COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
17e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 11 DECEMBRE 2012
N° 2012/
MV/FP-D
Rôle N° 09/20829
[H] [E]
C/
Société SERVICES VALEURS FONDS
Grosse délivrée
le :
à :
Me Jean-Jérôme MONDOLONI, avocat au barreau de NICE
Me Cécile SCHWAL, avocat au barreau de NICE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 22 Février 2007, enregistré au répertoire général sous le n° 05/1311.
APPELANT
Monsieur [H] [E], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Jean-Jérôme MONDOLONI, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
Société SERVICES VALEURS FONDS, demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Cécile SCHWAL, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 22 Octobre 2012 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Yves ROUSSEL, Président
Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller
Madame Corinne HERMEREL, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Décembre 2012.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Décembre 2012.
Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Monsieur [H] [E] a été engagé par la Société SERVICE VALEURS FONDS ci-après dénommée SVF le 1er février 1988 en qualité d'aide comptable coefficient 170 moyennant la rémunération mensuelle brute de 5 928 Francs comprenant la prime SF.
Le 3 avril 1990 il était affecté en salle forte moyennant la rémunération mensuelle brute de 7 236 F comprenant la prime SF .
En 1994 Monsieur [E] a été élu délégué du personnel et le 15 novembre 1995 délégué syndical et représentant syndical au comité d'entreprise et le 14 octobre 2005 conseiller du salarié.
A compter du 29 novembre 2007 Monsieur [E] était en arrêt maladie.
Le 23 mai 2008 lors de la visite de reprise le Médecin du Travail le déclarait inapte temporaire et le 2 juin 2008 « apte à la reprise à son poste mais un poste au PC par exemple lui serait plus salutaire ».
M. [E] était affecté hors salle forte au service DAB.
Le 1er juillet 2008 le Médecin du Travail déclarait M. [E] « apte ».
M. [E] a été réaffecté en salle forte.
Le 3 février 2009 le Médecin du Travail déclarait M. [E] « inapte définitivement à son poste d'agent de comptage mais reste apte à tout poste ne nécessitant pas un enfermement continu et sans port d'arme ».
Le 9 février 2009 Monsieur [E] était convoqué à un entretien préalable fixé au 16 février 2009 et, après autorisation de licenciement donné par l'Inspection du travail le 16 avril 2009 , il était le 16 avril 2009 licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Le 21 décembre 2005 M. [E] soutenant avoir été victime d'une discrimination syndicale, salariale et dans le déroulement de sa carrière et sollicitant un rappel de salaire sur cinq ans avait saisi le Conseil de Prud'hommes de GRASSE, lequel, par jugement du 22 février 2007, a dit qu'il n'a pas été victime de discrimination syndicale, que les coefficients hiérarchiques appliqués étaient justifiés et conformes à la législation, l'a débouté de toutes ses demandes, a débouté la société SVF sa demande reconventionnelle et a condamné M. [E] aux dépens.
Ayant le 20 mars 2007 régulièrement relevé appel de cette décision M. [E], au visa des articles L. 1132. 1 et L 2141. 5 du code du travail demande à la Cour de dire et juger qu'il a été victime d'une discrimination syndicale et salariale dans le déroulement de sa carrière, qu'il doit bénéficier du statut de cadre, coefficient 106,5 et d'un salaire mensuel de 3016,02 €, en conséquence, de condamner la société SVF à lui verser les sommes de :
84 361,20 € à titre de rappel de salaire à compter de la saisine du Conseil des prud'hommes, soit le 16 décembre 2005, à parfaire en fonction de la date du délibéré,
25 000 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale et dans le déroulement de sa carrière,
2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
ainsi qu'à lui délivrer des bulletins de salaire régularisés.
Il fait valoir qu'il a subi alors qu'il était salarié protégé des modifications unilatérales de son coefficient sans son accord, l'employeur pratiquant ainsi une politique de harcèlement permanente ayant pour objet visiblement de calmer son ardeur syndicale ; que des salariés embauchés après lui pour exercer des fonctions similaires ont fait l'objet de promotions diverses et d'augmentations de salaire alors qu'il est toujours resté bloqué pratiquement au même poste et au même niveau ; que son déroulement de carrière est à la mesure de la mauvaise foi de l'employeur ; que celui-ci n'a jamais répondu à ses questions concernant la définition des coefficients, n'a pas fait droit à sa demande d'entretien concernant son déroulement de carrière, ne produit pas malgré sa demande les bulletins de salaire concernant un certain nombre de salariés embauchés en même temps que lui ou postérieurement dans un service comparable ; qu'à peine rentré d'arrêt maladie il s'est vu affecté à un poste puis a été sommé de le quitter pour rejoindre son ancien poste en salle forte alors que le Médecin du Travail conseillait un reclassement à un autre poste même s'il l'a reconnu apte à cette fonction ; qu'une telle attitude de la part de l'employeur est totalement inacceptable vis-à-vis d'un salarié fragilisé, victime depuis des années d'une discrimination évidente dans le déroulement de sa carrière ; que l'employeur n'a pas pris en compte la formation de gestion et développement aux ressources humaines qu'il a suivie ; qu'il aurait dû depuis plusieurs années passer agent de maîtrise puis cadre alors qu'il est resté agent de niveau II au coefficient 130 sans jamais avoir obtenu de réponse à ses questions concernant les définitions de postes ; que sa comparaison avec M.[B] et avec M.[S] démontre la discrimination salariale pratiquée à son encontre alors qu'il n'est pas justifié que ces derniers aient une formation professionnelle spécifique expliquant les différences constatées dans leur déroulement de carrière respectif et le montant de leur salaire ; que la société SVF refuse de communiquer les bulletins de salaire de salariés dont il indique le nom démontrant ainsi qu'elle n'entend pas justifier par des éléments de preuve objectifs la différence de traitement qu'il a subi dans le déroulement de sa carrière.
La société SVF conclut à la confirmation du jugement déféré aux fins de voir dire que M.[E] n'a pas été victime de discrimination syndicale en soi et dans son déroulement de carrière, qu'il ne peut prétendre au statut cadre, que les demandes financières de celui-ci sont injustifiées et mal fondées et qu'il doit en être débouté.
Elle sollicite la condamnation de M. [E] à lui verser la somme de 4000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et sollicite sa condamnation au paiement d'une amende civile de 2000 € pour procédure abusive.
Elle fait valoir que les changements de coefficient intervenus n'ont pas concerné uniquement M. [E] mais tous les salariés et ne sont intervenus qu'au titre du statut collectif qui a évolué à partir de 1994 ; que M. [E] conformément à la pièce numéro 5 qu'il produit a obtenu la réponse à sa question posée sur les coefficients ; que la filière « comptage de fonds » n'existe pas ; que M.[S] et [B] auquel M. [E] se compare ont connu une évolution de carrière différente parce qu'ils ont montré des aptitudes supérieures non seulement à celles de M. [E] mais également à celles d'autres agents d'exploitation ; que d'autres salariés embauchés à la même époque que M. [E] ou même avant lui étaient encore, comme lui lors de son licenciement, agents d'exploitation ; que M. [E] a perçu la même rémunération que celle des autres salariés placés dans une situation identique à la sienne ; que les situations de Mme [T] et de Mlle [V] sont très différentes de celles de M. [E] ; qu'elle n'a pas à produire les bulletins de salaire d'un certain nombre de salariés d'une part parce qu'une telle production nécessite l'autorisation des intéressés, autorisation que M. [E] n'a pas sollicitée et d'autre part et surtout parce que M.[E] n'est pas fondé à se comparer à des salariés placés dans une situation totalement différente ; que c'est en raison de l'avis d'aptitude sans réserve du 1er juillet 2008 émis par le Médecin du Travail qu'elle a demandé à M. [E] de reprendre son poste en salle forte ; que les attestations d'autres salariés détenant des mandats syndicaux ou de représentation du personnel attestent de l'absence de discrimination au sein de l'entreprise ; que dans le cadre de l'accord d'entreprise NAO 2011 les organisations syndicales ont reconnu l'absence de discrimination salariale et syndicale au sein du groupe Sazias pour le passé et au jour de la signature de l'accord.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il y a lieu de se référer au jugement du Conseil de Prud'hommes et aux écritures déposées, oralement reprises.
Sur ce,
Attendu qu'aux termes de l'Article L1132-1 du code du travail :
« ... aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, au sens de l'Article L3221 3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de... de ses activités syndicales ou mutualistes.... »
de l'article L 2141-5 alinéa 1er du même code :
« Il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail »
et de l'article L 1134. 1 du même code :
« Lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles » ;
Attendu que s'il est exact que les bulletins de salaire de M. [E] ont connu entre 1988 et 2002 des modifications unilatérales de son coefficient (170 en 1988,140 en 1993, 125 en 1994,115 en 1995,120 en 2000 et 130 en 2002) il apparaît, ainsi que la Société SVF s'en est expliquée par courrier adressé à l' Inspection du Travail le 16 septembre 2003, laquelle n'a nullement remis en question cette explication, que lors de l' embauche de M. [E] en 1988 aucune convention collective n'était applicable de sorte que le « coefficient 170 mentionné sur le contrat de travail ne correspond à aucune référence de convention collective ni aucune grille de salaire » puis qu'en 1993 « notre cabinet comptable PISSETAZ a appliqué par erreur à l'ensemble de notre personnel les coefficients attribués par la Convention des transports routiers de marchandises alors que c'est la convention des transports de fonds qui aurait dû être appliquée » ce qui explique que par référence erronée à l'époque à la Convention Collective des Transports Routiers, groupe 8, le poste d'« aide comptable » qui était celui de M. [E] ait été affecté du coefficient 140, puis du coefficient 125 , erreurs dont a également été victime M. [X], entré dans la société le 2 janvier 1986 comme aide comptable et qui ont été réparées en 1994 à la suite de l'entrée en vigueur de la classification de la Convention Collective Nationale des Transports de Fonds et de Valeurs définissant 5 filières différentes dont quatre filières autonomes (traitement des fonds et valeurs, chambre forte, transport, maintenance en installations automatisées) et une filière commune : la filière exploitation ;
Attendu que M. [E] effectuant alors des tâches de traitement de fond et de valeurs, la qualification de son emploi est devenue celle d'« opérateur » au coefficient 115 conformément à la Convention Collective applicable ;
Attendu que cette même Convention Collective précisant dans son annexe I relative à la classification, à la nomenclature et à la définition des emplois que :
« Dans les unités d'exploitation où l'organisation des activités ne permet pas une structure faisant appel à la spécialisation des tâches, les opérations décrites dans les différentes filières d'emplois peuvent être assurées pour tout ou partie par un agent d'exploitation dans les conditions suivantes:
- lorsque ces opérations font appel à des compétences nécessaires à l'exercice d'activités appartenant à plusieurs filières le titulaire du poste est classé: " agent d'exploitation" niv. 1 (2 filières) ou niv, Il (plus de 2 filières) ;
- lorsque ces opérations font en plus appel à des compétences nécessaires à l'exercice d'une mission d'encadrement le titulaire du poste est classé: " chef d'équipe d'exploitation" niv. 1 (2 filières) ou niv. Il (plus de 2 filières) »
cela explique qu'en 2000 M. [E] ait été classé agent de Niveau I au coefficient 120 puis en 2002, à la suite d'une promotion interne , agent de niveau II au coefficient 130 ;
Attendu que M. [E] n'a subi du fait de ces fluctuations aucune baisse de salaire consécutive à ces modifications de coefficient , modifications elle-mêmes en rapport - hormis l'erreur sans incidence salariale commise avant 1994 - avec la mise en place d'un statut collectif ;
Attendu par ailleurs que contrairement à ce que soutient M. [E] , à savoir qu'il n'aurait pas obtenu de réponse à sa demande de définition des fonctions correspondant aux coefficients 130 et 145, il ressort de la pièce qu'il communique en n° 5 qu'il a obtenu la définition des emplois correspondant aux coefficients 115,130, 145 et 160 conformément à la demande formulée auprès de son employeur dans son courrier du 12 mai 2003, précision faite que dans ledit courrier il précise lui-même que « seuls les coefficients 130 et 145 ont été définis par M. [K] » ce qui démontre qu'il a bien obtenu les définitions sollicitées ;
Attendu en outre qu'il résulte de la pièce n° 29 qu'il produit à savoir le procès-verbal de la réunion des délégués du personnel du 6 mars 2003 qu'y est annexée la définition des emplois correspondant au coefficient 130 et au coefficient 145, de sorte que c'est à tort qu'il soutient n'avoir jamais obtenu de réponse à ce titre ;
Attendu par ailleurs que lorsque le 1er mars 2005 M. [E] demande à son employeur de faire figurer sur son bulletin de salaire le coefficient 130 correspondant à la « filière du comptage de fonds » c'est à juste titre que le 8 mars 2005 l'employeur lui répond ne pas être en mesure de faire droit à sa demande dans la mesure où cette filière n'existe pas en lui précisant qu'il appartient à la filière exploitation telle que prévue par la classification conventionnelle de branche ;
Attendu qu'il ressort en effet du tableau des coefficients résultant de l'avenant à la Convention Collective du 20 octobre 1993 que dans la filière « chambre forte » et dans la filière « exploitation » le coefficient 120 correspond à l'agent ou l'agent de niveau I alors que le niveau 130 correspond à la qualification de chef d'équipe dans la filière traitement des fonds et des valeurs et à la qualification d'agent de niveau II dans la filière exploitation, ce qui correspondait en dernier lieu à la qualification de M. [E] ;
Attendu que c'est donc à tort que M. [E] soutient que les changements de coefficients n'auraient eu pour but que de le déstabiliser et de violer son statut protecteur et constitueraient l'un des éléments de la discrimination syndicale ;
Attendu que M. [E] indique par ailleurs que des personnes embauchées après lui dans le même service ont bénéficié très rapidement du même coefficient que lui ou ont fait l'objet de promotions diverses et d'augmentations de salaire alors qu'il a en ce qui le concerne était bloqué au niveau agent niveau II, se référant en cela à M.[S] et à M. [B] alors qu'il y a lieu, comme il le revendique lui-même, de comparer sa situation « au déroulement de carrière des salariés embauchés en même temps que lui ou postérieurement à lui et dans un service comparable » ;
Attendu en effet que le principe « à travail égal, salaire égal » énoncé par les articles L. 2261. 22 et L. 2271. 1 du code du travail impose à l'employeur d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'un ou l'autre sexe, pour autant que les salariés en cause soient placés dans une situation identique ;
Attendu en effet que l'article L. 3221. 4 du code définit le travail de « valeur égale » de la façon suivante :
« sont considérés comme ayant une valeur égale les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles, consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse »,
de sorte que face à la constatation d'une différence de rémunération entre des salariés de même catégorie professionnelle effectuant un même travail ou un travail de valeur égale il appartient à l'employeur de justifier par des raisons objectives et pertinentes la différence de rémunération constatée ;
Attendu qu'il convient donc d'examiner si l'ensemble des salariés travaillant dans les mêmes locaux et le même service que M. [E] et avec lesquels il se compare effectuent ou non au sens des textes susvisés un travail de valeur égale ;
Attendu qu'il apparaît que M.[S], embauché le 8 septembre 1989 est devenu chef d'équipe salle forte tandis que M. [B], embauché en septembre 1989 est devenu responsable DAB, travaillant donc concernant ce dernier dans une activité différente, que la promotion de ces deux salariés est intervenue en fonction de critères fondés uniquement sur leur valeur intrinsèque ainsi qu'en a témoigné M. [K], à savoir « la compétence et la compréhension dans la gestion des dossiers et des événements, l'aptitude à encadrer des équipes, leur résistance à l'effort » de sorte qu'il existe une raison objective et pertinente à ce que des fonctions d'encadrement leur aient été confiées et à ce qu'ils aient connu une évolution différente de celle de salariés moins performants ;
Attendu au surplus que M.[B], est membre du comité d'entreprise ce qui démontre que son appartenance syndicale n'a pas été pas un obstacle à sa promotion et que seules ses qualités intrinsèques lui ont permis d'accéder à une fonction d'encadrement ;
Attendu par ailleurs que la société SVF démontre que d'autres salariés embauchés pour l'un d'entre eux, M.[C], le 11 décembre 1989 soit 10 mois après M. [E] et pour trois autres, M.[W], M.[X] et Mme [R] avant M. [E], respectivement en août 1987, en janvier 1986 et en octobre 1986, tous en qualité d'aide comptable, étaient encore le 2 mai 2006 au même niveau que M. [E], soit agent niveau II alors qu'ils travaillaient tous à la salle forte et effectuaient donc un travail de valeur égale ;
Attendu que la liste du « personnel salle forte » établie le 2 mai 2006 démontre que 27 salariés sont au niveau agent niveau I, que 19 salariés dont M. [E] sont agent niveau II, que 7 salariés sont chef d'équipe niveau I, que 4 salariés dont M.[S] sont chef de service et que seuls deux salariés sont cadres, répartition du personnel démontrant que M. [E] a un déroulement de carrière banal comparé à celui de salariés exerçant un travail de valeur égale au sien et que n'est donc aucunement établie l'existence d'une discrimination dans son déroulement de carrière ;
Attendu en conséquence que la comparaison faite par M. [E] entre ses salaires et ceux de M.[S] et de M.[B] n'est pas pertinente et est insusceptible de concrétiser la discrimination salariale qu'il invoque ;
Attendu que M. [E] se compare également à Mme [T], embauchée en 1996 en qualité de directeur administratif et financier alors que contrairement à ce que soutient M. [E] elle a une expérience de chargée de clientèle en entreprise à la Société Générale entre 1990 et 1995, de conseiller financier pour les PME-PMI en 1995 et 1996, est titulaire du baccalauréat et de 2 DU de psychologie, d'un brevet de banque, d'un examen classe V (cadre) à la Société Générale de Marseille, a obtenu en 2006 un diplôme de sciences et techniques en management et a intégré en 2007 [3] de sorte qu'elle avait une expérience supérieure à celle de M. [E] , qu'elle était plus diplômée que lui, que ses diplômes étaient utiles à l'exercice des fonctions qu'elle occupait, précision faite qu'en toute hypothèse Mme [T] ne relève pas de la filière exploitation et n'effectuait donc pas un travail de valeur égale à celui de M. [E] de sorte que c'est inutilement et de façon erronée qu'il se compare à l'intéressée ;
Attendu que le fait que M. [E] ait suivi à son initiative entre le 15 novembre 2002 et le 11 octobre 2003 une formation professionnelle de gestion et développement des ressources humaines, formation « non diplômante » - et dont lui-même a indiqué « dans l'esprit social qui caractérise la Direction de SAZIAS, celle-ci m'a permis de suivre une formation dont le contenu était laissé à ma discrétion » - n'est pas de nature à lui permettre de revendiquer le poste de directeur administratif et financier qui a été confié en 1996 à Mme [T] tant en fonction des diplômes détenus par cette dernière que de son expérience professionnelle ;
Attendu en conséquence que le fait que M. [E] se soit vu opposer un refus , après sa formation, à une candidature pour un poste spécialisé dans le social au motif qu'il n'y avait « rien à vous proposer » n'est que la constatation objective d'une situation de fait,M. [E] ne pouvant se prévaloir de cette formation pour exiger une promotion ou une autre fonction ;
Attendu que M. [E] soutient que la formation de Mme [T] en matière de « brevet de banque » n'est pas une raison pour que celle-ci ait une place que l'employeur ne lui a jamais proposée ajoutant que pendant les absences de cette dernière elle « est remplacée par M.[U] qui a le baccalauréat » , comme lui , alors que contrairement à ce qu'il indique M.[U] a un brevet de technicien supérieur en comptabilité et gestion des organisations et qu'en conséquence il disposait d'un diplôme supérieur à ceux détenus par M. [E] (baccalauréat, BEP et CAP) utile à l'exercice des fonctions confiées lui permettant de pouvoir effectivement temporairement remplacer Mme [T] lors de ses absences ;
Attendu que c'est donc à tort que M. [E] soutient que la société SVF « se fonde sur des critères à géométrie variable en opposant soit celui des diplômes soit celui de l'expérience professionnelle » lui permettant de l'exclure de toute promotion alors précisément que les critères en question sont des critères objectifs et pertinents de nature à justifier des différences de postes ;
Attendu que M. [E] invoque également l'attitude qu'aurait adoptée l'employeur à son égard après la constatation de son inaptitude en l'affectant en salle forte alors que le médecin du travail aurait conseillé un reclassement à une autre fonction alors qu'il apparaît qu'après avis du 23 mai 2008 et du 2 juin 2008 M. [E] a été affecté hors salle forte à une fonction d'agent de comptage au service DAB, puis, après l'avis d'aptitude à son poste en date du 1er juillet 2008, a été réaffecté à son poste initial en salle forte, soit conformément à l'avis du Médecin du Travail, ce à quoi M. [E] n'avait aucun motif de s'opposer ;
Attendu d'ailleurs qu'à la suite de la plainte adressée par M. [E] à l'Inspection du Travail pour « réaffectation à son poste initial en chambre forte », cette dernière par courrier du 2 décembre 2008 lui a indiqué :
« votre employeur m'a indiqué maintenir sa décision puisque le médecin du travail n'avait pas rendu d'avis d'inaptitude. Toutefois, si vous estimiez que le retour à la salle forte porte atteinte à votre santé, seul le Médecin du travail pourrait se prononcer sur votre aptitude médicale. Si une inaptitude médicale en salle forte était prononcée, l'employeur devrait alors rechercher un poste de reclassement. En tout état de cause, j'ai demandé à la Direction de revoir avec vous-même votre affectation et les tâches qui pourraient vous être confiées dans l'entreprise. Elle m'a précisé ne pas y être opposée... »
confirmant le fait que cette affectation en salle forte était conforme à l'avis d'aptitude du médecin du travail ;
Attendu enfin que M. [E] sollicite la production des bulletins de salaire de divers salariés et se plaint de ce que la société SVF refuserait de les communiquer alors d'une part que comme le fait à juste titre remarquer cette dernière une telle production nécessite l'autorisation des salariés concernés, non sollicitée en l'espèce et alors d'autre part que pour quatre de ses salariés, Mme [T] susvisée, M.[B] susvisé, Mme [V], directrice des ressources humaines et M.[J] Directeur, il s'agit de salariés n'effectuant pas un travail de valeur égale au sien, que pour trois autres salariés, M.[Z] et M.[F] et M.[A] il s'agit de salariés affectés à une autre société, la société EUROVAL, et au surplus travaillant dans un secteur d'activité différent (transport,DAB et agence), qui n'étaient donc pas placés dans une situation identique à la sienne et qu'enfin M. [K], responsable salle forte, a été embauché en 1977, soit 16 ans avant M.[E] et n'effectuait pas un travail de valeur égale au sien ;
Attendu enfin que la société SVF produit les attestations de :
M.[G], délégué titulaire au comité d'entreprise et délégué du personnel, indiquant : «... n'avoir constaté aucune discrimination syndicale ou autre au sein de la société SVF depuis mon embauche en 1997. En effet, j'ai obtenu moi-même une promotion au grade de chef d'équipe niveau I alors que j'étais délégué titulaire du personnel depuis 2001 et le suis toujours actuellement. Je constate également que des employés de tous les différents syndicats...ont obtenu diverses promotions dès le moment qu'un poste était libre ou au moment opportun »,
M.[L], qui a été depuis 1990 successivement délégué du personnel, délégué au comité d'entreprise, délégué représentant syndical et actuellement secrétaire au CHSCT, indiquant : « je certifie par la présente n'avoir jamais été sujet à des pressions ni de menaces émanant de la direction... je n'ai jamais non plus été l'objet de "promotions exceptionnelles" au sein de l'entreprise au vu de mes divers mandats. Je n'ai pas non plus fait de demandes personnelles concernant une évolution qui ne m'aurait pu être accordée que dans mes capacités et non pas de par mon statut syndical »,
M.[N] : « je suis entré le 1er février 89 et atteste sur l'honneur n'avoir subi aucune discrimination syndicale ou autre au sein de la société SVF. Jusqu'à ce jour, j'ai effectué différents mandats dont celui de délégué du personnel, secrétaire au comité d'entreprise. A mes yeux aucune personne n'a subi de stagnation dans son évolution de carrière ne serait-ce qu'à cause de ses mandats»
confirmant si besoin était l'absence de discrimination syndicale ou salariale au sein de la société SVF ;
Attendu que c'est en conséquence à juste raison que faute de constater des inégalités de traitement entre salariés placés dans une situation identique et d'établir un lien entre les inégalités et l'appartenance syndicale le jugement déféré a débouté M. [E] de ses demandes en rappel de salaire et en paiement de dommages et intérêts ;
Attendu que la société SVF ne démontrant pas en quoi la procédure initiée par M. [E], qui a conclu au fond, serait dilatoire ou abusive, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de condamnation quelle formule au titre d'une amende civile sur le fondement de l'article 32. 1 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il y a lieu de condamner M. [E] à verser à la société SVF la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,
Rejette toute demande plus ample ou contraire,
Condamne M. [E] aux dépens ainsi qu' à payer à la société SERVICE VALEURS FONDS la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT