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30/10/2012 | FRANCE | N°12/01122

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 30 octobre 2012, 12/01122


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 30 OCTOBRE 2012



N° 2012/



CH/FP-D









Rôle N° 12/01122





SAS KERROC





C/



[H] [C]

































Grosse délivrée

le :

à :

Me Antoine DONSIMONI, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Jean-Jérôme MONDOLONI, avocat au barreau de NI

CE





Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 16 Décembre 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/1787.







APPELANTE



SAS KERROC, demeurant [Adresse 2]



représentée pa...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 30 OCTOBRE 2012

N° 2012/

CH/FP-D

Rôle N° 12/01122

SAS KERROC

C/

[H] [C]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Antoine DONSIMONI, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Jean-Jérôme MONDOLONI, avocat au barreau de NICE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 16 Décembre 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/1787.

APPELANTE

SAS KERROC, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Antoine DONSIMONI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Mademoiselle [H] [C], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Jean-Jérôme MONDOLONI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 12 Septembre 2012 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Yves ROUSSEL, Président

Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller

Madame Corinne HERMEREL, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Octobre 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Octobre 2012.

Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mademoiselle [H] [C] a été embauchée le 1er octobre 1991 par la Société KERROC exploitant le supermarché sous l'enseigne « Centre E. LECLERC» à [Localité 5], en qualité d'employée commerciale niveau I, selon contrat à durée indéterminée à temps complet.

Le 1 février 2004, la salariée a été promue Adjointe au responsable Epicerie, niveau 5.

Le 1 avril 2006, Mademoiselle [C] est devenue responsable du rayon Epicerie, niveau 6. Un avenant d'actualisation a été signé à cette occasion.

Le 1 janvier 2008, Mademoiselle [C] est devenue Responsable du rayon Crémerie LS (libre service).

Le 23 septembre 2008, Mademoiselle [C] a été surprise en train de fumer en salle de pause à 6h30 du matin. Une lettre de rappel à l'ordre lui a alors été envoyée.

Par courrier en date du 10 novembre 2008, la Société KERROC a notifié une mise à pied sanction d'un jour à Mademoiselle [C] après la découverte d'une palette de marchandises périmées dans les réserves du rayon crèmerie.

Le 24 juillet 2009, la Société KERROC a remis une lettre de rappel à Mademoiselle [C] après qu'une cliente a retourné le 11 Juillet 2009 un pack de yaourts périmés.

Au mois d'août 2009, la salariée a été transférée au rayon Surgelés.

Le 31 août 2009, le médecin du travail l'a déclarée « Apte au poste de Responsable crémerie rayon frais. Inapte au poste de responsable du rayon surgelés ».

Le 1 Octobre 2009, et avec son accord, Mademoiselle [C] est devenue Responsable du rayon Charcuterie L8.

Le 15 février 2010, la Société KERROC a remis en mains propres un courrier de rappel à l'ordre à Mademoiselle [C] après la découverte les 5 et 7 Février 2010, de produits périmés (saucisses, tarama) en rayon.

Le 24 mars 2010, la Société KERROC a remis un courrier de rappel à Mademoiselle [C] pour avoir, le 16 mars 2010, fumé en salle de pause à 6 h12 du matin, alors qu'il est interdit de prendre sa pause entre 5 heures et 8h30.

Le 7 mai 2010, après entretien préalable, la Société KERROC a notifié un avertissement à Mademoiselle [C] en raison de la présence de produits périmés trouvés dans le rayon entre le 5 février 2010 et le 20 mars 2010.

Par courrier remis en mains propres le 21 mai 2010, la Société KERROC a convoqué Mademoiselle [C] à un entretien préalable fixé au 31 mai suivant, en vue d'un éventuel licenciement et l'a mise à pied à titre conservatoire après avoir, le 20 Mai, constaté qu'elle s'était rendue deux fois en salle de pause entre 5h 53 et 6h 20.

La Société KERROC a licencié Mademoiselle [C] pour cause réelle et sérieuse, par courrier en date du 3 juin 2010,rédigé en ces termes :

« Mademoiselle,

Suite à notre entretien du 31-05-2010 nous avons le regret de vous informer par la présente

que vous ne ferez plus partie du personnel de notre Société à compter du 04-08-2010 pour le motif suivant: CAUSE REELLE ET SERIEUSE.

En effet, nous avons eu à déplorer votre insubordination et vos mensonges, à savoir:

- le 20 Mai 2010, nous vous avons surprise en salle de pause « Fumeurs » à 06 h 20 alors que vous deviez commencer à 06 h 00. Vous avez déclaré être arrivée en retard, et vous avez demandé à votre responsable, de débuter votre travail à 06 h 30 en décalant d'autant votre heure de départ. Ce dernier a répondu favorablement à votre demande.

Après vérification, nous avons constaté ce qui suit: vous avez pointé une première fois à 5 h 53, vous êtes allée en salle de pause de 05 h 55 à 06 h 02, vous êtes allée vous changer dans les vestiaires, et vous avez pris votre poste à 06 h 06, vous avez passé vos commandes de 06 h 1l à 06 h 19 et vous êtes retournée en salle de pause « Fumeurs» de 06 h 20 à 06 h 23

En résumé :

- vous étiez en salle de pause malgré l'interdiction faite par note de service aux salariés de l'entreprise d'y accéder avant 08 h 30.

- vous avez pris deux pauses, dont la dernière après avoir effectivement travaillé 13 minutes.

(le temps de pause rémunéré est calculé sur une de base de 3 minutes par heure travaillées)

- vous avez pris vos fonctions avec retard,

- vous avez menti effrontément à votre responsable.

Ce fait n'est plus isolé, il vous a été reproché à plusieurs reprises, notamment par lettres en date des 06/10/08 et 24/03/10, un comportement similaire et malgré l'interdiction connue et confirmée, les observations qui vous ont déjà été formulées, la responsabilité que vous êtes sensée assumer auprès de votre équipe en votre qualité de responsable de rayon, vous avez continué à vous octroyer des privilèges auxquels nul autre salarié ne peut prétendre.

Il nous est dans ce cas difficile de demander à vos subalternes de respecter rigoureusement la réglementation interne de l'entreprise, alors que leur responsable n'en a que faire.

D'autre part, nous vous avons manifesté la plus grande confiance durant l'exercice de vos fonctions et vous, vous cherchez à nous duper par des propos mensongers.

Un tel comportement nous permet plus de vous témoigner la confiance que vous aviez acquise et de ce fait, nous ne pouvons plus vous maintenir dans notre société.

Votre préavis débutera le 04-06-2010 pour se terminer le 03-08-2010.

Nous vous précisons également que nous vous dispensons d'effectuer ce préavis, son montant vous sera néanmoins intégralement payé.

Nous vous informons, en application de l'article L.6323-18 du Code du travail, que vous avez acquis au titre du Droit individuel à la formation (DIF) 108,33 heures et qu'il vous appartient, si vous le souhaitez, de demander, avant le terme de votre préavis, à bénéficier d'une action de formation, d'un bilan de compétences ou de la validation des acquis de l'expérience.

Au terme de votre contrat, vous pourrez vous présenter, en nos bureaux, afin que vous soient remis tous documents vous concernant.

Nous vous prions d'agréer, Mademoiselle, nos sentiments distingués. »

Contestant son licenciement, Mademoiselle [C] a saisi le Conseil de prud'hommes de NICE le 24 septembre 2010 des demandes suivantes :

- 97 000.00€ au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 30 000.00€ de dommages et intérêts pour préjudice moral

- 3000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

- annulation des deux avertissements

- intérêts légaux à compter de la demande

Par Jugement en date du 16 Décembre 2011, le Conseil de prud'hommes de Nice a dit et jugé que le licenciement de Mademoiselle [C] était sans cause réelle et sérieuse et condamné la société KERROC à lui payer 50 000 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 5000 euros en réparation du préjudice moral.

Le 16 Janvier 2012 la Société KERROC a interjeté appel de cette décision

Elle demande l'infirmation du jugement entrepris et le débouté de la salariée de ses demandes, ainsi que sa condamnation à lui verser 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Mademoiselle [C] demande l'annulation des deux avertissements et la condamnation de la Société KERROC à lui verser les sommes de:

- 97 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 30 000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- 3 000 € article 700 du Code de Procédure Civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure des moyens et des prétentions des parties, il est renvoyé au jugement entrepris, aux pièces de la procédure, et aux conclusions des parties oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'annulation des deux avertissements

* la lettre du 24 Mars 2010

Son objet est libellé « Lettre de rappel » . Elle est rédigée comme suit :

« Madame,

Nous avons eu à déplorer de votre part, le fait suivant:

- le 16 Mars 2010 à 06 h 12, vous vous trouviez en salle de pause « Fumeurs» avec Monsieur [Z] [K], Mademoiselle [G] [U], et Mademoiselle [L] [D]

Ce fait est inacceptable compte tenu de votre fonction dans l'entreprise.

Aussi, nous tenons à vous rappeler l'interdiction faite aux salariés de l'entreprise d'accéder à la salle de pause de 05 h 00 à 08 h 30 (notre note de service du 07/02/2007 N° 070207)

Par ailleurs, nous regrettons votre réaction irrespectueuse voire agressive aux observations qui vous sont faites par votre hiérarchie ainsi que les commentaires intempestifs et inutiles que vous en donnez par la suite.

En raison de votre ancienneté, vous connaissez formellement cette interdiction et malgré cela, non seulement vous ne l'appliquez pas mais encore, vous ne veillez pas à son application.

Vous voudrez bien à l'avenir, prendre les résolutions nécessaires afin de respecter la réglementation de l'entreprise et contrôler davantage votre impulsivité afin d'assumer pleinement la responsabilité qui vous a été confiée.

A défaut, nous envisagerons à votre encontre une sanction disciplinaire.»

Cette lettre de rappel est une sanction de même nature qu'un avertissement.

Mademoiselle [C] en sollicite l'annulation au motif qu'étant libre d'organiser son temps de travail comme elle l'entend et dans la mesure où le contrat de travail fait interdiction à l'employeur de contrôler son temps de travail, cet avertissement n'aurait donc pas de fondement légal ou contractuel.

Cependant, il résulte précisément du contrat de travail que si elle est libre d'organiser son temps de travail comme elle l'entend, elle est toutefois soumise aux règles impératives minimales de l'entreprise concernant les temps de pause et elle a, au surplus, l'obligation de les faire respecter par les autres salariés. Dès lors, la sanction que constitue le rappel à l'ordre en date du 24 Mars 2010 au motif que la salariée s'est trouvée, avec d'autres collègues, en salle de pause à une heure prohibée, est parfaitement fondée. Elle est par ailleurs justifiée au regard du devoir d'exemplarité attaché à sa fonction de responsable.

Il n'y a en conséquence pas lieu d'annuler cette sanction

*La lettre du 7 Mai 2010,

Son objet est libellé « AVERTISSEMENT » et elle fait suite à la découverte d'articles périmés dans le rayon dont elle est responsable et notamment, sans que le détail des produits concernés qui figure dans le courrier querellé, soit ici repris,

-le 05/02/10, retrait de 58 lots périmés depuis le 02/02/10

- le 10/02/10,retrait de 5 terrines de volaille périmées depuis le 07/02/10

- le 18/02/10, retrait de 2 pizzas périmées depuis le 17/02/10

- le 23/02/10, retrait de tartes périmées depuis le 22 Février 2010,d'un jambon de bayonne périmé depuis le 19/02/10,

- le 03/03/10, il a été rapporté par une cliente 1 blanc de poulet périmé au 03/03/10 ( produit détaillé dans la lettre )

- le 06/03/10, retrait de 12 blancs de poulets à l'indienne périmés depuis le 04/03/10 ».

Des reproches identiques pour divers produits précisément désignés sont recensés à d'autres dates à savoir les 10 Mars, 24 Mars et 25 Mars 2010.

La lettre se poursuit comme suit :

« Nous déplorons une telle situation. Vous avez déjà été sanctionnée le 10/11/08 par une mise à pied disciplinaire pour la présence dans le rayon qui vous avait été alors confié d'une palette entière de lait périmé et nous regrettons à ce jour de constater que vous continuez à manquer de rigueur dans l'exercice de vos fonctions. Vous n'assumez pas la responsabilité qui vous a été conférée.

Votre négligence expose:

1°) la clientèle, à de grave intoxications alimentaires,

2°) l'entreprise, à une condamnation pénale et financière calculée comme suit:

' en cas de dépassement de DLC : d'un montant minimal de 92 € d'amende par produit retiré,

' en cas d'intoxication alimentaire: d'un montant minimal de 38.000 € d'amende et 2 ans d'emprisonnement,

à la perte de confiance des consommateurs envers le magasin, entraînant inévitablement une baisse de la fréquentation.

En conséquence, nous ne tolérerons plus la moindre négligence de votre part, et nous exigeons un contrôle quotidien des DLC ainsi que le retrait immédiat de toute marchandise devenue impropre à la consommation, dans le respect des consignes reçues. » 

La salariée soutient que cet avertissement est fondé sur des affirmations non étayées par un inventaire contradictoire en présence de la demanderesse, qui aurait régulièrement été confrontée à une insuffisance de personnel.

La salariée n'explicite pas plus les conditions de travail qui auraient pu être à l'origine des négligences constatées.

La Cour observe que cet avertissement n'avait, jusqu'à la procédure prud'homale, pas été contesté quant aux griefs qui y étaient formulés. En outre, c'est avec force détails que les « infractions» ont été relevées, l'employeur ayant consigné à chaque fois avec une précision extrême la référence du produit, de sorte que la critique tardive relative à l'absence d'inventaire contradictoire est considérée comme inopérante.

Compte tenu de la teneur des reproches énoncés, de la réitération des faits à des dates distinctes, de la gravité des incidents relevés au regard de la santé des consommateurs, l'avertissement infligé était parfaitement justifié.

Sur le licenciement pour cause réelle et sérieuse

Par courrier en date du 3 juin 2010, Madame [C] a été licenciée en ces termes:

« Mademoiselle,

Suite à notre entretien du 31-05-2010 nous avons le regret de vous informer par la présente

que vous ne ferez plus partie du personnel de notre Société à compter du 04-08-2010 pour le motif suivant: CAUSE REELLE ET SERIEUSE.

En effet, nous avons eu à déplorer votre insubordination et vos mensonges, à savoir:

- le 20 Mai 2010, nous vous avons surprise en salle de pause « Fumeurs » à 06 h 20 alors que vous deviez commencer à 06 h 00. Vous avez déclaré être arrivée en retard, et vous avez demandé à votre responsable, de débuter votre travail à 06 h 30 en décalant d'autant votre heure de départ. Ce dernier a répondu favorablement à votre demande.

Après vérification, nous avons constaté ce qui suit: vous avez pointé une première fois à 5 h 53, vous êtes allée en salle de pause de 05 h 55 à 06 h 02, vous êtes allée vous changer dans les vestiaires, et vous avez pris votre poste à 06 h 06, vous avez passé vos commandes de 06·h 11 à 06 h 19 et vous êtes retournée en salle de pause « Fumeurs» de 06 h 20 à 06 h 23

En résumé :

- vous étiez en salle de pause malgré l'interdiction faite par note de service aux salariés de l'entreprise d'y accéder avant 08 h 30.

- vous avez pris deux pauses, dont la dernière après avoir effectivement travaillé 13 minutes.

(le temps de pause rémunéré est calculé sur une de base de 3 minutes par heure travaillées)

- vous avez pris vos fonctions avec retard,

- vous avez menti effrontément à votre responsable.

Ce fait n'est plus isolé, il vous a été reproché à plusieurs reprises, notamment par lettres en date des 06/10/08 et 24/03/10, un comportement similaire et malgré l'interdiction connue et confirmée, les observations qui vous ont déjà été formulées, la responsabilité que vous êtes sensée assumer auprès de votre équipe en votre qualité de responsable de rayon, vous avez continué à vous octroyer des privilèges auxquels nul autre salarié ne peut prétendre.

Il nous est dans ce cas difficile de demander à vos subalternes de respecter rigoureusement la réglementation interne de l'entreprise, alors que leur responsable n'en a que faire.

D'autre part, nous vous avons manifesté la plus grande confiance durant l'exercice de vos fonctions et vous, vous cherchez à nous duper par des propos mensongers.

Un tel comportement nous permet plus de vous témoigner la confiance que vous aviez acquise et de ce fait, nous ne pouvons plus vous maintenir dans notre société.

Votre préavis débutera le 04-06-2010 pour se terminer le 03-08-2010.

Nous vous précisons également que nous vous dispensons d'effectuer ce préavis, son montant vous sera néanmoins intégralement payé.

Nous vous informons, en application de l'article L.6323-18 du Code du travail, que vous avez acquis au titre du Droit individuel à la formation (DIF) 108,33 heures et qu'il vous appartient, si vous le souhaitez, de demander, avant le terme de votre préavis, à bénéficier d'une action de formation, d'un bilan de compétences ou de la validation des acquis de l'expérience.

Au terme de votre contrat, vous pourrez vous présenter, en nos bureaux, afin que vous soient remis tous documents vous concernant.

Nous vous prions d'agréer, Mademoiselle, nos sentiments distingués. »

Le motif du licenciement consiste dans le fait pour la salariée d'avoir le 20 Mai 2010 , pris des pauses à des horaires prohibés et de surcroît d'avoir menti sur l'heure de prise de service.

Madame [C] ne conteste pas la matérialité des faits, à savoir la prise de pauses, mais s'en défend en arguant de ce que son contrat de travail stipule qu'aucun contrôle de ses horaires ne sera effectué.

S'il est exact que le contrat de travail et l'avenant d'actualisation numéro 4 signé par les parties, stipule « compte tenu de la nature de vos fonctions et des responsabilités qui vous sont confiées, vous ne subirez aucun contrôle horaire et serez libre d'organiser votre travail et par voie de conséquence votre temps de travail effectif dans la limite horaire ci-dessus fixée », il demeure qu'au paragraphe « Obligations générales » : il est rappelé que Madame [C] « s'engage à respecter les instructions qui pourront être données par l'entreprise et à se conformer aux règles régissant le fonctionnement interne de celle-ci ». 

L'absence de contrôle horaire indiqué à son contrat ne concerne nullement ses temps de pause. En effet Madame [C], comme tous les employés, devait se soumettre à la règlementation interne de l'entreprise sur ce point, à savoir l'interdiction de prendre des pauses entre 5 heures et 8 heure 30 du matin et Madame [C] devait, de surcroît, en sa qualité de responsable de rayon, veiller elle-même au respect de cette règle par les employés.

Cette charge lui était prescrite par les dispositions de l'avenant d'actualisation de son contrat de travail, signé par elle, dont il résulte qu'elle s'engage « à prendre toutes mesures et toutes décisions, sans aucune restriction, en vue d'appliquer et de faire appliquer strictement les lois et règlements en vigueur en matière, notamment de législation sociale ». Il est précisé, s'agissant de la législation sociale, que « les règles définies par la loi et par la convention collective doivent être appliquées rigoureusement et qu'une attention toute particulière doit être portée au respect des règles relatives au temps de travail (amplitude, heures complémentaires et supplémentaires, durée du travail, repos compensateur, temps de pause) ».

Il est indiqué également dans l'avenant que « Toute entrée ou sortie de l'entreprise donne lieu au pointage ».

Ainsi il incombait à Madame [C], quelle que soit l'organisation de son temps de travail effectif, de se conformer aux règles régissant le fonctionnement interne de l'entreprise en ce qui concerne les pauses. Or, la société KERROC avait réglementé cette question des pauses conformément aux dispositions de l'article 5-4 la collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.

Ainsi, une note de service produite aux débats, datée du 7 Février 2007, indiquait « à l'attention de l'ensemble du personnel, nous vous rappelons que l'accès à la salle de pause est interdit pendant le temps de travail entre 5 heures et 8 heures 30. Nous vous remercions de bien vouloir en prendre bonne note ».

Cette consigne a été rappelée à Madame [C] par une lettre en date du 6 octobre 2008 personnalisée en ces termes :

« Mademoiselle,

Nous déplorons de votre part, votre indiscipline, fait regrettable, compte tenu des fonctions que vous occupez.

En effet, lors de notre dernière réunion, nous avons rappelé au personnel d'encadrement dont vous faites partie, que l'accès à la salle de pause (fumeur ou non fumeur) est interdit jusqu'à 08 h 30 et nous vous avons demandé de veiller au respect de cette consigne.

Or, vous avez été surprise en train de fumer en salle de pause avec l'une de vos collègues, le 23 Septembre 2008 à 06 h 30.

Accord ou non de votre supérieur hiérarchique, la consigne reste la même pour l'ensemble du personnel dont vous êtes partie intégrante. Nous espérons ne plus avoir à vous notifier la moindre observation à ce sujet. Dans le cas contraire, nous envisagerons une sévère sanction».

Le 24 Mars 2010, une nouvelle lettre de rappel, ci-dessus examinée, avait été remise à Mademoiselle [C] au motif que le 16 Mars 2010 à 06 h 12, elle se trouvait en salle de pause « Fumeurs» avec des collègues.

L'employeur insistait alors sur le caractère inacceptable de ce fait compte tenu de sa fonction dans l'entreprise et rappelait l'interdiction faite aux salariés de l'entreprise d'accéder à la salle de pause de 05 h 00 à 08 h 30.

Mademoiselle [C] ne pouvait donc ignorer la consigne qui avait été affichée dans l'entreprise, et ne pouvait pas non plus prétendre qu'elle ne s'appliquait pas à elle puisqu'elle lui avait été personnellement rappelée et qu'elle avait la charge de la faire respecter par les autres salariés.

Le 20 Mai 2010, date des faits reprochés, Mademoiselle [C] surprise en salle de pause à 6 H 20, a tenté de faire croire qu'elle débutait sa journée de travail à 6 h 30 mais elle a été démentie par les horaires enregistrés par la pointeuse, dont il résulte qu'elle avait bien commencé son travail effectif lorsqu'elle a décidé de le stopper pour faire une pause.

Ce mensonge a conduit l'employeur à évoquer dans la lettre de licenciement une perte de confiance qui n'est pas en soi le motif du licenciement mais la seule conséquence d'un comportement déviant réitéré de manière délibérée.

Compte tenu de son ancienneté, de son niveau de responsabilité, de son devoir d'exemplarité et des précédents rappels qui lui avaient été donnés à ce sujet, le fait pour la salariée d'avoir été en salle de pause dans une tranche horaire durant laquelle les salariés ont l'interdiction de s'y trouver constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Le jugement sera infirmé en ce sens et la salariée déboutée de toutes ses demandes.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il ne serait pas équitable de laisser la société KERROC supporter l'entière charge des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager dans la présente procédure. Mademoiselle [C] sera condamnée à lui verser 1300 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile .

Les dépens seront supportés par Mademoiselle [C]

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement , par arrêt contradictoire, en matière prud'homale

Infirme le jugement déféré.

Dit que le licenciement est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Déboute Madame [C] de toutes ses demandes.

Condamne Madame [C] à verser à la société KERROC la somme de 1300 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamne Madame [C] aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 12/01122
Date de la décision : 30/10/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°12/01122 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-10-30;12.01122 ?
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