COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 10 MAI 2012
N°2012/226
Rôle N° 10/01821
[T] [E]
C/
[D] [S]
[R] [S]
[J] [S]
SARL DNX
[H] [Z] [A] [U]
[A] [G] [O] [U]
[X] [V] [Q] [U]
[F] [C] [B] veuve [U]
Grosse délivrée
le :
à
MAYNARD
BADIE
CHERFILS
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce d'AIX-EN-PROVENCE en date du 16 Novembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 2008/15173.
APPELANTS ET INTIMES
Monsieur [T] [E]
né le [Date naissance 5] 1976 à [Localité 5], demeurant [Adresse 2]
représenté par la SCP BADIE - SIMON-THIBAUD - JUSTON, avocats au barreau d'AIX EN PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP DE ST FERREOL ET TOUBOUL, avoués
Monsieur [H] [U], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de feu Monsieur [Z] [M] [Y] [J] [U], décédé le [Date décès 1]/2008,
Intervenant volontaire en sa qualité d'héritier
né le [Date naissance 2] 1977 à [Localité 3], demeurant [Adresse 7]
Monsieur [A] [U], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de feu Monsieur [Z] [M] [Y] [J] [U] décédé le [Date décès 1]/08,
Intervenant volontaire en sa qualité d'héritier
né le [Date naissance 3] 1980 à [Localité 3], demeurant [Adresse 1]
Monsieur [X] [U], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de feu Monsieur [Z] [M] [Y] [J] [U] décédé le [Date décès 1]/08,
Intervenant volontaire en sa qualité d'héritier
né le [Date naissance 8] 1983 à [Localité 3], demeurant [Adresse 6]
représentés par Me Romain CHERFILS, avocat de la Selarl BOULAN- CHERFILS-IMPERATORE avocats au barreau D'AIX-EN-PROVENCE constitué aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués et plaidant par Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Monsieur [D] [S]
né le [Date naissance 4] 1951 à [Localité 6] (31), demeurant [Adresse 4]
Madame [R] [S]
née le [Date naissance 6] 1983 à [Localité 2] (49), demeurant [Adresse 4]
Madame [J] [S]
née le [Date naissance 9] 1979 à [Localité 2] (49), demeurant [Adresse 8]
représentés par la SCP MAYNARD SIMONI, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et plaidant par Me Jean-Raymond DELISLE, avocat au barreau de MARSEILLE
SARL DNX prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant [Adresse 3]
défaillante
INTERVENANTE VOLONTAIRE
Madame [F] [B] veuve [U], agissant en sa qualité d'héritière de feu son époux Mr [Z] [M] [Y] [J] [U], décédé le [Date décès 1]/08, et également en sa qualité de représentante légale de son fils mineur [I] [U], né le [Date naissance 7]/1999 à [Localité 1] de nationalité française et actuellement héritier de feu Mr [Z] [M] [U],
née le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 4] (59), demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Romain CHERFILS, avocat de la Selarl BOULAN- CHERFILS-IMPERATORE avocats au barreau D'AIX-EN-PROVENCE constitué aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués et plaidant par Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785,786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 20 Mars 2012 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président Rapporteur,
et Monsieur Jean-Noël ACQUAVIVA, Conseiller- Rapporteur,
chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président
Monsieur Jean-Noël ACQUAVIVA, Conseiller
Madame Marie-Claude CHIZAT, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Mai 2012.
ARRÊT
Défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Mai 2012.
Rédigé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président,
Signé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA COUR
Par acte sous seing privé du 5 janvier 2008, M. [D] [S], Mme [R] [S] et Mme [J] [S] (les consorts [S]) ont cédé à la SARL DNX, constituée à cette fin, l'intégralité des parts de la société Solutions autos, devenue la société DNA autos, au prix de 77 000 €, payé comptant à concurrence de 40 000€ et, pour le surplus, par un versement de 20 000€ le 31 janvier 2008 suivi, quant au solde de 17 000 €, par 48 mensualités égales à compter de février 2008, les mensualités portant intérêts au taux de 7,5 %. Par le même acte, la société DNX s'est engagée à rembourser à M. [D] [S] le solde créditeur du compte courant d'associé dont il était titulaire dans la comptabilité de la société DNA autos, à concurrence de 36 860 €, en 48 mensualités égales assorties d'un intérêt au taux de 7,5%.
Par une stipulation expresse, le cessionnaire a déclaré renoncer à demander aux cédants une 'garantie conventionnelle de passif ou de bilan', en considération notamment des modalités de fixation et de paiement du prix, et il a reconnu que son attention a été spécialement appelée par le rédacteur de l'acte sur le caractère non usuel de cette clause.
M. [H] [U], M. [A] [U], M. [X] [U], M. [N] [U] (les consorts [U]) et M. [T] [E] se sont portés caution solidaire, par un acte du même jour, des engagements souscrits par la société DNX.
Après avoir payé la somme de 60 000 € et 6 échéances mensuelles, la société DNX a été défaillante.
Le 27 novembre 1998, les consorts [S] l'ont fait assigner, ainsi que les cautions, en paiement du solde de leurs créances.
La société DNA Autos, mise en redressement judiciaire le 2 juillet 2009, a fait l'objet d'un plan de cession arrêté le 22 septembre suivant puis a été mise en liquidation judiciaire le 3 novembre 2009.
La société DNX a été mise en liquidation judiciaire le 10 septembre 2009.
Par jugement du 16 novembre 2009, le tribunal de commerce d'Aix en Provence, statuant sur les assignations en paiement délivrées à la requête des consorts [S] :
- a constaté la suspension de l'instance relativement à la société DNX et a invité les consorts [S] à mettre en cause les organes de la procédure collective ;
- a rejeté le moyen d'irrecevabilité de l'action dirigée contre les cautions, tiré de l'ouverture de la procédure collective de la société DNX ;
- a condamné conjointement et solidairement M. [E] et les consorts [U] à payer :
- à M. [D] [S], la somme de 34 671,40 € avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2008 se capitalisant dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;
- aux consorts [S], la somme de 20 013 € avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2008 se capitalisant dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;
- la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les consorts [U] et M. [E] sont appelants de ce jugement.
M. [N] [U] étant décédé, ses héritiers sont intervenus volontairement aux débats.
****
Vu les conclusions déposées le 28 mai 2010 par M. [E] ;
Vu les conclusions déposées le 13 août 2010 par les consorts [S] ;
Vu les conclusions déposées le 13 janvier 2011 par les consorts [U] ;
Vu l'assignation délivrée le 19 octobre 2011 à la société DNX, par exploit déposé à l'étude ;
Vu l'ordonnance de clôture du 20 mars 2012 ;
MOTIFS DE LA DÉCISION
Les moyens de défense opposés par M. [E]
1. L'interruption de l'instance du fait de l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société DNX
L'interruption de l'instance consécutive à l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société DNX ne produisant effet que dans les rapports entre les consorts [S] et cette personne morale, le tribunal n'était pas privé de la faculté de statuer, ainsi qu'il l'a fait, à l'égard des seules cautions, lesquelles ne se trouvaient pas dans un lien d'instance indivisible avec la demande formée à l'encontre du débiteur principal.
La demande en nullité du jugement est rejetée.
2. L'absence des mentions manuscrites prescrites par les articles L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation
Au sens des articles L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation le créancier professionnel s'entend de celui dont la créance est née dans l'exercice de sa profession.
La créance représentée par le prix de cession du capital de la société DNA autos dont les consorts [S] étaient associés, n'est pas née de l'exercice d'une profession, même si les cédants avaient perçu des revenus de la société DNA autos.
Il en est de même de la créance résultant du compte courant d'associé ouvert au nom de M. [D] [S] dans la comptabilité de la société DNA autos qui se rattache à sa qualité d'associé et non à l'exercice de ses fonctions de dirigeant social.
Par suite, les actes de cautionnement n'étaient pas soumis aux exigences des articles L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation, applicables seulement aux cautionnements souscrits par une personne physique envers un créancier professionnel.
3. Les griefs de dol par réticence
M. [E] soutient que son engagement de caution est nul en raison de faits de dol par réticence portant sur la dissimulation lors de la cession de produits polluants et toxiques déposés dans une fosse scellée et sur la dissimulation d'un nantissement sur le fonds de commerce.
En vertu de l'article 1116 du code civil, le dol n'est une cause de nullité de la convention que lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.
Il résulte d'un constat d'huissier de justice effectué le 18 janvier 2008, à la requête de la société DNX qui venait alors d'acquérir le capital social de la société DNA autos, qu'une fosse d'une longueur de 17 mètres, située dans les locaux de cette dernière société, avait été comblée au moyen de gravats, de pneus, de plastiques de boulons et d'encombrants divers puis scellée par des plaques soudées. Selon le témoignage d'un employé divers diluants auraient été versés dans cette fosse.
Mais, la pollution susceptible de résulter des conditions de remplissage de la fosse ne présentait pas un niveau de gravité tel que, s'il en avait eu connaissance, M. [E] aurait renoncé à se porter caution, puisque ce n'est qu'après avoir été assigné en paiement et après l'ouverture du redressement judiciaire de la société DNA autos, procédure collective qui n'a pas de lien avec le grief de dol, que M. [H] [U], manifestement soucieux de se ménager un moyen de défense dans l'action en paiement, a pris l'initiative en octobre 2009 de faire procéder à un devis estimatif d'une étude de pollution puis a déposé une plainte, en novembre 2009, soit plus de 20 mois après la découverte des faits.
Il n'est pas mieux établi que M. [E] aurait renoncé à se porter caution s'il avait été informé de l'existence d'un nantissement sur le fonds de commerce en garantie d'une créance bancaire.
La demande en nullité est rejetée.
4. Le défaut d'exigibilité prétendu de la créance de M. [D] [S], au titre de sa créance en compte courant d'associé
Par convention du 31 décembre 2005, M. [D] [S] a consenti à la société DNA autos une remise, à concurrence de la somme de 4 200€, sur sa créance inscrite en compte courant d'associé.
M. [E] est infondé à se prévaloir de cette remise pour soutenir que la créance ne serait pas 'sujette à remboursement', dès lors que la convention du 31 décembre 2005 comporte une clause de retour à meilleure fortune, notion définie comme 'la réalisation de résultats bruts positifs', que cette circonstance s'est réalisée lors de l'exercice clos le 31 décembre 2006 dont il est résulté un bénéfice de 9 202 €, et qu'il a été stipulé en ce cas que la société est tenue de payer à M. [U] une somme égale au résultat brut, dans la limite de 4 200 €.
Les moyens de défense opposés par les consorts [U]
1. La perte d'un droit préférentiel
Les consorts [U] font valoir qu'en ne déclarant pas au passif de la société DNA Autos, mise en liquidation judiciaire le 3 novembre 2009, la créance résultant d'avances en compte courant consenties à cette société, M. [D] [S] leur a fait perdre le bénéfice de la subrogation dans cette créance.
Les consorts [U] ont garanti l'obligation souscrite par la société DNX de rembourser cette créance à M. [D] [S], à concurrence de la somme de 36 860 €.
L'exécution de leur obligation de caution par les consorts [U] aurait dû leur permettre de prétendre, d'un côté, à être subrogés dans les droits de M. [S] sur la société DNX débitrice principale de l'obligation garantie, d'un autre côté, en vertu de l'article 1251 alinéa 3 du code civil, à être subrogés dans les droits de M. [S] sur la société DNA autos puisqu'ils auraient par leur paiement libéré cette dernière société.
L'absence de déclaration de la créance de M. [S] au passif de la société DNA autos a pour effet de rendre la créance inopposable à la procédure collective, ce qui prive les consorts [U] du bénéfice de la subrogation dans les droits auxquels M. [S] aurait pu prétendre au titre des répartitions.
C'est à M. [D] [S] qu'il incombe de démontrer que la subrogation aurait été inefficace, en tout ou partie. Il ne le fait pas puisqu'il se borne à soutenir, en inversant la charge de la preuve, que les consorts [U] ne démontrent pas que la créance aurait pu être payée par la 'réalisation de l'actif'.
Il s'ensuit que les consorts [U] doivent être déchargés de leur obligation de garantir la créance afférente au compte courant d'associé.
2. La demande en paiement de dommages-intérêts
Les consorts [U] demandent l'allocation d'une somme de 10 000 € en réparation d'un manquement prétendu à la bonne foi contractuelle, résultant de la dissimulation d'un risque de pollution, et du caractère selon eux abusif de la procédure.
Mais ils ne justifient pas du préjudice qui serait résulté de la dissimulation du contenu d'une fosse, aucun lien n'étant établi entre cette circonstance et la défaillance de la société DNA autos, et ils ne peuvent invoquer le caractère abusif de l'action en paiement puisqu'ils succombent pour partie.
La demande est rejetée.
****
Il suit de ces motifs que le jugement doit être confirmé, sauf en ce qu'il a condamné les consorts [U] au titre de la créance afférente au compte courant d'associé.
En considération des succombances, les consorts [U] et M. [E], sont condamnés aux dépens.
L'équité commande de confirmer l'indemnité allouée en première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de ne pas faire application de ce texte en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour
Statuant publiquement, par arrêt de défaut,
Confirme le jugement attaqué, sauf en ce qu'il a condamné M. [H] [U], M. [A] [U], M. [X] [U] et M. [N] [U] au titre de la créance de M. [D] [S] afférente à un compte courant d'associé,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Décharge M. [A] [U], M. [X] [U], M. [H] [U] et les héritiers de M. [N] [U], de l'obligation de caution souscrite en garantie de la créance de M. [D] [S] afférente à un compte courant d'associé,
Rejette la demande en paiement de cette créance formée à l'encontre de M. [A] [U], M. [X] [U], M. [H] [U] et des héritiers de M. [N] [U],
Rejette les demandes en nullité du jugement et en nullité de l'obligation de caution souscrite par M. [T] [E],
Dit n'y avoir lieu à application en cause d'appel de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [T] [E], M. [A] [U], M. [X] [U], M. [H] [U] et Mme [F] [B] veuve [U] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président