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13/11/2012 | FRANCE | N°10/04573

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 13 novembre 2012, 10/04573


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 13 NOVEMBRE 2012



N° 2012/819













Rôle N° 10/04573





[C] [M]





C/



SARL AGOLOC

































Grosse délivrée

le :

à :

- Me Michel AMAS, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Frédéric DELCOURT, avocat au barreau de TOULON

>
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 19 Février 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/225.







APPELANTE



Mademoiselle [C] [M], demeurant [Adresse 1]



représentée p...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 13 NOVEMBRE 2012

N° 2012/819

Rôle N° 10/04573

[C] [M]

C/

SARL AGOLOC

Grosse délivrée

le :

à :

- Me Michel AMAS, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Frédéric DELCOURT, avocat au barreau de TOULON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 19 Février 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/225.

APPELANTE

Mademoiselle [C] [M], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Michel AMAS, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Isabelle SCHENONE-AMAS, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SARL AGOLOC, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Frédéric DELCOURT, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 25 Octobre 2012 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Gisèle BAETSLE, Président

Madame Fabienne ADAM, Conseiller

Madame Christine LORENZINI, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Julia DELABORDE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Novembre 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Novembre 2012.

Signé par Madame Gisèle BAETSLE, Président et Mme Julia DELABORDE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Mme [M] a été embauchée le 2/01/2001 par la société AUTOLOC aux droits de laquelle vient la SARL AGOLOC depuis 2005 en qualité de cadre, chef d'agence, coefficient 100.

Elle a été en arrêt de travail à compter du 26/09/2008 et a été licenciée pour inaptitude le 13/11/2010.

Saisi, le 18/02/2009, par Mme [M] d'une demande en résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur ,en paiement de diverses indemnités de ruptures, en dommages-intérêts pour harcèlement moral, en rappel de salaires en fonction des activités réellement exercées, par jugement du 19/02/2010, le conseil de prud'hommes de Toulon a débouté Mme [M] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée au paiement de la somme de 200 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [M] a régulièrement fait appel de cette décision.

Reprenant oralement leurs conclusions auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de leurs moyens, Mme [M] sollicite la réformation de la décision entreprise et réclame les sommes de :

- 6 600 € au titre du préavis

-36 000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture de son contrat de travail

-20 000 € de dommages-intérêts pour harcèlement moral

- 5 384,45 € brut de congés payés

-30 161,43 € au titre du réajustement de salaire

- 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Elle soutient que sa maladie est la conséquence directe de ses conditions de travail, des pressions qu'elle a subies de la part de son employeur alors même qu'elle se trouvait en arrêt de travail.

Elle soutient que de par ses fonctions réelles elle relevait du niveau 3 coefficient 140.

tandis que l'employeur conclut à l'infirmation du jugement déféré devant la cour et sollicite la condamnation de Mme [M] au remboursement des sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire et à celle de 3000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

La SARL AGOLOC conclut quant elle à la confirmation du jugement déféré et sollicite la somme de 3000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur la rupture du contrat de travail :

Mme [M] demande que la rupture du contrat de travail soit déclarée aux torts de l'employeur en raison du harcèlement moral dont il a fait preuve à son égard et qui est directement à l'origine de son inaptitude.

Aux termes de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L 1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte , notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement du contrat pour avoir subi ou refuser de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

L'article L 1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ses éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce , Mme [M] se plaint de ne pas avoir été rétribuée en fonction des activités réellement exercées par elle ; d'avoir fait l'objet d'une convocation à un entretien préalable en vue d'un licenciement économique non suivi d'effet ; d'avoir été destinataire alors qu'elle était en maladie de deux courriers pour lui reprocher son absence, la restitution du véhicule dont elle disposait et du téléphone portable de l'entreprise; d'avoir fait l'objet de pressions constantes de la part de M. [W] qui avait réparti, le temps de son congé maternité, sa charge de travail sur deux personnes et ne lui a pas restitué l'intégralité de ses fonctions à son retour et l'a dénigrée auprès des autres salariées ; qu'elle a dû subir des retards de paiement de ses salaires, des pressions sur la réalisation du chiffre d'affaires, toutes pressions et mesquinerie qui ont mis en danger sa santé ; que le harcèlement moral dont elle a été victime s'est poursuivi pendant l'arrêt maladie, l'employeur ayant même téléphoné à son médecin traitant afin de l'interroger sur sa pathologie.

Pour étayer ses affirmations, Mme [M] produit notamment:

-des courriers de juin à décembre 2008

-trois attestations des trois autres salariés travaillant au sein de l'agence

-quatre attestations émanant de M. [X], de Mme [J], de M. [D], son concubin et de Mlle [P], fille de son concubin

-une attestation de son médecin traitant

-divers courriers relatifs au complément maladie.

Mme [M] établit ainsi l'existence matérielle de faits précis qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre.

L'employeur fait valoir de son côté que Mme [M] a été rétribuée en fonction des activités qu'elle -même reconnaît dans ses écritures être les siennes et il sera vu ci-dessous que la demande de requalification et en rappel de salaires de Mme [M] n'est pas justifiée.

Il ajoute que les courriers adressés à Mme [M] lors de son arrêt de travail avait pour seul but de lui demander de restituer véhicule destiné à la location et le téléphone portable permettant d'assurer les permanences téléphoniques qui faisaient défaut à l'entreprise.

Il est à préciser que ces objets n'ont été restitués qu'après demande de l'employeur alors qu'ils ne constituaient pas des avantages en nature prévus au contrat de travail.

Il fait remarquer que les trois autres salariées ayant attesté d'un comportement qu'elles estiment être du harcèlement moral de la part de M. [W] ont elles-mêmes saisi le Conseil de Prud'hommes de faits identiques et que celles émanant de tiers de l'entreprise émanent de personnes qui ont pu constater seulement un état dépressif et non des faits de harcèlement moral.

Il produit quant à lui les attestations de divers employés ayant travaillé ou travaillant dans l'entreprise qui n'ont jamais constaté des faits de harcèlement au sein de celle-ci.

Il ajoute que les retards de paiement des compléments maladie est dû au fait que cette activité relevait des fonctions de Mme [M] qu'il a fallu remplacer lors de son arrêt de travail.

L'employeur démontre ainsi que les griefs avancés par Mme [M] sont justifiés par des éléments objectif étrangers à tout harcèlement.

En effet, ne constituent pas des faits de harcèlement mais relèvent de son pouvoir de direction et de contrôle:

-le fait de la part de l'employeur de vouloir faire le point avec le chef d'agence sur la situation économique de l'entreprise alors en difficultés, d'insister sur l'importance du chiffre d'affaires à réaliser et d'avoir pu concevoir un licenciement économique auquel d'ailleurs il renoncera

-de demander la restitution de matériels nécessaires au fonctionnement de l'entreprise à une salariée en arrêt maladie et qui n'en a plus de ce fait l'utilité;

-de s'inquiéter de l'état de santé de sa salariée auprès de son médecin.

Il sera par ailleurs fait remarquer que les attestations Mmes [E], [N] et [K]qui se sont établis des attestations réciproques dans les différentes instances introduites devant le conseil de prud'hommes de Toulon laissent planer un doute sur leur objectivité et ce d'autant que M. [W] donne une autre version des faits et qu'il apparaît que Mmes [E], [N] et [K] auraient pu se plaindre des faits d'harcèlement qu'elles déclarent avoir subi auprès justement de leur chef d'agence et elle-même auprès du dirigeant de l'entreprise, ce qui n'a jamais été fait.

Enfin, Mme [M] ne produit aucun certificat médical permettant de relier sa maladie à un quelconque harcèlement.

Les demandes relatives au harcèlement et au licenciement doivent en conséquence être rejetées.

Sur les congés payés :

Mme [M] fait valoir qu'elle a acquis 56,5 jours de congés payés pendant sa présence dans l'entreprise et en demande le paiement.

Elle produit à l'appui de sa demande :

-trois récapitulatifs de congés/récupération année 2007-2008 dont il résulte du dernier état qu'elle aurait acquis:7 jours en 2007 et 54 jours en 2008

-le jugement arrêtant le plan de cession du 18/01/2005 dans lequel il est prévu qu'AGOLOC prendra à sa charge les congés payés à compter du 1er mai 2004

-une lettre du mandataire judiciaire en date du 31/08/2005 questionnant Mme [M] au sujet des congés payés

-un bulletin de salaire de mai 2004 à titre d'exemple de congés payés non pris.

Les congés payés que réclame Mme [M] sont postérieurs à la cession de la société AUTOLOC et seuls le denier récapitulatif des congés payés acquis en 2007-2008 sert à étayer sa demande.

L'indemnité de congés payés ne peut se cumuler avec le salaire auquel elle se substitue et le salarié est fondé à réclamer des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par la privation de congés pour autant qu'il justifie que c'est l'employeur qui s'est opposé à la prise du congé.

Cette preuve n'étant pas rapportée, le Conseil de Prud'hommes qui l'a déboutée de sa demande à ce titre sera confirmé.

Sur le rappel de salaire:

Mme [M] prétend à une qualification supérieure à celle pour laquelle elle a été rétribuée.

Mme [M] a été embauchée en qualité de chef d'agence au coefficient 100, correspondant à une classification de cadre.

La convention collective de l'automobile à laquelle font référence les parties définit le chef d'agence comme le salarié assurant les activités concourant à la gestion économique , organisationnelle et humaine d'une ou plusieurs stations de location.

La convention collective précise que le chef d'agence a des activités relatives au management, des activités commerciales et des activités de gestion et d'organisation .

Mme [M] précise que les fonctions qui étaient les siennes étaient les suivantes :

-réception des clients

-signature des contrats

-gestion des procès verbaux , des impayés , des sinistres

- toutes activités touchant à la banque, les chèques, les espèces

-conservation des clés de l'agence.

Elle revendique le niveau III de la classification des cadres qui en comprend cinq.

Le niveau I qui est celui correspondant à son coefficient 100 concerne, selon la convention collective:

-les cadres diplômés débutants pour une durée maximale de 18 mois ( durée cumulée dans les entreprises de la profession)

-les salariés promus en catégorie cadres

-les cadres techniques occupés selon l'horaire collectif du service ou de l'équipe auxquels ils sont intégrés

-les cadres commerciaux disposant d'une liberté dans l'organisation de leur emploi du temps

Le niveau II comprend les cadres assurant une responsabilité d' encadrement et de gestion en appui d'un chef hiérarchique qui peut être le chef d'entreprise lui-même.

Le niveau III assumant de larges responsabilités exigeant une forte expérience et une réelle autonomie de jugement et d'initiative, en particulier dans la direction d'un service.

Mme [M] qui ne justifie pas du statut de cadre diplômé débutant , qui avait seulement des activités commerciales et de gestion et qui ne fait pas la preuve qu'elle disposait de larges responsabilités exigeant une forte expérience et une réelle autonomie de jugement et d'initiative, en particulier dans la direction d'un service et le fait qu'elle-même et trois autres des salariés de l'agence se plaignent de harcèlement moral de la part de M. [W], directeur technique, est la démonstration qu'elle n'avait les responsabilités qui auraient dû être les siennes si elle avait relevée du niveau III.

Le Conseil de Prud'hommes qui a estimé que Mme [M] ne rapportait pas la preuve que les fonctions pour lesquelles elle a été rémunérée étaient différentes de celles qu'elle a réellement exercées et qui l'a déboutée de sa demande en rappel de salaire sera confirmé.

Sur le licenciement:

Mme [M] ne conteste pas le motif d'inaptitude pour lequel elle a été licenciée.Elle soutient seulement que cette inaptitude est consécutive à des faits de harcèlement moral dont il vient d'être vu qu'il n'est pas constitué.

Dès lors, le licenciement apparaît justifié et la demande en dommages-intérêts infondée ainsi q ue celle relative au préavis que compte tenu de son inaptitude mme [M] ne pouvait exécuter.

En conséquence , le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

Il est équitable d'allouer à la SARL AGOLOC la somme de 800 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Mme [M] qui succombe supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Y ajoutant

CONDAMNE Mme [M] à payer à la SARL AGOLOC la somme de 800 € au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

CONDAMNE Mme [M] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 10/04573
Date de la décision : 13/11/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°10/04573 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-11-13;10.04573 ?
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