La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/07/2012 | FRANCE | N°11/01371

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 03 juillet 2012, 11/01371


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 03 JUILLET 2012



N°2012/

MV/FP-D













Rôle N° 11/01371







[B] [E]





C/



SARL MEDISTAR













































Grosse délivrée le :

à :

Me Roselyne NAIN-

DOYENNETTE, avocat au barreau de GRA

SSE



Me Ann AHLBERG, avocat au barreau de GRASSE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 31 Décembre 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 08/1237.





APPELANTE



Madame [B] [E], demeurant [Adresse 3]



re...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 03 JUILLET 2012

N°2012/

MV/FP-D

Rôle N° 11/01371

[B] [E]

C/

SARL MEDISTAR

Grosse délivrée le :

à :

Me Roselyne NAIN-

DOYENNETTE, avocat au barreau de GRASSE

Me Ann AHLBERG, avocat au barreau de GRASSE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 31 Décembre 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 08/1237.

APPELANTE

Madame [B] [E], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Roselyne NAIN-DOYENNETTE, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEE

SARL MEDISTAR, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Ann AHLBERG, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 14 Mai 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président

Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller

Madame Corinne HERMEREL, Conseiller

Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Juillet 2012

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Juillet 2012

Signé par Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président et Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame [B] [E] a été engagée à compter du 26 août 2002 par la société MEDISTAR en qualité d'attachée commerciale moyennant le mode de rémunération suivant :

« Sur son chiffre d'affaire:

- 12,50% net payé sur le chiffre d'affaire HT à partir du moment où celui-ci est supérieur au minimum demandé sur la base des prix publics édités (offres avec cadeaux)

- 6% net payé sur le chiffre d'affaire HT pour toutes commandes prises avec tarifs remisés.

Par ailleurs, une indemnité pour frais de déplacement sera versée chaque mois sur le bulletin de salaire, en net, de 400 €.

Sur le chiffre d'affaire de l'équipe commerciale:

- 3,50% net payé sur le chiffre d'affaire HT conditionné à la réalisation du minimum de chiffre d'affaire pour chaque commercial. »

Le 1er avril 2004 un avenant, dont l'authenticité est contestée par Mme [E], prévoyait une modification de la rémunération dans les termes suivants :

« Il a été arrêté et convenu ce qui suit :

Madame [T] [B] [Mme [E] ] a été engagée le 02 septembre 2002 en qualité d'attachée commerciale de la catégorie des employés par un contrat à durée indéterminée;

Le présent avenant a pour objet de modifier le mode de rémunération de Madame [T] [B] (passage d'un mode de rémunération variable à une mode de rémunération fixe).

A la demande exclusive de Mme [T] [B], pour raisons familiales qui lui sont propres, et qui a souhaité voir se rémunération stabilisée et non fluctuante en fonction de ses chiffres d'affaires ainsi que ceux de la salle de vente, celle-ci a demandé à voir sa rémunération passer à 2575 Euros de commissions mensuelle, augmentée de son fixe, et ce en remplacement des conditions variables fixées à l'article « Rémunération » de son contrat de travail, ceci à compter du 01 Avril 2004.

La société Medistar a décidé de donner une suite favorable à sa demande, chacune des parties ayant pris conscience de l'impact financier qui pourrait naître de ces modifications.

De ce fait, cette nouvelle commission fixe vient en remplacement de l'article « rémunération » du contrat de travail initial, où figurait une commission en pourcentage du CA, sous conditions, et qui comportait une indemnité pour frais de déplacement de 400 euros, qui est supprimée compte tenu de la sédentarisation du poste occupé, ainsi que le rapprochement du lieu de travail par rapport au domicile de Mme [T], à l'occasion de l'ouverture de notre bureau commercial [Adresse 1].

L'article « Rémunération » devient :

La Société Medistar versera à Mme [T] [B] une rémunération mensuelle brute de 1090,51 Euros, auquel se rajoutera une indemnité différentielle de 77,65 Euros, une commission mensuelle brute fixée à 2575 euros soit un total de 3743, 16 Euros brut, quelque soit le niveau de CA réalisé par l'ensemble de l'équipe commerciale (commission fixe) .

Les autres clauses du contrat signé le 2 septembre 2002 reste inchangées ».

Le 25 février 2008 la fille de Mme [E] mettait fin à ses jours.

Du 25 février au 31 juillet 2008 Mme [E] était en arrêt de travail intercalé de trois périodes de reprise du 23 au 27 mars, du 1er au 8 juin et du 1er au 6 juillet).

Le 31 juillet 2008 Mme [E] adressait à la société MEDISTAR sa démission dans les termes suivants :

« Gilles,

De par cette lettre, je vous annonce mon intention de démissionner de mon poste de responsable télémarketing au 1er Août 2008.

Etant en congès jusqu'au 25 Août, mon préavis de 2 mois se terminera le 30 Septembre, date à laquelle je ne ferais plus partie de votre personnel à 18 H.

Je vous remercie par avance de bien vouloir déposer mon salaire de juillet à la CIC Liberté avant le 10 Août.

Mes raisons vous sont exprimées dans la seconde lettre jointe. Pour faire valoir ce que de droit » ,

la lettre annexée étant ainsi rédigée :

« Objet: Raisons de la Démission

Gilles,

J'ai décidé de m'arrêter parce que j'en ai marre, toutes vos promesses n'ont jamais été tenues, tout ce qui est écrit n'est pas respecté, votre prime d'ancienneté se fout de moi, ma fiche de salaire est une moquerie à mon travail, vous prenez votre soit disant responsable pour une idiote.

Cela fait presque 6 ans que je travaille pour vous, je croyais que vous me connaissiez, que vous m'estimiez ne serait-ce qu'un peu, mais non. Vous dîtes que je suis votre collaboratrice, mais connaissez-vous vraiment la définition de ce mot'

J'ai pris conscience que sur terre, nous sommes peu de choses, rien n'est plus important que la vie de famille, pas même un gros salaire. Pendant toutes ces années à vos côtés, j'ai fait passer ma vie professionnelle avant ma vie privée. Je vous ai protégé vous, au détriment de ma propre fille.

Je tiens à vous remercier de lui avoir permis de travailler à mes côtés à deux reprises. Sachez qu'il ne faudra jamais oublier ce que vous lui avez fait, perte de chômage et perte de salaire. Si vous aviez de la considération pour moi et de la reconnaissance pour elle,rien ne serait arrivé. Elle a décidé de partir à cause de la société dont vous en faites partie, n'oubliez jamais cela, le futur en dépend.

Vous ne pouvez plus me payer, je comprends, alors j'anticipe. Vous m'avez mis dans le noir, j'ai cassé mon capital retraite dans sa totalité grâce à vous.

J'ai décidé de tourner une page à ma vie professionnelle. Je ne m'en sens plus capable, je n'ai plus l'envie ni la motivation.

Merci de votre compréhension »,

démission qu'elle confirmait par courrier du 3 septembre 2008 ainsi rédigé :

« De par ce courrier, je vous confirme ma démission. Après relecture de mon contrat de travail, ce n'est qu'un mois de préavis que j'ai à effectuer. En conséquence, j'ai décidé qu'au 4 septembre 2008 au soir je ne ferais plus partie de votre personnel. Les raisons et les conséquences vous ont été dites le 2 septembre écoulé dans votre bureau. Pour faire valoir ce que de droit ».

La société MEDISTAR déposait plainte à l'encontre de Mme [E] le 2 octobre 2008 et le 12 mars 2009.

Mme [E] déposait plainte à l'encontre de la société MEDISTAR le 27 juin 2009 et le 17 janvier 2012.

Le 23 janvier 2012 Mme [E] était condamnée par le Tribunal Correctionnel de Nice du chef d'abus de confiance commis entre le 4 août 2008 et le 18 février 2010 à une peine d'amende avec sursis ainsi qu'à payer à la société MEDISTAR solidairement avec la SARL PROMEDIC les sommes de 1000 € à titre de dommages et intérêts et de 800 € sur le fondement de l'article 475 -1 du code de procédure pénale.

Le 29 septembre 2008 Mme [E] saisissait le Conseil de Prud'hommes de NICE d'une demande en rappel de salaire et d'une demande tendant à voir qualifier sa démission en licenciement irrégulier et dénué de cause réelle et sérieuse, lequel, par jugement du 31 décembre 2009, a dit que Mme [E] avait été justement classée par la société MEDISTAR en qualité de responsable commerciale statut employée, que la démission présentée en juillet 2008 et réitérée en septembre 2008 résultait d'une manifestation claire et non équivoque de mettre volontairement un terme à son contrat de travail hors de toute responsabilité de l'employeur, en conséquence, l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, a dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens.

Mme [E] a régulièrement relevé appel de cette décision le 19 janvier 2010.

Par ordonnance de référé du 30 octobre 2008 le Conseil de Prud'hommes de NICE, saisi le 9 octobre 2008 par Mme [E], donnait acte à la SARL MEDISTAR de ce qu'elle s'engageait à remettre sous huitaine à cette dernière un chèque de 2899,73 € correspondant au salaire du mois d'août 2008 ainsi que le solde de tout compte, le certificat de travail, l'attestation ASSEDIC et les bulletins de salaire des mois de juillet et août 2008, la condamnait au versement de la somme de 600 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, disait qu'il existait une contestation sérieuse sur l'ensemble des autres demandes et renvoyait les parties à mieux se pourvoir au fond.

Mme [E] demande à la Cour de constater qu'elle avait une qualification de cadre au sein de la société MEDISTAR, d'infirmer le jugement déféré à ce titre et dire qu'elle devait relever de la position Cadre, niveau VIII, échelon 1 ou 3 de la CCN du Commerce de Gros du 23 juin 1970 , en conséquence modifier tous les bulletins de salaires depuis l'embauche, certificat de travail, attestation POLE EMPLOI avec la mention de la position cadre, niveau VIII, échelon 3 de la CCN du Commerce de Gros , constater qu'elle aurait dû bénéficier d'une rémunération

contractuellement fixée à 12,50% net payée sur son chiffre d'affaires HT et de 3,50% net payé sur le chiffre d'affaire de l'équipe commerciale, tel que le prévoit son contrat de travail, constater que l'avenant au contrat du 1er avril 2004 produit par la SARL MEDISTAR est un faux, et ne saurait être appliqué en l'espèce, infirmer le jugement entrepris ,condamner la SARL MEDISTAR à lui verser la somme de :

379 525 euros à titre de rappel de salaires brut de septembre 2002 à février 2008 ,

et si ces sommes venaient à être contestées par la société MEDISTAR, condamner cette dernière à fournir tous les éléments comptables de nature à apprécier la réalité de ces chiffres (bilans , compte de résultat ....), constater que son contrat de travail prévoit une indemnité de déplacement versée chaque mois de 400 euros net et condamner

la SARL MEDISTAR à lui verser la somme de:

21 600 euros à titre d'indemnité de déplacement .

Vu l'article 6 de la CCN du Commerce de Gros n° 3044 elle demande de condamner la SARL MEDISTAR à lui verser la somme de :

30 633 euros brut à titre de maintien de salaire pendant ses arrêts de travail,

22 906 euros brut à titre de solde de congés payés ,

Vu l'article 31 de la CCN du Commerce de Gros n° 3044 :

12 524 euros brut au titre de la prime d'ancienneté depuis août 2005,

constater qu'elle n'avait pas la volonté claire et non équivoque de démissionner compte tenu de sa fragilité psychologique, dire et juger que la lettre de prise d'acte de la rupture doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner la SARL MEDISTAR à lui verser les sommes de :

10 083 euros brut à tire d'irrégularité de procédure,

241992 euros brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif sans cause réelle et sérieuse,

Vu l'article 35 de la CCN :

30 251 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis ,

3 025 euros au titre des congés payés y afférents,

ainsi qu'à lui délivrer le reçu pour solde de tout compte, le certificat de travail et l'attestation PÔLE EMPLOI rectifiés sous astreinte de 180 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

ordonner l'exécution provisoire .

Elle sollicite enfin la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dont distraction au profit de Maître NAIN DOYENNETTE.

La société MEDISTAR, au visa des articles R. 1423. 7, L. 1237. 1 et L. 1235. 5 du code du travail et vu la Convention Collective Nationale du Commerce de Gros, demande de dire et juger que Mme [E] n'avait pas le statut de cadre mais le statut d'employé, que les parties ont régulièrement signé un avenant au contrat de travail, que Mme [E] a été régulièrement rémunérée conformément aux stipulations contractuelles, par conséquent, confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et condamner Mme [E] à lui verser la somme de 7 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il y a lieu de se référer au jugement du Conseil de Prud'hommes et aux écritures déposées, oralement reprises.

Sur ce,

Sur la demande du statut de cadre,

Attendu que Mme [E] a été engagée en qualité d'Attachée Commerciale et a toujours été rémunérée, ainsi que l'indiquent ses bulletins de salaire , en qualité de Responsable Commerciale statut employée et ne démontre nullement relever de la classification des cadres tels que fixée par la Convention Collective applicable à savoir que cette classification « s'applique aux collaborateurs chargés de traduire, dans les domaines de leur fonction, opérationnelle ou fonctionnelle, les objectifs globaux et de déterminer les actions propres à les réaliser.

L'exercice de cette fonction requiert la mise en oeuvre de connaissances, compétences et savoir-faire aussi bien dans les domaines techniques et technologiques que dans le domaine du management: analyse de situations, prévisions, résolutions de problèmes, animation des hommes, relations extérieures » et il apparaît que le premier niveau de la classification des cadres « est réservé aux cadres débutants diplômés de l'enseignement supérieur long », diplôme dont Mme [E] est dépourvue, de sorte qu'elle ne peut prétendre à cette classification et a fortiori pas à une classification supérieure supposant notamment pour le niveau VIII qu'elle revendique d'« engager l'entreprise dans le cadre d'une délégation limitée et dans son domaine d'activité ... Gérer sous le contrôle correspondant à cette délégation soit une activité bien identifiée relevant d'une spécialisation professionnelle précise , soit d'un ensemble d'activités diversifiées dont il assure la coordination et la liaison avec les autres fonctions. Échelon 1 : les fonctions sont assurées à partir de directives précisant les moyens, les objectifs et les règles de gestion. Échelon 2 : est amené, pour obtenir les résultats recherchés, à décider de solutions adaptées et à les mettre en oeuvre ainsi qu'à formuler des instructions d'application. Échelon 3 : responsable d'une unité ou d'un service autonome » ;

Attendu que le fait que Mme [E] ait été chargée « de l'ensemble des taches de téléprospections, de vente et du suivi de clientèle, dans le cadre des responsabilités et des orientations qui lui sont données, à savoir : la vente des consommables médicaux et dentaires, produits d'hygiène et d'entretien .... » et d'intervenir par ailleurs « en tant que responsable de département, sa fonction l'amènera à manager une équipe de vente à distance, à assurer son développement commercial ainsi que le le chiffre d'affaire convenue avec avec la direction ...devra en outre informer des demandes particulières des clients, ainsi que de l'évolution du marché dans son domaine de compétence » soit des fonctions strictement commerciales exercées à la tête d'une équipe de vente et nullement des fonctions de détermination des objectifs globaux ou d'analyse, il y a lieu, indépendamment du fait que Mme [E] elle-même ait implicitement reconnu dans son courrier du 3 septembre 2008 («... Ce n'est qu'un mois de préavis que j'ai à effectuer... ») qu'elle n'était pas cadre, de confirmer le jugement déféré qui a indiqué qu'elle avait le statut d'employée et l'a déboutée de ses demandes de rappel de salaire et de modification des documents sociaux et des bulletins de salaire liées au statut de cadre ;

Sur la validité de l'avenant du 1er avril 2004,

Attendu que Mme [E] soutient que l'avenant en question modifiant tant la structure que le montant de sa rémunération serait un faux au motif que la société MEDISTAR ne produirait qu'une copie et non l'original dudit avenant alors d'une part qu'elle ne démontre pas que la plainte qu'elle a déposée à ce titre le 24 juin 2009, soit plus de cinq ans après la mise en place de l'avenant contesté, pour faux et usage de faux ait abouti, qu'elle ne démontre pas en conséquence que la signature figurant sur cet avenant sous son nom serait fausse, alors d'autre part qu'elle a indiqué dans la longue lettre qu'elle a adressée à son employeur le 26 août 2011 qu'elle avait « récupéré l'essentiel de mon travail, mes preuves, mes fichiers, ma clef USB qui comporte mon fichier et non votre fichier comme vous l'avez prétendu, MENTEUR. Tout ce qu'il faut pour les prud'hommes et autres (surprise), le tout dans un coffre tenu dans un endroit secret, c'était votre intention que la police mette la main sur mes preuves ! Je ne vous ai jamais rien volé et vous le savez » propos qui tendent à accréditer la thèse de la société MEDISTAR selon laquelle Mme [E] a emporté son dossier social à l'occasion de sa démission, alors par ailleurs qu'il ressort de la déclaration que M.[L], son époux, dont elle est séparée ou divorcée, a faite lors de son audition par les Services de Police le 19 février 2010 au sujet de la création de la société PROMEDIC : « j'ai débuté avec le fichier clients de la société MEDISTAR que [B] m'a fourni... Il me semble que [B] m'a donné une clé USB à partir de septembre ou octobre 2008... Je vous remets une clé USB, contenant le fichier clients que [B] m'avait fourni », reconnaissant à la fin de cette audition « la complicité de détournement de fichier clients au préjudice de la société MEDISTAR », confortant ainsi le fait que contrairement à ce qu'elle soutient Mme [E] a emporté notamment l'original de l'avenant du 1er avril 2004 qu'elle ne peut en conséquence reprocher à la société MEDISTAR de ne pouvoir produire ;

Attendu par ailleurs que Mme [E] a été condamnée par le Tribunal Correctionnel de Nice le 23 janvier 2012 pour avoir notamment entre le 4 août 2008 et le 18 février 2010 « détourné au préjudice de la société MEDISTAR des fonds, des valeurs, un bien, en l'espèce des dossiers et fichiers clients, ainsi que les données relatives à ses clients » confirmant encore le fait énoncé par la société MEDISTAR et non sérieusement contesté par Mme [E] selon lequel elle a emporté lors de sa démission l'original de l'avenant du 1er avril 2004 ;

Attendu enfin qu'à aucun moment jusqu'à la date de sa démission en juillet 2008, soit pendant plus de quatre ans, Mme [E] n'a émis quelque réserve que ce soit sur son nouveau mode de rémunération tel que fixé par l'avenant susvisé, ce qui signifie qu'elle a bien signé cet avenant, qu'elle ne l'a pas contesté et en a accepté toutes les conséquences financières telles qu'elles sont apparues sur l'ensemble de ses bulletins de salaire postérieurs au 1er avril 2004 ;

Attendu qu'il n'y en conséquence nullement lieu de faire droit aux demandes financières sollicitées par Mme [E] à compter du 1er avril 2004 sur la base d'un contrat de travail initial qui a été modifié du commun accord des parties ;

Sur la période antérieure au 29 septembre 2003,

Attendu que Mme [E] ayant saisi le Conseil de Prud'hommes le 29 septembre 2008 toute demande en rappel de salaire antérieure au 29 septembre 2003 est atteinte par la prescription quinquennale et n'a pas lieu d'être examinée ;

Sur la période s'écoulant du 29 septembre 2003 au 1er avril 2004,

Attendu que seule cette période non prescrite couvrant les mois d'octobre, novembre, décembre 2003 et janvier, février et mars 2004, soit antérieure à l'avenant du 1er avril 2004 , doit être examinée au regard des dispositions contractuelles figurant au contrat du 2 septembre 2002 ;

Attendu que pendant cette période de six mois au total Mme [E] devait conformément aux dispositions contractuelles percevoir :

«- 12,50% net payé sur le chiffre d'affaire HT à partir du moment où celui-ci est supérieur au minimum demandé sur la base des prix publics édités (offres avec cadeaux)

- 6% net payé sur le chiffre d'affaire HT pour toutes commandes prises avec tarifs remisés.

Par ailleurs, une indemnité pour frais de déplacement sera versée chaque mois sur le bulletin de salaire, en nette, de 400 €.

Sur le chiffre d'affaire de l'équipe commerciale:

- 3,50% net payé sur le chiffre d'affaire HT conditionné à la réalisation du minimum de chiffre d'affaire pour chaque commercial. »

Attendu que si la société MEDISTAR fait valoir que Mme [E] invoque notamment pour les périodes considérées des chiffres d'affaires fantaisistes en ce que leur montant entre la première instance et l'instance d'appel ont très notablement varié et aboutirait à des chiffres d'affaires supérieurs à ceux indiqués par l'expert-comptable de la société « toutes activités confondues » y compris l'activité de télévente, ce qui est exact, il n'en demeure pas moins qu'il appartient à la société MEDISTAR, si elle conteste ces chiffres d'affaires, de justifier exactement du chiffre d'affaires mensuel sur lequel doivent être calculées les commissions de Mme [E] à hauteur d'une part de 12,50 % nets d'autre part de 3,50 % nets, ce qu'elle ne fait pas, se contentant de dire que les dires de Mme [E] ne sont « aucunement probants » sans pour autant produire - en dehors de son affirmation inopérante relative à la possibilité « d'apprécier le chiffre d'affaires global pour l'ensemble des téléventes » - les chiffres concernant exclusivement Mme [E] mois par mois ;

Attendu qu'il y a lieu par ailleurs d'observer qu'aucune des parties ne produit le bulletin de salaire de septembre 2003 ni celui de mars 2004 tandis qu'il apparaît que les bulletins de salaire d'octobre, novembre et décembre 2003 puis de janvier et février 2004 font état du paiement de « commissions » sans qu'il soit nullement possible de déterminer sur quelles bases de chiffre d'affaires elles ont été calculées, de sorte qu'il y aura lieu de procéder à une appréciation forfaitaire des commissions dues à Mme [E] pendant les six mois considérés sur la base donnée par Mme [E] pour le mois de septembre 2003 à décembre 2003 (quatre mois) à savoir un rappel de 43 064 € dont il convient de déduire les salaires perçus à hauteur de 21 860 €, soit un reliquat pour quatre mois de 21 204 €, soit un rappel mensuel de 5 301 € et donc de (5 301 € x six mois) 31 806 € pour les mois d'octobre, novembre, décembre 2003 et janvier, février et mars 2004 ;

Attendu par ailleurs qu'antérieurement à l'avenant du 1er avril 2004 il apparaît que l'indemnité de frais de déplacement net de 400 € prévue par le contrat de travail n'a pas été versée pour les six mois susvisés non prescrits de sorte que Mme [E] peut prétendre à ce titre au paiement de la somme de (400 € x 6 mois) 2400 € ;

Attendu qu'il apparaît que Mme [E] a , en conformité avec l'avenant du 1er avril 2004, obtenu le maintien de son salaire durant ses arrêts de travail de sorte que c'est à juste titre qu'elle a été déboutée de sa demande à ce titre ;

Attendu concernant les congés payés sollicités par Mme [E] que les salariés ont non seulement le droit mais également l'obligation de prendre chaque année les congés payés acquis et que les congés payés acquis non pris sont en principe, perdus sauf preuve par le salarié que l'impossibilité d'exercer son droit de congés payés a été le fait de l'employeur ;

Attendu que Mme [E] ne démontre nullement l'impossibilité dans laquelle elle aurait été de prendre ses congés payés entre le mois de juin 2003 et le mois de mai 2007 de sorte que ne contestant pas avoir perçu en septembre 2008 une indemnité compensatrice de 13 jours de congés non pris elle n'est pas fondée à solliciter le solde allégué de 52 jours revendiqués ;

Attendu que Mme [E] fonde sa demande de rappel de prime d'ancienneté sur la base d'une rémunération mensuelle brute inexacte de 9 790 € de sorte qu'ayant bénéficié du paiement d'une prime d'ancienneté sur la base de son salaire minimum mensuel tel que résultant de l'avenant c'est à juste titre qu'elle a été déboutée de la demande formée à ce titre ;

Sur la demande de requalification de la démission en licenciement irrégulier et dénué de cause réelle et sérieuse,

Attendu que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ;

Attendu que s'il ressort du courrier de démission et de son annexe adressé par Mme [E] à son employeur le 31 juillet 2008 que celle-ci était équivoque dans la mesure où ce courrier contient un certain nombre de reproches à l'encontre de l'employeur susceptibles de l'avoir motivée («... j'en ai marre, toutes vos promesses n'ont jamais été tenues, tout ce qui est écrit n'est pas respecté, votre prime d'ancienneté se fout de moi, ma fiche de salaire est une moquerie à mon travail, vous prenez votre soit disant responsable pour une idiote...j'ai passé ma vie professionnelle avant ma vie privée. Je vous ai protégé vous, au détriment de ma propre fille... Sachez qu'il ne faudra jamais oublier ce que vous lui avait fait, perte de chômage et perte de salaire. Si vous aviez de la considération pour moi et de la reconnaissance pour elle, rien ne serait·arrivé. Elle a décidé de partir à cause de la société dont vous en faites partie, n'oubliez jamais cela, le futur en dépend. Vous ne pouvez plus me payer, je comprends, alors j'anticipe. Vous m'avez mis dans le noir, j'ai cassé mon capital retraite dans sa totalité grâce à vous.. »), il apparaît que Mme [E] ne démontre pas quelles promesses n'auraient pas été tenues, ne démontre pas quel écrit ne serait pas respecté puisque la validité de l'avenant du 1er avril 2004 est établi, ne démontre pas en quoi son employeur l'aurait pris pour une " idiote " , et formule enfin des accusations gravissimes à l'encontre de son employeur relatives à la responsabilité qu'il aurait eue dans le suicide de sa fille, propos que seule sa détresse est susceptible d'excuser puisqu'à aucun moment le lien qu'elle allègue entre le comportement de l'employeur et le suicide de sa fille n'est établi, qu'enfin Mme [E] qui percevait une rémunération confortable (3716,32 € de moyenne mensuelle en 2007 et 2728,92 € de moyenne mensuelle pour les six premiers mois de l'année 2008 malgré des arrêts de travail quasi continus du 25 février au 31 juillet 2008) ne démontre pas en quoi son employeur l'aurait « mise dans le noir », de sorte que sa démission, réitérée par courrier du 3 septembre 2004, en l'absence de toute preuve dans la période antérieure ou concomitante à cette démission d'un quelconque manquement de l'employeur suffisamment grave pour la justifier, n'a pas lieu d'être requalifiée en licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;

Attendu qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement qui l'a déboutée de toutes ses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail ;

Attendu que la SARL MEDISTAR délivrera à Mme [E] des bulletins de salaire rectifiés concernant la période s'écoulant du 1er octobre 2003 au 31 mars 2004 inclus, la nécessité du prononcé d'une astreinte n'étant pas rapportée ;

Attendu qu'il y a lieu de condamner la société MEDISTAR à verser à Mme [E] la somme de 2000 € le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit que Mme [E] avait été à juste titre classée en qualité de responsable commerciale statut employé, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en rappel de salaire fondée sur le statut de cadre, de ses demandes au titre du maintien de salaire pendant la maladie, de la prime d'ancienneté, du solde de congés payés, en ce qu'il a dit que la démission n'avait pas lieu d'être requalifiée en licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a rejeté les demandes formées au titre du préavis, des congés payés y afférents, de l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Réforme pour le surplus,

Et statuant à nouveau ,

Condamne la société MEDISTAR à payer à Mme [B] [E] les sommes de :

31 806 € bruts à titre de rappel de commissions sur la période s'écoulant du 1er octobre 2003 au 31 mars 2004 inclus,

2400 € nets au titre de l'indemnité de déplacement pour la période s'écoulant du 1er octobre 2003 au 31 mars 2004 inclus,

ainsi qu'à lui délivrer les bulletins de salaire des mois d'octobre 2003 au mois de mars 2004 inclus rectifiés conformément au présent arrêt,

Rejette toute demande plus ample ou contraire,

Condamne la société MEDISTAR aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu' à payer à Mme [E] la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 11/01371
Date de la décision : 03/07/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°11/01371 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-07-03;11.01371 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award