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05/06/2012 | FRANCE | N°11/06763

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 05 juin 2012, 11/06763


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 5 JUIN 2012



N°2012/

CH/FP-D













Rôle N° 11/06763







[S] [G]





C/



SAS CLUB [Adresse 6]













































Grosse délivrée le :

à :

Me Florence MARCHAND, avocat au barreau de GRASSE



Me Cédric DE KERVENOAEL, avocat au barreau de PARIS



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CANNES en date du 25 Mars 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 09/589.





APPELANT



Monsieur [S] [G], demeurant C/O IMAGINEZ - [...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 5 JUIN 2012

N°2012/

CH/FP-D

Rôle N° 11/06763

[S] [G]

C/

SAS CLUB [Adresse 6]

Grosse délivrée le :

à :

Me Florence MARCHAND, avocat au barreau de GRASSE

Me Cédric DE KERVENOAEL, avocat au barreau de PARIS

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CANNES en date du 25 Mars 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 09/589.

APPELANT

Monsieur [S] [G], demeurant C/O IMAGINEZ - [Adresse 2]

représenté par Me Florence MARCHAND, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEE

SAS CLUB [Adresse 6], demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Cédric DE KERVENOAEL, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 14 Mars 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Corinne HERMEREL, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président

Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller

Madame Corinne HERMEREL, Conseiller

Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Mai 2012 prorogé au 5 juin 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 5 juin 2012

Signé par Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président et Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Suivant lettre d'embauche en date du 18 Mars 1994 avec prise d'effet au 21 Mars suivant, Monsieur [S] [G] a été embauché par la société CLUB [Adresse 6], aux droits de laquelle vient aujourd'hui la SAS CLUB DE [Adresse 6]) en qualité de Directeur du Club.

Par lettre datée du 24 Février 2001, Monsieur [X] indiquait « je soussigné [L] [X] déclare avoir reçu ce jour les clefs du bureau de [S] [G], les véhicules et le bureau de [U] le 24 Février à 15 heures suite à ma demande faite à [S] [G] » et par un autre courrier du même jour Monsieur [G] était 'suspendu' de toutes ses fonctions.

Par courrier recommandé du 28 février 2001, la Société CLUB [Adresse 6] représentée par Monsieur [X], gérant, convoquait Monsieur [G] à un entretien préalable fixé au 8 mars 2001 et confirmait la mise à pied conservatoire prononcée le 24 Février 2001.

Par courrier daté du 1 Mars 2001, [S] [G] écrivait à Monsieur [X] en lui indiquant que suite à leur rencontre du 24 Février à l'issue de laquelle, ne voulant pas démissionner comme il y était pressé, il avait été dépossédé de ses moyens de travail, il se considérait comme licencié verbalement et qu'il saisissait le conseil de prud'hommes.

Par lettre recommandée en date du 12 mars 2001 la Société CLUB [Adresse 6] notifiait son licenciement pour faute grave à Monsieur [S] [G] en ces termes :

" Vous occupez à ce jour la fonction de Directeur du Club de [Adresse 6] et êtes à ce titre responsable notamment de sa gestion.

Le 14 février 2001, un rapport d'audit, nous était remis par le cabinet d'expertise comptable TRINTIGNAC.

Ce rapport faisait ressortir un nombre important d'irrégularités et de dysfonctionnements dans la gestion du club.

Nous avons été conduits de fait à procéder à des investigations complémentaires pour apprécier l'étendue et la nature des anomalies relevées.

L'ensemble de ces documents et diligences nous ont permis de découvrir et de retenir à votre encontre, notamment les griefs suivants:

1- Achat d'un camion frigo non retiré auprès du vendeur

En octobre 2000, vous avez procédé pour le club à l'acquisition d'un camion frigo pour un montant de 23.920 Francs TTC (facture du 24/10/2000) auprès de la société FRIGOCCASION.

A ce jour, nous avons constaté que vous n'étiez toujours pas allé le chercher à [Localité 7], en région parisienne, et ce en dépit des relances de FRiGOCCASION, dont la dernière mise en demeure afin de prendre possession et de retirer ledit camion, est datée du 1er mars 2001.

Malgré le règlement effectué le 24 octobre 2000, le titre de propriété du camion n'est toujours pas établi au nom du Club.

Ce comportement traduit déjà à ce stade de notre exposé votre absence de rigueur professionnelle, étant rappelé qu'aucun investissement, quelle qu'en soit la nature, ne peut être effectué au hasard.

2 - Caractère totalement disproportionné des "offèrts"

Une procédure de gestion des "offerts a été mise en place corrélativement avec l'ouverture le 7 juillet 2000, de deux comptes à cette fin.

Au 31 décembre 2000, le total des offerts depuis le 7 juillet représentait au minimum, une somme de 104.243 Francs. Les bénéficiaires des invitations que vous avez faites au cours de cette période, ne sont pas indiqués sur les documents retraçant ces opérations. De surcroît, il n'existe pas d'édition détaillée de ces prestations, mais simplement un récapitulatif des inscriptions en compte au 31 décembre 2000.

Les 18 et 19 juillet 2000, 54 repas gastronomiques ont été offerts au peintre [Z] et à ses amis, mais ne sont pas enregistrés en tant que tels.

Outre le caractère tout à fait exorbitant de ces offerts par rapport au chiffre d'affaires du club, il nous est apparu qu'ils bénéficiaient en majorité à des "non-membres" et ce sans qu'il en soit justifié.

Par ailleurs, différentes personnes nous ont certifiés le 14 février 2001, que les transactions en "offerts" n'avaient pas fait l'objet d'un enregistrement systématique, de sorte que le volume de ces prestations est vraisemblablement supérieur au constat opéré.

Au-delà, le défaut même d'enregistrement est constitutif d'une faute manifeste.

3- Octroi unilatéral de primes

L'audit réalisé a permis de constater que vous vous étiez arrogé de façon unilatérale, sans avoir préalablement obtenu l'accord du conseil de gérance, des primes dont le montant s'élève à 256.807 Francs pour l'année 2000.

A l'occasion de l'arrêté des comptes au 31 décembre 1998, en présence de l'expert-comptable représentant le cabinet TRINTIGNAC, vous nous aviez présenté un état, non contradictoire, de jours de repos non pris. Il avait été provisionné dans les comptes une prime de 125.000 Francs que vous deviez percevoir dans le courant de l'année 1999. Le récapitulatif de vos salaires de 1999, fait apparaître une prime de 102.858 francs.

Il ressort des éléments comptables que la prime qui vous avait été octroyée fin 1998, a été ventilée sur les primes de 1999 et 2000, ce qui confirme nos interrogations sur l'octroi unilatéral de la prime totale de 234.665 francs non justifiée.

Nous en avons trouvé le montant au travers du calcul suivant:

- prime 1999 : 102.858 F

- prime 2000 : 256.807 F

- A déduire provision constituée en 1998 - 125.000 F

- Soit un total net de 234.665 F

Nous nous sommes entretenus avec vous de cette situation en vous laissant pourtant une chance de modifier l'appréciation que nous avions ainsi, de votre comportement.

4- Versements d'espèces non justifiés

L'audit réalisé et nos contrôles postérieurs ont révélé que vous aviez procédé à de nombreux versements d'espèces dont certains ne sont en rien justifiés sur le plan comptable, à l'instar notamment, des montants suivant:

- Versement de 48.000 Francs en août 2000 à la société Atmosphère Sud, sans facture correspondante;

- Versement de 5.000 Francs en août 2000 à Monsieur [L] [E] et sans facture.

Ces deux exemples sont d'autant plus édifiants que la Société Atmosphère Sud dont Monsieur [E] est l'un des associés, n'est autre que celle que dirige votre épouse.

5- Retrait d'espèces

Le 31 mai 2000, vous avez effectué un retrait d'espèces sans autorisation du Conseil de Gérance et sans justificatif comptable recevable, pour un montant de 18.000 Francs au bénéfice d'un fournisseur de la société KOALA.

Vous avez prétendu qu'il s'agissait là d'une avance que vous auriez consentie de façon unilatérale. A ce jour, rien ne justifie du remboursement de cette somme.

Par ailleurs, vous avez également retiré en décembre 2000, une somme de 5.200 Francs sans en justifier ne fut-ce que par un reçu.

6- Echanges de vins

Pour des raisons inconnues, vous avez échangé avec un certain Monsieur [W], en novembre 2000, un stock de bouteilles de vin appartenant au club, pour un montant de 54.681,12 Francs TTC, laquelle a donné lieu à un avoir daté du 25 janvier 2001.

Aucun des documents n'a été enregistré en comptabilité.

Par ailleurs, une confirmation de commande émanant du champagne René Jardin, situé à la même adresse que la facture et l'avoir précité, a été datée du 17 janvier 2001.

7- Achats de billets Air France

Le club jouit de tarifs préférentiels auprès d'Air France, au bénéfice de ses membres.

L'application de ces tarifs suppose que le club fasse lui-même l'avance du prix du billet en l'achetant au préalable à la compagnie aérienne.

Par suite, le membre du club qui en aura fait la commande, procédera directement à son remboursement ou fera imputer la facture sur son compte, ouvert dans les livres du Club.

L'examen des comptes a révélé que pour 224.919 Francs d'achat de billets par le Club, le total des billets vendus ne s'élevait qu'à 203.602 Francs.

On pourrait en déduire que certains billets n'ont pas été remboursés et que rien n'a été fait pour expliquer cet écart et procéder au recouvrement de ces montants.

De surcroît, il s'est avéré que les bénéficiaires de ces ventes de billets n'étaient constitués qu'à hauteur de 25% de membres du club, les 75% restant étant des tiers.

Ainsi, le club assure à cet égard, la trésorerie des tiers, étant précisé que les délais de paiement constatés sur certains comptes peuvent être très importants.

On citera à titre d'exemple, la société KOALA.

8 Achats de la fin d'année 2000

Vous avez réalisé sur la fin de l'année 2000 et le début de l'an 2001, des achats de vins et liquoreux en des proportions exorbitantes et sans lien avec l'activité et les besoins du club, à savoir:

- 312 magnums de Château Belle Brise Pomerol pour un montant de 69.858 Francs.TTC;

- 60 bouteilles de bas Armagnac 19'73 pour un total de 2B.704 Francs TTC (alors que la consommation du club sur ce type de produit, n'excède pas 1 à 2 bouteilles par an.)

Ce simple constat illustre une absence de gestion des achats.

Par ailleurs, l'inventaire physique a révélé un écart en négatif de 91 bouteilles, qui ont disparu des stocks.

9 - Commande de produits de beauté pour l'hôtel

Entérinant votre incapacité à gérer les achats, nous avons relevé le 14 février dernier que vous aviez passé une commande disproportionnée de savons, de bain moussant et de lait pour le corps, pour un montant de 57.631,29 Francs.

Nous avons relevé la présence de non moins de 5.130 flacons de bains moussant de 110 ml et 9.535 de 20 ml, ce qui représente respectivement 301 jours et 560 jours de consommation pour un hôtel de seulement 17 chambres.

10- Factures concernant des achats personnels

Nous avons déploré la présence de factures libellées au nom du club et qui couvraient en fait, vos achats personnels.

On citera notamment les factures suivantes :

- MASSA AUTO PNEU le 23/02/2000 : 4.479 Francs ITC

- GARAGE DE LA NAPOULE le 14/04/2000 : 3.728,46 Francs ITC

Puis le 29/1112000: 6.149,40 Francs TTC

- BALITRAND le 04/05/2000: 2.101 Francs TTC

- CASTORAMA : le 13/1112000 : 3.597 Francs ITC

11- Peignoirs de bain

Vous avez procédé à l'achat de 165 peignoirs de bain siglés aux armes de [Adresse 6] pour 210 Francs pièce.

Vous les avez revendus 100 Francs pièce au gendre de Monsieur [M], Monsieur [K].

Il n'a pas été retrouvé dans les comptes, la moindre trace de document qui aurait pu justifier ce cadeau.

12 - Prestation" mariage [M]/[K]"

En octobre 2000, une prestation a été effectuée pour le mariage [M]/[F] pour un montant de l'ordre de 250.000 Francs.

Au 26 février 2001, Monsieur [K] reste devoir la somme de 93.745 Francs, pour laquelle vous n'avez jamais fait effectuer la moindre relance.

13 - Prestations extérieures dites" traiteur"

Nous avons relevé qu'au cours de mois d'octobre, novembre et décembre 2000, différentes prestations de "traiteur" n 'ont pas été facturées aux bénéficiaires de ces prestations:

Il s'agit en particulier des cocktails organisés pour la société Europe 2 en octobre et novembre 2000 et du cocktail pour le salon du mariage organisé en décembre dernier à Monaco. Le coût de ces prestations a été indûment supporté par le club, à savoir: la confection des cocktails par le chef de cuisine, la participation du personnel du Club, la location de véhicules pour transporter la nourriture, les boissons et le matériel.

Ces prestations, que vous qualifiez "d'échanges marchandises" n'ont pas à être supportées par les membres du Club. Votre comportement est là encore inadmissible et contraire à l'intérêt général des copropriétaires.

14 - Fiches de présence erronées

Nous avons également déploré que la majeure partie des plannings de repos hebdomadaires sur lesquels vous figurez soit raturés et modifiés à votre avantage. Nous avons constaté que vous aviez fait état de votre présence la semaine du 12 au 18 Février, alors même que vous étiez absent puisqu'en congé, ce qui pas contestable, Monsieur [X] étant présent au club du 12 Février au soir au 15 Février au matin.

L'ensemble de ces constats, qui vous sont imputables, est parfaitement inadmissible et illustre des abus manifestes que votre qualité de Directeur du Club excluait de façon rédhibitoire.

Vos agissements frôlent la malversation et il n'est pas exclu que des compléments d'investigations ne nous révèlent une étendue insoupçonnée, voire délictuelle'./'

En tout état de cause, vos manquement professionnels caractérisés et largement dommageables à la saine gestion et à la prospérité de notre exploitation, sont incompatibles avec votre maintien dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis.

Nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave, sans préavis ni indemnités.'/' »

Le 20 mars 2001, la Société CLUB [Adresse 6] adressait à Monsieur [S] [G] les documents relatifs à la rupture de son contrat de travail.

Le 23 mars 2001, Monsieur [G] saisissait le Conseil de prud'hommes de Cannes.

La procédure était radiée en 2002, réenrôlée en 2008 puis renvoyée à plusieurs reprises.

Selon jugement prononcé le 25 Mars 2011, le Conseil de Prud'hommes de CANNES a considéré que la procédure de licenciement était régulière, que le licenciement pour faute grave était justifié et a débouté Monsieur [G] de toutes ses demandes ainsi que la société [Adresse 6] de ses demandes reconventionnelles.

Le 8 Avril 2011, Monsieur [G] a interjeté appel de la décision.

Il demande à titre principal de retenir que le licenciement pour faute grave de Monsieur [G] est intervenu verbalement sans aucune procédure le 24 février 2001 et de condamner en conséquence la SAS CLUB DE [Adresse 6] au paiement de :

· 11.434,00 euros au titre du préavis de trois mois;

· 1.143,00 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis;

· 3.500,00 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement;

· 225.000,00 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement abusif.

de considérer, à titre subsidiaire, que le licenciement intervenu est dépourvu de tout fondement et de condamner en conséquence la SAS CLUB DE [Adresse 6] au paiement des mêmes sommes.

Il sollicite aussi la condamnation de la société CLUB [Adresse 6] à lui verser 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

La SAS [Adresse 6] demande à la Cour de confirmer le jugement du 25 mars 2011 en ce qu'il a jugé :

* que la rupture du contrat de travail de Monsieur [G] repose sur une notification écrite, que le licenciement de ce dernier n'a pas été notifié de manière verbale et que la procédure de licenciement est parfaitement régulière ;

*que le licenciement notifié par la Société CLUB [Adresse 6] à Monsieur [G] repose sur une faute grave

et débouté en conséquence Monsieur [G] de l'ensemble de ses demandes.

La société CLUB [Adresse 6] demande en outre de le réformer pour le surplus et de condamner Monsieur [G] à restituer à la Société CLUB [Adresse 6] les sommes suivantes :

-35.769,85 euros au titre des primes que Monsieur [G] s'est unilatéralement octroyées sans le moindre accord en 1999 et en 2000

- 6.905,48 euros au titre des cotisations qui ont été réglées à l'insu et au dépens de la société au titre du contrat de retraite type "article 82" ouvert au nom de Monsieur [G]

En tout état de cause, de condamner Monsieur [G] à payer à la Société CLUB [Adresse 6] une somme de 15.000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure des moyens et des prétentions des parties, il est renvoyé au jugement entrepris, aux pièces de la procédure, et aux conclusions des parties oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement « verbal »

Il résulte des termes d'un courrier de Monsieur [X], président du Club [Adresse 6] et gérant de l'EURL, remis en mains propres le 24 Février 2001 à Monsieur [G], contre émargement, qu'à compter de ce jour là, Monsieur [G] a été suspendu de toutes ses fonctions au Club [Adresse 6].

Cette décision a été suivie le 28 Février d'un courrier recommandé avec accusé de réception par lequel Monsieur [G] a été convoqué à un entretien préalable tandis que lui était notifié concomitamment le maintien de la mise à pied conservatoire notifiée le 24 février.

Dès lors, Monsieur [G] ne saurait soutenir que le contrat de travail a été rompu le 24 Février alors que les termes de la lettre n'étaient pas équivoques et visaient la suspension et non la rupture, autrement dit invoquaient une mise à pied conservatoire laquelle ne doit revêtir aucune forme particulière pour être régulière.

C'est par conséquent à bon droit que le Conseil de Prud'hommes a considéré qu'il n'y avait pas eu de licenciement verbal et a débouté Monsieur [G] de ses demandes à ce titre.

Sur le licenciement pour faute grave

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ;

Le lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, mentionne un certain nombre de griefs à l'encontre de Monsieur [G], qu'il convient d'examiner.

Sur l'achat d'un camion frigorifique

Il est établi que la société CLUB [Adresse 6] disposait un camion frigorifique Citroën [Immatriculation 1].

Le 24 Octobre 2000, Monsieur [G] a fait l'acquisition d'un nouveau camion auprès d'une société FRIGOCCASION moyennant le versement d'un chèque de 23920 francs pour remplacer l'ancien trop vétuste et dont il a barré la carte grise en mentionnant « Vendu le 29 Janvier 2001 pour destruction », signé de sa main.

Or, Monsieur [S] [G] n'a jamais pris la peine d'aller prendre possession du camion et c'est à l'occasion d'une mise en demeure adressée par la société FRIGOCCASION le 1 Mars 2001 pour sommer la société CLUB [Adresse 6] de venir chercher le véhicule que la société CLUB [Adresse 6] s'est rendue compte de ce que ce dernier, facturé pourtant en Octobre 2000, était encore à [Localité 7] , soit presque 5 mois plus tard, et ce malgré les nombreux rappels de la société FRIGOCCASION, ce qui témoigne d'une négligence caractérisée, d'un manque de rigueur professionnelle et de la gestion laxiste des deniers du Club.

Ces faits ne sont pas contestés dans leur matérialité par Monsieur [S] [G] qui argue de ce que le rapatriement du camion était prévu pour les beaux jours car le club n'avait, selon lui, pas besoin d'un camion en hiver. Cet argument n'est pas pertinent compte tenu du climat sur la côte d'Azur et inopérant en ce qui concerne les règles relatives au transport des denrées alimentaires, qui suppose nécessairement une réfrigération en toutes saisons.

Si ce fait fautif est ainsi circonscrit, il n'est pas inutile d'observer qu'en 2003, Monsieur [S] [G] a reconnu devant le juge d'instruction que le vieux camion de la société, censé être vendu pour destruction, était en possession de la société ATMOSPHERE SUD, société qu'il a créée le 28 Mars 2000, dont il est associé et son épouse co-gérante.

Sur l'octroi de primes

L'audit a révélé qu'en 1999, Monsieur [S] [G] avait perçu 102858,18 francs de prime exceptionnelle et en 2000, la somme de 313677,51 francs.

Il n'est pas contesté que les bulletins de paye étaient édités par la comptable selon les instructions de Monsieur [S] [G] et qu'ils n'ont été analysés qu'à l'occasion de l'audit pratiqué en Février 2001, qui a permis de porter les anomalies qu'ils contenaient à la connaissance de l'employeur.

Il résulte d'un courrier de Monsieur [X] en date du 1 Avril 1999, produit aux débats, que ce dernier avait autorisé Monsieur [G], qui n'avait pas pris la totalité de ses jours de récupération en 1999, à percevoir à ce titre la somme de 125 000 francs pour solder ses droits antérieurs au 31 Décembre 1998.

Or, il résulte de l'analyse des bulletins de salaire de Monsieur [S] [G] que celui-ci a perçu dans l'année 1999 102 858,18 francs à titre de primes exceptionnelles, et dans l'année 2000 ( de janvier à septembre inclus) 256 806,67 francs soit un total de 359 688 francs.

Il en résulte, déduction faite de la somme de 125 000 francs qu'il avait été expressément autorisé à percevoir pour apurer ses droits antérieurs, que Monsieur [G] s'est alloué en deux années 234 634,85 francs sans aucune autorisation des dirigeants.

Monsieur [S] [G] produit l'attestation d'un ancien président du conseil de gérance en exercice en 1994 et 1995, Monsieur [R], qui dit se souvenir de ce que le Conseil avait accordé une prime annuelle à Monsieur [S] [G] de 60 000 francs environ, « au moins pour les deux années 1994-1995". Cependant la vérification des procès verbaux de réunion du conseil de gérance de l'époque démontre que la prime en question était véritablement exceptionnelle puisqu'elle a été décidée pour la seule année 1995, et d'un montant en effet de 60 000 francs.

Force est de constater que les primes perçues en 1999 et 2000, à hauteur de 234634,85 francs représentent le quadruple de la prime annuelle qui avait été octroyée pour l'année 1995.

Monsieur [S] [G] invoque enfin un prêt personnel de 60 000 francs que la société lui a consenti le 24 Octobre 2000 et qu'il l'a remboursé lorsqu'il a été licencié.

Les arguments de Monsieur [S] [G] n'expliquent donc pas le montant des sommes qu'il s'est alloué au titre de prétendues primes exceptionnelles qui n'ont pas été autorisées.

S'octroyer de telles primes sans le soumettre à la délibération du conseil de gérance revient à disposer des fonds des copropriétaires comme des siens propres et à échapper à tout contrôle.

Il s'agit là encore d'un manquement grave qui justifiait le licenciement.

Sur le versement et le retrait d'espèces

L'audit remis en février 2001 à la société CLUB [Adresse 6] a révélé que Monsieur [S] [G] avait procédé à divers retraits d'espèce qui n'ont pas été enregistrés en comptabilité, à savoir, 48 000 francs à la société ATMOSPHERE SUD et 5000 francs à Monsieur [E], associé au sein d'ATMOSPHERE SUD.

Quels que soient les explications données à ces opérations pour les justifier, tant par Monsieur [S] [G] que par Monsieur [E], il demeure qu'elles étaient dissimulées dans la comptabilité et qu'elles ont été faites au profit de la société ATMOSPHERE SUD dans laquelle Monsieur [S] [G] avait des intérêts.

Par ailleurs, le 31 Mai 2000, Monsieur [S] [G] a sorti 18 000 francs en espèces pour les verser, selon ses dires, à la société KOALA, à titre d'avance sur frais, que cette société n'aurait jamais remboursé, ce que la gérante de ladite société conteste dans son audition par le juge d'instruction, tandis que Monsieur [S] [G] déclare pour sa part, qu'il a remboursé en partie cette somme, à hauteur de 5200 francs, mais que ce remboursement a été fait avec des fonds également empruntés à l'EURL et qu'il n'a pas remboursé .

Peu importe à cet égard, comme le soutient Monsieur [S] [G], que la somme de 18 000 francs ait servi à régler le personnel de la société KOALA à la suite d'une soirée du CLUB et que ce dernier disposait d'une caisse noire. Il résulte d'un procès verbal d'audition de la comptable Madame [D], que ce « trou » de 18 000 francs dans la comptabilité, sans aucun justificatif correspondant, lui avait posé des difficultés.

Cette gestion anarchique et désinvolte caractérise en tous cas la faute grave reprochée de manière justifiée à Monsieur [G].

Les griefs qui viennent d'être examinés sont tirés de faits qui n'étaient pas prescrits à la date de l'engagement de la procédure de licenciement dès lors que l'employeur n'en a eu connaissance qu'en Février 2001.

Cumulés, ils suffisent à caractériser la faute grave justifiant la rupture du contrat de travail et l'impossibilité pour la société CLUB [Adresse 6] de maintenir Monsieur [G] dans le poste durant son préavis.

Il n'est donc pas nécessaire d'analyser la pertinence des autres griefs listés dans la lettre de licenciement.

S'il est exact que Monsieur [G] dans les premières années de son emploi, s'est investi totalement dans sa mission, sans compter ses heures ni prendre de congés, ce qui a conduit la société CLUB [Adresse 6] à le féliciter pour ses bons résultats dus en partie au fait qu'il agissait dans l'intérêt de l'entreprise comme si elle était la sienne, c'est également cet excès qui lui a été finalement reproché à juste titre.

Monsieur [G] a profité de la confiance aveugle qui lui était accordée et de l'indépendance totale dans laquelle il exerçait ses fonctions, pour s'accorder des faveurs de manière déloyale, sans autorisation de son employeur, maniant ainsi avec une grande désinvolture les fonds de la société, comportements qui, pour partie seulement, ont été qualifiés d'abus de confiance par la juridiction correctionnelle et qui, pour le surplus ont fait l'objet d'une relaxe de ce chef, ce qui ne les prive pas de leur caractère gravement fautif au regard de la relation contractuelle de travail.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a considéré que le licenciement pour faute grave était justifié et débouté Monsieur [S] [G] de ses demandes .

Sur les demandes reconventionnelles de la société CLUB [Adresse 6]

Sur les primes

Comme il vient d'être examiné ci-dessus, c'est indûment que Monsieur [S] [G] s'est octroyé des primes à concurrence de 234 634,85 francs en 2000.

Monsieur [G] sera donc condamné à verser à la société [Adresse 6] la somme de 234 634,85 francs soit 26623 euros en restitution des primes indûment perçues.

Sur le contrat retraite

La société CLUB [Adresse 6] reproche à Monsieur [G] d'avoir souscrit à son profit, sans autorisation, un compte d'assurance défiscalisable comprenant un contrat de retraite de type article 82 dont les cotisations, d'un montant total de 6905,48 euros, ont été supportées par le CLUB [Adresse 6] au cours de l'année 2000.

Monsieur [S] [G] ne conteste pas la matérialité de cette opération dont il justifie par la production d'un courrier de Monsieur [R], sus cité, qui indique que lorsque le Conseil a autorisé l'allocation de la prime annuelle en 1995, il a , par la même occasion, autorisé Monsieur [S] [G] à capitaliser « un montant régulier et raisonnable » établi sur un compte d'assurance défiscalisable pour le CLUB.

Il convient en premier lieu d'observer qu'il n'appartenait pas à Monsieur [G] de déterminer ce qui pouvait être selon le président de l'époque, « un montant régulier et raisonnable » et qu'il incombait donc à Monsieur [S] [G] de requérir une autorisation chiffrée et non de décider lui-même du montant à capitaliser.

Mais au surplus, aucun compte rendu du Conseil de gérance ne fait état d'une telle opération, ni même d'une autorisation de principe et si tel avait été le cas, Monsieur [S] [G] n'aurait pas attendu l'année 2000 pour réaliser une opération de cette nature, prétendument autorisée en 1995.

Enfin, faute d'autorisation écrite donnée en 1995, Monsieur [S] [G] aurait dû, dans tous les cas, solliciter expressément l'autorisation du conseil de gérance en place en 1999 ou 2000 avant de capitaliser 6905,48 euros comme il l'a fait .

Monsieur [G] sera donc condamné à verser à la société [Adresse 6] la somme de 6905,48 euros qu'il a prélevé indûment sur les fonds de la société.

Sur les frais irrépétibles

Il serait inéquitable de laisser la société CLUB [Adresse 6] supporter l'entière charge des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager en cause d'appel et au titre desquels Monsieur [S] [G] devra lui verser 2000 euros.

Sur les dépens

Ils seront supportés par Monsieur [S] [G] qui succombe.

PAR CES MOTIFS

La COUR , statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la société CLUB [Adresse 6] de ses demandes reconventionnelles.

Condamne Monsieur [S] [G] à verser à la société CLUB [Adresse 6] les sommes de :

*35769,85 euros au titre des primes octroyées en 1999 et 2000.

*6905,48 euros au titre des cotisations pour le contrat retraite .

*2000 euros sur le fondement de l'sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamne Monsieur [S] [G] aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 11/06763
Date de la décision : 05/06/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°11/06763 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-06-05;11.06763 ?
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