COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
18e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 30 OCTOBRE 2012
N° 2012/785
Rôle N° 10/18102
(jonction avec le n°10/18119)
[E] [R]
C/
SA SAPA PROFILES PUGET
Grosse délivrée
le :
à :
- Me Jerry DESANGES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
- Me Henri CHARLES, avocat au barreau de NICE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de FREJUS en date du 09 Septembre 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/145.
APPELANT
Monsieur [E] [R], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Jerry DESANGES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMEE
SA SAPA PROFILES PUGET, demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Henri CHARLES, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 09 Octobre 2012 en audience publique devant la Cour composée de :
Madame Gisèle BAETSLE, Président
Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller
Madame Christine LORENZINI, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Mme Julia DELABORDE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Octobre 2012.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Octobre 2012.
Signé par Madame Gisèle BAETSLE, Président et Mme Julia DELABORDE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
M. [R] a été embauché le 28/05/1979 par la SAS SAPA PROFILES PUGET en qualité d'ouvrier OS et a été licencié le 21/10/2008.
Saisi de demandes en paiement de rappels de salaires et de dommages-intérêts suite à un licenciement qu'il estime sans cause réelle et sérieuse et à une discrimination dont il aurait fait l'objet, par jugement du 27/05/2010, le conseil de prud'hommes de Fréjus a condamné la SAS SAPA PROFILES PUGET à payer à M. [R] les sommes de :
-72.000 € de rappel de salaire du1/01/2004 au 31/12/2008
- 7.200 € de congés payés sur le rappel de salaire
-20.000 € de dommages-intérêts pour discrimination
- 4.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
et a ordonné à l'employeur de remettre à M. [R] les bulletins de salaire des mois de décembre des années 2004 à 2008 portant la mention rectifiée de la date d'embauche
Chacune des parties a régulièrement fait appel de cette décision.
Deux dossiers ayant été ouverts suite à ces appels, leur jonction sera prononcée pour une bonne administration de la justice.
Reprenant oralement leurs conclusions auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de leurs moyens,
M. [R] d'une part sollicite la confirmation partielle de la décision entreprise quant aux sommes qui lui ont été allouées et subsidiairement demande l'institution d'une expertise afin d'examiner les carrières de ses collègues de travail et sa réformation quant au licenciement.
.Il réclame en définitive les sommes suivantes :
-72.000 € de rappel de salaire outre 7200 € de congés payés y afférents
-45.000 € de dommages-intérêts pour discrimination
-75.000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 4500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
et demande que soit ordonnée la rectification sous astreinte des bulletins de salaire en faisant mention de la bonne date d'embauche.
tandis que l'employeur conclut à la réformation du jugement déféré devant le cour en ce qu'il a requalifié les fonctions de M. [R] et a admis qu'il avait fait l'objet de discrimination et la confirmation de ce même jugement en ce qu'il a déclaré le licenciement pourvu d'une cause réelle et sérieuse . Il demande 1 € de dommages-intérêts et la restitution des sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire avec intérêts aux taux légal à compter de la date du paiement et ce , au besoin, à titre de dommages-intérêts complémentaires et la somme de 4000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Subsidiairement, il ne s'oppose pas à l'expertise sollicitée.
MOTIVATION
Sur la requalification de M. [R]:
M. [R], au moment de son licenciement était employé comme responsable des eaux au coefficient 240 du niveau 3, 3ème échelon de la qualification ouvrier.
L'accord national du 21/07/1975 , plusieurs fois modifié, indique qu'à ce niveau et cet échelon, le salarié exécute des travaux comportant l'analyse et l'exploitation simple d'informations du fait de leur nature ou de leur répétition , en application des règles d'une technique déterminée ,d'après des instructions précises et détaillées et des informations fournies sur le mode opératoire et su les objectifs; que ces travaux sont réalisés par la mise en oeuvre des procédés connus ou en conformité' avec un modèle indiqué; qu'il peut avoir la responsabilité technique du travail exécuté par des personnes de qualification moindre et qu'il est placé sous le contrôle direct d'un agent le plus généralement d'un niveau de qualification supérieur.
M. [R] revendique le coefficient 365 du 3ème échelon du niveau V dont l'accord précité indique que le salarié assure ou coordonne la réalisation de travaux d'ensemble ou d'une partie plus ou moins importante d'un ensemble complexe selon l'échelon, d'après des directives constituant le cadre d'ensemble de l'activité et définissant l'objectif du travail , accompagnées d'instructions particulières dans le cas de problèmes nouveaux; que ces travaux nécessitent la prise en compte et l'intégration de données observées et de contraintes d'ordre technique, économique , administratif ; ainsi que du coût des solutions proposées,le cas échéant en collaboration avec des agents ad'autres spécialités.
Il poursuit en précisant que l'activité est généralement constituée par l'étude, la mise au point, l'exploitation de produits, moyens ou procédés comportant, à un degré variable selon l'échelon, une part d'innovation; que l'étendue ou l'importance de cette activité détermine le degré d'association ou de combinaison de ces éléments : conception, synthèse , coordination ou gestion; qu'il a généralement une responsabilité technique ou de gestion vis-à-vis du personnel de qualification moindre ; qu'il a de larges responsabilités sous le contrôle d'un supérieur hiérarchique qui peut être le chef d'entreprise.
A la lecture des seules pièces du dossier permettant d'essayer d'appréhender l'activité de M. [R] , à savoir les observations et avertissements dont il a fait l'objet en 2003,2005 et 2008 et le compte rendu d'activité des 27/28 et 29 septembre 2008, il ressort que le travail de ce dernier était essentiellement un travail de manutention et à défaut pour lui d'établir l'existence d'une quelconque activité de conception, de synthèse, de coordination ou de gestion, c'est à tort que le Conseil de Prud'hommes lui a reconnu le coefficient 365 du niveau 5 au seul motif qu'il formait des agents des eaux , ce qui est prévu pour le salarié au coefficient 240 comme énoncé plus haut et qu'il n'avait pas de supérieur hiérarchique alors que l'employeur justifie par la production de son bulletin de salaire que M. [A] ayant le statut d'agent de maîtrise et la qualification de chef d'atelier anodisation ,dont au demeurant le coefficient est celui de 305 ,était le supérieur de M. [R] ce que celui-ci ne conteste pas.
Sur la discrimination:
Outre que M. [N], délégué au comité d'entreprise , délégué syndical et M. [S], délégué syndical et conseiller prud'hommes au Conseil de Prud'hommes de Draguignan attestent tous deux qu'ils n'ont jamais fait l'objet de la moindre discrimination et n'ont jamais eu connaissance de la moindre discrimination au sein de l'entreprise SAPA, il est justifié par la production des attestations de stage que M. [R] , qui a été embauché en qualité d'ouvrier au coefficient 145 , devenu responsable station traitement des eaux aux coefficient 215 puis 240 , échelon le plus élevé dans son niveau et alors qu'il vient d'être vu qu'il ne peut réclamer un niveau supérieur, a bénéficié d'une formation professionnelle suivie, que le salaire perçu par ce dernier était supérieur aux salaires minima annuels garantis pour le coefficient 365 qu'il revendique .
Enfin, la production par l'employeur des bulletins de salaire des autres salariés de l'entreprise montrent que , contrairement à ce qu'il affirme, les agents d'eaux ne sont pas plus rétribués que lui.
En conséquence , c'est à tort que les premiers juges lui ont alloué des dommages-intérêts de ce chef de demande.
En l'absence de tout commencement de preuve d'une discrimination à son égard, M. [R] sera débouté de sa demande d'expertise, une telle mesure n'ayant pour objet de pallier la défaillance de ce dernier dans l'administration de la preuve qui lui incombe.
Sur le licenciement:
M. [R] a été licencié pour deux motifs : la non-identification d'un prélèvement expédié le 29/09/2008 au laboratoire de [Localité 4] et le défaut de fermeture d'une vanne le 28/09/2008.
M. [R] ne remet pas en cause la réalité de ces faits dont il ne s'estime pas responsable et juge qu'il s'agit de faits mineurs ne pouvant justifier son licenciement compte tenu de son ancienneté.
Or, autant le premier que le second motif lui sont imputables; qu'il est en effet établi par les attestations produites que l'expédition des prélèvements d'eau ne peut se faire sans leur identification, faute d'intérêt et qu'il lui incombait de fermer ou de contrôler que cette vanne était fermée à son départ de l'entreprise, étant souligné que M. [X] atteste qu'une lors d'une réunion à laquelle M.[R] a participé, juillet 2008, il avait été rappelé aux salariés de l'obligation pour eux de s'assurer de la fermeture des vannes à leur départ et de l'attestation de M. [W] que M. [R] , le 27/09/2008, n'a laissé, contrairement à ce qu'il affirme pour se dédouaner de toute responsabilité, aucune consigne aux gardiens concernant le remplissage des cuves sous autre surveillance particulière sur la chaîne anodisation.
Ces faits, alors que M. [R] venait de faire l'objet d'un avertissement pour négligence et alors que dans le passé d'autres mises en garde lui avaient été données, justifie le licenciement intervenu.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts :
La SAS SAPA PROFILES PUGET demande 1 € de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait des allégations portées contre elle.
En l'absence de préjudice caractérisé, il ne sera pas fait droit à cette demande.
Aucun élément tiré de l'équité ou de la situation économique des parties ne justifie en la cause l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
M. [R] qui succombe supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement,
Ordonne la jonction des dossiers 10/18102 et 10/18119 sous le premier numéro.
CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré le licenciement de M. [R] pourvu d'une cause réelle et sérieuse.
Le REFORME pour le surplus
et statuant à nouveau:
Déboute M. [R] de sa demande en requalification et rappel de salaires et de sa demande en dommages-intérêts pour discrimination.
En conséquence , ordonne à M. [R] de rembourser à la SAS SAPA PROFILES PUGET les sommes perçues dans le cadre de l'exécution provisoire, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision.
Déboute les parties de leurs plus amples demandes.
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE M. [R] aux dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT