrélativement une chute de sa rémunération variable importante.

Attendu qu'l est constant qu'il y a modification du contrat de travail, nécessitant l'accord du salarié, lorsque la modification porte sur un élément déterminant du contrat de travail et formalisé dans une clause de celui-ci ou sur un élément du socle contractuel, indispensable à l'existence du contrat, tel la rémunération et la qualification du salarié.

Que lors de l'embauche du salarié, aucun contrat écrit n'a été formalisé et dès lors, aucune sectorisation contractuelle dans le cadre de ses fonctions de VRP n'a été prévue.

Que dans le contrat d'ingénieur clientèle signé le 27 octobre 1997 ne prévoit pas de secteur géographique de clientèle pour le salarié.

Que ses fonctions consistent en reconduction de contrats d'abonnement, exploitation de clients listés, recherche de nouveaux clients ( activité new ») travail de liste prospect « Grand Compte », réaliser un chiffre d'affaires trimestriel.

Que selon M. [W], il avait un secteur géographique de plusieurs départements sur lesquels il était reconducteur de contrats d'abonnement exclusivement et qu'à partir de 2005, la gestion du parc client n'a plus été organisée en zones géographiques mais des portefeuilles clients ont été attribués aux ingénieurs clientèles.

Qu'il résulte des documents du dossier que si effectivement à l'origine, les ingénieurs clientèle se répartissaient la clientèle en fonction des départements rattachés à leur agence, il ne s'agissait que de secteurs géographiques sans exclusivité, purement indicatifs.

Qu'aucun élément contractuel ne prévoyait l'exclusivité de cette sectorisation.

Que les salariés avaient toujours la possibilité de développer leur activité de gestion du parc client à l'extérieur des départements indiqués.

Qu'ainsi, d'autres commerciaux ont reconduit avant 2006 des contrats de clients pourtant situés dans le secteur attribué à M. [W], ainsi qu'en attestent les vues synthétiques de quelques contrats (n°s 211331, 212201,215901..) produites au dossier de l'employeur.

Que de même, M. [W] s'est rendu à l'extérieur de son secteur pour reconduire des contrats.

Que l'attestation de M. [D], aux termes de laquelle les secteurs commerciaux auraient été exclusifs avant 2005, n'est pas suffisamment probante en l'absence d'éléments extérieurs pour l'étayer et alors que son auteur est en contentieux avec l'entreprise.

Qu'à partir de l'année 2006, la répartition de l'activité s'est effectuée selon un portefeuille de fiches clients, également indicatif, afin de tenter de positionner chaque commercial comme « interlocuteur unique d'un client précis » pour favoriser selon l'entreprise une meilleure relation avec la clientèle.

Qu'il s'est agi alors d'une exclusivité de priorité ou de contact pour les clients et non d'une exclusivité au profit du commercial.

Qu'à cette occasion, si M. [W] s'est vu retirer certaines fiches de clients, il s'en est vu attribuer un nombre conséquent par ailleurs, bénéficiant du portefeuille client le plus important de l'agence de [Localité 6].

Qu'ainsi, M. [W] se plaint de n'avoir eu en 2007 un portefeuille comptant que 518 clients.

Que cependant, un client peut avoir plusieurs contrats et la fluctuation du nombre de fiches client, indépendante de la volonté des parties, n'a pas eu pour objet de modifier son contrat de travail, ses fonctions et sa rémunération étant calculée de la même manière.

Que le nombre de clients varie en fonction de la conjoncture économique et la baisse constante de la clientèle à compter de l'année 2006 s'est répercutée sur l'ensemble de l'entreprise.

Qu'en outre, la rémunération variable de M.[W] dépend en partie de son activité « new », soit de la recherche de nouveaux clients, celle-ci étant supérieure à l'activité de reconduction ainsi qu'il en résulte de l'examen des bulletins de paie de l'intéressé.

Que dès lors, la baisse de sa rémunération alléguée est indépendante du volume de contrats confiés à reconduire mais résulte également d'une activité « new » moins développée par le salarié.

Que de même, il lui appartenait de mener une action commerciale pour faire reconduire des contrats résiliés ou transférés.

Qu'au regard de ces éléments, aucune modification des fonctions de M. [W] susceptible de s'analyser en une modification de son contrat de travail n'est établie.

Que de même, les raisons de la baisse de rémunération invoquée par le salarié sont liés à des facteurs ne dépendant pas de la volonté de l'employeur ainsi qu'il a été vu mais de l'activité personnelle de M. [W], ce dernier ayant baissé son activité « new » de 64% entre 2006 et 2007 et cette dernière n'ayant rien à voir avec les fiches clients.

Que si le nombre de fiche clients a baissé en 2006 et 2007, c'est parce que globalement sur l'ensemble de l'entreprise mais également sur l'agence de [Localité 6], le nombre de contrat à reconduire a baissé de façon significative, ainsi qu'il en résulte des tableaux de bord de ces années et aussi du fait du nombre le plus important « d'encours » de ladite agence en matière de reconduction, ainsi que l'a relevé avec pertinence le premier juge.

Qu'en effet, M. [W] enregistrait le plus grand nombre de fiches client qui lui ont été confiées mais qui sont demeurées non traitées par lui de 2005 à 2008.

Que M. [W] est dès lors mal fondé à reprocher à son employeur de réduire son portefeuille et son potentiel d'activité alors qu'il ne traitait pas toutes les fiches client qui lui étaient remises, ni les fiches « résiliation » et avait une activité « new » moins importante que celle de commerciaux ayant la même ancienneté que lui (cas de M. [X] par exemple).

Que le propre d'une rémunération variable est de varier à la hausse ou à la baisse en fonction de l'activité déployée et de la conjoncture économique.

Que d'ailleurs, il résulte des propres documents versés par le salarié que sa rémunération variable a augmenté à compter de 2010, indépendamment de la baisse des fiches clients, car M. [W] s'est plus investi dans l'activité « new » qui n'avait pas de limites territoriales ou autres et qui lui incombait au même titre que la reconduction.

Que dès lors aucune modification du contrat n'est établi et ce grief non démontré ne saurait caractériser un manquement de l'employeur au soutien de la demande de résiliation.

Que c'est à juste titre que le jugement déféré a rejeté les demandes en paiement de dommages et intérêts pour préjudice contractuel et pour préjudice moral.

Sur le détournement de clientèle

Attendu que M. [W] allègue que l'attribution des portefeuilles clients était arbitraire et que son portefeuille n'était pas « respecté », les clients attribués étant détournés par d'autres commerciaux sans sanction et les commissions étant finalement versées à d'autres commerciaux ou l'interlocuteur unique étant modifié au bon vouloir de l'employeur.

Que cependant, l'employeur a émis des directives rappelant l'interdiction de conclure des affaires avec un client dont on n'est pas l'interlocuteur unique et l'interdiction de visiter des clients ne figurant pas dans son portefeuille clients (cf message de [P] [R] aux équipes commerciales d'[Localité 3] et [Localité 6] en date du 11 juin 2010).

Qu'en outre, l'intéressé fait état d'un dossier (SARL TOUTELA PRESSE) qui lui aurait été détourné alors qu'il s'agissait d'un nouveau client pour lequel un autre ingénieur commercial avait conclu un contrat.

Que des changements d'interlocuteur unique peuvent intervenir à la demande du responsable d'agence, dans l'exercice de son pouvoir de direction ou lorsque ledit interlocuteur en charge du client est absent de l'entreprise (cas des contrats signés par le directeur d'agence, M. [X], lors de l'arrêt maladie de M. [W] en janvier 2012).

Que la société ne saurait cesser la prospection clientèle et la signature de contrats commerciaux en l'absence d'un commercial, et il apparaît nécessaire que le directeur d'agence ait assuré la relation avec les clients pendant l'absence du salarié.

Qu'en conséquence, aucun manquement de l'entreprise n'étant démontré, M. [W] sera débouté de sa demande nouvelle de résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur et des indemnités de rupture en découlant.

Qu'il y a lieu à confirmation du jugement entrepris et au débouté de l'ensemble des demandes de M. [W].

Qu'aucune considération d'équité ne commande l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties.

Que l'appelant supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Ecarte des débats les pièces numérotées 45 à 57 communiquées tardivement par la société GENERALE DE PROTECTION.

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Rejette la demande de résiliation judiciaire formée en cause d'appel par M. [W], comme non fondée.

Déboute M. [W] de toutes ses demandes.

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Laisse les entiers dépens à la charge de l'appelant.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 11/01910
Date de la décision : 17/01/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9B, arrêt n°11/01910 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-01-17;11.01910 ?
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