COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 11 DECEMBRE 2012
J.V
N° 2012/
Rôle N° 11/18777
[P] [C]
[X] [S]
C/
SARL AXESS FINANCES
Société KAUPTHING SINGER AND FRIEDLANDER
Grosse délivrée
le :
à :la SCP ERMENEUX CHAMPLY-LEVAIQUE
la SCP COHEN-GUEDJ
la ME MAYNARD
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 25 Octobre 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 10/1638.
APPELANT
Monsieur [P] [C] venant également aux droits de feue Mme [X] [S] épouse [C] décédée le 31/10/11
né le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 10] (AUTRICHE), demeurant [Adresse 7]
représenté par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
ayant pour avocat Me Jean-marie LESTRADE, avocat au barreau de NICE
INTIMEES
SARL AXESS FINANCES prise en la personne de son gérant en exercice., demeurant [Adresse 3]
représentée par la SCP COHEN L ET H GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
ayant pour avocat Me Pascale DIEUDONNE, avocat au barreau de NICE
Société KAUPTHING SINGER AND FRIEDLANDER LTD, représentée par son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social sis, [Adresse 1])
représentée par Me Sylvie MAYNARD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 Novembre 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, M.VEYRE, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Jean-Paul LACROIX-ANDRIVET, Président
Monsieur Jean VEYRE, Conseiller
Monsieur Olivier BRUE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Décembre 2012
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Décembre 2012,
Signé par Monsieur Jean VEYRE, Conseiller, en l'absence du Président empêché et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Vu le jugement rendu le 25 octobre 2011 par le tribunal de grande instance de Nice dans le procès opposant la société AXESS FINANCES, Monsieur [P] [C], son épouse née [X] [S] et la société KAUPTHING SINGER AND FRIEDLANDER LTD;
Vu la déclaration d'appel de Monsieur et Madame [C] du 03 novembre 2011 ;
Vu les conclusions récapitulatives déposées le 20 juin 2012 par Monsieur [C] venant également aux droits de Madame [S], décédée ;
Vu les conclusions récapitulatives déposées le 21 juin 2012 par la société AXESS FINANCES;
Vu les conclusions récapitulatives déposées le 21 juin 2012 par la société KAUPTHING SINGER AND FRIEDLANDER LTD.
SUR CE
Attendu que la société AXESS FINANCES sollicite la condamnation de l'appelant à lui payer la somme de 569.532,95 euros correspondant à des commissions et frais pour des opérations d'intermédiaire bancaire selon facture du 09 février 2010 ;
Que celui-ci fait valoir pour s'opposer à cette demande que cette facture ne renvoie à aucune prestation précise ni à aucun consentement sur la chose et sur le prix, que la société AXESS FINANCES ne démontre pas être à l'origine de l'obtention d'un quelconque prêt, que l'article L 519-6 du Code monétaire et financier interdit à tout intermédiaire de percevoir une commission avant le versement effectif des sommes objets du prêt, qu'aucun écrit sur l'intervention alléguée n'a été formalisé, ce qui est contraire aux dispositions de l'article 325-4 du Règlement général de l'AMF, qu'aucune information n'a été fournie quant à une éventuelle rémunération, qu'elle n'a jamais justifié d'un mandat à son profit d'un quelconque établissement bancaire, et que les actes de prêt invoqués ne contiennent aucune référence à un quelconque intermédiaire, qu'en l'absence de tout écrit, elle a ignoré le droit de la consommation et que la LLOYDS BANK n'a jamais formulé d'offre de prêt pouvant fonder un droit à commission ; que subsidiairement, il soutient que le quantum de la facture n'est pas conforme aux usages de la profession d'intermédiaire en profession de banque ;
Attendu, sur les relations contractuelles entre les parties, qu'il est versé aux débats un courrier en date du 11 décembre 2008 adressé par Monsieur [C] à la société AXESS FINANCE, qui est ainsi rédigé :
'Le 27 octobre 2008, par e-mail, vous abordiez la question de la rémunération dont vous nous estimez redevables au titre des trois prêts DEXIA des 14 septembre 2004, 27 décembre 2005 et 31 août 2006 et des deux Prêts privés du 31 mai 2006 et 25 octobre 2006 que vous avez négociés et obtenus pour nous.
Je vous rappelle vous avoir payé 12000 euros d'honoraires au déblocage du premier prêt DEXIA et vous aurez à ce titre l'obligeance de m'adresser la facture correspondante, que je n'ai jamais eue (...)'.
Que ce courrier, ainsi que d'autres qui sont versés aux débats, rend à tout le moins vraisemblable l'intervention de la société AXESS FINANCES dans l'obtention de prêts au profit de Monsieur [C], et constitue un commencement de preuve par écrit des relations contractuelles alléguées par la société AXESS FINANCES ;
Que ce commencement de preuve par écrit est complété notamment par les termes de l'assignation délivrée par Monsieur et Madame [C] le 18 mai 2009 dans le cadre d'une autre instance, et qui constituent un aveu extra judiciaire des relations ayant existé entre les parties, puisqu'il y est indiqué :
'Afin de permettre le financement des sommes pouvant être dues à la BNP PARIBAS, Monsieur et Madame [C] ont obtenu un accord de financement de la BANQUE DEXIA LUXEMBOURG requise, ce financement ayant fait l'objet de trois contrats de prêt pour des montants respectifs de 4.500.000 euros, 600.000 euros et 2.700.000 euros, le second de ces prêts ayant pour objet 'la mise à disposition sous forme d'une ligne en compte courant (d'une somme de 600.000 €)' et le troisième 'le paiement des corps de métier listés dans le relevé des travaux globaux ...' dans le cadre de la rénovation de l'immeuble.
Ces contrats de prêt ont été accordés par l'entremise de la société AXESS FINANCES laquelle a agi en qualité d'intermédiaire en opération de banque au sens de l'article L 519-1 du Code Monétaire et Financier.'
Attendu que ne s'appliquent pas en l'espèce les dispositions des articles 325-1 et suivants du règlement général de l'AMF, qui concernent les conseillers financiers qui doivent soumettre à leur client une lettre de mission, ni celles des articles L 341-11 et suivants du Code monétaire et financier, qui concernent les démarcheurs, ni celles du Code de la consommation, qui ne concernent pas Monsieur [C] dès lors qu'il résulte, notamment d'une lettre du 30 novembre 2005 dans laquelle il fait un historique de ses réalisations immobilières passées et de la lettre du 08 décembre, où il fait également référence à ces réalisations, qu'il était un professionnel de l'immobilier; qu'il est ainsi établi par les pièces précitées que la société AXESS FINANCES est intervenue au profit de l'appelant pour lui apporter son concours à l'obtention des prêts visés dans l'assignation précitée du 18 mai 2009 ; que la société AXESS FINANCES est en conséquence fondée à réclamer à Monsieur [C] la rémunération de ses interventions ayant servi l'obtention de ces prêts, ce que ce dernier qui, dans sa lettre précitée du 27 octobre 2008, rappelait avoir déjà payé 12.000 euros d'honoraires au déblocage du premier prêt, ne peut sérieusement contester, tout au moins dans son principe ;
Attendu, s'agissant de l'offre de prêt de la LLOYDS à hauteur de 24.500.000 euros, qu'il est constant que la banque est revenue sur cette offre et que le prêt n'a pu être souscrit ; qu'en l'absence de prêt effectif et de versements de fonds, la société ACCESS FINANCES ne peut prétendre au versement d'une commission ;
Attendu qu'il résulte des attestations versées aux débats que le taux des commissions réclamées par la société AXESS FINANCES est conforme aux usages en la matière, et qu'il convient de faire droit à sa demande de ce chef pour les trois prêts de 4.500.000 euros, 600.000 euros et 2.700.000 euros pour lesquels son intervention est établie, à hauteur de 223.500 euros ; que l'intervention de la société AXESS FINANCES n'est pas établie pour la prorogation des prêts de 4.500.000 euros et de 6.000.000 euros ni pour l'obtention d'un prêt de 200.000 euros et qu'il convient de la débouter des demandes qu'elle a formées à ce titre ;
Attendu que la société AXESS FINANCES, qui ne démontre pas que la LLOYDS soit revenue sur sa décision d'accorder un prêt en raison d'un comportement fautif de Monsieur [C], ne peut prétendre à l'allocation de dommages et intérêts pour ce motif ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu d'examiner les demandes subsidiaires que la société AXESS FINANCES a formées pour le cas où il ne lui serait pas reconnu de droit à commission ;
Attendu que la société AXESS FINANCES ne démontre pas non plus que Monsieur [C] soit à l'origine de la rupture des relations de confiance qui l'auraient unie aux banques DEXIA et LLOYDS et qu'elle doit dès lors être déboutée de la demande en dommages et intérêts qu'elle a formée à ce titre ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que Monsieur [C] a déjà versé à la société AXESS FINANCES 12.000 euros et 5.000 euros à titre de provision ; qu'après déduction de ces sommes, il convient en conséquence de faire droit à la demande en principal de la société AXESS FINANCES à hauteur de 206.500 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 17 mars 2010 qui équivaut à une sommation de payer ;
Attendu, sur la demande de Monsieur [C] contre la société KAUPTHING SINGER & FRIEDLANDER LIMITED, en remboursement des sommes de 28.125 euros et 14.952 euros, que l'appelant n'établit pas que les sommes versées en exécution de leurs conventions, n'étaient pas dues et qu'il doit être débouté de sa demande de ce chef ;
Attendu qu'en l'état de la condamnation prononcée en principal, Monsieur [C] doit être également condamné au coût de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire, et qu'il ne peut prétendre être indemnisé pour le blocage par la société ACCESS FINANCES en garantie de sa créance, de la somme détenue par Maître [B] ;
Attendu que la société ACCESS FINANCES, qui ne démontre pas la mauvaise foi de Monsieur [C] ne peut prétendre à l'allocation de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Attendu que Monsieur [C], qui succombe sur l'essentiel du litige, doit supporter les dépens, et qu'il apparaît équitable de le condamner en outre à payer au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel 3.000 euros à chacune des intimées.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris, à l'exception de la condamnation au paiement de la somme de 569.532,95 euros ;
Le réformant de ce chef, condamne Monsieur [C] à payer à la société ACCESS FINANCES 206.500 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 17 mars 2010,
Condamner Monsieur [C] à payer à chacune des intimées 3.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Condamne Monsieur [C] aux dépens d'appel et dit qu'ils seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIERP/LE PRESIDENT