COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
18e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 11 DÉCEMBRE 2012
N°2012/907
Rôle N° 11/16948
[C] [F]
C/
ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX (A.V.S.A.)
Grosse délivrée le :
à :
- Me Roland GRAS, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
- Me Renaud ARLABOSSE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FREJUS en date du 02 Septembre 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/147.
APPELANTE
Madame [C] [F], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Roland GRAS, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMEE
ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX (A.V.S.A.), prise en la personne de son Président en exercice, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Renaud ARLABOSSE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 25 Septembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Christine LORENZINI, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Gisèle BAETSLE, Président
Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller
Madame Christine LORENZINI, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Julia DELABORDE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Décembre 2012
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Décembre 2012
Signé par Madame Christine LORENZINI, Conseiller, pour le Président empêché et Mme Julia DELABORDE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Rappel des faits et de la procédure :
Madame [C] [F] est appelante d'un jugement en date du 2 septembre 2011 rendu par le Conseil de Prud'hommes de FREJUS qui a :
- condamné l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX dite l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX à lui payer diverses sommes au titre de rappels de salaire, de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, de non respect de la procédure de licenciement, d'indemnité de préavis et de repos hebdomadaires non pris ainsi que pour voies de fait,
- ordonné la remise par l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX des documents relatifs à l'emploi, sous astreinte,
- ordonné exécution provisoire de la décision,
- débouté les parties du surplus de leurs prétentions,
- condamné l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX aux entiers dépens.
L'appel a été formalisé par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 28 septembre 2011, la lettre recommandée avec accusé de réception de notification du jugement étant en date du 5 septembre 2011.
Dans ses écritures développées à la barre, Madame [C] [F] demande à la Cour de :
- réformer le jugement en date du 2 septembre 2011 sauf en ce qu'il a reconnu l'existence d'un contrat de travail à son profit,
- dire et juger que la convention d'occupation précaire comportait une cause illicite et en prononcer la nullité avec toutes les conséquences de droit,
- dire et juger que l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX s'est rendue coupable de travail clandestin,
- constater l'existence d'un contrat de travail à temps plein liant Madame [F] et l'association pour la période du 19 novembre 2008 au 19 novembre 2009,
- dire et juger que le salaire dû, au vu dommages et intérêts coefficient 255 auquel elle était en droit de prétendre était de 1849.12€ par mois,
en conséquence,
- condamner l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX à :
'payer à Madame [F] diverses sommes au titre de rappels de salaire et de congés payés sur salaires, outre heures supplémentaires, indemnité de préavis, treizième mois, indemnité de licenciement, dommages et intérêts pour travail dissimulé, dommages et intérêts pour rupture abusive, voie de fait, privation du repos hebdomadaire et congés payés et non respect de la procédure,
' remettre à Madame [F] les bulletins de salaire et documents PÔLE EMPLOI sousI astreinte de 50€ par jour de retard,
' lui payer la somme de 5000€ de dommages et intérêts par application des dispositions de l'article 1382 du Code Civil pour résistance abusive,
' lui payer la somme de 3500€ ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans ses écritures également soutenues sur l'audience, l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX conclut à :
- l'infirmation de la décision du Conseil de Prud'hommes,
- le débouté des demandes de Madame [F] ,
- constater l'absence de contrat de travail ;
à titre subsidiaire, elle demande à voir :
- constater que les périodes de présence dont se prévaut Madame [F] doivent s'analyser en périodes d'astreinte et non de travail effectif qui ont été compensées par la mise à disposition d'un logement, de l'eau; l'électricité et la ligne téléphonique à titre gracieux,
- rejeter toutes les demandes,
- reconventionnellement, condamner Madame [F] au paiement de la somme de 5000€ de dommages et intérêts pour procédure vexatoire et abusive,
- condamner l'appelante au paiement de la somme de 3000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens .
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures oralement soutenues à l'audience.
MOTIFS DE LA DÉCISION
rappel des faits :
Madame [F] a répondu à une annonce publiée le 27 octobre 2008 par l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX en ces termes :
- AVSA REFUGE D'ANIMAUX cherche gardien non rémunéré, présence de 17 heures à 8 heures toutes les nuits contre logement Mobil home + jardinet '.
Une convention précaire d'occupation a été signée entre les parties le 19 novembre 2008.
Le 14 septembre 2009, Madame [F] adressait une lettre recommandée avec accusé de réception à l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX pour demander la régularisation de sa situation, considérant qu'elle travaillait sans être payée. Le 30 septembre 2009, l'association dénonçait le contrat par lettre, à la date d'échéance de la convention précaire.
Le 26 mars 2010, Madame [F] saisissait le Conseil de Prud'hommes de FREJUS aux fins de voir requalifier la convention précaire en contrat de travail avec toutes ses conséquences de droit .
Sur la demande de nullité de la convention conclue entre les parties et sur la nature de la relation contractuelle entre Madame [F] et l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX :
L'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX est une association régie par la loi de 1901, déclarée d'utilité publique. Il est constant que le 27 octobre 2008, elle a publié l'annonce rappelée dans l'exposé des faits, annonce à laquelle a répondu Madame [F]. Elle soutient que celle-ci a refusé un emploi rémunéré pour ne pas perdre le bénéfice du Revenu de solidarité active ( attestations de Messieurs [H] et [T] et de Mesdames [E] et [B]). Le 19 novembre 2008, les parties signaient une convention d'occupation précaire stipulant que :
' (...) Il est nécessaire pour l'AVSA de bénéficier de la présence d'un 'gardien' de nuit dans le refuge du chemin de l'Endre au Muy. D'autre part, il y a un avantage certain pour Madame [F] de jouir gracieusement de cet emplacement en contre-partie d'engagements réciproques des parties comme ci-après.
Les parties ont donc convenu ce qui suit :
(...°) l'AVSA. met gracieusement à la disposition de Madame [F] un emplacement où elle pourra résider dans le mobil-home appartenant à l'AVSA. Elle fournit l'eau, l'électricité gracieusement afin qu'il bénéficie des commodités d'usage . Elle lui met à disposition un trousseau de clefs lui permettant de franchir les grilles d'entrées ainsi que l'abonnement téléphonique pour effectuer sa mission. Il est bien entendu que ses communications personnelles restent à sa charge.
(...) En contrepartie des avantages que lui offre l'AVSA, elle a pour mission de veiller à la sécurité du refuge (..) dans lequel se trouve le mobil-home.
a/ A cet effet, elle devra veiller à la fermeture des portes donnant accès au refuge dès sa prise de fonction à 18h00.
b/ Elle devra alerter les forces de l'ordre, ainsi que la Présidente, lors de tout incident ou pénétration d'individus non identifiés n'ayant pas à y circuler.
c/ Sans engager sa sécurité propre, elle devra prévenir les personnes habilitées, la présidente Madame [V] de toute anomalie qu'elle décèlerait sur le plan des matériels que des visites importunes éventuelles,
d/ Son 'gardiennage' s'effectuera hors des heures d'ouverture au public et prendra la forme d'une astreinte de 18 heures à 8 heures et ce sept jours sur sept.
e/ Elle devra prévenir Madame [V], l'actuelle présidente, de toute maladie ou indisponibilité qui contrarierait sa mission et notamment de ses volontés d'absence ponctuelle. En effet, Madame [V] la fera remplacer. En cas d'impossibilité et sauf cas de force majeure, elle devra assurer sa mission.
f/ Elle devra accueillir les Autorités amenant des chiens en fourrière.
(...) Une période de mise en place de deux mois sera observée pour que chacune des parties puisse évaluer la pertinence de ces arrangements. Si pendant cette période une des parties constaterait l'inadéquation de l'arrangement, elle pourra y mettre fin par simple lettre (...) A la suite de cette période de mise en place, et, si celle-ci a été satisfaisante, la présente convention prendra effet de plein droit.
Chacune des parties devra dénoncer, par lettre recommandée, un mois avant l'échéance choisie, cette Convention sans avoir besoin d'en justifier la cause, au cas où elle déciderait d'y mettre fin.
En cas de manquement grave à sa mission entraînant la perturbation de l'ordre public ou de la sécurité du refuge, tant pour les animaux que pour les personnels bénévoles et tiers, cette convention sera rendue caduque dès réception de la recommandé avec accusé de réception la notifiant ou du même courrier remis en main propre (...) Cependant, la disparition pendant son gardiennage d'un seul chien du refuge suffira à rendre caduque cette convention .'
Deux théories sont en présence qu'il y a lieu d'examiner dans leur globalité.
Madame [F] considère que ce qui la liait à l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX était un contrat de travail qui ne disait pas son nom ; elle en tire la conséquence que la convention signée par elle était illicite et doit être annulée, la relation requalifiée et l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX condamnée à lui verser diverses sommes en raison de ce contrat de travail et des manquements de l'association envers elle. Elle affirme que les termes mêmes de la convention la subordonnaient à l'association avec un horaire précis d'astreinte, sept jours sur sept, la convention prévoyant une période d'essai de deux mois.
L'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX soutient au contraire qu'il n'y avait aucun lien de subordination et donc aucun contrat de travail et que, subsidiairement, la convention doit s'analyser en un contrat de volontariat associatif.
Elle expose que Madame [F] agissait librement, ne fermait jamais la porte à 18 heures mais rentrait vers 22-23 heures et se faisait souvent remplacer par des bénévoles et travaillait 'au noir' dans un snack ; qu'elle n'avait aucun compte à rendre sur son emploi du temps et qu'elle n'avait aucun lien de subordination, aucune sanction ne pouvant être prise à son encontre.
En ce qui concerne la demande de nullité de la convention pour défaut de cause et cause prohibée, il convient de relever que Madame [F] ne démontre pas en quoi il y aurait défaut de cause dans la mesure où chaque partie s'engageait en connaissance de cause, Madame [F] ayant répondu à une annonce qui spécifiait une absence de rémunération autre qu'en nature et obtenu ainsi un logement ainsi que les fournitures d'eau et d'électricité en découlant, outre un abonnement téléphonique dont il ressort de son courrier en date du 23 mars 2010 qu'elle y avait greffé une ligne fixe personnelle ainsi qu'une ligne internet de son propre chef. Elle ne rapporte pas non plus la preuve de la volonté de l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX de contourner la loi sur la rémunération, s'agissant d'une association qui fonctionne quasiment exclusivement sur le bénévolat tourné vers la défense animale et dont elle ne saurait sérieusement soutenir qu'elle exerce une activité commerciale au vu de la nature de ses moyens d'existence ( subventions, donations, cotisations des bénévoles pour l'essentiel). Il n'y a donc pas lieu de prononcer la nullité de cette convention.
Quant à l'argument tenant à l'existence d'un contrat de volontariat associatif, il doit être écarté dans la mesure où l'association ne rapporte pas la preuve de la limitation à un an de ce contrat, se bornant à faire état d'un accord oral en ce sens, sans le moindre élément de preuve à l'appui. De même, si l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX excipe d'un agrément, elle ne le produit pas, en sorte que la Cour n'est pas en mesure de vérifier si cet agrément est bien celui prévu par la loi ayant mis en place ce contrat, au regard des exigences des textes, dont il ressort que:
- l'agrément est une autorisation administrative nominative, préalable à l'accueil du ou des volontaires.
-l'organisme doit présenter les garanties nécessaires à l''accomplissement d''une mission d''intérêt général.
- l'agrément est délivré par le préfet du département dans lequel l'association du droit français ou la fondation reconnue d'utilité publique a son siège social ;
- pour que l'agrément soit délivré, l'organisme doit justifier d'au moins une année d'existence et assurer une mission ou un programme de missions entrant dans le champ d'application de la loi et dont le contenu et les modalités au sein de l'organisme justifient le recours au volontariat.
D'autre part, il doit disposer d''une organisation et de moyens compatibles avec l'accueil de volontaires, présenter un budget en équilibre et une situation financière saine dans la limite des trois derniers exercices budgétaire clos. Il doit enfin bénéficier de ressources d'origine privée supérieures à 15 % de son budget annuel au cours du dernier exercice clos.
- l'agrément est accordé pour une durée de quatre ans renouvelable.
L'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX ne saurait également soutenir que Madame [F] exerçait une mission d'intérêt général revêtant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques français ainsi que prévu pour les contrats de volontariat associatif.
Cependant, l'examen du document intitulé ' convention précaire d'occupation' permet de le requalifier en contrat de travail . En effet, y sont énoncées :
- les obligations de Madame [F] qui doit ouvrir et fermer les portes du refuge, assurer l'accueil de nuit éventuel des chiens, aviser les forces de l'ordre et la présidente de l'association en cas d'incident ou d'anomalie, assurer une astreinte de nuit,
- les sanctions en cas de manquement à ces obligations : la cessation de la convention, tous éléments qui démontrent l'existence d'un lien de subordination.
Il y a lieu de rappeler que la qualification du contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination de leur convention, mais des conditions dans lesquelles la prestation de travail est fournie.
D'autre part, malgré l'absence d'écrit, l'employeur démontre que la salariée connaissait exactement la durée d'emploi convenue, au regard de la précision des tâches et ne se trouvait pas placée dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail ni dans l'obligation de se tenir constamment à la disposition de son employeur.
En conséquence, la décision du Conseil de Prud'hommes de FREJUS sera confirmée en ce qu'elle a constaté l'existence d'un contrat de travail à service partiel entre les parties, selon la définition de la convention collective de gardiens- concierges et employés d'immeubles en son article 18 en vigueur en novembre 2008.
Cette qualification doit être expressément retenue dans la mesure où Madame [F] ne conteste pas que, dans la journée, elle était libre d'exercer un emploi et qu'elle a, effectivement, travaillé dans un snack.
Sur la rémunération de Madame [F] :
L'analyse de la convention signée entre les parties permet de constater que la seule sujétion imposée à Madame [F], laquelle n'était pas à la disposition permanente de l'association, de se tenir au sein du refuge afin d'être en mesure d'intervenir en cas d'urgence, ne l'empêchait pas de vaquer à des occupations personnelles et constituait non pas un travail effectif mais une astreinte. Seule la durée de l'intervention doit être considérée comme un temps de travail effectif. Cependant, s'il est constant que toute heure d'astreinte doit donner lieu à rémunération, une disposition contractuelle ou conventionnelle peut prévoir que l'attribution du logement à titre gratuit et le paiement de factures d'électricité et d'eau constitueraient une modalité de rémunération de l'astreinte.
En l'espèce, la convention signée entre les parties prévoit expressément ce mode de rémunération de l'astreinte imposée à Madame [F]. Il résulte de la page 3 de la pièce 30 de Madame [F] ( AG 2009 de l'association ) qu'au cours de l'année 2008, le mobil-home a été changé et amélioré, en sorte qu'il y a lieu de retenir des pièces produites par l'association (photos, attestations et factures) que ce logement était décent, plomberie neuve et climatisation installée en octobre 2008, agrémenté d'une terrasse en bois, les photos produites par l'appelante étant manifestement celles des lieux avant qu'elle n'en prenne possession ainsi que cela résulte de l'attestation de Madame [O] celle de Monsieur [U] ne le contredisant pas, au regard de l'imprécision des dates, et celle de Madame [D] ne concernant manifestement pas le lieu de vie de Madame [F] mais les bureaux.
L'association soutient, sans être contredite sur ce point, que les frais de vétérinaire et de nourriture des chiens de Madame [F] étaient également pris intégralement en charge par ses soins, ce qui constitue un avantage en nature complémentaire.
En revanche, au delà de l'astreinte, il y a lieu de retenir que des interventions étaient demandées à Madame [F] :
- ouvrir et fermer le refuge,
- intervenir en cas de besoin.
Madame [F] ne conteste pas que des chiens étaient rarement amenés de nuit au refuge et elle ne produit aucune pièce quant au nombre de ses interventions nocturnes de ce chef, se contentant d'une pétition de principe, alors que l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX fait état de sept chiens amenés de nuit par les polices municipales sur une année ; elle ne fait pas non plus état d'incidents ayant nécessité son intervention dans les termes de la convention. En revanche, il est établi qu'un incendie a ravagé le refuge au cours de la nuit du 3 août 2009 et qu'elle y a fait face avec des bénévoles.
Madame [F] ne conteste pas non plus s'être fait remplacer par des bénévoles de l'association même si elle affirme que c'était très rarement, sans pièce à l'appui. Cependant, Madame [W] atteste qu'elle l'a remplacée à plusieurs reprises, qu'elle fermait le portail elle-même à la fin de son service, chaque fois qu'elle était d'après-midi et qu'il n'y avait pas à ouvrir le refuge le dimanche, la personne de permanence ce jour-là ayant la clef. Monsieur [A] atteste l'avoir remplacée deux nuits et plusieurs soirées ; Madame [K] indique également l'avoir remplacée plusieurs nuits . Elle était également régulièrement absente au moment de fermer le portail à 18 heures, Madame [E] attestant également fermer le portail en fin de journée.
En l'état des éléments du dossier, la Cour retient que Madame [F] disposait d'une nuit par semaine de repos, au cours de laquelle elle ne se trouvait pas sur les lieux, ce qui correspond au repos compensateur prévu aux application des dispositions de l'article L3132-11 du Code du Travail.
L'analyse des tâches telles que ressortant de l'annexe 1 de la convention collective, en l'absence de précision des parties sur leur quantum, doit donner lieu à rémunération fondée sur le coefficient 255 de la grille des salaire de la convention collective des gardiens, concierges et employés d'immeuble, dont le montant était, en vertu de l'avenant 73 étendu par arrêté au 1er janvier 2009, de 1525.03€ bruts mensuels, étant rappelé que ce montant de rémunération ne concernait que les salariés du groupe B à service complet, selon l'article 18 de la même convention alors en vigueur ; en effet, la situation de Madame [F] relève de ce que cette convention collective qualifie en ses articles 18 et 21 ( alors en vigueur) d'employée de catégorie B à service partiel, puisque totalisant un nombre d'unités de valeur inférieur à 2400. Le calcul à faire est donc de:
salaire X UV
10 000
L'examen de l'annexe I de la convention collective applicable, alors en vigueur, que les interventions de Madame [F] peuvent être considérées comme des travaux spécialisés équivalents à 2000 UV par mois. Leur rémunération est donc de :
1525.03€ X2000 = 305€ mensuels X douze mois
10000
soit 3660€, auxquels il y a lieu d'ajouter dix pour cent d'indemnité compensatrice de congés payés soit 366€, outre treizième mois ( de novembre 2008 à novembre 2009) de 305€.
Sur les heures supplémentaires et congés payés y afférents :
Au vu des éléments analysé précédemment, il y a lieu de retenir que Madame [F] effectuait une nuit d'astreinte et d'interventions en heures complémentaires par semaine, soit quatre par mois, quarante-huit sur l'année.
La Cour retient, dans ce cadre, un calcul de 67 UV majorées de 25% soit, selon le mode de calcul précédent :
1525.03 X ( 67 x 48) = 490.45€ + 25% = 613.06€
10 000
outre indemnité compensatrice sur congés payés afférents de 61.30€.
Sur la rupture du contrat de travail :
La convention liant les parties ayant été requalifiée en contrat de travail, l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX aurait dû procéder au licenciement de Madame [F] en respectant les conditions édictées par la loi.
Tel n'a pas été le cas et il y a lieu de considérer le licenciement comme dénué de cause réelle et sérieuse.
Il en est résulté pour Madame [F] un préjudice moral, le préjudice matériel étant compensé par le fait qu'elle a continué à occuper le mobil-home jusqu'au 28 février 2010, sans en acquitter une quelconque redevance ni payer les factures d'eau, d'électricité et de téléphone, considérant que l'interdiction légale d'expulsion en hiver l'exonérait de toute charge ( sa lettre du 23 mars 2010 - pièce12), alors que cette occupation a posé problème à l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX pour l'astreinte de nuit de la personne remplaçant Madame [F]. Il convient cependant de fixer cette indemnité à la somme de 1000€, son ancienneté étant inférieure à deux ans et l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX comptant moins de onze salariés.
Sur le non respect de la procédure :
L'absence de respect de la procédure de licenciement sera sanctionnée par l'allocation de la somme de 500€ à Madame [F] qui n'a pu bénéficier d'un entretien préalable ni être assistée.
Sur le préavis et les congés payés y afférents :
Le licenciement étant dénué de cause réelle et sérieuse, Madame [F] a droit au paiement de son préavis, sur la base des unités de valeur retenues pour le calcul de la rémunération mensuelle de 305€, soit une indemnité compensatrice de 915€ au regard de la convention collective qui fixe à trois mois le préavis de licenciement des employés de catégorie B. Elle a également droit à 91.50€ au titre des congés payés afférents.
Sur l'indemnité légale de licenciement :
Au vu des éléments du dossier, il y a lieu d'allouer de ce chef à Madame [F] la somme de 61€.
Sur la demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé :
L'examen des pièces de la procédure démontre que c'est de bonne foi que l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX qui avait publié une annonce claire et précise a cru pouvoir ne pas signer un contrat de travail et qu'elle n'a jamais eu l'intention de se soustraire à ses obligations.
En application des dispositions légales, il convient de rappeler que le caractère intentionnel nécessaire pour caractériser une demande d'indemnité sur ce fondement, ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paye.
En l'espèce, les éléments produits aux débats ne permettent pas de rapporter la preuve de cet élément intentionnel. La demande d'indemnité formée par le salarié à ce titre sera en voie de rejet.
Sur la demande de dommages et intérêts pour voies de fait :
Madame [F] soutient qu'elle a été victime de voies de fait en ce que l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX aurait coupé l'électricité et le téléphone à son détriment.
Elle ne rapporte aucun élément de preuve à l'appui, une main-courante ne constituant qu'une preuve auto-constituée non corroborée de manière objective.
Quant au fait que l'association aurait changé le cadenas de l'entrée principale, il convient de relever que cette entrée donnait accès au refuge et que Madame [F] n'avait pas vocation à s'y trouver d'autant qu'elle disposait d'une autre entrée directe au mobil home, entrée dont elle ne démontre pas l'absence d'accessibilité, sa lettre du 23 mars 2010 ne contestant pas que ce passage est entretenu . Elle s'est également maintenue dans les lieux plus de trois mois, sans offrir de prendre en charge au moins les factures de consommation d'eau, d'électricité et de téléphone qui ont été assumées par l'association.
Cette demande sera également en voie de rejet.
Sur la remise des documents sociaux :
Il y a lieu de confirmer la décision des premiers juges en ce qu'ils ont ordonné à l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX de :
- son certificat de travail,
- une attestation PÔLE EMPLOI,
- les douze bulletins de salaire de novembre 2008 à novembre 2009,
mais de dire que ces documents devront être rectifiés en considération des éléments de calcul retenus par la Cour.
Aucune résistance de l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX n'étant à craindre, les écritures de Madame [F] reconnaissant qu'elle s'était exécutée des condamnations de première instance dans le mois de la notification du jugement, il n'y a pas lieu d'assortir cette remise d'une astreinte.
Sur la demande présentée par Madame [F] de dommages et intérêts pour résistance abusive à une action en justice :
Il n'est pas établi que, dans l'exercice de son droit en défense, l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX aurait commis une faute de nature à faire dégénérer cet exercice en abus, il échet de débouter Madame [F] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive :
Madame [F] ayant été partiellement admise en ses demandes, la demande reconventionnelle de dommages et intérêts reconventionnelle présentée par l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX ne saurait prospérer.
Sur les demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens :
L'équité commande de laisser à chaque partie la charge de ses propres frais et dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, en matière prud'homale, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au Greffe, le onze décembre deux mille douze,
REÇOIT l'appel régulier en la forme,
CONFIRME partiellement le jugement en date du 2 septembre 2011 du Conseil de Prud'hommes de FREJUS en ce qu'il a requalifié la convention liant Madame [F] et l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX en contrat de travail,
Le réforme pour le surplus,
Et statuant sur le tout pour plus de clarté,
DÉBOUTE Madame [F] de sa demande de nullité de la convention la liant à l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX,
REQUALIFIE cette convention en contrat de travail,
CONSTATE que Madame [F] était soumise à des astreintes et que ces astreintes étaient rémunérée par la mise à disposition d'un logement, de l'eau, de l'électricité et d'un téléphone,
CONSTATE que Madame [F] a, dans le cadre de ses astreintes, amenée à effectuer des interventions,
FIXE à DEUX MILLE (2000) unités de valeur le montant mensuel de rémunération de ces interventions soit 305€ mensuels,
CONSTATE que Madame [F] a également droit de ce chef à une indemnité compensatrice de congés payés et un treizième mois,
CONSTATE l'existence d'heures complémentaires calculées à 67 unités de valeur, outre congés payés afférents
CONSTATE que la procédure de licenciement n'a pas été respectée,
DIT que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse,
CONDAMNE en conséquence l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX à payer à Madame [F] , en deniers ou quittances, les sommes de :
- TROIS MILLE SIX CENT SOIXANTE EUROS (3660€) bruts de rappel de salaires,
- TROIS CENT SOIXANTE SIX EUROS (366€) bruts d' indemnité compensatrice de congés payés,
- TROIS CENT CINQ EUROS (305€) bruts au titre du treizième mois,
- SIX CENT TREIZE EUROS ET SIX CENTS (613.06€) bruts au titre des heures complémentaires,
- SOIXANTE ET UN EUROS TRENTE CENTS (61.30€) d'indemnité compensatrice de congés payés sur heures complémentaires,
- NEUF CENTS QUINZE EUROS (915€) bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
- QUATRE-VINGT ONZE EUROS et CINQUANTE CENTS (91.50€) bruts au titre des congés payés sur préavis,
- SOIXANTE ET UN EUROS (61€) d'indemnité compensatrice de licenciement,
- CINQ CENTS EUROS (500€) de dommages et intérêts pour non respect de la procédure,
- MILLE EUROS (1000€) de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,.
ORDONNE à l'ASSOCIATION VAROISE DE SECOURS AUX ANIMAUX de remettre à Madame [F] certificat de travail, attestation PÔLE EMPLOI, bulletins de salaire de novembre 2008 à novembre 2009, rectifiés en considération de la présente décision,
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,
LAISSE à chaque partie la charge de ses propres frais et dépens.
LE GREFFIER.LE CONSEILLER
POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ.